Daily Archives: 08/10/2011
Mauritanie – Marche sans violences à Nouakchott contre le recensement
Des centaines de Mauritaniens noirs ont marché samedi à Nouakchott à l’appel du mouvement “Touche pas à ma nationalité” (TPN), réclamant “l’arrêt immédiat” du recensement en cours dans leur pays qu’ils jugent “discriminatoire”, a constaté un journaliste de l’AFP. La marche, qui était autorisée, s’est déroulée sans violences sous haute surveillance policière sur environ un kilomètre depuis le centre-ville. Scandant des slogans hostiles au régime du président Mohamed Ould Abdel Aziz, les manifestants ont fini leur parcours à l’Assemblée nationale où ils déposé une lettre “aux élus de la République” dans laquelle ils demandent “l’arrêt immédiat du recensement” lancé en mai en Mauritanie pour une durée non déterminée.
Dans leur lettre, réceptionnée par des députés de trois partis d’opposition, ils dénoncent également les violences policières contre des manifestants le 29 septembre à Nouakchott et, auparavant, à Kaédi et Maghama (sud) où un manifestant avait été tué par balle par un gendarme. “Nous sommes contre ce recensement discriminatoire, nous voulons qu’il soit arrêté, tout comme nous dénonçons la violence policière et nous exigeons une enquête indépendante sur le cas de Maghama”, a affirmé à l’AFP leur porte-parole, Wane Abdoul Birane.
Lors de la manifestation de samedi, “nous avons démontré que si cela ne dépendait que de nous, aucune violence n’aura lieu, et nous affirmons que notre combat se poursuivra, avec ou sans autorisation” des dirigeants, a-t-il averti. Selon un porte-parole de TPN, quatre militants du mouvement ont été présentés jeudi à un juge qui a ordonné leur incarcération. Ils étaient parmi 56 personnes arrêtées au cours de la manifestation du 29 septembre à Nouakchott, 26 des manifestants ont été libérés, d’après le porte-parole.
Les autres manifestants toujours détenus “ne sont pas nos militants” mais “peut-être des étrangers interpellés par la police et dont nous ignorons totalement les nationalités et la situation”, a-t-il précisé.
Les Noirs de Mauritanie dénoncent le recensement, affirmant craindre une remise en question de leur nationalité qu’il leur est demandé de prouver par des pièces, d’après les ONG, souvent impossibles à réunir.
Selon le gouvernement, l’opération vise uniquement à instaurer “un système d’état civil biométrique moderne et fiable”.
©Agence France-Presse
Lettre ouverte aux parlementaires remise ce matin à l’issue de la manifestation pacifique par le coordonnateur du mouvement “TOUCHE PAS A MA NATIONALITE” Abdoul Birane Wane.
Depuis le mois de mai 2011,le régime de Mohamed Ould Abdel Aziz a démarré, de façon unilatérale et sans consultations, les opérations d’enrôlement qui sont aujourd’hui contestées par une bonne partie de la population mauritanienne. Devant cette situation, des jeunes appartenant à des organisations de différentes obédiences politiques ont constitué le mouvement “TOUCHE PAS A MA NATIONALITE” qui se veut à l’avant-garde du combat contre cet enrôlement qui a montré ses limites et sa gravité par des pratiques discriminatoires et racistes.Dés le 30 juin dernier, le mouvement a initié, une série de sit in devant les différents centres de recensement de la capitale en protestation contre la manière par laquelle l’opération d’enrôlement est menée, notamment vis-à-vis des populations de souche négro-mauritaniennes.Devant le mutisme des autorités, le mouvement décide mener des actions plus engagées en instituant à partir du 10 septembre 2011, des marches hebdomadaires les samedis. Ces marches ont toujours été brutalement et sauvagement réprimées par les forces de sécurité.
Dans le sillage de Nouakchott, des localités de l’intérieur décident de marcher pour dire non à l’enrôlement raciste. A Kaédi, les forces de police ont fait un usage excessif de grenades et ont brutalement réprimé nos manifestants pacifiques. Elles seront plus tard appuyées dans la Besogne par des éléments de la garde avant d’être renforcées par les forces armées. Durant deux jours, les populations de Kaédi furent soumises à la violence et à l’humiliation. L’armée nationale y agissait comme en territoire conquis. Résultat : plusieurs blessés et plus d’une trentaine d’arrestations. Pendant que Kaédi brulait, les autorités, (jouant comme à leur habitude la carte de la division des mauritaniens) appelaient les commerçants arabes de la ville à l’auto-défense, les incitant et les encourageant à s’armer.
A Maghama, le 26 septembre, la police et la gendarmerie dispersent des manifestants qui marchaient pacifiquement contre l’opération d’enrôlement.
Dans la journée du 27, la police et la gendarmerie tirent à balles réelles sur de jeunes manifestants désarmés. Le bilan fut lourd : un mort et sept blessés graves.
Nouakchott voit la spirale de la violence s’intensifier le jeudi 29, quand la garde et la police empêchent les militants du mouvement de se regrouper pour manifester en solidarité avec les habitants de Kaédi et pour dénoncer le meurtre du jeune Lamine Mangane à Maghama. La aussi, les forces censées maintenir l’ordre infiltrent des voyous notoirement connus de tout Nouakchott parmi les manifestants pour piller et saccager les biens de paisibles citoyens dans le but de discréditer “TOUCHE PAS A MA NATIONALITE” et de ternir la nature pacifique de son combat. L’objectif dérisoire du pouvoir est de nous présenter comme un mouvement sectaire visant et menaçant les intérêts de la communauté arabe.
Ce faisant, les autorités jouent à un jeu dangereux en montant les communautés nationales les unes contre les autres. Elles doivent cependant savoir que les humiliations, les exécutions sommaires, les massacres et déportations des années de braise ne pourront plus se répéter aujourd’hui, car les mauritaniens ne sont pas dupes et n’acceptent plus d’être divisés pour prolonger les jours d’un pouvoir anti-national.
Nous tenons pour responsable, le régime de Ould Abdel Aziz de la tournure grave et violente qu’ont prises les évenements à Kaédi, Maghama, Nouakchott et ailleurs.
Nous exigeons que la lumière soit faite sur ces événements graves qui sont de nature à compromettre jusqu’à l’existence même de notre pays.
Aussi, nous lançons un appel aux élus du peuple afin qu’ils fassent preuve de solidarité sans faille avec les revendications légitimes, exprimées par une importante frange de notre peuple et exiger l’arrêt des opérations d’enrôlement en cours.
En un mot, nous demandons aux élus de prendre leurs responsabilités pour éviter le pire à la Mauritanie.
Tous unis, nous ferons échouer ce projet cynique de diviser notre peuple et de détruire notre nation.
Nouakchott, le 08 octobre 2011.
Taisez-vous, vous n´avez aucune leçon de patriotisme ou de civisme à donner !
Depuis quelques jours, la presse écrite, électronique et audio – visuelle ne cesse de transmettre des messages, avis et commentaires, relatifs aux manifestations des jeunes Négro-Africains, qui protestent contre l’enrôlement, organisé depuis mai 2011 par les nouvelles autorités mauritaniennes. Le plus souvent, les auteurs se présentent en donneurs de leçons de civisme et / ou de patriotisme. Presque personne ne se pose la question de la cause profonde. Pourquoi ces jeunes gens, au risque de leur vie –on compte déjà des morts -, s’en prennent – ils à cette opération ? Tous ces donneurs de leçons sont – ils frappés d’amnésie ou bien ont – ils décidé d’enterrer définitivement les évènements de 1989, avec tous les drames qui continuent de persécuter les familles de milliers de Négro-Africains, en Mauritanie même et à travers le monde ?
Si l’opération vise à fournir au pays un état civil fiable et donc à extirper des registres les noms de tous ceux qui ont « frauduleusement acquis la nationalité mauritanienne » (citation d’un ministre d’Ould Taya en 1989), on comprend aisément la crainte des milliers de Négro – Africains, brutalement expulsés de leur pays en 1989, sous le fallacieux prétexte de « nationalité frauduleusement acquise ». Or donc, « chat échaudé craint l’eau froide ». Pourquoi ces personnes, leurs enfants et petits enfants feraient-ils confiance à un Etat, qui tout en faisant semblant de reconnaitre la faute, n’en continue pas moins de sévir.
On a écrit ici et là qu’il ne faut pas réveiller le démon de 1989. La vraie question est : est-il endormi ? Je soutiens que non ! En effet, si les « Journées Nationales de Concertation et de Mobilisation pour le Retour des Réfugiés et le Règlement du Passif Humanitaire » de novembre 2007 avaient suscité de l’espoir et un certain enthousiasme, force est de noter qu’elles n’ont pas été l’occasion d’une véritable catharsis, qui aurait permis une meilleure compréhension des véritables causes de ces douloureux évènements.
Qui, en effet, peut dire pourquoi des citoyens ont été déportés ? Qui en est le donneur d’ordre ? En outre, si l’opération de rapatriement des réfugiés s’est poursuivie, avec des interruptions, depuis 2008, personne n’ignore que nulle part un rapatrié n’a récupéré un champ de culture, ni même une maison en ruine…
D’ailleurs, le fait même qu’une structure aussi importante que la « Commission Nationale d’Orientation et de concertation » créée en même temps que les commissions d’identification (locales, départementales, régionales et nationale) –véritables tamis-, n’ait jamais fonctionné, depuis 2008est assez éloquent pour montrer l’état d’esprit des représentants de l’Autorité…
Depuis bientôt 22 ans, aucun des auteurs des crimes de faciès et des déportations n’a exprimé ne serait-ce qu’un regret. Hormis le discours du Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, du 29 juin 2007 et la prière à Kaédi, le 25 mars 2009, de l’actuel Président, M. Mohamed Ould Abdel Aziz, aucune voix de repentance n’est audible.
Or, les auteurs de ces crimes sont connus et circulent librement à côté de leurs victimes encore vivantes et des ayants droit de celles qui ne sont plus de ce monde. Cela ne permet pas à tous ceux qui prétendaient ignorer l’ampleur des violations des droits humains des années dites de braise, de se débarrasser de leurs préjugés. Il n’est pas rare d’entendre dire des rapatriés, que ce sont des Sénégalais, y compris par des représentants de l’Autorité.
En fait, aux yeux de beaucoup de compatriotes arabes, tous les Négro – Africains seraient des Sénégalais. Il est banal d’affirmer que tous les originaires de la vallée du fleuve (des deux rives) sont effectivement un même peuple : chaque famille d’une rive a effectivement une parentèle sur l’autre rive. Est-ce leur faute si le colonialisme a décidé de les séparer ?
Le Waalo, le Fuuta Tooro et le Guidimakha / Gadiaga, ont constitué des états souverains bien avant que ne se constituent les colonies françaises érigées en Etas indépendants aujourd’hui. Ces préjugés sont renforcés par une propagande exclusiviste véhiculée jusqu’au sein de la jeunesse, qu’une « école à deux vitesses » a contribué à entretenir.
C’est pourquoi depuis au moins trois décennies, le Négro-Africain est « translucide » -selon l’expression d’un chercheur mauritanien- au sein d’une communauté nationale, qui se « hassanise » de plus en plus : ne pas parler hassania, s’habiller autrement qu’en boubou à la manière maure, etc. constituent des signes extérieurs de non appartenance nationale…L’affirmation de la multi ethnicité de la Mauritanie dans des discours officiels n’annihile en rien cet état de fait.
Ce sont toutes ces brimades réprimées, toutes ces frustrations bues et cette marginalisation sans retenue, entre autres, qui expliquent la colère des jeunes Négro-Africains. C’est dire que la Mauritanie ne peut pas faire l’économie d’un débat national, franc et sérieux, sur la coexistence nationale. En attendant, que ceux qui se sont tus pendant les années de braise, par opportunisme ou par peur se taisent! Ils n’ont aucune leçon de patriotisme ou de civisme à donner !
Balla Thierno Cissé.
Abdoul Birane Wane du TPMN: “On s’amuse avec l’unité nationale”
ALAKHBAR (Nouakchott)– L’impacte de l’enrôlement sur l’unité nationale est objet d’un séminaire organisé, jeudi dernier, par le Centre mauritanien pour la communication et les études à l’hôtel El Khater. A l’occasion, Yacoub Ould Lemrabott, administrateur à l’Agence Nationale du Registre des Populations et des Titres Sécurisés(ANRPTS) a estimé que l’enrôlement renforce l’unité nationale: si demain un mauritanien croise un autre à l’étranger, il sera sûr que ce dernier est son concitoyen parce qu’il détient des papiers sécurisés. En plus, a-t-il ajouté avec l’enrôlement, l’administration sera plus proche des citoyens. Ils pourront retirer tous leurs papiers d’état civil et d’identification d’un seul centre, à savoir le Centre d’accueil des populations (CAC).Yacoub Ould Lemrabott a rassuré également que depuis le début de l’enrôlement, seulement 180 cas ont été signalés non-conformes. Quant à Abdoul Birane Wane, coordinateur du mouvement Touche pas à ma nationalité, a considéré que “c’est un ensemble de pratiques et de convictions qui mènent à l’unité nationale, pas seulement des mots. On s’amuse avec l’Unité nationale; on nous parle de l’unité nationale pendant qu’on tue un enfant de 16 ans qui ne faisait que manifester”. Il s’est interrogé: quelle est cette unité nationale qui encourage le sentiment d’infériorité chez ceux qui s’estimaient inférieurs, qui renforce le sentiment de supériorité chez ceux qui s’estimaient supérieurs. Pour lui, le recensement a crée deux mauritaniens qui ne seraient pas au même de pied de citoyenneté. Abdoul Birane Wane a rappelé “qu’à première vue, le noir est considéré étant sénégalais ou malien. Viennent après les questions humiliantes: savez-vous réciter une sourate du Coran; parlez-vous Hassanya: avez-vous une maison au Sénégal? Quelle liaison ont ses questions à l’enrôlement?” a-t-il demandé
De son côté, Mohamed Fall Ould Bellali, ancien ministre a replongé l’assistance dans l’histoire de la Mauritanie avant l’indépendance. Il a rappelé les raisons qui avaient poussé la France à créer les limites de l’Etat Mauritanien
Le Centre Mauritanien pour la Communication et les Etudes (CMCE) est une institution de recherches fondée à Nouakchott le 23 juin 2011, par un groupe de professionnels des médias, d’intellectuels et de chercheurs pluridisciplinaires.
TPMN marche vers l’Assemblée nationale, trois députés accueillent les manifestants
ALAKHBAR(Nouakchott) – Des centaines de manifestants participent à la marche de Touche pas à ma nationlité vers l’Assemblée nationale, a constaté le correspondant d’Alakhbar qui accompagne la marche. La marche, débutée du Centre d’accueil des citoyens de Tevragh Zeine à la Médina 3, a pour objectif de remettre aux députés une lettre contestant la procédure de l’enrôlement de la population en Mauritanie. Touche pas à ma nationalité demande la recomposition du Comité à la tête de l’Agence du Registre des Populations et des Titre sécurisés et “la dissolution des commissions départementales” chargées des opérations d’enrôlement. Le mouvement les juge non représentatives
Trois députés de l’opposition ont accueilli les manifestants de Touche pas à ma nationalité à leur arrivée à l’Assemblée nationale. Ils s’agit de Salick Ould Sidi Mahmoud du Tawassoul, de Khadiata Malick Diallo de l’UFP et de Yacoub Ould Moïne du RFD.
Quant aux locaux de l’Assemblée nationale, ils sont restés fermés devant les manifestants qui crient: “Touche pas…; Aziz Louga(une région du Sénégal); Aziz mécanicien” et brandissent des slogans:”Aziz Zéro; libérez les prisonniers; recensement raciste”.