Daily Archives: 30/12/2017
Un ex-ministre mauritanien à Salmane : «Nous ne sommes pas vos bonniches !»
Algérie Patriotique – L’ancien ministre mauritanien de l’Enseignement supérieur, le docteur Bakay Ould Abdel Malik, a demandé l’annulation d’une convention bilatérale signée entre la Mauritanie et l’Arabie Saoudite le 15 juillet 2017 à Djeddah, consistant à organiser l’exportation vers le royaume d’une main-d’œuvre féminine destinée à servir de domestiques, autrement dit pour des emplois de «bonnes» chez les riches Saoudiens.
Il rappelle que la Mauritanie a été un pays qui a fourni nombre d’oulémas (savants musulmans) issus de ses universités islamiques réputées dans le monde arabe et musulman.
En rejetant l’accord sur l’exportation de «bonnes» vers l’Arabie Saoudite, l’ex-ministre énumère ce que son pays attend du royaume saoudien : des investissements dans l’enseignement supérieur et la recherche pour atteindre un haut niveau de qualité similaire au niveau de l’université Roi-Abdelaziz ; le financement d’un programme complet pour la réforme de l’enseignement primaire et secondaire afin de résoudre le problème de la déperdition scolaire dans les banlieues et les bidonvilles qui se trouvent à la périphérie des grandes villes.
Le docteur Bakay évoque les pertes financières de son pays à la suite de la rupture des relations avec le Qatar décidée par suivisme aveugle et irréfléchi pour plaire à l’Arabie Saoudite, en contrepartie de quelques millions de dollars promis par les Saoudiens au gouvernement mauritanien, mais qui sont sans rapport avec ce que rapportaient non seulement les investissements du Qatar en Mauritanie, mais aussi les centaines de fonctionnaires mauritaniens, magistrats, imams et enseignants qui travaillaient au Qatar.
L’annulation de la convention que l’ex-ministre revendique est, officiellement, motivée par le souci de protéger les Mauritaniennes contre les abus dont elles étaient victimes et contre les atteintes à leur dignité. Le texte définit les travaux domestiques concernés et offre des garanties pour les femmes qui désirent profiter des opportunités d’emploi en Arabie Saoudite.
En réalité, c’est une forme d’hypocrisie dont le but est de tromper l’opinion publique en Mauritanie où les organisations de défense des droits des femmes ne cessent de protester contre le véritable esclavagisme auquel les Mauritaniennes sont soumises en Arabie Saoudite. Il y a deux ans, l’Association de femmes chefs de famille de Mauritanie avait révélé un scandale de traite massive de femmes impliquant l’Arabie Saoudite où des centaines de Mauritaniennes se sont retrouvées «séquestrées dans des cours de maison, victimes de toutes les formes de maltraitances physiques, psychologiques et sexuelles».
L’ONG dénonçait alors «une forme aberrante d’esclavage contemporain et une traite sexuelle». Ce trafic était facilité par les administrations mauritaniennes pour la délivrance de passeports et par les autorités saoudiennes pour ce qui est de l’octroi des visas.
Cette pratique d’un autre âge est aggravée par le fait qu’elle concerne les «harratine», qui font partie de la catégorie – 40% de la population, dit-on – d’esclaves ou descendants d’esclaves de Mauritanie. Ce sont ces femmes mauritaniennes qui sont exportées vers l’Arabie Saoudite comme «bonnes».
H. A.
CRIDEM
Manifeste des Harratines : Communiqué
Une délégation du MANIFESTE pour les droits politiques, économiques et sociaux des Haratine au sein d’une Mauritanie unie, égalitaire et réconciliée avec elle-même, a effetué une visite de travail au niveau de la ville de KIFFA, dans la période du 23 au 24 Décembre 2017. L’objet de cette visite était de renouer le contact avec les cadres et les bases populaires locales. Durant ce périple, des points de vue ont été échangés sur les voies et moyens les plus appropriés pour concrétiser les nobles objectifs d’AL MITHAGH ; objectifs qui ne sont autres que la quête perpétuelle de la justice et l’égalité entre tous les fils du peuple mauritanien. A travers les exposés et les échanges sincères et fructueux, les membres de la délégation ont été suffisamment édifiés sur la portée et l’envergure des méthodes et procédés utilisés pour maintenir le statu quo fait d’injustice et de marginalisation, pratiquées contre de larges franges et classes sociales au niveau de cette ville refractaire et insoumise. La capitale régionale, KIFFA, autrefois fleuron des villes émergentes, exemple vivant d’intégration et d’harmonie sociales, incarnait par son rayonnement le modèle à suivre par d’autres contrées du pays. Aujourd’hui dénaturée, hagarde et désemparée, elle ploie et gémit sous le poids d’un immense chagrin ; celui d’avoir perdu son âme en prétant le flanc, par mégarde, à la culture et aux comportements typiquement bédouins. L’infiltration par surprise de ce mileu citadin par des us et coutumes tribales inadaptées mais dopées par l’autorité et les moyens de l’Etat, a eu pour conséquence la mainmise totale des tribus sur tous les leviers de commande et toutes les ressources. Or, la tribu et l’organisation tribale sont organiquement liées à l’injuste stratification sociale. La pratique qui en découle – communément appelée tribalisme – marginalise machinalement tous ceux qui se trouvent être mal nés et donc promis au bas de la pyramide de cette républiquette tribale qui ne dit pas son nom. Cette réalité amère a genéré des déséquilibres évidents dans le fonctionnement des structures sociales. Les victimes de cette grande pagaille ne sont autres que la majeure partie de la population, les Haratine – prémiers visés par cette alliance Etat-Tribus – et qui font face en particulier à la privation et divers autres types d’exclusion dont le plus saillant est leur absence presque totale de la conduite des affaires publiques.
A titre d’exemple, l’une des plus grandes moughata’a de cette région – Barkéol, la capitale du triangle de la pauvreté, dont la population avoisine les 100 000 habitants, n’a eu aucun candidat au baccalauréat l’année dernière ; et l’incident de Daghveg qui s’est produit dans la même province, il y a de cela un an, demeure jusqu’à présent sans solution. Ledit incident symbolise désormais l’esclavage foncier procédant de la logique tribale dominante, laquelle est de mèche avec les milieux officiels…
Suite à ce constat qui ne représente qu’une goutte d’eau dans l’océan des pratiques ségrégationnistes, uniformémnt répandues et toutes plus abominables les unes que les autres, le MANIFESTE (AL MITHAGH) attire l’attention de l’opinion publique nationale et des autorités étatiques responsables, sur ce qui suit :
1 – Après que la Mauritanie ait été classée première nation esclavagiste du monde, nous ne voulons pas que notre pays ou que le système de gouvernement de notre pays soit mis au ban des nations et taxé de pratiques indignes et honnies de par le monde ; pratiques qui ont été expérimentées et abhorrées par tous les peuples de la planète ;
2 – Nous faisons porter, au pouvoir en place, la responsabilité pleine et entière de l’approfondissement du clivage entre les composantes de la société mauritanienne et la détérioration sans précédents du climat social qui s’en est suivie. Le parti pris flagrant en faveur des forces retrogrades, la déchirure sans cesse grandissante du tissu social, l’indifférence par rapport au sort reservé aux couches les plus défavorisées et aux pauvres en général, la partialité dans la répartition des ressources sont autant de faits concrets témoignant d’une mauvaise foi évidente ;
3 – Nous appelons tous les mauritaniens jaloux de l’avenir de leur pays, à un Sursaut National, porté par un grand consensus social et politique, pour faire régner la justice et l’équité afin de refonder la République en rebâtissant ensemble un projet fédérateur pour le progrès, le développement, la cohésion nationale, la justice et l’égalité des chances pour tous.
Nouakchott, le 29 Décembre 2017.
LE MANIFESTE
Pour les droits politiques, économiques et sociaux des Haratine au sein d’une Mauritanie unie, égalitaire et réconciliée avec elle-même