Daily Archives: 29/12/2017
Tabital Pulaagu : Pari gagné pour la mobilisation des Peuls
Tabital Pulaagu international a tenu, les 18, 19 et 20 Décembre 2017, sa rencontre annuelle à Nouakchott. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’à part les problèmes d’organisation, le pari de la mobilisation des Peuls a été largement gagné. Sur ce point, les organisateurs, qui auraient pu mieux faire, peuvent se frotter les mains. Devant l’impressionnante affluence, nombre d’hôtes n’ont pas manqué d’exprimer leur surprise. Les peuls mauritaniens ont afflués de tous les coins du pays, pour exprimer leur fierté d’être peul et d’appartenir à la Mauritanie, ce que certains extrémistes leur avaient contesté en 1989. Quant à leurs hôtes, ils sont venus des vingt-quatre autres pays membres de Tabital Pulaagu et de la diaspora. Le Palais des congrès a refusé du monde, jusqu’à générer des bousculades avec les forces du BASEP contraintes d’endiguer le flot des congressistes cherchant à accéder à la salle, lors de la cérémonie d’ouverture. C’est justement pour éviter pareils désagréments que certains auraient souhaité que la cérémonie se déroulât à l’extérieur.
Louable n’en reste pas moins l’initiative de tenir la rencontre en Mauritanie : elle a permis, à la communauté peule mauritanienne, d’étaler sa culture, dans toute sa diversité et son dynamisme. Diversité et dynamisme des couleurs, des modes de vie, d’expression et d’accoutrements, etc. Les invités ont revisité l’histoire de la migration et des mythes fondateurs peuls, au rythme trépidant des soirées artistiques et culturelles, animées par les artistes locaux. Bref, Nouakchott a constamment et puissamment vibré, les trois jours de la rencontre, et les invités de Tabital sont repartis très satisfaits de la Mauritanie.
Problèmes d’organisation
Pourtant, la cérémonie d’ouverture avait très tôt dévoilé, lundi matin, de sérieux problèmes d’organisation. Outre le retard de livraison des badges d’accès, pour les invités, étrangers ou non, il était impossible de rencontrer le moindre membre des commissions d’organisation, d’accueil et d’installation des invités. Du coup, plusieurs officiels – étrangers, surtout – peinaient à trouver place au premier rang. Les quelques membres de la commission financière, rencontrés dans les couloirs, disaient tout ignorer de l’organisation. Les uns et les autres étaient occupés à obtenir des badges pour ses proches et amis. Ceux qui ont réussi à décrocher le sésame, le faisaient circuler pour faire entrer tous les leurs. On ne savait plus à qui s’adresser, chacun rejetant la responsabilité sur autrui. Mais la détermination de réussir était visible sur tous les visages, particulièrement des femmes qui ont battu le record de participation, à tous les niveaux.
A l’arrivée, indescriptible pagaille devant la porte intérieure du Palais. Des députés n’ont reçu leur badges que vers 13 heures, alors que la cérémonie d’ouverture touchait presque à sa fin. Face à la pression, les agents de la sécurité présidentielle ont recouru aux muscles, pour contenir le flot humain. Et tous de souligner la responsabilité de Diallo Daouda, président du comité de pilotage, dont les uns et les autres n’ont cessé de tirer le boubou, pour le désordre des badges et autres manquements. On lui a reproché d’avoir accaparé l’organisation, en ne la confiant qu’à ses proches. Il faut cependant mettre, à sa décharge, l’inattendue ampleur de la mobilisation et la détermination de la communauté peule à réussir le pari de la mobilisation. La tâche ne fut donc pas aisée, pour l’ex- secrétaire général du ministère de l’Equipement et des transports, mais le volontarisme a prévalu, durant toute la manifestation.
Autre point noir : l’absence d’eau potable. « Nous avons passé toute la journée au Palais, sans boire ni manger », se sont plaints de nombreuses personnes accompagnées d’enfants, alors que des bœufs avaient été gracieusement offerts, par des éleveurs peuls. Autre couac, l’absence de trop de ministres et hauts cadres peuls, à la cérémonie d’ouverture et aux autres activités. Seuls présents, les ministres de l’Elevage, de la Culture et de l’Artisanat. C’est par leur absence que madame Coumba Bâ, de la Fonction publique, Diallo Mamadou Bathia, de la Défense, Moctar Malal, de la Justice, les députés et autres membres de l’UPR se sont faits remarquer. Pour quelles raisons ? Mystère. Certains ont pensé qu’ils n’avaient pas été associés à l’organisation, mais quelques officiels, notamment Coumba Bâ, avaient accueilli, à l’aéroport, le président de Tabital et le roi. Coumba les a d’ailleurs reçu à dîner, chez elle, en compagnie de nombreux hauts cadres.
Beaucoup ont déploré le caractère trop pastoral donné à l’évènement. On a plus vu les bergers que les sédentaires. D’ailleurs, les cartons d’invitation avaient été dressés à partir de listes des différents groupements « cases » peuls. Certains ne s’y retrouvaient donc pas. Ce qui a amené certains à dénoncer une « récupération » ou « instrumentalisation » de l’évènement.
Chapeau à Radio-Nouakchott 99.5 FM et à Fuuta Média TV !
Toujours au chapitre des manquements, la communication dont la commission a brillé par son absence. Les journalistes ne savaient à qui s’adresser et ceux qui ont réussi à tirer leur épingle du jeu ne le doivent qu’à leur volontarisme. Mais, si la commission de communication fut défaillante, Radio-Nouakchott FM s’est, elle, particulièrement illustrée. Ses journalistes ont bien informé les citoyens, à travers des émissions en direct et des débats entre invités. Avec, en point d’orgue, une rencontre entre ses animateurs et plusieurs journalistes. Une immanquable occasion d’épingler les tares de l’organisation, le choix de l’emblème, le caractère trop restrictif de l’événement, mais, aussi, de saluer une initiative qui aura permis aux peuls locaux de magnifier leur culture spécifique. Un des journalistes vedettes de RN, Hamat Diallo, a fortement critiqué l’accaparement de l’organisation, par le président du comité de pilotage. « Un évènement de cette dimension doit faire l’objet d’une concertation maximale, ainsi que d’un sens élevé de l’ouverture et du partage », a-t-il indiqué. Mention bien, également, à Futa Média qui a puissamment mobilisé ses équipes. Ses journalistes ont bien quadrillé le terrain, en distribuant la parole à tous les invités et hôtes étrangers.
Radio-Mauritanie : zéro pointé !
La Radio nationale a brillé, quant à elle, par son absence. Elle a carrément choisi d’ignorer la manifestation, placée pourtant sous le haut patronage du président de la République. Elle n’a pipé mot, dans ses émissions en pulaar, sur la cérémonie d’ouverture. Ses journalistes en langues nationales (pulaar, soninké et wolof) étant pourtant présents au Palais des congrès. Interrogé sur le silence de leur radio, l’un d’entre eux a lâché qu’il n’en savait rien, qu’il n’avait pas été sollicité pour la couverture et qu’il est venu, comme tous les autres, de sa propre initiative. La veille de la cérémonie, le responsable des émissions en pulaar a choisi de rediffuser une émission de l’été dernier sur le SIDA. Au final, la manifestation n’aura bénéficié que d’une émission de 40 minutes avec le président du comité de pilotage, Diallo Daouda, deux semaines avant le rassemblement. C’est quand même incompréhensible qu’une radio nationale choisisse d’ignorer un évènement national de cette envergure. Les organisateurs doivent poser des questions, au ministère de la Communication et au nouveau directeur de Radio Mauritanie. Il est aussi fort curieux que seuls cinq des treize millions promis par l’Etat aient été décaissés. Notons que la TVM a, quant à elle, correctement couvert la manifestation, notamment en diffusant, à son épilogue, les réactions de participants qui saluaient l’action du président Mohamed ould Abdel Aziz.
DL
le calame
Nouvelles d’ailleurs de Mint Derwich: De la dilatation, de la muleta et du matador
C’est une chronique de temps de crise. Vu la pénurie de papier, je suis obligée de la rédiger sur quelques omoplates de mouton et autres supports tout aussi utiles que le dos de mes paquets de clopes, le papier toilette et le mur. Accessoirement j’ai tenté d’écrire sur les nuages mais ça n’a pas marché… Question, sûrement, de sculpture sur les nuages et de non-compatibilité bédouine. À la guerre comme à la guerre, surtout quand il s’agit de manque de papier à notre nationale et bien aimée Imprimerie ! Quand j’aurai usé toutes les omoplates de mouton, je serai sûrement obligée de passer par les signaux de fumée ou le t’bol. Après, il se peut que j’écrive sur les bandes rouges de notre nouveau truc appelé drapeau. Car, vous l’aurez remarqué, plus le temps passe, plus les bandes rouges augmentent en largeur… Nous avons commencé avec de timides galons. Ils ont, depuis, grossi. Et selon l’inspiration du « maître es bandes rouges » et de l’institution qui affiche royalement notre nouveau drapeau, les bandes rouges se sont mises à faire leurs intéressantes… Ici, deux misérables bandes. Là, tout un boulevard. Là-bas, en haut une largueur, en bas une autre… Nous voilà donc devenu peuple peinture rouge. Du coup et pour ne pas rester en veine, le vert s’est mis à avoir des vapeurs. Parfois vert agressif, sultanesque, parfois couleur de lendemains de crise de foie. Parfois les deux en même temps. Et pour le jaune… hé bien, le jaune tente de garder sa dignité de jaune, outragé par tant de rouge mais je n’ai pas encore vu notre étoile perdre une branche ou en gagner une. Ce qui ne saurait tarder : notre drapeau perd la tête et moi avec… D’accord il l’a perdue, sa tête de drapeau, depuis le referendum. Et comme on lui a imposé un hymne national martial, digne des séries égyptiennes, arabe d’entre les meilleurs arabes, en guise de camisole de force, rien de bien étrange, dans ce jeu de largeur de bandes non conventionnelles et de vert en promenade des champs. Nous avons donc un drapeau baladeur et un hymne guerrier. Et tout un pays se retrouve en pleine dilatation, à l’image de tout ce rouge qui ne sait toujours pas combien il mesure. Dilatés, nous le savions…Et aujourd’hui, dilatés tout rouge, nous voilà bien, me direz-vous, mais attendez, je dois changer d’omoplate… Me revoilà ! Veuillez accepter toutes mes excuses. Cette interruption des programmes était indépendante de ma volonté. Nous en étions où ? Ah, oui : aux bandes de drapeau, à la peinture rouge, au vert, à la dilatation des Nous Z’Autres et à l’interruption des programmes… Il y a sûrement un lien, entre la croissance exponentielle des bandes Z’à rouge et la disparition exponentielle des chaînes de télé privées. Je dis ça, je dis rien, hein ? N’allez pas raconter que j’ai dit quelque chose que je n’ai pas dit. Pas envie de me retrouver au commissariat pour et atteinte à notre drapeau Z’à bandes et pour avoir émis l’hypothèse d’une relation de cause à effet, entre ce magnifique objet à dilatation variable et nos écrans TV. D’abord, ce que je dis ne vaut pas un niébé. De plus, ce niébé, j’y tiens quand même. Sans lui, plus de parenté à plaisanterie, entre les Ba et le reste de l’univers, par exemple. Mais la prudence me conseille quand même de changer de sujet. Je n’ai pas envie de me prendre trois mois de prison avec sursis, pour apologie de notre ancien drapeau. Interlude : je dois encore changer d’omoplate. Celle que j’utilisais appartenait à un agneau. Pendant que je farfouille dans mes omoplates, moment pub : la Mauritanie, joli port de pêche, possède un climat polaire propice aux balades en moto neige. N’empêche… C’était beau toute cette assemblée d’islamistes politiques et « modérés » (j’ai quand même vu quelques têtes qu’on ne peut qualifier de modérées et quelques barbes très vindicatives… J’ai pas dit de nom ! Hé, ho!) sous ce vert et rouge et jaune à dilatation géométriquement variable et réunis chaleureusement, autour du leader du Hamas, pour parler de la Palestine… Il en faut, du rouge, pour parler de la Palestine ! Beaucoup de rouge. Et il en faut, des brainstorming sur les Palestiniens, pour que le martyr des uns devienne le fonds de commerce des autres… Beaucoup de rouge. C’est peut-être pour cela que les bandes rouges ont soudain grossi : pour saluer le malheur des Palestiniens. Peut-être qu’une fois le leader du Hamas reparti, les bandes rouges vont maigrir. Peut-être… Pause ! Je passe au dos de mes paquets de clopes : écrire une chronique entre deux « Fumer tue », c’est rock and roll ! Mais passons sur ce « tue »… En écrivant entre ces épitaphes nicotinées, je ne peux m’empêcher de penser à Paul Auster qui répondit, à quelqu’un qui lui demandait « Pourquoi fumez-vous ? – Parce que j’aime tousser »… Madame l’Imprimerie Nationale, franchement, z’êtes pas drôle ! Bref et re-bref, nous avons perdu le Nord mais nous n’avons pas perdu le rouge. Nous avons perdu le Sénat mais pas le pot de peinture. Nous avons perdu l’immobilité mais nous avons hérité de la dilatation. Et l’Imprimerie nationale a perdu le papier… Qui a dit, il y a fort longtemps : « Mauritaniens, Mauritaniennes, peuple de héros….et blablabla, et blablabla… » ? Il en faut, de l’héroïsme, pour supporter tout ce rouge. À force, ce drapeau, il va ressembler à la muleta des matadores dans une arène : tout rouge ! Et nous fonçant, comme des dératés, tête la première, énervés par tant de rouge à largeurs variables… Mon stock de supports improbables d’écriture étant épuisé et moi, passablement énervée par ceci et par tant de rouge, je vais donc arrêter ce gymkhana et aller me coucher. Il brandit quoi, le matador, quand il a fini d’agiter sa muleta? La queue et les oreilles…
Salut.
Mariem mint DERWICH
le calame