Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Monthly Archives: December 2017

Mauritanie : l’opposition dénonce la gestion “unilatérale” du pays

Mauritanie : l’opposition dénonce la gestion Le G8, la coalition qui regroupe des partis d’opposition, des centrales syndicales et des ONG de défense des droits humains, est descendue ce samedi dans les rues de Nouakchott pour dénoncer “la gestion unilatérale du pays”, selon l’ancien premier ministre Yahya Ould Waghef.

Il était interrogé par Alakhbar. « Le message que nous voulons transmettre au pouvoir est très clair : l’opposition démocratique rejette la gestion unilatérale du pays et exige que ce pays puisse être remis sur les rails, à travers un consensus des forces politiques pour permettre une véritable transition.

Une transition qui nous permet de faire une alternance démocratique véritable. Voilà le message que nous passons au pouvoir à travers cette marche », a indiqué Yahay Ould Waghef qui est également le chef de Adil, un parti membre du G8.

ALAKHBAR

Le Président de la République : «La Mauritanie et les pays de la CDEAO sont liés, par la géographie et par des liens humains indéfectibles»

Le Président de la République : «La Mauritanie et les pays de la CDEAO sont liés, par la géographie et par des liens humains indéfectibles» Le Président de la République, Son Excellence Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz, a exprimé sa profonde satisfaction, lors de la 52ème session des Chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres de la CEDEAO, exprimant ainsi sa profonde satisfaction quant à la volonté commune des deux parties de renforcer leurs liens historiques, sociaux et économiques.

Voici l’intégralité de cet important discours :

« Excellence et cher frère Monsieur Faure Gnasingbé, président de la République togolaise, président en exercice de la CDEAO,

Excellence et cher frère, Monsieur Muhammadu Buhari, président de la République Fédérale du Nigéria,

Excellences et chers frères, Messieurs les chefs d’Etat et de gouvernement,

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

Je voudrais, tout d’abord, exprimer mes vifs remerciements à notre frère, Son excellence Monsieur Muhammadu Buhari, président de la République Fédérale du Nigéria, au gouvernement et au peuple nigérians pour l’accueil chaleureux et l’hospitalité authentiquement africaine, dont nous avons été l’objet depuis notre arrivée dans cette belle capitale, Abuja.

Je voudrais également remercier mon frère, Son Excellence mon frère, Monsieur Faure Gnasingbé, président de la République togolaise pour son aimable invitation à prendre part aux travaux de la session actuelle de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO.

Je voudrais aussi saluer chaleureusement mes frères chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest et les féliciter pour leurs efforts inlassables qui, en un temps record, ont fait de la CDEAO, un modèle réussi de coopération régionale.

Je tiens à vous adresser, Excellences chefs d’Etat et de gouvernement, les remerciements du peuple et du gouvernement mauritaniens pour votre décision unanime, en faveur de l’établissement d’un accord d’association entre la CEDEAO et la République Islamique de Mauritanie.

C’est également pour moi un plaisir réel d’être parmi vous aujourd’hui, chers frères, pour prendre part aux travaux de cet important sommet, qui constitue une précieuse opportunité pour échanger sur les voies et moyens de renforcer la coopération entre nos pays et faire face, ensemble, aux nombreux défis auxquels notre région est confrontée.

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

La Mauritanie et les pays de la CDEAO sont liés, par la géographie et par des liens humains indéfectibles. C’est pourquoi nous-nous sommes engagés résolument, en Mauritanie, à favoriser la création d’un cadre efficace d’échange et de partenariat avec la CEDEAO. Notre pays s’est préparé à cette perspective à travers notamment la transformation de son économie nationale, le développement des infrastructures routières, portuaires et aéroportuaires, l’amélioration sensible de la production de l’énergie en plus de la création d’une zone franche dans notre capitale économique, Nouadhibou.

Je me félicite que notre volonté commune de renforcer davantage nos liens séculaires est aujourd’hui matérialisée par l’accord d’association que nous venons de conclure. Cet accord ouvre des perspectives prometteuses en faveur de la prospérité de nos peuples et de l’intégration économique régionale.

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

Notre région est confrontée à des défis sécuritaires majeurs tels que le terrorisme, la criminalité transfrontalière et les trafics illicites ; ces défis ont été exacerbés par la multiplication des foyers de tension et de l’absence même de l’Etat dans certaines zones de notre continent, où des atrocités ignobles sont commises, par des trafiquants d’humains.

Les tragédies humaines récurrentes dont sont victimes des dizaines de milliers de nos jeunes nous obligent tous à trouver une solution rapide et pérenne au phénomène de la migration clandestine.

Nos Etats se doivent d’adopter une approche collective susceptible d’apporter les réponses appropriées, car il s’agit de problématiques communes à tous nos pays.

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

La Mauritanie sait pouvoir compter sur vous, chers frères, chefs d’Etat et de gouvernements, pour le parachèvement de notre accord d’association. Les peuples de notre région fondent des espoirs légitimes sur les conclusions des travaux de notre présent sommet ; il importe de répondre positivement à leurs attentes.

Je souhaite plein succès à nos travaux.

Je vous remercie ».

AMI

L’ancien drapeau national brandi lors de la marche de l’opposition , ce soir à Nouakchott

العلم القديم خلف قادة المعارضة خلال مسيرة اليوم (الأخبار)Les militants de l’opposition mauritanienne ont brandi aujourd’hui , l’ancien  drapeau national ,tout au long de  la marche de l’opposition, organisée cet aprés midi à Nouakchot . Ses couleurs (vert et jaune) ont servi à  l’ecriture des slogans portés par les participants à cette marche.

L’ancien drapeau est apparu dans la marche, soulevés  derrière les leaders de l’opposition, malgré l’adoption d’un nouveau drapeau par le gouvernement actuel , depuis le 28 novembre dernier , 57 éme anniversaire de l’indépendance du pays. Le nouveau drapeau adopté   après le référendum en août dernier porte deux bandes rouges ajoutées en haut et au bas de l’ancien drapeau.

Les dirigeants de l’opposition n’avaient pas donné d’instructions pour  lever l’ancien  drapeau pendant la marche d’ aujourd’hui, mais un certain nombre de militants de l’opposition n’ont pas répondu àce voeu  et ont porté haut l’ancien  drapeau pendant la marche.

Le correspondant de « Akhbar.info » a indiqué qu’il a vu les policiers, confisquer les anciens drapeaux et  entrainer les personnes qui les portaienst  dans l’un de leur bus .

Source : .http://alakhbar.info/?q=node/7998 et http://alakhbar.info/?q=node/8000

Traduit par Adrar.Info

Mauritanie : Samba Thiam initie des mesures concrètes pour la réconciliation nationale

altLa tentative du gouvernement de régler le passif humanitaire par des indemnisations des veuves et orphelins des 28 soldats noirs assassinés en 91 à Inal suscite des réactions au sein de la classe politique mauritanienne. Parmi les les plus pertinentes figurent celles du chef historique des FPCex-Flam qui prône des mesures pour une réconciliation nationale durable.

Pour Samba Thiam la cause profonde de la difficile cohabitation est politique et réside dans la rupture de l’équilibre des différentes communautés. L’ancien prisonnier politique de Ould Taya pointe ainsi la politique d’exclusion depuis l’indépendance jusqu’à nos jours de plus de la moitié des mauritaniens dans les affaires de l’Etat.Et à juste titre c’est une grave erreur pour le régime de Ould Aziz de croire que solder le passif humanitaire suffirait à réconcilier tous les mauritaniens insiste le président des FPC qui conclut dans une déclaration à la presse nationale cette semaine à Nouakchott que la réconciliation nationale passe par l’apaisement et la refondation du pays.

Le président des FPC passe à l’offensive cette semaine à Nouakchott dans une déclaration à la presse nationale sur la question nationale.L’occasion pour Samba Thiam de recadrer les intentions politiques du régime de Ould Aziz qui tente de résoudre le passif humanitaire par des indemnisations des veuves et orphelins des 28 soldats noirs assassinés en 91 à Inal. Cette réouverture du dossier par le ministre de la défense cette semaine après l’échec du 28 novembre à Kaédi est considérée par les observateurs comme une fuite en avant pour retarder les poursuites contre tous les criminels officiers de l’armée.

En réaction à cette politique négationniste le leader négro-mauritanien refuse la fatalité et l’impunité et ouvre ainsi de nouvelles perspectives sur la difficile cohabitation piétinée par les différents locataires du palais de Nouakchott depuis 1960. Ancien prisonnier politique de Ould Taya il est le mieux placé pour jeter un regard sur le blocage du passif humanitaire. L’arrivée au pouvoir de Ould Aziz en 2009 n’a rien changé mais au contraire l’exclusion systématique des noirs dans les affaires de l’Etat s’est empirée avec le durcissement du régime par la répression policière des militants anti-esclavagistes de militants de mouvements citoyens voire des leaders de l’opposition .Par nature cette question nationale est très sensible.Sa solution est dictée par l’impératif de justice et d’équité.Pour Samba Thiam la cause profonde du passif humanitaire est politique et réside dans la rupture de l’équilibre du mieux vivre ensemble.Le président des FPC avertit que c’est une grave erreur pour Ould Aziz de croire que solder le passif humanitaire suffirait à réconcilier tous les mauritaniens.

Dans la perspective de bonnes résolutions le charismatique opposant prône une commission « Vérité et Réconciliation » sur toutes les violations commmises par les régimes de 86 à 91 contre la communauté noire.Cette instance nationale devra être indépendante avec une mission principale de procéder à des enquêtes et d’entendre les victimes et les présumés criminels.Cet apaisement passe par un devoir de vérité, de justice de réparation et de mémoire pour une véritable cohésion sociale.Pour Samba Thiam il s’agira également de refonder le pays pour une nouvelle identité mauritanienne arabo-africaine avec en toile de fond une charte fondamentale pour le respect de toutes les communautés.C’est un long processus.D’autres pays comme l’Afrique du Sud, le Rwanda etc…l’ont réussi.Il a fallu plus d’un siècle pour certains et plus de 50 ans pour d’autres.

Bakala Kane

(Reçu à Kassataya le 14 décembre 2017)

Kassataya

La parole libérée des anciens esclaves (2)

alt

Après des années de souffrance sillonnées d’humiliations et de privations, les anciens esclaves savourent, désormais, la liberté et recommencent une nouvelle vie, grâce à l’action conjuguée des abolitionnistes. Un nouveau combat pointe à l’horizon.

Après avoir recouvré leur dignité,  ils doivent apprendre à vivre, à se prendre en charge, en se dotant d’une nouvelle demeure, à se munir de papiers d’état civil. Le plus difficile commence, sans doute, pour des gens qui, une fois consommés les premiers secours d’urgence, devront passer à d’autres paliers. Tout apprendre et survivre dans un nouvel univers.

Beaucoup d’espoirs et de projets, mesurés. Nous leur donnons l’opportunité de narrer leur passé douloureux et de leur vie présente d’hommes et de femmes libres, de faire part de leurs rêves et des perspectives qui s’offrent à eux. Les opportunités sont sans doute grandes mais pour des gens qui n’ont jamais bénéficié de la moindre formation professionnelle, ça ne sera pas des parties de plaisir.

  Il s’agit donc de  faire part, à l’opinion, via des témoignages poignants et émouvants mais sans animosité aucune, de faits ayant marqué tant de nos compatriotes,. Quand les langues se délient, c’est la parole libérée des anciens esclaves qui s’élève.

     M’barka Mint M’barek

Je m’appelle Mbarka Mint M’barek, fille de Kheidama. Bergère, toute ma vie d’esclave. Quand je reviens, le soir, je trais le bétail, fais la cuisine, sers à manger, nettoie la tente. Je suis blâmée, réprimandée et insultée, par mes maîtres, quand les choses ne sont pas bien faites, quand j’en oublie, tarde à les accomplir ou quand je réponds à la femme de mon maître.

  Je ne sais pas quand je suis venue avec la famille, je sais seulement que j’ai pris conscience avec eux. De mon enfance au moment où je suis partie de chez mes maîtres, ni le rythme de travail ni mon traitement n’ont jamais changé.

Je ne mange jamais avec eux. Mon maître me retrouve souvent en brousse, me harcèle et abuse de moi. De mes quatre enfants, Mbareck Salem, Laghdaf, Mboirika et Aicheta, trois sont de mon maître et de ses frères [mais ceux-ci ne reconnaissent aucun de ceux-là, ndlr]. Je suis habillée à chaque fête, soit trois fois par an.

On ne m’a jamais permis de rencontrer d’autres personnes, d’aller dans les cérémonies. Il n’y a plus aucune relation maintenant. Au début, mon maître est venu nous donner de l’argent et cherchait à ce que nous retournions. Mais Kheidama, ma maman, a refusé. […] La relation avec SOS est  fraternelle. On leur souhaite de bonnes choses.

  Elle nous aide et nous accompagne […]. Mes maîtres étaient Ehel Bourada Bouh ould Bonane, Yenjé ould Bonane, Marieme mint Sweide, l’épouse de Sidi Mohamed, Mariema mint Bouna, Aicha mint ElHacen, épouse de Bouh, Nouha mint Moktar, épouse de Itawal Oumrou, Moija Mint Sweidi, épouse de Yenjé, Fatimetou et Fatma Yahya.

Je veux avoir ma maison. Je souhaite que  mes enfants soient éduqués. Moi-même, je veux  apprendre. Je suis libre, c’est vrai. La fille  de ma tante est encore en esclavage, je pense porter plainte pour qu’elle soit libérée de toutes les souffrances qu’elle subit.

J’ai  adhéré à l’association [SOS Esclaves, ndlr] parce que je veux connaître la vie, apprendre, m’assumer, etc. J’ai porté plainte contre tous mes anciens maîtres. Je cherche mes droits et ceux de mes enfants. Si l’on me proposait de l’argent, pour rien au monde je n’accepterai. Je ne peux pas oublier les souffrances que nous avons vécues, ma sœur et moi, loin de notre mère. 

Vatma Mint Zaida

« J’étais assise jusqu’à ce que mon frère, Idoumou [antenne locale de SOS esclaves, ndlr], Maouloum et la gendarmerie  viennent me trouver en brousse [dans la localité d’Outeyd Talhaya, aux environs de Nbeiket Lehwach, ndlr]. J’étais en haillons, presque nue, à m’occuper du bétail.

  Je remercie Allah de ce jour, Nous sommes passés par le campement où nous avons récupéré mes enfants. J’en ai quatre. Un de mes fils est resté avec ma mère. Bergère, je pile aussi, lave, cuisine ; quand je me lève le matin, je m’occupe du bétail et, la nuit, quand je reviens de la brousse, je m’occupe de tous les travaux de la maison.

Il n’existe pas de mots sales et autres injures que je n’ai pas entendus. Mais je n’ai  jamais été bastonnée, physiquement. Je suis très mal habillée. On me donne un voile par an. Je mange toujours seule et suis toujours tellement fatiguée que je n’ai pas envie de manger.

J’habite un abri constitué de trois bâtons couverts de haillons. Les esclaves qui sont  là-bas vivent tous comme je l’ai décrit. Ces maîtres n’ont pas peur de Dieu ni des hommes. Ils sont capables de tout.

  Moi, j’ai refusé qu’on me frappe mais il y en a d’autres qui le sont.  J’ai  vu ma propre mère frappée. Je n’ai plus vu mes maîtres, depuis mon départ. Leur fils, Yahafdhou, nous apporte de l’argent  et des habits  pour les enfants. Bien que son père soit  en prison. La conciliation, c’est le fait de mon  frère. S’il ne tenait qu’à moi, je n’aurais pas accepté l’accord.

C’est grâce à l’association  que nous  sommes sortis, moi et mon frère, de l’esclavage. Je remercie  Allah. Je suis des cours d’alphabétisation. Je pile pour des gens et j’effectue tout travail qui me rapporte quelque chose. Ici, j’ai appris à faire le couscous.

  Mes maîtres sont des Oulad Daoud : Ikhallihina ould Haimao, maître Daoud, son fils Abdallah Ould Khalihina, El Beidh ould Maimad, frère du maître, Tahma Mint Haimad, Mohamed  Haimad et  Eide ould Haimad. Le fils du maître, Abdallahi, me fatigue beaucoup. Il nous met la pression, nous injurie.

  Il n’ya pas de repos. J’aurais souhaité qu’il soit  emprisonné. C’est lui qui a pris mon fils et l’a chargé de s’occuper du bétail. Il est plus méchant que son père.

Dans la vie de liberté, je veux faire du commerce, avoir un chez moi et des occupations rentables. Ma mère est vieille, je m’occupe d’elle, tandis que les enfants vont à la mahadra. Ils n’ont pas encore de papiers d’état-civil. Je n’en ai pas moi-même. […] Mon maître a été libéré, après une année de prison, j’aurais souhaité qu’il y reste jusqu’à ce qu’il nous donne nos droits à réparation.

Ce qu’il a donné est insignifiant : trois millions cinq cent mille ouguiyas, pour quarante années d’esclavage. C’est moi qui ai souffert, je n’ai aucune compassion pour eux. Je n’étais pas d’accord avec mon frère. Je n’ai jamais été d’accord avec la conciliation ».

Essalme 

«J’ai fui avec mon fils il y a cinq ou six ans. Ma sœur a refusé de venir avec nous. Ses enfants sont là [à Bassiknou, ndlr]. Les maîtres n’ont pas été arrêtés. Ils se cachent. Ilsne m’ont jamais rien enseigné. Je ne dis que la vérité. Je n’ai qu’un terrain vague pour habitation.

Je ne suis pas recensée. J’ai bien essayé mais ils m’ont dit que pour me faire recenser, il faut présenter mes parents qui ne sont plus vivants. Mon problème, c’est surtout de retrouver mes enfants. Je ne connais pas mon âge. J’ai pris conscience avec ces gens. Mon père était avec d’autres. Nous étions partagées entre plusieurs familles. Je ne sais pas prier. Je ne connais que garder les animaux.

  Idoumou Ould Abeïd, point focal SOS Esclaves à Bassiknou

« C’est pacifiquement que je combats l’esclavage, depuis le jour où je m’y suis décidé[…]Parfois, des maîtres notoires se présentent à des marchés forains. On les dénonce à la gendarmerie. Parfois, ils sont arrêtés et envoyés à Néma. Mais il n’y a jamais de sanction, à part une ou deux.

Il y a eu une affaire qui s’est conclue par une conciliation. Mais, finalement, l’argent qu’il devait être versé ne l’a jamais été. Les dossiers d’esclavage, au Parquet, sont au nombre de 113 […] mais le laxisme est partout de mise, à tous les niveaux.

Les esclaves souffrent, dans l’ignorance la plus totale, et ne peuvent même pas s’acquitter de leurs obligations religieuses. Des fois, les anciennes victimes reçoivent de l’aide. Mais, le plus souvent, ils sont oubliés, lors des opérations de distribution. Ils sont privés de tout, par les notables et les élus qui sont, tous, des féodaux et des esclavagistes.

  Vatma Mint Hamady

A l’origine de ma libération, c’est mon frère Hamou. Je me peux pas pardonner les bastonnades des enfants, le travail forcé et brutal, sous la pluie, sous le froid, sous le vent. Dieu sait  qu’on me fait entendre de mauvaises paroles, quand je suis les animaux, quand je fais la cuisine, quand je vais puiser de l’eau.

Mais, moi aussi, je n’ai jamais mâché mes mots avec eux. J’allaite et lave leurs enfants, nettoie, cuisine… Malade, je ne peux pas me coucher. Quand le bétail se perd, je suis battue. Quand je tarde à descendre les pans des tentes, je suis insultée, on me frappe  avec un bâton enflammé tiré du foyer [elle montre une cicatrice au genou gauche, ndlr].

J’ai été injuriée par des propos que je ne peux pas répéter. J’ai été battue, brûlée mais jamais abusée sexuellement. […] Je n’ai plus aucune relation avec mon ancien maître. Je souhaite qu’ils soient punis de bien plus qu’un an de prison. Cette peine ne suffit pas.

L’association [SOS Esclaves, ndlr] me rend beaucoup de services. Elle me donne de l’argent, nous aide, moi et mes enfants, et m’accompagnent dans les démarches, pour l’obtention de  mes droits. […] Mes maîtres sont Sidi Mohamed Bouna Hamena Ould Bouna [en prison, ndlr], Fatma Mint Sidi Brahim, Jar Ould Sidi Mohamed Bouna, Ould Sidi Ould Bouna et d’autres enfants. Je veux acheter un terrain, construire une maison, avoir un troupeau de vaches et de chèvres, une charrette et des ânes.

J’ai une grande fille mariée, Tahra,  un fils qui fait le journalier, des petites et un autre garçon qui vont à l’école.  Je souhaite qu’ils y réussissent et que nous obtenions enfin un état-civil. […] Le procès  eu lieu et sa décision est l’emprisonnement. Mais, s’il y a une possibilité de faire appel, je suis d’accord : j’attends une juste réparation ».
Saada Mint Mabrouk

« Je me rappelle l’action d’un comité venu dans notre localité (Mzeirig), près de Bassiknou. Les Maures ont pris peur et m’ont donné deux ânes et six chèvres. [C’était une mission de SOS-Esclaves et de gendarmes, accompagnée de son frère, ndlr]. C’est à ce moment-là que tout s’est déclenché.

On m’a envoyée en brousse, et mon maître aussi. Ma vie d’esclave, c’est les mauvais traitements, les bastonnades, pour moi et mes enfants. J’en ai cinq : trois filles et deux garçons.

La plus petite, Chaya, a sept  ans ; Vatma, environ neuf ; Lalla Vatma, onze ; Barke est plus âgé de deux ans que Lalla Vatma; et puis mon aîné, Khweibir. Je ne suis pas sûre mais je pense que les garçons sont à Bassiknou, en train de travailler dans le charbon.

Très jeune, je suis les animaux, cuisine, pile le mil, puise l’eau, trait les vaches, les chamelles, les chèvres et les conduis, avec les moutons, de l’aube jusque très tard dans la nuit.

Je n’avais de relation avec aucun membre de ma famille. On me disait que ma mère était morte. Aujourd’hui, je vis avec elle. Elle est bien vivante. J’ai été mariée, durant une courte période, et j’ai divorcé. Je ne sais pas où est le père de mes enfants. Je n’ai pas été objet de violences sexuelles.

Très petite, j’ai commencé à apprendre le Coran, portant ma tablette avec moi, derrière les animaux, mais ça n’a pas duré plus d’une semaine. Mes maîtres ont vite arrêté cet enseignement. Mais j’ai appris à prier. Je passe la journée en brousse et prie là-bas.

Mes maîtres n’étaient pas gentils. Habillée une fois par an, je me débrouillais pour vêtir mes enfants. Nous mangions seulement le soir. Il n’y a pas de ration spécifique pour nous. De ce que je prépare, pour les maîtres, j’en prends une partie, pour moi. Depuis mon départ de chez eux, je ne les ai jamais vus. Je n’en entends même plus parler. L’association nous donne de l’argent.

Cela me permet de vendre et d’acheter. Elle me fournit de temps en temps des vivres [riz, blé, huile, ndlr], cela nous permet de faire face. Je parle de l’association bienfaitrice qui aide les esclaves [SOS-Esclaves, ndlr].

Je veux, à l’avenir, vendre, acheter. Je fais du couscous que je vends, je vends des biscuits, bonbons, allumettes et briquets. La vie que je mène, actuellement, est meilleure qu’avant. Je vis avec ma mère prétendue morte. Ce que j’endurais, avec mes maîtres, ce n’est pas une vie. J’étais entre le ciel et la terre, à courir du matin au soir. Maintenant c’est différent, je suis libre, je suis bien.

Les chèvres et les ânes que les maîtres m’ont donnés, je les avais laissés à mes tantes. J’ai demandé qu’on me les envoie à Néma, mais la personne à qui on les a donnés, les a vendus et en a utilisé l’argent. Mes maîtres sont de la tribu de Oulad Daoud, des Ehel Bourada: Sidi Mohamed ould Ethmane et son épouse Minétou Mint Mohamed. Leurs enfants sont Ahmed, Khatri, Vatma, Lalla Vatma, Cheia, Lalla, Marièm et Meriem.

J’ai déposé une plainte  en justice. Je réclame mes droits. Je veux qu’on me ramène ma fille Vatma qui est restée avec Ahmed Ould Ehl Ethmane, frère de mon maître. Je suis satisfaite de ma situation actuelle. Avec ma mère, j’ai pu avoir un état-civil mais mes enfants n’ont pas encore de papier. 

Kheinatha, grand-mère de Lalla  Aicha Mint  Mohamed

« Lalla Aicha est restée une journée avec la maîtresse, Lalla Aicha mint El Galla ould Abdel Wahab, à Kusmara. La maman  de Lalla Aicha était esclave des Ehel Abdoul Wahab, une tribu des Oulad Daoud ». A l’origine, une bagarre, entre la famille et ses esclaves. La grand-mère a téléphoné à son fils. Elle raconte : « Nous avons marché jusqu’à Kassala et mon fils est venu nous récupérer pour nous amener à Bassiknou. Ma fille Setra et moi sommes arrivés à Bassiknou où nous avons retrouvé une autre de mes filles Dadde.

C’est là qu’elle avait mis au monde Lalla  Aicha. La  maîtresse  est venue prendre son homonyme, après le décès de Dadde. Ce sont les voisins harratines qui ont  dénoncé le départ de la fillette chez la maîtresse. SOS esclaves et la gendarmerie sont allés les ramasser, elle et la maîtresse, et les ont déposés au Parquet de Néma.

Je me rappelle bien. Nous étions  parties en voiture avec Lalla Aicha. Elle  m’avait dit de venir avec elle à Kusmara. Mais je n’y ai fait qu’une journée. Les gendarmes sont venus me reprendre avec ma petite-fille. Les gendarmes ont demandé à Lalla Aicha, la maîtresse, de venir avec eux et ils nous ont déposées à la brigade.  Depuis l’épisode de Néma et du tribunal, nous avons appris qu’elle est retournée deux fois à Néma ».

Vatma intervient : « J’ai des frères  et sœurs : Cheikh Issa, Agnida et Daddah ; qui habitent avec moi et ma grand-mère. Nous ne sommes pas recensés. Je vais à l’école. Je veux, à l’avenir, devenir employée dans une maison parce que  je veux gagner de l’argent ». La grand-mère reprend : « Nous ne voulons que la paix. Par Dieu, qu’elle  nous laisse en paix,q u’elle nous laisse en paix ! »

Moima mint Abderrahmane (environ 80 ans, malade et presque sénile)

Je suis Moima Mint Abderrahmane, j’étais à Azamat (vers Bassiknou), esclave de Hel Bouna ould Archaq. Mon maître se nomme Archaq Ould Bouna et son épouse, Nanna Mint Sidi Mohamed Bouna. Le frère de mon maître, Sidi Mohamed Ould Bouna, est mariée à Vatma Mint Sidi Brahim. Avec mes maîtres, je travaillais comme bergère, je cuisinais les repas et faisais tous les autres travaux de la maison. C’est moi qui ai porté tous leurs enfants, je les ai allaités et pris soin d’eux.

Lorsque je suis devenue faible et vieille, les maîtres ne me parlaient plus. Ils m’ont laissé de côté. J’ai appelé mon fils, il est venu me ramener à Néma dans sa maison. Mes maîtres me traitaient comme une esclave mais sans violence, ma maîtresse venait même piler avec moi, quelquefois. Ce sont de bonnes personnes. Mais la vraie vie, c’est seulement ici, avec mon fils. Pour rien au monde, je ne retournerai là-bas. La vie, chez les maîtres, et la vie ici, avec mon fils, sont incomparables.

Je n’ai pas porté plainte. Au moment de partir avec mon fils, mes maîtres m’ont donné de l’argent. Je ne me rappelle plus  combien. Mes relations avec la famille de mon maître sont bonnes, le fils de mon maître est venu ici me voir. Mes relations avec l’association  sont bonnes aussi. Je les remercie de tout ce qu’ils font pour moi. Ils me font beaucoup de bien.

J’ai laissé, derrière moi, chez les maîtres, ma sœur Moumna et ses enfants, Sidi Mohamed, Dadda, Mabrouka, Hayna, Tahra. [Toutes ces personnes sont encore en esclavage chez Archa]. Je n’ai pas de papier d’état civil. Je n’ai qu’un fils [Sidi ould Mahmoud]. Moi, j’ai toujours vécu en brousse. Si quelqu’un vient pour me ramener chez Sidi Mohamed, je ne  vais pas accepter mais je peux lui rendre visite.

  Propos recueillis par THIAM Mamadou

le calame

Au service du programme : « Liberté, droit et justice
pour combattre l’esclavage par ascendance en Mauritanie »
promu par le Département d’Etat des Etats-Unis