Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Daily Archives: 25/05/2018

Des membres du gouvernement commentent les résultats de la réunion du conseil des ministres

Nouakchott,  24/05/2018  –  Les ministres de la Culture et de l’Artisanat, porte- parole du gouvernement, Dr Mohamed lemine Ould Cheikh, du pétrole, de l’énergie et des mines, M. Mohamed Ould Abdel Fetah et de l’hydraulique et de l’assainissement, M. Yahya Ould Abd Dayem ont commenté, jeudi soir à Nouakchott les travaux du conseil des ministres tenu plus tôt dans la matinée.

Prenant le premier la parole, le ministre de la culture et de l’artisanat, porte parole officiel du gouvernement a indiqué que le conseil a examiné et adopté un certain nombre de projets de lois de décrets et de communications dont un projet de loi relatif à la définition des conditions de qualification, de constatation et de répression des contraventions relatives à l’électricité et un projet de loi relative à la définition des conditions de qualification, de constatation et de répression des contraventions relatives à l’eau potable.

En réponse à une question sur l’article attribué au leader du mouvement FLAM non autorisé, le ministre a indiqué que ces déclarations, si elles sont exactes, constituent une sorte de dévouement à ses mentors et à de ceux qui l’ont soutenu pendant un certain temps, soulignant qu’il n’est pas étrange qu’il fasse ces déclarations, partant de son histoire avec ce groupe.

Le ministre a affirmé que les politiciens nationaux sérieux admettent communément que la Mauritanie est un pays musulman à 100% et que la question palestinienne pour les mauritaniens relève de la foi et des fondamentaux de la nation, soulignant que régime actuel a ancré ces fondamentaux à travers les mesures historiques qu’il a prises et qu’il a toujours agi en faveur de la cause palestinienne.

Il a mis en relief les positions honorables du Président de la République à ce sujet, notamment l’expulsion de l’ambassadeur israélien et la rupture des relations avec l’Etat hébreu.

Le ministre s’est déclaré surpris que cet individu soit un mauritanien, qu’il vive au sein des Mauritaniens et qu’il partage avec eux leurs douleurs et leurs espoirs et qu’en même temps il porte atteinte à la cause palestinienne ou s’allie avec les ennemis de cette cause qui ont torturé le peuple palestinien, qui l’ont expulsé et qui jusqu’à présent continuent de le persécuter.

Nous constatons quotidiennement sur les réseaux sociaux les images de la torture raciste et criminelle et qui cependant reste ignorée par ceux qui prétendent soutenir les droits de l’Homme.

A propos d’une question sur les causes de l’arrestation d’une activiste politique du mouvement IRA, le porte-parole officiel du gouvernement a indiqué que cette affaire fait l’objet d’une enquête en cours, soulignant que les données indiquent que cette dame a été instrumentalisée par une personne occidentale connue pour son hostilité à notre peuple et à notre Etat. C’est cette personne-là qui lui a dicté les déclarations qu’elle a faites, a-t-il dit. Il a précisé qu’il s’agit là d’une volonté délibérée de nuire au peuple mauritanien et d’entacher l’image du pays qui reste un exemple dans la lutte contre le terrorisme
Il a ajouté que le projet de loi définit la contravention à la règlementation en matière d’électricité comme toute prise ou acquisition, par quelque moyen que ce soit, de l’énergie d’une manière non autorisée ou tout acte ou comportement visant à entraver la marche normale du compteur ou encore toute action visant à ralentir ou à arrêter la marche de ce compteur ou la nature de l’enregistrement de l’énergie électrique ou la distribution de cette énergie électrique qu’un individu peut entreprendre au profit d’autrui ou destiner à des bâtiments en dehors des installations intérieures prévues par le contrat d’abonnement.

Le ministre a expliqué que les amendes pour les contraventions en la matière sont fixées de 30 mille à 100 mille N-UM. Cette peine est doublée et peut aller jusqu’à l’emprisonnement au cas où le délinquant est un employé de la SOMELEC.

De son côté, le ministre de l’hydraulique et de l’assainissement a affirmé que le projet de loi permettra de consolider les acquis des dix dernières années dans ce domaine. C’est ainsi que le gouvernement, sur instruction du Président de la République, Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz a investi des centaines de milliards de dollars pour rendre disponibles l’eau potable sur l’ensemble du territoire national et notamment à Nouakchott où le problème de l’eau se posait avec acuité.

Il a expliqué que la contravention à la règlementation en matière d’électricité est définie comme toute prise ou acquisition, par quelque moyen que ce soit, de l’eau potable d’une manière non autorisée ou tout acte ou comportement visant à entraver ou à arrêter la marche normale du compteur ou à entacher la nature de l’enregistrement de la consommation de l’eau ou la distribution illicite de cette eau que peut entreprendre un abonné au profit d’autrui ou destiner à des bâtiments en dehors des installations intérieures non prévues par l’abonnement ou le manque de payement de dettes.

Le ministre a enfin indiqué que la sanction prévue pour les contraventions citées fixe une amende allant de 30 mille à 100 mille N-UM et en cas de non payement de cette amende la personne en cause peut être exposée à l’emprisonnement pour une durée de deux à trois mois.

AMI

Les nouveaux masques de la Françafrique /Par Jacques-Marie Bourget

Jacques-Marie Bourget est un journaliste d’investigation et Grand reporter ayant couvert de nombreux conflits (la guerre des Six Jours, la guerre du Vietnam, la guerre du Liban, du guerre d’El Salvador, la première et la seconde Intifada, la guerre de l’Ex-Yougoslavie, etc.). Il a écrit pour les plus grands journaux français (L’Aurore, Le Canard enchaîné, L’Express, VSD, Paris Match, etc.) En 1986, il a notamment reçu le Prix Scoop pour avoir révélé l’Affaire du Rainbow Warrior, le navire de l’organisation écologiste Greenpeace détruit par les services secrets français en juillet 1985 en Nouvelle-Zélande en raison de leur opposition aux essais nucléaires français dans le Pacifique. Jacques-Marie Bourget est également l’auteur de plusieurs ouvrages dont « Des Affaires très spéciales », « Survivre à Gaza »,  « Sabra-Chatila au cœur du massacre », « Le Vilain petit Qatar ».

Vincent Bolloré vous le confirmera, la «Françafrique» n’existe plus. Inutile de chercher poux et querelles à ces entrepreneurs méritants, humanistes, engagés à veiller au bien auprès de gouvernants du continent noir. Pour le grand bien de l’Afriquehttp://www.afrique-asie.fr/wp-content/uploads/2018/05/Fran%C2%BAafrique1-650x301.jpg

Gloire au bienveillant Jacques Foccart qui, en tête du peloton des néo missionnaires, a été le premier à ériger ce pouvoir parallèle, à inventer ces républiques à deux têtes, une noire une blanche. Certes les actions civilisatrices et altruistes du « Phoque » étaient un peu brutales, voyantes et souvent sanglantes. Afin que le nègre -qui se croyait émancipé- continue sans grogner d’obéir à la philosophie d’une libération sous tutelle dont la camisole est réglée à Paris. Avec le temps, les règles ont été contraintes de s’adapter à la musique et au décor qui accompagnent la farce de « l’indépendance », dont le mot de passe est « démocratie ». Le chemin de cette liberté africaine est marqué par la tombe d’un soldat connu, celle de Jean-Pierre Cot. Jeune ministre de la Coopération sous Tonton, fils de héros vraiment « de gauche» comme Pierre, son père, ce naïf a imaginé que l’élection de Mitterrand sifflait la fin de partie pour la « Françafrique », que le temps des colonies était fini. Que de Dakar à Bamako  «Liberté, Egalité, Fraternité » était une Lumière partagée. Idiot inutile, ce Cot a été jeté aux orties après quelques mois d’exercice. Ne jamais oublier la doctrine distillée par l’Elysée, depuis « l’Indépendance » : l’Africain est réputé ne rien entendre au reggae voltairien. Alors qu’il suffit de lui donner un ballon et un djembé pour qu’il soit heureux. Désormais tranquille dans des palais trop secs ou trop humides, le bataillon des dictateurs s’occupe de tous les bonheurs, et donc de celui des amis blancs de la France à fric.

Je disais que le modèle inventé par Foccart avait dû s’adapter. Pour le mesurer, il suffit de consulter la liste des sociétés de « sécurité » ou « d’intelligence » qui pullulent dans l’hexagone. L’Afrique reste leur fromage.

Jadis on envoyait l’armée, la Légion pour régler le compte des Africains indociles. Parfois, pour les cas les plus complexes, Bob Denard et ses mercenaires prenaient la main. Jusqu’à Mitterrand qui a utilisé cette bande de reîtres au Tchad, pour tailler pièce à Kadhafi. Aujourd’hui, comme souvent, la mode du pire vient des Etats-Unis. C’est le pays de Bush qui a remis sur le devant une privatisation des armées oubliée depuis le début du XIXe siècle. Maintenant Blackwater est là pour se battre à la place des « Marines » ou des « G.I ».  Avant d’en arriver à cet extrême guerrier, et d’acheter « l’ordre » ou la guerre clé en main, il existe des entreprises qui proposent des solutions intermédiaires où le gradé blanc joue un discret rôle de chef suprême auprès des armées noires. Par le truchement de ces sociétés d’un service vraiment spécial, des potentats peuvent compter sur le colon historique pour l’aider à rester en place. Dans le passé les « gardes présidentielles » de ces roitelets étaient entre les mains de barbouzes tricolores sous contrôle de Paris. Le dispositif était voyant et sujet à bavures. La France ne veut plus de surprise à la Bokassa, un adjudant ivre et mégalo qui arrive au pouvoir. Le président africain n’est plus un affidé mais un « partenaire », le DRH d’un pays qui reste une filiale économique et stratégique de l’Elysée et de ses amis. Pour éviter l’avènement de l’ivrogne capable de se faire sacrer empereur, rien de plus sûr qu’un contrôle étroit et continu des élites militaires des républiques des ex A.O.F ou AEF. Une école de guerre ambulante ? Voilà une idée pour garder à l’œil tout le sérail. Ce que veulent les ministères français de la Défense ou des Affaires étrangères, c’est former des officiers africains qui restent « des nôtres».

Dans l’actualité nous avons, bien visible, l’exemple de l’une de ces sociétés de guerre, la firme « Thémiis ». Elle n’a pas sourcillé en prenant pour icône la déesse de la justice. A propos de cette boîte capable de délocaliser les cursus de Saint Cyr ou de l’Ecole de Guerre, la revue « Jeune Afrique » met les pieds dans le plat et titre, « Voilà une nouvelle passerelle armée-privé ». Et Jean Guisnel, un journaliste breton qui exulte à la simple vue d’un uniforme kaki, s’en vient préciser dans un entretien avec le Télégramme de Brest, « Thémiis » n’agit pas sans l’aval du gouvernement », ni du MEDEF partenaire de l’aventure néocoloniale. Fondée par Camille Roux, bretonne elle aussi, et un général, Gilles Rouby, « Thémiis » est également animée par le colonel Peer Dejong, un militaire trop diplômé pour finir général.  Aujourd’hui cette perle de l’enseignement des arts de la guerre est à la manœuvre en République Démocratique du Congo (RDC), en Côte d’Ivoire et en Mauritanie. Des Etats où, c’est prouvé, la liberté est chérie-e.

Pardon pour la citation qui suit, mais elle indique le jargon militaro-globish que l’on peut lire dans l’argumentaire de ces combattants de la paix et du droit : « Terrorisme transnational, cybermenaces, multiplication des acteurs internationaux, guerre de l’information : dans un monde globalisé, les questions de sécurité et de défense sont de plus en plus complexes. Les acteurs de la sécurité sont confrontés à une véritable guerre de la connaissance pour proposer aux décideurs les solutions les plus adaptées aux menaces qui les concernent.

L’acquisition progressive d’une autonomie stratégique constitue un enjeu majeur pour les Etats. L’une des réponses à cette autonomisation réside en la mise en œuvre in situ de formations de très haut niveau, permettant à ces Etats de s’adapter rapidement aux nouveaux défis, de réformer leurs secteurs de la sécurité en conséquence, et de prévenir les crises à venir. » Sic et pardon encore pour le pensum.

Dans un entretien, que je résume, la dame Camille Roux, cheffe donc de l’entreprise, tente de convaincre de la noblesse de sa mission, pour l’instant le plus souvent auprès de putschistes ou de dictateurs : « Après plus de 60 ans d’indépendance politique, les pays africains veulent aujourd’hui s’approprier leur propre sécurité et souhaitent accéder à une certaine autonomie dans la gestion de leurs problématiques de défense et de sécurité… Il leur faut acquérir des compétences en matière de droits de l’homme, de droit international humanitaire, même d’écologie ». Vous aurez noté que cette nouvelle petite sœur du bien parle de s’approprier «une certaine  autonomie ». Il ne faut aller ni trop vite. Ni trop loin. La laisse reste courte, et l’Africain un grand enfant.

Mais qui sont ces magnifiques « jet profs » qui vont enseigner les droits de l’homme là où on les étrangle ? « Le corps enseignant est composé de chercheurs, de généraux (interarmées), de journalistes, d’humanitaires, de spécialistes de la gestion de crise ».

« Nous avons un partenariat avec la  Direction de la coopération de sécurité et de défense du Ministère des Affaires étrangères, car nos cursus permettent à la France de rester active dans une zone stratégique. Lorsque l’on met sur pied des programmes de formation, on diffuse aussi des méthodologies, une certaine vision du monde, et bien sûr, cela favorise la francophonie. Tout cela à coût zéro pour l’Etat français. » Ah ! La belle entente entre bretonne et breton, Roux et Le Drian les amis de la bombarde, le ministre qui présente la société comme « indispensable à la diplomatie française ». Et les journalistes qui enseignent aux godillots cloutés de RDC doivent avoir belle allure.

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« Par ailleurs, l’offre Themiis, via Antigone Associates, est en mesure de proposer aux Etats des solutions de financements, européens notamment. Enfin, nous allons travailler avec des Etats africains sur des sujets civils de contrôle des frontières, de gestion de l’immigration. »

Ici nous sommes dans le dur, dans l’argent qui ne saurait mentir. En ce moment, pas très difficile contre une promesse de « stabiliser » le migrant, d’obtenir d’une Europe apeurée des crédits en cascade. Pas pour le migrant, pour son chasseur.

Les 150 officiers supérieurs instruits par « Thémiis » à Kinshasa ne sont-ils assez férus de Droits de l’homme, d’écologie, de philosophie, de Lumières ? Voilà que « l’Institut » monté par Camille de Bretagne n’arrive pas à convaincre des défenseurs des libertés. Qui se fâchent : la société amie de Le Drian est devenue leur cible, ils la dénoncent à Emmanuel Macron et apposent leurs signatures : «  Clément Boursin, responsable des programmes Afrique à l’ACAT-France, Julien Moisan, coordinateur des campagnes de l’association Survie, Tony Fortin, chargé d’études de l’Observatoire des armements, et Laurent Duarte, coordinateur international de la campagne « Tournons la page », Secours catholique Caritas France… »

« Monsieur le Président,

… vous avez la possibilité d’entendre enfin l’appel des démocrates congolais : pour fragiliser l’appareil répressif auquel ils font face et isoler politiquement le régime qui ordonne de les réprimer violemment, vous pouvez annoncer la suspension immédiate de toute coopération policière et militaire française avec ce pays. Combien de coopérants militaires et policiers sont dépêchés ? À quel poste ? Les officiers militaires ou de police congolaise qui participent aux formations prodiguées ou appuyées par la France (par exemple au sein des formations de l’entreprise française Themiis) sont-ils ceux qui ordonnent de réprimer toute manifestation ? Les matériels utilisés dans cette répression brutale proviennent-ils de fournisseurs français soutenus dans le cadre de cette coopération ? ».

Ces membres d’ONG, qui ont bien compris les nouvelles méthodes de la « Françafrique» », exigent que Paris cesse cette politique d’assistance ressentie comme le SAV des régimes autoritaires : « en France, il faut enfin rendre transparents ces programmes de coopération militaire et policière ; en RDC, la suspendre immédiatement pour cesser de soutenir un régime criminel ». Ce n’est pas gentil pour nos nouveaux missionnaires, hussards blancs des républiques noires, mais c’est bien dit.

Le coup de colère des ONG, en février 2018, a été précédé de tentatives d’alertes multiples. Depuis 2012, de nombreuses plaintes sont régulièrement déposées devant la Cour pénale internationale (CPI) contre l’Etat de RDC pour des violations répétées des Droits de l’homme. Le vendredi 10 mars 2017, c’est un collectif d’associations accompagné de plus de 200 Congolais de la diaspora, qui dépose de nouvelles requêtes. Selon leur porte-parole Oscar Rashidi : « Il s’agit d’une plainte contre Joseph Kabila pour crime contre l’humanité, crimes de guerre et génocide. Nous avons une documentation solide …Joseph Kabila a tué des milliers de personnes, des enfants ont été massacrés… Kabila utilise ses forces de sécurité pour commettre les massacres… ».

C’est encore le magazine « Ngambo Na Ggambo » qui, le 17 mars 2018 enrage à son tour. On peut lire un texte adressé à la patronne Camille Roux, et qui dit ceci : « Ne craignez-vous pas que votre institut soit un jour poursuivi en justice dès le changement de régime finissant de Joseph « Kabila » ; vus les crimes contre l’humanité et autres faits de violations dont certains officiers militaires, que Thémiis « forme ou recycle », et qui ont déjà été concernés en tant que responsables militaires ? ».

Dans une longue réponse la dame Roux nous rassure en précisant : « Dans notre enseignement nous avons un module sur les « responsabilités et contraintes des hauts dirigeants » dans lequel nous enseignons une méthode de raisonnement éthique ». Ouf. (1)

Cette considération qu’elle porte au dictateur Kabila, real politique oblige, met Le Drian dans de bien petits souliers. Sur Internet on injurie la France, pays « sponsor de la barbarie » en RDC. Difficile de donner tort aux réseaux sociaux quand on lit les dépêches diplomatiques : tous les pays sauf l’Espagne et la France ont rompu leurs relations avec l’énergumène de Kinshasa.

Et l’Institut français de Goma, installé dans l’est du pays, est devenu dans l’imaginaire des twitteurs une « cellule de renseignement française pour piller les minerais du Kivu ». Soucieux de protéger son enfant (un peu) caché, celui de Camille Roux et consort, le Quai d’Orsay estime qu’exprimée sur les réseaux sociaux,  « cette  hostilité prend source dans les «succès d’une société privée française, « Themiis ». Déclarons donc la guerre à Facebook !

Dans sa marche triomphale ourlée de tendresse et de Droits de l’homme, « Thémiis » est maintenant accompagnée « d’Amarante Internationale », une autre firme qui enseigne aussi l’harmonie et la paix. Sauf que, que le langage officiel de cette boîte est beaucoup plus rude. Voilà donc la publicité « d’Amarante », l’alliée de « Thémiis » :

« Confrontés à de nouvelles menaces, les Etats sont désormais contraints de reconsidérer leur dispositif de sécurité intérieure. La radicalisation de la délinquance et sa mutation en organisations criminelles sont de nature à fragiliser le droit fondamental des populations à la sécurité. De plus, les phénomènes de contestation, s’ils ne sont pas gérés selon un principe de stricte gradation des réponses, dans le respect des libertés publiques, peuvent conduire à une déstabilisation des institutions, et des pays. Par ailleurs, ces menaces s’appuient sur d’importantes innovations technologiques. Vecteur de nouvelles formes de criminalité, cet environnement offre également des capacités quasi instantanées d’action et de mobilisation de masse.

Enfin, la vulgarisation et la maitrise de la production d’images et de vidéos permettent largement aux délinquants et aux agitateurs d’instrumentaliser et d’alimenter les médias et l’opinion. »

Disons merci à cet argumentaire récité par un individu qui, lui, a appris les Droits de l’homme au sein de la DGSE. Il est clair : « les phénomènes de contestation…qui peuvent conduire à une déstabilisation… qui permettent aux délinquants et aux agitateurs d’instrumentaliser et d’alimenter les médias et l’opinion ». Que le dictateur qui n’a pas compris qu’avec ces méthodes l’opposition sera choyée lève la main !

Dans l’édification des élites militaires, et parfois civiles, « Thémiis » a trouvé un point de chute tout aussi rémunérateur que la RDC. Si les exploits du satrape de Kinshasa sont connus, ceux de  Mohamed Ould Andel Aziz, le maître de Nouakchott, sont moins diffusés. Le militaire a été assez malin pour que son pouvoir, né d’un putsch, se transforme par magie en celui d’un président élu. Ce tour n’a pas empêché toutes les organisations démocratiques de flétrir l’usurpateur… qui s’accroche à son trône comme un démocrate. Un siège qu’il protège comme un molosse en faisant taire toute voix ne chantant pas ses louanges. Un emploi à plein temps. Qui exige l’assistance des amis de la « Françafrique», grands démocrates capables de souper avec les diables. Aziz ? Un homme de dialogue qui a récemment remis dans un avion des militants venus de Chicago pour protester contre l’esclavage encore en cours en Mauritanie.

Même les gentils organisateurs de Reporters Sans Frontière, ne donnent pas l’absolution au régime mauritanien. Dans leur dernier rapport ils écrivent : « Depuis 2014, la Mauritanie connaît une forte régression en matière de liberté de la presse contrairement aux grandes avancées que le pays avait réussi à réaliser les années précédentes. En novembre 2017, un projet de loi, qui punit de la peine de mort l’apostasie et le blasphème, même en cas de repentir, a été adopté…. De même, la loi sur les cybercrimes de décembre 2015… annule d’anciennes législations visant à protéger les journalistes… Par peur de représailles, l’essentiel de ceux-ci s’autocensure quand ils doivent couvrir des sujets tels que la corruption, les militaires, l’islam ou l’esclavage. Cette censure est renforcée par les pressions financières des autorités qui ont suspendu cinq chaînes de télévision et de radios privées depuis octobre 2017. » Palmarès : au classement mondial de la liberté de la presse le pays passe de la 55 è à la 72 è place. Au rang des « Démocraties dans le monde » c’est pire. Le régime d’Aziz est en 121 è position sur 167. Proche donc de la voiture balai.

Et c’est dans ce paradis de la liberté, où souffle le droit que nos amis de « Thémiis » forment policiers et gendarmes. Bizarrement, l’arrivée de la société de Camille Roux correspond à un engouement pour le voyage à Nouakchott. A la file, des citoyens français n’hésitent pas à venir clamer auprès d’Aziz combien ils le voient grand. L’odeur de pétrole, qui commence à flotter dans l’air, aurait-il un effet de Chanel N° 5 ? Et pourtant, bizarrement alors que la Mauritanie dépense beaucoup d’argent pour, dit-elle, « mieux former ses cadres », au Sahel, là où les forces africaines luttent contre le djihad, les impeccables soldats et fonctionnaires de Nouakchott sont toujours absents.

Pour blinder sa position de pointe, routine pour un guerrier, Peer Dejong, donc l’homme- orchestre de « Thémiis », créé en 2015 à Paris, l’association « Europe-Mauritanie ». Elle a pour but de « développer les relations d’amitié et de compréhension mutuelles »…Vous noterez que nous restons dans la ligne générale de la nouvelle « Françafrique», tout y est droits de l’homme, amour, amitié, échanges, écologie, culture. Foccart reviens ils sont devenus mous ! Comme un écrin de la rue de la Paix, cette association contient sa perle : Jean-Louis Bruguière dit « l’Amiral » (sans doute en raison de ses naufrages ?). Le site «Mondafrique.com » nous dit que, pour ce petit boulot flexible de conseiller en contre-terrorisme, l’ancien magistrat  aurait touché une pige de 100 000 euros. Je trouve que c’est un peu léger pour un homme qui n’a pas de prix. Et le site de Nicolas Beau d’énumérer, en Mauritanie, les béantes carences du droit et des libertés. Qui ne semblent pas être un obstacle pour la conscience de Bruguière. Mieux, dans le livre « L’Histoire secrète du Djihad » (Editions Flammarion), le  journaliste mauritanien Lemine Ould Salem  révèle qu’Abou Hafs, l’imam d’al Qaïda, le numéro trois de l’organisation terroriste, vit peinard dans une villa de la capitale mauritanienne. Et Bruguière ne moufte pas !

Pour vous permettre de situer notre « Amiral », ce héros peu ordinaire de la justice française dans sa branche ultra répressive, rappelons quelques exploits de celui qui a fini sa carrière en politicien (candidat malheureux UMP aux législatives). Mise en examen -pour « terrorisme »-  du franco-algérien Djamel Beghal, alors que torturé par la CIA, ce dernier avait été contraint d’avouer un crime imaginaire, expertise privée et bienveillante pour Total dans l’explosion de l’usine AZF de Toulouse, connivence avec Washington pour maintenir Georges Ibrahim Abdallah en détention après 34 années de prison : Bruguière ne redoute rien.

Pour les militants d’une ONG qui milite pour « la vérité sur le génocide du Rwanda », l’amertume contre le l’ancien magistrat est vive :  « Si l’on doit mesurer le professionnalisme de l’ex-juge Bruguière à l’aune de son instruction, plus politique que judiciaire, dans l’affaire de l’attentat du 6 avril 1994 qui a été le signal du coup d’envoi du génocide au Rwanda, on peut s’étonner qu’il soit aujourd’hui haut représentant de l’Union européenne auprès des États-Unis pour la lutte contre le financement du terrorisme ».Car « JLB » est devenu insubmersible, et il a décroché un rond de job « anti-terroriste » auprès d’une Europe vraiment bonne fille.

En 1994, quand le juge de la galerie Saint Eloi trouve matière à inculper 174 « islamistes » dans un procès dit « Chalabi », le tiers des accusés est  innocenté et libéré après des mois de prison. Situation qui  motive le communiqué de la FIDH : « La Fédération internationale des droits de l’homme a lancé depuis près d’un an deux avocats, l’un britannique, l’autre italien, sur la piste de l’antiterrorisme français. Ils en sont revenus passablement stupéfaits, conclusions sévères sous le bras. Les deux juristes ont relevé «un large spectre de violations des obligations de la France au regard de la Convention européenne des droits de l’homme», dont les conséquences, «très préoccupantes», «contribuent à vider de leur substance certains droits de l’homme fondamentaux». Ils doutent de la légitimité, de la crédibilité et de l’efficacité du dispositif antiterroriste, qui se contente de «l’administration à courte vue d’une justice-spectacle» où «la raison d’Etat l’emporte souvent sur les droits de l’homme».

Aziz, le  président  mauritanien, avec son nouveau conseiller  n’a pas affaire à un ingrat. A qui veut l’entendre, par exemple au média « Tahalil »,  « JLB »  affirme : « la Mauritanie est un pays fort et un point d’appui important… Et je ne peux que me féliciter de la façon dont, aujourd’hui et même hier, les problèmes sécuritaires et globalement ceux concernant le terrorisme et la lutte contre la criminalité organisée ont été maîtrisés… Je crois que c’est un succès qui tient incontestablement à la volonté politique du président, qui est un militaire …». Bon si le juge considère… Passant de Thémis à « Thémiis »…il ne saurait pour autant être aveugle.

Parfois c’est à Paris que Bruguière et ses amis se réunissent, pour bosser. Ainsi le colloque «Le danger du terrorisme au Sahel : la réponse de la Mauritanie » a pris le profil d’une reconstitution de commissariat dissous avec dans la salle une kyrielle d’ex-flics en recherche de cachets.

Etrangement, ce débarquement civilisateur de la «Françafrique» en Mauritanie n’a pas été marqué par un peu plus de paix pour les opposants au formidable président Aziz. Bien au contraire. C’est ainsi de Mohamed Bouamatou, puissant homme d’affaires et ancien président du patronat mauritanien, n’est plus vraiment tranquille dans son exil de Marrakech. On l’espionne, on le traque, on le criminalise. Ne riez pas mais, même en plein désert, on retrouve des ordinateurs neufs et beaux, perdus dans le sable et contenant la comptabilité du maudit Mohamed Bouamatou. Il suffit de d’ouvrir les computeurs pour accéder à des chiffres, à des comptes, habilement bricolés par des barbouzes. Aggravant son dossier, Bouamatou a eu l’idée utopique de financer une ONG qui entend traquer la corruption en Afrique. C’est dire si l’homme est fou. Et nuisible. Il doit être exécuté.

Dans cette vendetta au pays des Maures, William Bourdon l’avocat parisien du mécène, par ailleurs héros harcelé du dossier des « Biens mal acquis », ne cesse de souffrir de dégâts collatéraux. Le produit de ricochets qui visent d’abord son client, le rebelle mauritanien. Bourdon est régulièrement menacé de mort, dénoncé dans des articles sponsorisés par les réseaux de corruption. Un exemple. A l’aide de faux documents, un épistolier anonyme expédie au fisc français la « preuve » que Bourdon a des comptes cachés en Chine !  Plutôt que de jeter ce torchon à la poubelle, l’administration française sollicite le FBI pour l’aider à chasser les magots imaginaires au pays de Mao. La «Françafrique» n’a pas peur de la guerre d’usure, du mensonge redondant qui se mord la queue, elle se sait éternelle.

Comme à la boxe, faute de directs ou de crochets, d’uppercuts, les coups sourds accumulés dans les côtes, ça use. Même Bourdon l’inexpugnable combattant.  Ces assauts  visent à décourager, à effrayer, à déstabiliser ceux qui luttent contre l’oligarchie « françafricaine »,  capable de tout pour défendre sa rente. Pour en finir, et que reprenne le cours du long fleuve colonial et tranquille, je conseille à ces spectres infatigables de retrouver en urgence le mode d’emploi des flèches empoisonnées. Peut-être est-il caché au milieu des secrets scellés dans la commode à Foccart ? Celle du Dieu, du maître à jamais ? Un meuble qui tient toujours son pan de mur dans les étages de l’Elysée.

Le calame

Ambassade des États-Unis à Jérusalem : quand António Guterres défie Donald Trump

Jeune Afrique – Face à Donald Trump et à ses foucades, le secrétaire général de l’ONU António Guterres a longtemps fait le dos rond. Après le drame de Gaza, il s’est résolu à l’affronter. À ses risques et périls.
La partie est de plus en plus serrée. Dix-sept mois après son arrivée à la tête de l’ONU, le 1er janvier 2017, António Guterres n’a pas (encore) été broyé par le bulldozer Donald Trump. Il a même habilement procédé à quelques esquives. Face aux menaces américaines de coupes budgétaires drastiques, il a promis de faire le ménage dans la lourde administration onusienne.
Face aux saillies verbales sur les « pays [africains] de merde », il a laissé au Haut-Commissaire aux droits de l’homme, le Jordanien Zeid Ra’ad Al Hussein, le soin de dénoncer les propos « racistes » du président américain. Mais la stratégie du dos rond a ses limites.
Après le carnage du 14 mai à la frontière entre Gaza et Israël (près de 60 manifestants palestiniens tués par Tsahal), le secrétaire général de l’ONU sait qu’il ne peut plus rester sans réaction.

Épreuve de force

C’est en décembre 2017 que commence l’épreuve de force. Le 6, Trump annonce que l’ambassade américaine en Israël va être transférée de Tel-Aviv à Jérusalem, au mépris de toutes les résolutions votées à l’ONU depuis 1967.
Le 10, sur CNN, Guterres répond timidement : « La décision américaine de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël risque de compromettre les efforts de paix entre Israéliens et Palestiniens. »
Le 21, lors d’un vote à l’Assemblée générale de l’ONU, l’initiative de la Maison-Blanche est condamnée par une large majorité de 128 États, mais Trump, qui ne recule pas devant le chantage au portefeuille, réussit à convaincre 65 membres de ne pas voter contre sa décision.
Parmi eux : le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, la RD Congo, la Centrafrique, le Cameroun, le Bénin et le Togo. Quelques jours plus tard, les 65 ambassadeurs qui n’ont pas déplu à Trump sont invités à un cocktail de remerciement par sa représentante à l’ONU, la sémillante Nikki Haley.

Arrive la première journée sanglante à Gaza. Le 30 mars, 17 Palestiniens tombent sous les balles israéliennes. Dès le lendemain, Guterres sonne le tocsin et réclame « une enquête indépendante et transparente »… que les Américains bloquent aussitôt devant le Conseil de sécurité. À partir de la journée meurtrière du 14 mai, la demande de Guterres est reprise par tout le monde, même par les Britanniques, pourtant très proches de Washington.
Ce 18 mai, le Conseil des droits de l’homme, réuni en session extraordinaire à Genève, vote l’envoi d’une mission d’enquête internationale à Gaza. « C’est tout à l’honneur d’António Guterres d’avoir presque immédiatement demandé une enquête, commente Philippe Bolopion, directeur adjoint du plaidoyer à Human Rights Watch (HRW), mais c’est le minimum que la communauté internationale pouvait faire. »

L’un est un « catho de gauche », l’autre un milliardaire hostile aux migrants. C’est l’eau et le feu

Jusqu’où peut aller l’épreuve de force ? À priori, Guterres et Trump, c’est l’eau et le feu. Le premier est un « catho de gauche » qui, à la tête du HCR, a consacré dix ans de sa vie aux réfugiés.
Le second est un milliardaire qui veut ériger des murs antimigrants. Mais en janvier 2017, lorsque Trump a cherché à interdire l’entrée des États-Unis aux ressortissants de sept pays musulmans, Guterres a réagi de manière fort prudente, contrairement au Haut-Commissaire aux droits de l’homme.
« Guterres, c’est la vitrine de l’ONU, mais ce n’est pas le champion des droits de l’homme, regrette Philippe Bolopion, de HRW. Après Ban Ki-moon, on espérait beaucoup de sa part et, pour l’instant, on est déçus. En Syrie, en Birmanie, en Chine, on voudrait qu’il prenne plus de risques. »
Premier contributeur
Le problème de Guterres, c’est que les États-Unis sont le premier contributeur de l’ONU : ils financent 20 % de son budget général et 30 % de ses opérations de maintien de la paix.
Or Trump ne cesse de réduire les subsides américains. Depuis quelques mois, le secrétaire général multiplie donc les visites aux Casques bleus pour bien montrer l’importance de leurs missions. En octobre, il était en Centrafrique. À la fin de ce mois, il doit se rendre au Mali. Puis, en juillet, en RD Congo.

Aujourd’hui à la tête de l’ONU, Guterres fait face à une crise de crédibilité sans précédent

En novembre dernier, Guterres soupirait : « [Avec Trump], j’ai évité une rupture. » Aujourd’hui, il continue de se démener en cajolant Nikki Haley et en espérant que le nouveau conseiller à la sécurité nationale, l’ultraconservateur John Bolton – un fin connaisseur de l’ONU –, ne va pas tenter d’assujettir l’organisation aux intérêts américains.
En arrivant à New York, Guterres savait qu’il prenait le job le plus difficile du monde. Aujourd’hui à la tête de l’ONU, il fait face à une crise de crédibilité sans précédent.
Par Christophe Boisbouvier

Déportés négro-mauritaniens: «Nous sommes les Palestiniens de l’Afrique»

Grève faim réfugiés négro-mauritaniens au Sénégal 19 juin 2012Francetv info – C’est une tragédie dont on parle peu. Celle des déportés négro-mauritaniens chassés de leurs terres il y a bientôt 30 ans. Ils sont des milliers au Sénégal à rêver d’un retour au pays natal. Aldiouma Cissoko est de ceux-là.

Depuis son exil sénégalais, il dénonce le sort réservé à ses compatriotes qu’il considère comme «les Palestiniens de l’Afrique de l’Ouest». Il s’est confié à Géopolis. Aldiouma Cissokho ne décolère pas. C’est le coordinateur des organisations des réfugiés mauritaniens au Sénégal. Après des décennies d’errance, des milliers de ses compatriotes accueillis au Sénégal dans les années 90 ont cessé d’exister légalement, soupire-t-il.

«Depuis 2016, le gouvernement sénégalais n’a pas voulu renouveler nos documents d’identité. Nous sommes devenus des réfugiés-apatrides. Quand on devient apatride, qu’est qu’on peut donner à son enfant? Quelle  promesse peut-on lui faire? Le Sénégal n’accepte pas non plus de nous aider à nous installer dans un autre pays», confie-t-il à Géopolis.

«Ils sont cloîtrés dans des ghettos»

Un accord tripartite sur le rapatriement volontaire et la réintégration des réfugiés mauritaniens conclu entre le Sénégal, la Mauritanie et le HCR était censé mettre fin à leur cauchemar. Quelque 60.000 Mauritaniens avaient été déportés vers le Sénégal et le Mali à la suite d’un conflit frontalier qui a dégénéré en violences interethniques sanglantes.

Aldiouna Cissokho raconte à Géopolis la galère de ceux qui ont tenté de prendre le chemin du retour. Environ 20.000 personnes, selon les chiffres du HCR, le Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés.

«Ils avaient reçu la promesse d’obtenir de nouveaux papiers d’identité au plus tard trois mois après leur retour. Il n’en a rien été. Personne n’a retrouvé ses terres perdues en 1989. La plupart des gens sont installés dans des hangars de fortune à quelques kilomètres de leurs villages. Sans papiers, ils ne peuvent pas se déplacer. Ils sont cloîtrés dans des ghettos qui rappellent l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid.

Certains ont été tellement découragés par l’accueil dont ils ont fait l’objet qu’ils ont choisi de revenir au Sénégal. On leur a menti sur tous les plans. Ils nous ont dit que si c’était à le faire, ils ne le referaient pas», témoigne Aldiouna Cissokho.

«Le gouvernement mauritanien ne veut pas de nous»

Aux yeux des déportés mauritaniens, le HCR a perdu toute crédibilité. Ils lui reproche de ne pas dénoncer la mauvaise foi du gouvernement mauritanien.

«Le gouvernement mauritanien ne veut pas de nous. C’est clair, nous sommes devenus les Palestiniens de l’Afrique de l’Ouest. Ils veulent conquérir notre âme, notre culture, notre terre. Ils veulent nous éliminer complètement.»

Arrivé au Sénégal le 7 mai 1989, Aldiouma Cissokho a vu grandir une génération de jeunes Mauritaniens nés dans les camps de réfugiés au Sénégal. Il parle d’une génération sacrifiée, abandonnée à son sort.

«Ils ont été sacrifiés. Parce que l’enfant n’est rien d’autre que le reflet de sa famille. Depuis 2016, nous sommes devenus des réfugiés apatrides au Sénégal. Quand on devient apatride, qu’est-ce qu’on peut donner à son enfant? Quelle promesse peut-on lui faire?»

«Nous vivons dans l’ombre, nous n’existons pas»

Certains jeunes réfugiés ont préféré demander la nationalité sénégalaise. Il s’agit pour eux d’un problème de vie et de mort, explique Aldiouma Cissokho. Ils ne veulent pas subir le même sort que leurs pères et leurs mères qui n’ont connu que la précarité.

«Les gens vivent de l’aumône. Les femmes prennent d’assaut les lieux de mariage. Elles aident les gens à préparer les cérémonies et reçoivent un repas. D’autres vont trouver des soutiens à l’église. D’autres se débrouillent dans l’informel. Nous vivons dans l’ombre. Nous n’existons pas», tranche-t-il.

Ils sont estimés à 35.000 à vivre ce calvaire. Mais ils rêvent encore du jour où ils pourront regagner leur pays avec des garanties d’être rétablis dans leurs droits: «Le droit de retrouver notre citoyenneté, nos terres et notre dignité. Ce qui est sûr, c’est que la civilisation négro-mauritanienne n’est pas vouée à disparaître», conclut Aldiouma Cissokho.

Par Martin Mateso

http://geopolis.francetvinfo.fr/deportes-negro-mauritaniens-nous-sommes-les-palestiniens-de-l-afrique-190779