Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Monthly Archives: April 2017

Réponse à Mohamed Saleck Ould Beheite /Par Mohamed Yehdih Ould Breideleil

altCher frère,

J’ai pris connaissance avec un certain retard de la lettre par laquelle vous m’interpelez, dans les colonnes du journal le Calame. Je comprends qu’il a été laborieux pour vous de mettre la main sur ma boite postale et que vous soyez obligé de donner la primeur d’une lettre qui m’est adressée aux lecteurs du Calame. Je n’en suis pas offusqué et j’apprécie d’ailleurs le professionnalisme de ce journal, bien que je ne le lise qu’avec une régularité douteuse.

Ce n’est tout de même pas le Calame qui fixe l’Ordre du Jour. En revanche, j’écoute avec assiduité Radio-Mauritanie. Je présume d’ailleurs que si vous aviez eu la prévenance de mettre cette lettre entre les mains de mon ami Abdallahi o. Hormetalla, j’en aurais eu la primeur et elle serait parvenue avec moins de paresse.

Mais peu importe, l’expéditeur est tout de même maître du mode d’acheminement de son courrier, ça ne minore en rien la valeur des idées exposées et la ferveur et la sincérité des sentiments exprimés. Je me rappelle que j’ai dû moi-même, il y a 33 ans, alors que j’étais en séjour à Tichitt, confier une lettre à la caravane de sel (l’amersal) reliant Aïoun à la cité historique ensevelie, au pied du Dhar, dans les sables de la Tamokrarett, pour donner mes nouvelles à des compagnons qui séjournaient, eux, dans la capitale du Hodh El Gharbi.

La lettre est parvenue à ses destinataires qui purgeaient une peine de travaux forcés de 12 ans, pour appartenance à un ‘’mouvement idéologique’’. J’ai même reçu la réponse, par le même canal. La lettre a eu la vie longue, parce que les gens d’Aïoun se sont arrangés, je ne sais au prix de quelles acrobaties, pour la réexpédier vers leurs camarades de Boumdeid et Kaédi. Seuls y ont échappé ceux qui étaient à Aoujeft et Ouadane.

J’avais joint à ma lettre un cadeau constitué de dattes de Tichitt et de viande sèche qui apparaît maintenant insignifiant mais qui était alors aussi précieux que l’or. C’était la période, précisément, où le scorbut sévissait, abattait les plus fragiles et menaçait, avant tout, tous les prisonniers en Mauritanie. Je fus secouru en même temps que la population de la cité historique pour laquelle j’ai lutté, en Octobre 1978, lors de l’Assemblée Générale de l’UNESCO, pour qu’elle soit inscrite au patrimoine mondial de l’humanité. Ce qui fut alors fait au cours de cette Assemblée, en même temps que les autres villes de même classe. Mon ordinaire, lui, fut amélioré. Non, non– n’en pensez rien– je n’ai pas commencé à nager dans l’abondance. Il y a eu une farine dans des petits sachets pour faire des potages et quelques biscuits vitaminés, le tout don du Croissant rouge.

Le fixe quotidien, le casuel, qui est imparti à ma catégorie, les grands criminels,  était de 40 ouguiyas– les prisonniers politiques avaient, paraît-il, deux cents ouguiyas. Ceux qui m’hébergeaient arrivaient tout de même à me fournir deux repas par jour : un à midi : du riz aux haricots et un le soir : du couscous de blé américain assaisonné uniquement – mais copieusement – de sel. Voilà pour la qualité. Qui se plaindrait pour la quantité ? Un jour, le cuisinier, profitant de l’absence momentanée des gardes, est venu me dire, sous le sceau de la confidence, qu’il connaît des gens qui vont égorger un coq et que, si j’ai de l’argent, il peut s’arranger pour m’en obtenir un quart ou même une moitié. J’ai naturellement sauté sur l’occasion, bien que j’apprécie modérément le poulet. A l’époque, je n’étais plus étonné que la pauvreté conduise à partager un coq en quatre, depuis que j’ai rencontré en 1979 Adnan Abou Aouda, ministre de l’intérieur de Jordanie, qui m’a raconté qu’à la fin des années 1950, alors qu’il était enseignant dans un village du golfe –avant que le pétrole ne le submerge– il ne pouvait trouver à acheter comme viande qu’un quart de poulet et encore, me dit-il, c’était la croix et la bannière.

Dans le contexte où je me trouvais, terrorisé par le scorbut et tenaillé par la faim, les quelques produits alimentaires dérisoires dont je me suis privé et que j’ai expédiés à mes amis me donnaient le sentiment d’avoir accompli un acte d’abnégation proche de la générosité de Katow, le révolutionnaire qu’évoque le grand écrivain français, André Malraux qui fut ministre des Affaires culturelles du général de Gaulle pendant dix ans.

Dans sa jeunesse, Malraux était révolutionnaire et débarquait partout où les peuples combattent l’ordre injuste. Avant de combattre le fascisme de Franco au cours de la Guerre civile d’Espagne, il a d’abord été en Indochine et en Chine, du côté de la Révolution. C’est ainsi qu’il rapporte que lorsque l’insurrection de Shanghaï de 1927 a été vaincue par Tchang Kai Chek, appuyé par les Occidentaux, les révolutionnaires capturés étaient trop nombreux pour être tous fusillés. On résolut de les brûler dans les chaudières des trains. Le révolutionnaire Katow attendant, avec des dizaines d’autres, son tour avait pour voisins des jeunes qui étaient épouvantés par la perspective d’être brûlés vifs. Vieux révolutionnaire aguerri, il avait sur lui une capsule de cyanure pour se suicider, en cas de nécessité. Bouleversé par l’état d’esprit de ses codétenus, il décida de partager le cyanure entre eux et d’affronter lui-même le feu… C’est le sommet de la générosité et de l’abnégation.

Cher frère,

Je sais que ce que je dis n’est pas ce que vous attendez et n’est peut-être pas ce que vous voulez. Mais il y a mieux que ceci et cela et comme beaucoup d’entre nous vous ne savez pas l’exprimer. Je vais vous le rappeler: C’est ce qu’il y a dans votre conscience d’homme libre, cette lumière ensevelie sous les gravats du quotidien et du contingent, du futile et de l’inutile. C’est cela qu’il faut tenter de déterrer et qui vaille la peine. Cette lumière abhorre le mal et le faux, et adore le bien et le vrai.

Je vous vois comme un lanceur d’alertes dont la sensibilité humaine ne s’est pas éteinte. En cette qualité, je perçois pour vous un filon – non lucratif – à exploiter. Cherchez vos semblables, faites une initiative–une Moubadara, pour mieux dire –demandez à tous, puissants au non, de ne pas blesser moralement, 40 ans après, ou 50 ans, je ne sais, les malheureux dont nous parlions tantôt et leurs semblables. Obtenez pour eux une trêve sur leur passé, en attendant d’y voir clair. Ce qu’il a d’honorable et de généreux doit être tu en compensation de ce qu’il a d’insupportable. Appliquez pour eux l’omerta. Que leur “péché” personnel d’antan se transforme en trésor de tous, en attendant que les historiens se penchent sérieusement sur ces pages d’histoire.

Certains acteurs de cette histoire ont quitté ce monde et je pense que c’était sans regret. Ce monde leur paraissait cruel, inhumain et sans signification. Mais nous devons faire un acte moral pour leur mémoire et pour apaiser l’amertume de leurs enfants. L’organisateur et le meneur de la grève des travailleurs de la Miferma qui a paralysé l’entreprise coloniale, en 1971, pendant deux mois m’a téléphoné il y a 4 ou 5 jours. Consultez Jeune Afrique d’Octobre ou Novembre 1971. Il disait que c’était la plus longue grève dans les anciennes colonies françaises, au sud du Sahara, depuis les Indépendances. Pensez-vous qu’il puisse être injurié dans ce passé? Pour ma part, je le vois nimbé  d’une auréole de gloire. Il n’y a pas de gloire sans souffrance préalable. Je me rappelle, comme si c’était hier, du jour où il a été chargé d’aller à Zouérate reprendre le flambeau tombé en mai 1968, des mains des grévistes fauchés par les mitraillettes pour l’intérêt et les beaux yeux des actionnaires de Miferma et de leur financier, le baron Guy de Rotschild. Vous ignorez peut-être que le baron  Guy de Rotschild a été décoré dans ces années-là de l’ordre du Mérite National Mauritanien. Votre Moubadara n’aura rien de plus urgent, je pense, que de récupérer cette distinction et de la remettre au citoyen mauritanien qui était venu de Zouérate menotté, en même temps que 220 ouvriers licenciés et étiquetés baathistes. Vous voulez savoir le nom de ce gréviste ? Je crains de lui rendre un mauvais service. Je doute qu’il veuille encore se faire remarquer, tant que sa médaille est encore dans les effets de Monsieur de Rotschild. C’est le même torturé de Zouérate qui m’a informé, la semaine passée, que le vieux Mohamed El Hacen o. Loud, la figure emblématique de la grève des Travailleurs de SOMIMA (des intérêts Sud-Africains blancs), de 1971 aussi, s’est éteint, à Nouakchott, après avoir été évacué d’Akjoujt. Mohamed El Hacen avait été, lui aussi, licencié sans droit en 1971, en même temps que deux dizaines de baathistes. La misère les a broyés pendant des années, en même temps que les 220 de Zouérate. Les autorités veillaient à ce qu’ils ne trouvent jamais d’employeurs. C’est seulement après 1978 qu’ils ont pu espérer une réinsertion.

Mohamed El Hacen, qui vient de nous quitter pour l’éternité, était sur le plan moral et politique un cas rare. C’était la rigueur morale et l’honnêteté intellectuelle personnifiées. Il avait mis fin à toute activité politique depuis l’instauration de la démocratie en 1991. Il considérait que la Mauritanie devant la démocratie ressemblait à une poule qui avait trouvé un couteau. Il n’estimait pas pouvoir militer dans un parti qui n’avait pas d’idéologie, ni de se mêler à des organisations dont les principes étaient fumeux. Jamais, il n’a mis les pieds dans un meeting ou une quelconque réunion depuis 25 ans, depuis que l’organisation du Baath local s’est dissoute. Tout sauf la compromission. On ne se voyait plus que très épisodiquement. L’idéologie s’est transfigurée, il ne restait plus que des reflexes, des souvenirs communs de moment d’anxiété, de peurs et d’espoir, de la solidarité indéfectible bâtie autour d’une cause commune qui ne concernait aucun en particulier, mais tous les misérables et les victimes de l’injustice.

 Il y a des milliers de gens comme le regretté Mohamed El Hacen dont la mémoire, ou les sentiments ou les enfants doivent être respectés. C’est le cas de Matalla et Belkheir, de vieux dockers, qui nous ont quittés eux aussi. Leurs fils sont devenus dockers. Ces vieux dockers se sont engagés dans le mouvement où je militais au début des années 1970. Ils étaient déjà à un âge sûr et ce genre de gens ne s’engage pas facilement, mais pour la première fois de leur vie ils ont rencontré des jeunes–”instruits”, disent-ils –qui partageaient leurs préoccupations intérieures et leurs sentiments enfouis. Plus, ils leur révélaient un monde d’espoir, un monde insoupçonné et merveilleux: les promesses de la Révolution, toute révolution qui vise à rendre la dignité aux opprimés. La sincérité éclatante de ces jeunes avait gagné les cœurs de ces hommes mûrs, courbés et ridés par le travail manuel pénible, la misère continuelle et l’injustice de l’Etat, à telle enseigne que tout ce qui sortait des bouches des uns allait droit dans les cœurs des autres. L’idéologie et les slogans du mouvement ont commencé à être petit à petit leur langage quotidien et, finalement, ils se sont identifiés à ce mouvement. Désormais, c’était leur tribu, une tribu qu’on cache mais pour laquelle on est prêt à mourir.

Lorsqu’intervint la rafle mémorable des baathistes de mars 1982 –400 personnes environ –un groupe d’une douzaine de ces dockers en faisait partie. Comme tout le monde, ils étaient au 100 m2 du Génie militaire. Le jour ils sont enfermés dans des cellules et l’alimentation est distillée au compte-goutte, y compris l’eau. On buvait une fois par 24h et les repas sont plus espacés. Le soir, on torturait ces hommes pour connaitre les membres de leur cellule et le responsable de celle-ci. En vérité, on n’attendait rien d’essentiel de ces interrogatoires de vieux Haratine–nous, on disait, à l’époque, les Arabes foncés–illettrés ou en cours d’alphabétisation clandestine. Ce que voulait la police c’était de les démoraliser ou, mieux, de les amener à se renier. Après quelques semaines, ils furent libérés à l’exception de deux ou trois. Aucun des objectifs visés n’a été atteint.

C’est sous l’actuelle République que j’ai revu pour la dernière fois les deux monstres historiques évoqués plus haut.

L’un ne marchait plus qu’appuyé sur une canne, l’autre a perdu la vue et ne sort plus que tenant la main de son plus jeune fils. Dans cette situation et à cet âge, ils me sont apparus comme les “Dormants de la Caverne”. Moi-même j’ai complètement changé, sans m’en rendre compte, mais eux avaient encore à la bouche les slogans de l’extrémisme de gauche du 6ème congrès inter- arabe du parti Baath, tenu á Damas, en 1963, et dont la vedette a été Ali Saleh Saadi, le secrétaire général du commandement régional irakien, le prédécesseur d’Ahmed Hassan Al Bakr.

Ces slogans, espèces de psalmodies sacrées, avaient pour eux une fonction talismanique ou rédemptrice qui apportait une sensation intérieure bienfaisante pour l’esprit et le cœur, sinon pour le corps, á en juger par l’étincelle qui s’allumait et éclairait ces visages éteints.

Ils se sont rappelés le soir où par une nuit noire et froide ils ont été jetés, les yeux bandés –pour ajouter á leur épouvante– dans des cellules au sol nu et glacé. Je me suis rappelé, moi aussi, l’arrivée de ces nouveaux détenus qui ne savaient pas répondre par l’alphabet morse des prisons. Les éléments, qui avaient un certain rang dans la hiérarchie de l’organisation, communiquaient entre eux en frappant sur la paroi de la cellule contiguë avec un objet dur, et l’occupant de celle-ci transmettait au suivant.

Quelle réaction peut-on avoir face à ces hommes, dans cet état, 30 ans après ?

Je vais vous révéler en tout cas la mienne, puisque vous persistez, depuis un certain temps déjà, à renvoyer vers moi le trop-plein de votre cœur. J’ai simplement senti deux gouttes chaudes couler sur mes joues et lorsque j’ai voulu souhaiter la bienvenue à ces visiteurs, j’avais dans la gorge une arête.

    Cher frère,

Je dois ajouter que toute évocation, même sommaire, de cette période ancienne qui ne rappellerait pas le rôle et les sacrifices de toutes sortes des gens du MND est une falsification. Ces gens ont tout sacrifié –il n’est pas nécessaire d’être d’accord avec eux pour le dire –en faveur des opprimés, des démunis, des travailleurs, des esclaves. Que cette vérité soit aujourd’hui oubliée, qu’il soit de mauvais ton de la rappeler, n’enlève rien au fait qu’elle est inscrite dans l’histoire de manière plus durable encore que ce qui est gravé dans le marbre et la pierre.

Venons-en maintenant aux sacrifices de ces “mouvements idéologiques” pour le pays.

Je me demande si vous vous êtes posé une fois la question: quelle est le plus grand danger auquel un pays peut faire face ? Je vous le rappelle: c’est la guerre. Quelle est la plus grave épreuve à laquelle la Mauritanie ait fait face depuis 1960 ? Il faut la rappeler encore: C’est la guerre du Sahara.

Bien que cette guerre signifiait la fin de la Mauritanie, très peu de gens se sont opposés à son déclenchement. L’aura du régime d’alors, la force de la mobilisation, l’encadrement de la population par le parti unique et sa milice étaient tels qu’il n’était pas facile de se désigner á la vindicte populaire et au courroux d’une autorité sans partage. L’hystérie généralisée qui a salué la guerre a découragé toute velléité d’opposition.

C’est pourtant dans ces conditions que les Baathiste et le MND – qui allaient s’allier pour six ans – ont dit non à la fin certaine de la Mauritanie. Je me rappelle des termes précis que nous avions dits aux responsables de l’époque: “une alliance avec le Maroc signifie que nous avons mis un nœud coulant autour du cou de la Mauritanie et donné l’autre bout à celui qui court deux fois plus vite que nous”. Immédiatement quelques Baathistes ont perdu leur gagne-pain. Je crois que les gens du MND n’avaient rien à perdre.

Un an après, ce qui était inévitable est arrivé. Il s’est avéré indispensable que les troupes marocaines débarquent à Bir Mogrein, à Zouérate, à Atar, à Akjoujt, à Nouadhibou. Dès les derniers mois de l’année 1977, les troupes marocaines en Mauritanie étaient estimées à 12000 hommes, avec un armement bien différent du nôtre. L’économie, elle, était par terre. Le fondateur et le Directeur Général de la SNIM, Ismaël o. Amar, criait dans le désert : “arrêtez les dégâts”. L’hystérie du départ a fait place au désarroi. On ne savait plus à quel saint se vouer.

C’est à la même époque, à la fin de l’année 1977, que le président Senghor, dans une interview à “Jeune Afrique”, levait le voile sur les tractations en cours à propos d’un éventuel partage de la Mauritanie. Entre qui ? C’est ce qui n’est pas mystérieux….

C’est à partir de ce moment que les Baathistes ont pris conscience de la fragilité de la Mauritanie et c’est ce qui expliquera, plus tard –il n’est pas encore temps de revenir sur ces péripéties –leur refus entêté de toute aventure, bien que les occasions tentantes ne leur ont pas marqué.

Ils se sont braqués sur cette faiblesse qu’ils ont découverte, cette “fragilité de la Mauritanie”, devenue un leitmotiv, au point d’en être obnubilés. C’est ce qui expliquera, toujours, leur difficulté à décrocher avec tout régime en place, fut-il néfaste pour eux-mêmes. Même en 1981-82, ils ont tergiversé avant d’engager la bagarre avec Haïdalla, de crainte qu’une mauvaise situation ne se transforme en catastrophe pour le pays. Memed (Ould Ahmed, un des leaders du parti Baath mauritanien, NDLR) continuait, pratiquement au moment où la police allait s’emparer de son poignet, à prêcher la bonne parole, à dire ‘’assurez-vous que vous ne commettez pas un péché à l’égard de cette créature de Dieu, assurez-vous au moins qu’il ne sera pas remplacé par pire que lui’’. Les autres lui répondaient : ‘’il n’y a pas pire que lui’’. Si Haïdalla avait fait les concessions nécessaires pour sauver sa peau et celle de son régime, les choses se seraient, sans doute, passées autrement. Lorsque le vote est intervenu, à notre niveau, j’étais le seul à voter avec Memed. Les jeux étaient faits.

Leur ligne de conduite, toujours, est d’éviter –ce qui n’est pas facile en Mauritanie, vous le savez –l’exaltation, l’emballement, d’éviter qu’un incident ne gouverne la politique et, au contraire, cherchent que la politique gouverne les événements. Ils supporteront un partenaire qui leur donne quotidiennement de la corne dans le ventre, mais pas un ami avenant dont les méthodes et la politique dissoudront la Mauritanie.

Ces ‘’mouvements idéologiques’’ qui ont défrayé la chronique dans le passé n’ont pratiquement plus rien de leur idéologie d’origine. Les ombres du MND dans leur aggiornamento, leur adaptation  au temps, ont tout réduit à la défense de l’unité nationale, selon leur compréhension.

 Les résidus Baathistes tiennent beaucoup – cela va sans dire – à la place de la langue arabe, mais on ne sait par quel miracle de la transfiguration, ils en sont venus, pour définir une position juste, que le curseur indique :’’préservation de l’entité mauritanienne’’.

Il est vrai que depuis quelques temps, certaines analyses tendent à dépasser ce blocage. D’aucuns les considèrent comme extravagantes, d’autres y voient, au contraire, la rigueur objective d’une vision pointue de la réalité, sans concession aucune à la subjectivité. Cette nouvelle approche rappelle que l’Etat est un moyen et la société une fin et qu’on devrait éviter, pour toute vision juste de long terme, l’amalgame entre la fin et le moyen et a fortiori la substitution de celui-ci à celle-là. Cette analyse ajoute – ce qui reste à vérifier objectivement sans affirmation gratuite – que depuis que l’Etat existe, c’est-à-dire depuis près de 60 ans, son hypertrophie s’est accompagnée de l’hypotrophie de la Société ou, plus grave, s’est opérée au détriment de celle-ci. Il n’est pas étonnant, dans ces conditions que les contre-pouvoirs soient inexistants et qu’il soit si simple de prendre une décision – comme s’il s’agit d’une affaire familiale – d’entrer en guerre.

Les contre-pouvoirs institutionnels, dans les pays sous-développés, ne sont rien, seuls les contre-pouvoirs naturels, secrétés par la société constituent une réalité.

   A la vérité, tout ce qui fait la fierté des générations passées et présentes, dans le Grand Sahara de l’ouest, ne comporte pas d’Etat. La Société n’a pas souvenir de l’Etat Sanhaja avec Tiloutan, Tarjutt, TalakaKine, etc., vers les 7e-9eSiècles.

C’est vrai, nos grands hommes appelaient l’Etat de leurs vœux et son absence les déprimait. L’un des rares hommes dont on peut dire, sans hésiter, c’est un savant, Cheikh Sidiya, parure de son temps, en pleurait pratiquement. J’en serais malheureux, si vous pensiez que Cheikh Sidiya est un simple maître de Mahadra, ou un simple chef de confrérie soufie. Cheikh Sidiya, par son savoir et sa conscience politique et historique était de la trempe des fondateurs d’empires, mais il était tombé au milieu d’une société déjà désorientée et son âge – il avait terminé ses études seulement à l’âge de 58 ans – sa fierté et sa sainteté l’empêchaient d’insister.

Si on avait enseigné la vie de Cheikh Sidiya aux écoliers, le spectre de la délinquance se serait infiniment éloigné.

Cheikh Sidiya était, de surcroit, le père et le précurseur de notre Résistance. Ce n’est pas le lieu de dire comment. Apprenons notre Histoire.

Cher frère,

Venons-en à d’autres aspects de votre lettre.

Vous semblez tenir pour des informations des rumeurs colportées par l’Internet, c’est-à-dire par la Rue. Je vous rassure, vous êtes comme tous les Mauritaniens, et il semble qu’il ne faut excepter personne. On s’emporte, on s’invective, on s’empoigne sur la base d’une information non confirmée.

Les précautions n’ont jamais semblé aussi indispensables pour s’informer que depuis que les lecteurs se sont transformés en journalistes anonymes. L’information à travers l’Internet n’est pas fiable. C’est comme si vous voulez prendre connaissance de la pensée de Karl Marx au cours d’un concert géant de Reggae.

Le journalisme était une profession régie par une déontologie rigoureuse, aussi impérative dans l’esprit des professionnels qu’une loi pénale. La loi elle-même achevait par un cordon sanitaire, un arsenal juridique, de protéger les individus, les sociétés et les Etats contre ses dérives, dont la moindre ne serait pas le risque de guerre civile ou de guerre entre Etats. Il a suffi d’une simple déformation d’une information pour qu’éclate une guerre entre l’Allemagne et la France (Dépêche d’Ems).

Il n’est pas dans mes habitudes de rectifier ou de démentir des informations erronées ou fausses colportées par l’Internet ou qui que ce soit d’autre, mais, pour une fois, je voudrais déroger à la règle. A titre d’exemple, vous me dites :’’ votre’’ compte Facebook. Mais je n’ai pas de compte Facebook. C’est un faux. Je m’empresse d’ajouter que ce n’est pas un drame. Quand on a été habitué au fouet et à la cravache, on ne se plaint pas d’une indélicatesse.

L’idée d’avoir une page de cette espèce ne m’a jamais effleuré l’esprit. A mon sens, pour ouvrir une telle fenêtre dans le plafond de sa chambre à coucher, il faut ou être quelqu’un qui estime nécessaire de s’adresser au public quotidiennement et qui craint que ses idées ne viennent trop tard sur la place publique ou alors être un jeune pressé qui se cherche encore et qui joue des coudes pour faire irruption sur la scène de la célébrité et, dare-dare, rejoindre le bal masqué de la confusion.

Vous voyez, cher frère, je cherche dans tous les azimuts où se situe le point nodal de vos préoccupations, pour éviter une réponse exhaustive fastidieuse qui ne s’occuperait que du fond. Ibn Arabi, le grand philosophe du 13e siècle, dont le surnom de Cheikh Al Akbar n’est pas usurpé, disait que celui qui contemple les choses à la fois dans leur principe et dans leur forme obtiendra la connaissance complète.

Cher frère,

Votre haut-le corps devant la situation actuelle, je le comprends, mais vous vous trompez si vous pensez que je suis serein, dans le sens d’indifférent ou inconscient. Chacun à sa façon qui tient à l’éducation, à l’habitude, à l’âge – l’âge n’est pas une collection d’années mais une accumulation de problèmes et de difficultés traversés.

Dans ma jeunesse, l’un de ceux qui m’ont élevé, chaque fois qu’il me voyait en proie à l’emportement et à la colère m’adressait sur le ton de l’indifférence froide cette apostrophe : ’’il faut verser le sable dans son pantalon’’. Avec le temps, je n’ai plus su réagir avec promptitude. 

Comme vous êtes un chef, je ne vous adresserais pas le conseil obscur précédent, mais un autre. Vous êtes, en effet, un chef. Un vrai chef, c’est celui qui, sans que personne ne l’en charge, prend sur lui les problèmes des autres, c’est-à-dire de la Société. Les chefs ad hoc, provisoires, pour une mission déterminée sont des ‘’responsables’’. C’est autre chose.

  En tant que chef, dis-je, investi par sa propre conscience, je vous rappellerais plutôt deux choses. D’abord la consigne Ashanti, l’ancien Royaume de l’actuel Ghana, destinée aux princes: ‘’ Doucement ! Doucement ! Un chef doit marcher doucement !’’ La seconde est un dicton Chinois :’’un faux pas se paie de regrets éternels’’, et le proverbe arabe ajoute : ‘’l’erreur est la provision de celui qui se hâte’’ !

Votre exigence rigoureuse – si je comprends bien – s’accommode mal de l’incohérence et des solutions de pis-aller. Mais n’oubliez pas que vous êtes dans une société de fourmis. Et je ne me réfère pas ici à notre récit mythique, aux temps premiers, lorsque tout se mettait en place. La fourmi, selon ce récit génésiaque avait volé la nourriture des orphelins. Le bon Dieu, pour la punir, a serré son ventre, de telle sorte que son corps se réduise à une tête et un arrière-train.

Maudite, elle a été condamnée à errer, perpétuellement, à la recherche de nourriture, à l’emmagasiner, et, dit-on, à ne jamais pouvoir en user, faute de ventre.

Ce qui est à propos, c’est ce que nous disent depuis peu les spécialistes des sciences naturelles. Nous croyions jusqu’ici que la société des fourmis était industrieuse et disciplinée. Or, non. Les entomologistes ont découvert qu’un tiers seulement de la fourmilière travaille. Un tiers ne fait rien – vous nous retrouvez – et un autre tiers, vous nous reconnaitrez davantage, sabote ce que le premier tiers réalise.

Dans une société pareille, vous devez garder vos nerfs.

Pour ne rien arranger, Cheikh Sidiya rapporte quelque part un dit du Prophète qui énonce qu’ ‘’il viendra un temps où les plus heureux des hommes seront des coquins fils de coquins’’.

Je vous laisse juge de la distance qui nous sépare de ce temps….

Le moment est venu, je crois, de terminer cet accusé de réception, je suis conscient d’abuser de votre patience. Je vous écrirais plus tard, peut-être, si vous n’êtes pas apaisé entre temps.

Je n’ai pas de remède à ce qui vous préoccupe et agite votre esprit, c’est-à-dire, probablement, tout ce qui porte le caractère de l’inconséquence.

L’essentiel, en toute circonstance, pour l’individu, c’est de ne pas se perdre sous le rapport du devoir. Pour le pays, la chose est plus simple, – ce qui ne veut pas dire plus facile –  depuis que nous savons que la sagesse consiste à donner à chaque chose la place qui lui revient.

Fraternellement vôtre.

Mohamed yehdih o. Breideleil

le calame

Les sites de mémoire de Djowol, benjamine des villes anciennes de Mauritanie

Les sites de mémoire de Djowol, benjamine des villes anciennes de MauritanieLe Quotidien de Nouakchott Djowol la rebelle et benjamine des villes anciennes de Mauritanie.

Tu es Benjamine de par ta date de reconnaissance (2015) par l’état Mauritanien comme ville ancienne de Mauritanie. Tu aurais dû l’être depuis par la richesse de ton histoire, la pluralité et la diversité de tes sites de mémoire…

Le mérite de ta reconnaissance revient à Madame Hindou Mint Aïnina, à l’époque, Ministre de la Culture et de l’Artisanat qui s’est pleinement investie pour faire aboutir ce projet. Qu’elle trouve ici l’expression de notre admiration, pour son courage, son objectivité ainsi que notre profonde gratitude.

DJOWOL SAARE

Saaré était ton nom d’origine à l’époque de l’empire du Ghana. Depuis le 9ème siècle, ses habitants ont immigré vers le sud. Sur leur chemin ils fondèrent dans le département de Barkéol sur le Gorgol Noir un village qu’ils baptisèrent Djowol et qui existe encore, aujourd’hui. C’est par la suite qu’ils rejoignirent ton emplacement actuel situé à 18 km de Kaédi où ils t’appelèrent Djowol Yowi Loodé.

– Tu es Djowol Saaré Wadjoubé Ndeni

– Djowol Yowi Loodé

– Djowol Samaye Soudou Fowrou, Samaye Mbélou Haïré

– Samaye Sabboundou Gnakoké

– Hodé Djeeri, Loutti Djoogué Mayo

– Thiéné Thiagni Biri

– Djoogué Haïnoré

– Piyodji Ndaaré Thibé

– Lerani Djahodje

Djowol, Mo Mbégnou Ghana Samb Mariam Molo Borogo

Sounno et Margnadé

Ngada et Alkabéré

Takéré Libi Loodé Athia-Ni Doodido

Mbara Haïré, Mbara Mbêlou Haïré

Sounno Warani Wonebé Eless Mbélou Haïré.

Ces expressions en langue Pular exprimées sous forme de métaphore rappellent ton glorieux passé, la beauté de ton paysage ainsi que les chevauchées de ta belle cavalerie. Elles décrivent également la stratégie de combat qu’utilisaient tes braves fils pour te protéger et remporter les victoires contre les envahisseurs ennemis.

Ta jeunesse doit connaitre le rôle joué et le sacrifice consenti par nos ancêtres à travers certains de tes sites de mémoire tels que :

– Toulel Tabaldé

– Bilbassi

– Thourouyal

– Haïré Sounné

– Haïré Madjioubé

– Haïré Toodi ou Soudou Fowrou

– Makandiam et Hayordé

– Une ancienne forge découverte récemment (le 11 Septembre 2016) par Amadou Tijani Ba fils d’Ousmane Sadio à l’endroit nommé Mogo et Codé et qui n’a pas dit tous ses secrets.

– Koylel Mbara

– Koutou Tambirou

– Haïré Dammé

– Gaalé

– Silla Doré Khaaré (marigot qui porte le nom de Silla Doré)

– Ma Maro Goumba (le profond lac qui porte le nom de Ma Maro)

– Mama Sira Madi Khoolé (le Marigot qui porte le nom de Mama Sira Madi)

Ainsi que Haïré Youldé, ou Guidi Botonté, Haïré Tékéré et Demba Pathé ou Dempété

Toulel Tabaldé

Toulel Tabaldé est une vaste plaine située au sud ouest du village surplombant le champ de bataille du Bulbassi. Elle est limitée à l’est par Doundé Diawbé actuellement occupé par le village du Tinza à l’ouest par Koylel Mbara occupé par le jardin d’Eli Samba. C’était le lieu de rassemblement de tes braves troupes guerrières à l’annonce de l’attaque du village par les ennemis ou à la veille des grandes batailles. Elles répondaient ces troupes à l’appel du Tabaldé Djayndé, du chant guerrier Goumbala et aux Baoudi Alamari.

Bulbassi et Njarendi

Bulbassi est une immense étendue de sable blanc bordant la rive gauche du fleuve Sénégal. C’était un champ de bataille où il eut de nombreux affrontements sanglants. Parmi lesquels on notera en particulier la bataille de Bulbassi du redoutable guerrier Samba Gueladou Djegui.

Cette bataille fut tellement atroce et cruelle en causant de nombreuses victimes au point où l’historien pour la qualifier a prononcé la célèbre phrase suivante : Bulbassi, Bulbassi sable blanc devenu rouge du sang des héros.

Thourouyal ou Tidi Khassé

Thourouwal est situé à l’ouest du village sur la rive droite du fleuve Sénégal non loin de Haïré Dammé.

C’est l’endroit où a échoué par le passé un bateau à vapeur. Celui-ci avait heurté un gros rocher qui était au milieu du fleuve. Après cet accident le colon français a installé des repères pour les bateaux. C’est ainsi qu’à la place du rocher, il a été fixé un long poteau métallique à l’intérieur duquel on a placée une lampe pour guider les bateaux la nuit. Ce poteau, est tombé il y a quelques quatre ou cinq ans, et il n’a jamais été remplacé.

Thourouwal rappelle aussi la résistance héroïque que sept de tes fils ont opposée aux colons français pour arrêter le travail forcé imposé par ces derniers aux populations de la vallée du fleuve Sénégal.

Thourouwal est une grande barque que certains appellent Chaland. Elle servait de moyen de transport sur le fleuve Sénégal avant l’avènement des bateaux à vapeur. Cette barque chargée de marchandises pour se déplacer était tirée par sept jeunes gens recrutés au niveau de chaque village tout le long du fleuve. Ces jeunes marchaient sur les bords du fleuve de jours comme de nuits bravant tous les obstacles. Arrivé au niveau d’un village les premiers jeunes se reposaient et ils étaient remplacés par de nouvelles recrues. Il en était ainsi jusqu’à arrivée à destination. Cette corvée a été supprimée au niveau du village de Djowol.

En effet, les sept jeunes de Djowol retenus par les colons ont refusé de s’exécuter. Pour se faire, l’un d’entre eux Abdoul Dicko Dia cracha sur le drapeau français et les autres se joignirent à lui pour le brûler. Après ce geste des jeunes, le colon abatta Abdoul Dicko d’un coût de fusil et les autres s’enfuirent et se dispersèrent dans la grande forêt qui entourait à l’époque le village de Djowol. Parmi ces sept jeunes, qu’on appelle Thiopi Djowol, nous n’avons pu identifier que six d’entre eux.

Il s’agit de :

– Sedoum Wélé

– Abdoul Dicko Dia

– Bouna Amadou Waïga

– Samba Wantcha Wélé

– Abdoul Baboye Ba

– Oumar Demba Wele

Haïre sounne

Haïre sounné est la montagne qui surplombe les cimetières et qui fait face au nord à la montagne de Toodi plus connu sous le nom de Soudou Fowrou. C’est sur cette montagne que se plaçaient les sentinelles chargées de surveiller les mouvements des troupes ennemies qui voulaient s’attaquer au village.

Toodi ou Soudou Fowrou

C’est la montagne qui est située au nord et qui fait face à Haïré Sounné. Soudou Fowrou est une montagne qui possède une caverne. C’est dans cette caverne, que les chefs des troupes guerrières du village viennent se rencontrer et se préparer avant d’aller à Toulel Tabaldé. C’est cet endroit qui servait de cachette pour leurs fétiches. Toodi est devenu par la suite Soudou Fowrou du nom d’une hyène féroce. Cette hyène avait terrifié toute la sous région avant de venir se cacher dans cette caverne. Les guerriers Djowolois l’ont abattue. Avec l’avènement de l’islam, cet endroit est devenu la place de prière des grandes fêtes de Tabaski et de korité.

Haïré Madjoubé

C’est la montagne autour de laquelle les villages de Djowol et Gori (Soninké) ont fini par s’installer définitivement à leur retour de la rive gauche du fleuve. C’est sur cette montagne que les colons français voulaient construire un FORT. Mais c’est sans compter avec la détermination et le rejet de la politique française de colonisation des populations de la vallée du fleuve.

Lors que les français construisaient les murs de la fondation le jour, la nuit, les jeunes du village procédaient à leur destruction. Le lendemain matin il était raconté aux français que l’endroit est habité par de mauvais esprits qui n’acceptent pas la cohabitation dans ce lieu. Ainsi, le projet de construction du Fort de Djowol fut abandonné.

C’est l’occasion pour moi, de prendre le contrepied de la thèse qui voudrait faire croire que la création des villages du sud de la Mauritanie date de 1904 c’est une contre vérité historique. La vérité est que il existait dans cette région sahélienne, avant l’arrivée des français un grand banditisme et des crimes organisés. Il y avait surtout de fréquentes razzias pratiquées par des hordes berbères Maure sur les populations de la vallée. Pour protéger les personnes âgées, les femmes et les jeunes et pour des raisons de stratégie guerrière les responsables des villages déplacèrent ces populations pour les installer sur la rive gauche du fleuve Sénégal qui leur sert désormais de barrière.

Ceci est d’ailleurs confirmé par l’adage Pular suivant :

Marewo Romka, Ndé Worgo Hodha qui signifie littéralement : c’est par dépit que le nord a été abandonné au profit du sud.

Seuls les hommes valides étaient restés sur place pour en découdre avec ces brigands. Il y a lieu de rappeler pour ceux qui ne le savent pas, qu’à l’époque ces populations vivaient ensemble dans le royaume du Fouta qui couvrait les deux rives du fleuve. Il y avait également le Guidimakha et le Gadjaga situés au nord est et à l’est du Fouta. Ces deux contrées peuplées de Soninké étaient dirigées par des chefs guerriers Tounka Lémou. Le Royaume Wolof du Walo quant à lui était situé à l’ouest du Fouta. Il s’étendait sur les deux rives du fleuve Sénégal, de Tekane à Keur Macene. Le Walo était dirigé par de terribles guerriers Walo Bracks. Le Fouta était divisé en plusieurs provinces gouvernées chacune par un chef guerrier. Au nombre de ces provinces on peut citer le Damga, le Nguenar avec comme chef le célèbre et redoutable Farba Djowol, le Bossoya, le Yirlabé hebiyabé, le Law, le Halaybé, le Toro ainsi que le Dimatt.

C’est avec la colonisation française que ces entités ont été supprimées ou modifiées. Un nouveau découpage territorial fut établi avec de nouvelles frontières qui séparèrent les familles. Ce nouveau découpage a fait de certaines familles des sénégalaises d’autres des mauritaniennes et maliennes dont nous vivions aujourd’hui les conséquences dramatiques.

Plusieurs batailles entre les populations de la vallée et ces brigands maure mais qui n’ont été enregistrées que par la tradition orale, ceci bien avant l’arrivé des français. Cette situation continua jusqu’à la période coloniale. On citera entres autres batailles à titre d’exemple, la bataille mémorable que les Halaybés de la région de Boghé ont livrée contre l’émirat du Brakna de Sidi Eli. Cette bataille a eu lieu dans les années 1800 qui a été retenue par l’histoire écrite. C’est quand la France a mis fin à la pratique des grands brigands et que la paix est revenue les populations qui étaient déplacées sont revenues rejoindre leur cité sur la rive droite du fleuve. C’est peut être que c’est ce retour correspond à l’année 1904.

Haïré Dammé

Cette montagne a été un lieu d’affrontements sanglants entre les jeunes guerrier du village de djeol et les berbères maure pratiquant la razzia qui les avaient attaqués.

En souvenir de leur défaite sanglante ils ont nommé la montagne Deum qui signifie le sang en maure.

Les villageois ont repris le terme Deum en le déformant pour devenir Dammé.

Gaale

Gaalé est un ancien village qui a disparu. Il était situé au nord, non loin du village de Ngolo qui porte le nom de Ghahira.

Gaalé fut la capitale et le lieu de résidence du célèbre guerrier Konko Boumoussa qui a livré bataille contre Samba Gueledjo Djegui à Bilbassi.

Koutou Tambirou

Koutou tambirou chez les soninké et Koylel Mbara chez les pular étaient les endroits où se retrouvaient les jeunes de 9 à 10 ans pour subir la circoncision avec tout le cérémonial qui l’accompagnait, à l’époque.

J’invite au terme de cet article, les cadres, les élus de nos villages en particulier la jeunesse à identifier, recenser, valoriser afin de les sauvegarder, les sites de mémoire de nos anciennes cités. Une fois ce travail fait, nous investir pour qu’ils soient pris en charge par l’Etat, ce qui est peu probable dans l’état actuel de notre pays. A défaut de cette prise en charge par l’Etat, nous en occuper nous mêmes pour restaurer ces témoins de notre riche histoire qui a été totalement occultée et falsifiée.

Abdoulaye Oiga

Ancien DG de la CNSS, Mauritanie

cridem

Boydiel Ould Houmeid, président du parti El Wiam: «Si le président de la République ne peut pas recourir à l’article 38 pour poser certaines questions au peuple, à quoi cet article pourrait-il servir alors?»

altLe Calame : Vous étiez à la prestation télévisée du président de la République, le 22 mars. Vous, qui aviez émis des réserves sur le recours  au congrès pour passer les amendements constitutionnels, préconisés par l’accord du 20 octobre, avez-vous été convaincu par  l’argumentaire du président Aziz, qui, en dépit du rejet par le sénat  décide d’organiser une consultation populaire ? El Wiam battra-t-il campagne pour le oui ?

Boydiel Ould Houmeid : Avant de répondre à vos questions, je tiens à placer cette interview, que vous avez souhaitée depuis quelques mois, dans son véritable contexte. Notre entretien intervient à un moment où l’opinion mauritanienne est préoccupée par la situation politique dans le pays, suite au dialogue tenu au mois d’octobre 2016 et auquel une partie de l’opposition n’a pas jugé utile de participer, malgré tous les efforts déployés en ce sens par les parties participantes, aussi bien du côté de la majorité que dans le camp de l’opposition. Il s’agissait de tout mettre en œuvre pour que ce dialogue soit véritablement inclusif, offrant à chaque parti politique la possibilité d’y apporter sa contribution, afin que ses résultats soient consensuels pour permettre une avancée significative de notre pratique démocratique et produire des retombées positives sur la vie du citoyen mauritanien.

Je ne reviendrai pas sur la genèse de ce dialogue qui a abouti aux conclusions du 20 octobre 2016 qui devaient être soumises au gouvernement pour exécution. Parmi les aspects les plus importants figuraient la suppression du Sénat, émanation des collectivités locales, la question du drapeau et de l’Hymne national, etc. Cette première étape devait passer par la voie d’un référendum, conformément à la Déclaration que moi-même j’ai signée au nom de l’Opposition.

Pour revenir à votre question, je dois préciser que je n’avais pas émis réellement de réserve sur le recours au congrès en soi, puisqu’il s’agit d’une possibilité prévue par la législation pour permettre au président de la République de modifier la Constitution, tout comme le Référendum ; j’ai néanmoins rappelé que dans les conclusions auxquelles nous avons abouti et qui ont été signées par toutes les parties représentées au dialogue, y compris la majorité présidentielle, il est mentionné que les modifications envisagées devaient être soumises au peuple par voie référendaire, et non par le vote des deux chambres du Parlement réunies en congrès, comme ce fut le cas pour les conclusions du dialogue de 2011. A un certain moment, le Président de la République a été convaincu par certains de ses collaborateurs, puis par sa majorité parlementaire, de passer par le congrès, en insistant sur le fait que cette formule est moins coûteuse que celle du référendum ; cela nous le savions au départ, mais nous avions répliqué que la démocratie, c’est le pouvoir au peuple est non à ses représentants pour des questions si importantes, et il faut ajouter, en plus, que si la majorité tenait à ce choix, elle devait le reposer au niveau du Comité de suivi du dialogue. Par la suite, il a été décidé que dans les deux cas, le projet de loi devait être préalablement soumis aux deux chambres et obtenir une majorité de deux tiers au minimum avant d’envisager l’adoption des modifications constitutionnelles, par référendum ou en congrès. La suite, vous la connaissez, l’Assemblée nationale dont je suis membre, a adopté le texte à une très large majorité et le Sénat l’a rejeté majoritairement.

Donc, pour moi, il n’y a pas de confusion possible à ce sujet. Nos appréhensions à l’époque se situaient dans un cadre donné, celui défini par les articles 99, 100 et 101 pour la révision de la Constitution. Cette procédure-là est aujourd’hui dépassée et nous sommes en présence d’une autre procédure, celle de l’article 38 de la Constitution de 1991. Je vous rappelle au passage que le texte constitutionnel en question n’avait pas été promulgué par le président Mohamed Ould Abdel Aziz, mais par le président Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya. Ai-je été convaincu par l’argumentaire du Président ? Si l’objet de votre question est de savoir si nous sommes pour le recours à l’article 38 pour aller à la consultation populaire, ma réponse est oui. Certains de nos juristes et hommes politiques comparent cet article à l’article 11 de la Constitution française. Même si les deux articles n’ont pas été libellés de la même manière, du fait de nuances voulues par les rédacteurs de notre Constitution ou par les décideurs politiques de l’époque, il n’échappe à personne que les ressemblances entre les deux textes sont manifestes et que les rares différences entre certains articles sont voulues. Je me rappelle que le peuple mauritanien a adopté cette constitution à plus de 95%. Si le Président de la République ne peut pas recourir à l’article 38 pour poser certaines questions au peuple, à quoi cet article pourrait-il servir alors ?

Ceci dit, je n’étais pas venu à la prestation télévisée du président pour être convaincu, et j’avais déjà mes convictions. S’agissant de la future campagne pour la consultation référendaire, il est évident que le parti El Wiam fera campagne pour le oui.

– Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de servir de faire valoir, ou de caution au président Abdel Aziz qui fait appel à vous, chaque fois qu’il connaît des difficultés ?

Le président Aziz n’a pas besoin de moi comme faire valoir ou caution pour appliquer le programme politique sur la base duquel il a été élu par le peuple mauritanien. Il a son programme, j’ai le mien. Le groupe parlementaire de mon parti siège à la place réservée à l’Opposition ; nos positions ne sont tributaires ni des positions de la Majorité, ni des positions de l’Opposition ; nous avons notre propre ligne républicaine, responsable et démocratique.

 -Deux écoles s’opposent à propos de ce référendum. Ceux qui soutiennent la position du président, donc de l’utilisation de l’article 38 de la Constitution et ceux lui arguent de la primauté du spécifique (art. 99, 100, et 101) sur le général  (art 38). Qu’en pensez-vous ?

Par rapport à cette question, j’ai déjà fourni les éléments de réponse dans la première partie de cette interview, sans entrer dans cette polémique quant à la primauté du général ou du spécifique. En toute logique, l’ordre des articles doit traduire une préséance et un ordre d’importance, même si leur objet n’est pas le même, Dans ce cas l’article 38 précède, les articles 99, 100 et 101.

-Pour certains, le rejet par les sénateurs, des amendements constitutionnels  est  l’expression de la vivacité de notre démocratie, pour d’autres, en revanche, il s’agit là,  d’un  défi à l’endroit du pouvoir en place,  une protestation même contre les  critiques dont ont fait l’objet, le sénat et 33 de ses membres  de la part  des membres du gouvernement et de l’UPR. Qu’en pensez-vous ?

-Effectivement, le fait qu’une chambre parlementaire vote librement contre une proposition de loi déposée par le gouvernement est en soi un signe de bonne santé démocratique, si seulement les intéressés n’étaient pas concernés directement. Vous connaissez l’adage qui dit qu’on ne peut pas être « juge et partie ». Pour le reste, je pense qu’il s’agit d’une cuisine intérieure de l’UPR et je n’ai pas un avis à émettre là-dessus.

-Ne pensez-vous pas que le président de la République devrait faire comme son homologue béninois, Patrice Talon qui a retiré son texte sur les modifications  de la Constitution, rejeté par  les députés béninois ? En quoi, les conditions seraient-elles  différentes ?

En la matière, le copier n’est pas approprié. D’abord, les deux peuples ne réfléchissent pas et ne réagissent pas forcément de la même manière ; ensuite, les deux conjonctures ne sont pas comparables. Au Bénin, le parlement n’est pas bicaméral et les députés béninois ont refusé à l’unanimité d’examiner la proposition d’amendement. Ici, l’Assemblée nationale a examiné le texte et l’a adopté à plus de 80%. Le Sénat aussi l’a examiné et sa Commission des lois l’a adopté sans amendement, contrairement à la Commission des lois de l’Assemblée nationale qui lui a apporté deux amendements qui ont finalement été rejetés. Donc, les deux situations ne sont pas identiques et ne peuvent pas être traitées de façon similaire.

D’autres en sont venus à comparer nos sénateurs à ceux des Etats-Unis où il existe un Congrès à deux chambres (Chambre des Représentants et Sénat). Là encore, les deux situations ne se ressemblent pas, dans la mesure où une partie des élus républicains qui sont majoritaires au Congrès a fait clairement savoir à son groupe parlementaire qu’elle ne voterait pas la loi modifiant les dispositions de l’Obamacaire. Après de longues discussions, une minorité des récalcitrants a accepté de voter les modifications, mais leur majorité est restée sur ses positions, contraignant ainsi le président américain à retirer son projet de loi.

Par contre, nos sénateurs, eux, ont donné à leur parti, au gouvernement et au Président de la République, l’engagement de voter en faveur du projet de loi et ont majoritairement agi autrement. C’est leur choix et leur responsabilité.

-Le président de la République a laissé entendre qu’il  fera de la politique après son départ du pouvoir, en 2019, qu’il se battra même pour la modification de la Constitution qui, à son avis, comporte des imperfections. Est-ce à dire que notre constitution n’est pas totalement verrouillée  pour ce qui est  de la limitation du nombre de mandats, comme  certains le font croire – le recours à  l’article 38 serait une preuve?

-C’est son droit le plus absolu, en tant que citoyen, de faire la politique et de se battre pour ses convictions. Pour ce qui est de la Constitution, c’est un texte fondamental de la République qui doit être respecté par chaque citoyen en tant quel tel, mais qui reste sans doute perfectible. Quant au verrouillage de la Constitution, je pense qu’aucun président de la République ne cherchera à la déverrouiller, puisque le texte est clair quand il stipule « ni directement, ni indirectement ». Cela veut dire que lui-même n’en prendra pas l’initiative et si d’autres institutions la prennent, le président de la République doit s’abstenir d’en assurer la promulgation.

-Dans sa conférence de presse, le président a rejeté énergiquement l’offre dialogue, réitéré   par l’opposition (FNDU et RFD). Ne pensez-vous pas que,  face à  un référendum  qui va crisper davantage la situation politique, des échéances électorales en vue, le pays a besoin d’un minimum de consensus  autour de  ces  élections  pour éviter des boycotts, voire des contestations au lendemain desdits scrutins ? Allez-vous faire quelque chose dans ce sens ?

-Je pense que le président a raison. Moi, j’ai toujours soutenu qu’un pays ne peut pas se permettre d’organiser des dialogues en l’espace de quelques semaines ou quelques mois. C’est sûr qu’il y a certaines formes de dialogue qui doivent être permanentes entre la Majorité et l’Opposition pour résoudre des questions conjoncturelles, mais un dialogue national, tel qu’organisé en 2011 et en 2016, j’estime qu’il ne peut pas être envisagé à intervalles rapprochés. Donc, nos frères de l’Opposition radicale ont, encore une fois, raté le coche, mais ils pourront toujours le rattraper aux prochaines stations, la plus proche étant celle du référendum. C’est peut-être pour eux l’occasion de participer, en faisant campagne pour le non et s’ils l’emporteraient, nous serions les premiers à les applaudir, et ainsi, ils prendraient le train en marche et se positionneraient pour les futures échéances du dialogue national.

-Que pensez-vous de la réaction du président sur  les appels au dialogue, émis par les partenaires au développement  que sont l’UE et l’ONU?

-Mon point de vue est qu’il n’appartient pas aux partenaires au développement de nous dicter la manière dont nous devons diriger notre pays. Et s’il leur arrive de s’ingérer dans notre politique intérieure, nous devons tous, Majorité et Opposition confondues, leur opposer une fin de non recevoir.

-Le référendum sera organisé par  une CENI, largement critiquée par les acteurs politiques dont vous,  lors des dernières élections municipales et législatives. Qu’en pensez-vous ?

 Une CENI critiquée par qui ? En tout cas pas El Wiam. Nous sommes, avec les parties participantes au dialogue de 2011, à l’origine de la loi de 2012 qui a créé et qui régit la Commission électorale. Pour la première fois, nous avons écarté le Ministère de l’Intérieur des opérations électorales, du recensement à vocation électorale (RAVEL), des opérations de vote et même de la publication des résultats des scrutins. Nous avons mis en place une commission de sages de sept membres qui sont apolitiques, à la différence des CENI précédentes qui étaient, elles, composées de représentants de partis politiques et qui avaient tendance à se quereller en permanence pour défendre les positions de leurs formations politiques, au lieu de s’adonner au travail technique qui leur était confié.

Certes, des insuffisances ont été relevées lors des élections municipales où la CENI avait près de 1 500 listes électorales à gérer, des tâtonnements ont eu lieu et certains représentants des listes candidates n’ont pas eu de PV électoraux, mais pour les autres consultations électorales (législatives et présidentielle), il n’y a pas eu de problèmes significatifs. Le rôle du Comité de suivi du dialogue s’est limité à la mise en place du Comité des sages et là, comme vous pouvez le constater vous-même, ils n’ont aucun problème, ni moral, ni technique, ni intellectuel. Je leur conseille tout simplement, comme je l’ai toujours fait, de se conformer aux textes qui les régissent et qui stipulent clairement qu’en matière de recrutement, ils doivent respecter l’esprit du Code du travail, de la Convention collective et du Statut de la Fonction publique, c’est-à-dire faire détacher par l’Administration les fonctionnaires dont ils ont besoin, recruter les contractuels dont ils ont besoin dans le respect du Code du travail et de la Convention collective. Par le passé, ils ont recruté en majorité des retraités, alors que dans l’accord politique qui a présidé à leur désignation, la condition exigeant plus de 60 ans d’âge ne concernait que les sept sages.

-A en croire la presse, le député et  maire  de Rosso, Sidi Diarra, un grand cadre d’El Wiam  affiche ses ambitions pour la présidentielle de 2019. Vous en a-t-il parlé ? Quand pensez-vous ?

-Effectivement, il m’en a parlé à deux reprises et c’est normal d’être ambitieux. Jusqu’à ce jour, il est membre du parti El Wiam ; le jour où il décide de se présenter dans le cadre du parti, le parti en discutera et décidera ; s’il se présente en dehors du parti, nous lui souhaiterions bonne chance. Vous savez, l’autre soir, à la conférence de presse du président à laquelle vous aimez faire référence, deux présidents de partis politiques qui étaient auparavant membres de la direction de notre parti sont venus me saluer, en me manifestant leur respect et leur fierté d’avoir appartenu à El Wiam. Il s’agit de Saad Ould Louleid et Valla mint Mini. Ça fait toujours plaisir pour un chef de parti d’avoir réussi à créer chez certains cadres du pays l’envie de faire la politique et de l’exercer par le canal légal des partis politiques et non par d’autres voies illégales.

-Dans une récente tribune publiée par le site Cridem, M. Samba Thiam s’étonne du silence des  leaders Haratines sur la demande  d’officialisation des langues nationales Pulaar, Soninké, Ouolof, formulées par des associations  issues de ces communautés. Que lui répondez-vous ?

 Samba Thiam avec qui j’ai eu des entretiens très constructifs en marge du dialogue national et en qui j’ai trouvé un homme posé qui sait ce qu’il veut, qui a sa place dans l’espace politique national et dont je respecte l’opinion, même si nous ne sommes pas d’accord sur beaucoup de choses, je lui réponds que je ne suis pas un cadre haratine, je suis un cadre de la Mauritanie, je ne parle pas au nom des Haratines, mais au nom des Mauritaniens sans distinction

Ici je ne parle pas au nom des maures noirs ni des Tandgha, je parle au nom de la Mauritanie qui m’a formé, qui m’a fonctionnarisé et qui m’a permis d’occuper les plus hautes fonctions allant de contrôleur  d’Etat, Directeur Général des Impôts, Directeur de la SMCP, Directeur et fondateur de la CNAM, Ministre dans plusieurs départements : commerce, développement rural, pêches, Santé, Finances et Ministre Secrétaire Général à la Présidence de la République.

Par ailleurs, dans le Parti EL WIAM que je dirige actuellement vous trouvez tous les mauritaniens sans distinction aucune.

Au demeurant, je reste convaincu que dans l’intérêt de notre pays nous devons tous avoir comme objectif le renforcement de la nation mauritanienne encore embryonnaire et de ce fait ne jamais encourager le racisme, l’ethnisme le tribalisme, et l’entitisme qui sont nuisibles à la construction d’une Mauritanie forte et unie

De ma part pour des raisons de convictions personnelles, j’ai toujours combattu ces maux et je continuerai à les combattre tant que j’ai la tête sur les épaules. Maintenant, si vous voulez mon point de vue sur cette question des langues nationales, je ne peux la traiter en quelques mots parce qu’elle demande toute une interview à elle seule, mais pour lancer le débat, j’aurais préféré que la transcription de ces langues se passe en lettres arabes, comme du temps de nos aïeux. En effet, Elif, lamlam, hatongué, minpithiou sont une transcription en pulaar de ا ب ت etc. que seul un halpulaar peut comprendre ou quelqu’un qui les apprend. Les Ouolofs aussi que je connais très bien faisaient cette transcription et écrivaient des lettres entières en caractères arabes qu’un arabophone peut lire mais ne comprend pas s’il n’a pas appris l’alphabet en Ouolof. C’est une manière d’introduire le sujet en attendant le grand débat.

– Certains  cadres de ces communautés s’indignent de vous entendre défendre  le régime d’Ould Taya, auteur de leurs déportations  et  de massacres  de militaires négro-mauritaniens  dans les casernes, entre 1989 et 1991. Que leur répondez-vous ? Cela ne justifierait-il pas leur faible adhésion à El Wiam ?

 Comment pouvez-vous parler de faibles adhésions de Négro-africains à El Wiam, alors que nous avons deux  mairies au Guidimagha, dont la mairie de Ghabou qui est la commune la plus peuplée du Guidimagha avec 21 conseillers municipaux, au Gorgol, particulièrement à Mbout, où nous avons deux Mairies, en plus du fait que dans ces deux Wilaya notre parti occupe la 2ème position en nombre de conseillers municipaux. Au Trarza aussi, nous avons les mairies de Rosso, Keur Macène et N’Diago .

Pour les évènements dont vous parlez, ils datent des années 1989 et 1991. A l’époque, je n’étais pas encore politiquement lié à Maaouya, j’ai commencé à le soutenir lors de la création du PRDS en Août 1991. Lors des discussions autour des documents de base, certains ont voulu lier le parti aux évènements dont vous parlez, en laissant entendre que le parti était solidaire de tous les agissements du Comité Militaire depuis le 12 décembre 1984 ; j’ai dit que nous ne pouvons pas être responsables de tous ces actes et un seul m’avait soutenu à l’époque, c’était Aboubekrine Ould Ahmed. Un membre de l’Assemblée a répliqué que ceux qui ne veulent pas être responsables des agissements du Comité militaire depuis le 12/12 n’avaient pas leur place ici ; j’ai répondu que donc je n’ai pas ma place ici. Le document est parti à l’arbitrage du président Maaouya qui a demandé que ce passage soit enlevé du texte.

– Les partis de la CUPAD sont allés en rang dispersé  au dernier dialogue. Est-ce adire que cette coalition est morte de sa belle mort ?

 Il n’y a pas de belle mort, la mort est toujours regrettable pour une personne morale qui a des objectifs et des idéaux. Seulement, l’un des partis membres de la CUPAD n’a pas jugé nécessaire de participer au dialogue et c’est lui qui assurait la présidence tournante. Les deux autres partis membres de la Convention, l’APP et El Wiam, ont participé chacun en son nom, mais je dois souligner que nous avons toujours été d’accord sur les questions essentielles au niveau du Comité de suivi.

-Toujours au cours de sa prestation télévisée, le président de la République a dressé un tableau idyllique de la situation économique du pays. Partagez-vous son enthousiasme ?

– Je reconnais qu’il a réalisé beaucoup de choses dans le pays, mais nous pensons à  El Wiam qu’il aurait pu encore faire mieux. Si nous étions d’accord avec tout ce qu’il dit et ce qu’il fait, nous nous serions rangés au sein de la Majorité présidentielle.

-Certains se demandent ce qui pourrait empêcher le président Mohamed Ould Abdel Aziz, après l’adoption des amendements Constitutionnels, grâce à l’article 38, d’invoquer, demain, le même article, pour déverrouiller la limitation des mandats (article 28). Partagez-vous leur crainte? 

-Ce qui peut l’en empêcher, c’est d’abord et avant tout le serment qu’il a prêté devant le peuple mauritanien de ne pas toucher aux articles verrouillés. Les craintes ? Pas du tout, les craintes à ce sujet, sont injustifiées.

Propos recueillis par Dalay Lam

le calame

FAIRE FACE AU RACISME ANTI-NOIR DANS LE MONDE ARABE

par Susan Abulhawa

En réponse à un article que j’ai écrit récemment sur la «Noirceur essentielle» de la lutte palestinienne, j’ai reçu, entre autres, cette réaction : « Mais qu’en est-il du racisme arabe Anti-Noir  ? Ou de la traite Négrière Arabe ? »

La traite arabe est un fait de l’histoire et le racisme anti-Noir est un fait de la réalité actuelle, une chose honteuse qui doit être affrontée dans les sociétés arabes. Bien que je ne prétende pas à l’expertise sur le sujet, je pense que l’application de la notion de Racisme, telle qu’elle existe aux États-Unis, empêche une véritable compréhension du sujet dans le monde Arabe.

J’ai passé la plus grande partie de ma jeunesse dans le monde arabe, et je ne me souviens pas avoir eu conscience de la race jusqu’à ce que je vienne aux États-Unis à l’âge de 13 ans et ma connaissance du racisme anti-Noir arabe vient principalement des Arabes-Américain(es) qui comme d’autres communautés d’immigrants, ont adopté les sentiments racistes dominants de la structure de pouvoir aux États-Unis, qui tient vraiment les Afro-Américain(es) dans le Mépris .

Cette attitude est également devenue de plus en plus répandue dans les pays arabes, pour diverses raisons, mais surtout par les gouvernements arabes, et en particulier par ceux qui importent de la main-d’œuvre étrangère en provenance d’Afrique et d’Asie du Sud-est

Le cas récent d’Alem Dechesa a mis en lumière les horreurs rencontrées par les travailleurs migrant(es) au Liban. Dechesa, une travailleuse domestique d’Ethiopie, s’est suicidée après avoir subi des violences physiques et mentales terribles aux mains de ses employeurs libanais, dont son tabassage sauvage en face du Consulat éthiopien l’année dernière.

L’extension du racisme arabe anti-Noir est une aspiration actuelle de tout ce que nos Anciens possèdent des colonisateurs, où les individus aspirent à ce qui est puissant et riche, et les images de ce pouvoir ainsi que de la richesse ont la peau Claire, les cheveux Raides, un petit Nez, des Joues rouges de grande taille, les corps maigres et cette image rejette la peau riche en Mélanine, les cheveux Enroulés, les Nez larges ou pointues, les hanches larges et grandes jambes, Alors nous aussi, nous rejetons ces caractéristiques, les méprisons chez les autres et en nous-mêmes comme des symboles d’infériorité, de paresse et de pauvreté. C’est pourquoi les industries occidentalisantes de blanchiment de la peau et de défrisage sont si Rentables.

Et pourtant, quand la Palestine est allée aux Nations unies pour la reconnaissance de son statut d’État, la grande majorité des pays qui ont voté «Oui»,  étaient des pays du Sud. La même chose est vraie lorsque la Palestine a demandé l’admission à l’UNESCO. En fait, quand les Etats-Unis ont coupé le versement de fonds à l’UNESCO en réponse à un vote démocratique de ses membres d’admettre la Palestine, c’est la nation Africaine du Gabon qui a immédiatement augmenté sa contribution, grâce à un don de 2 millions de dollars à l’UNESCO, pour aider à compenser la perte de Revenu.

Ce n’était pas l’Arabie Saoudite, le Koweït, le Qatar, le Liban, la Suède ou la France. C’était le Gabon. Combien de Palestinien(nes) le savent, et combien ont exprimé leur gratitude pour Cela ?

Lorsque je faisais des recherches sur le sujet de la traite arabe d’esclaves, je suis tombée sur un véritable trésor de site web, établi par “La Société de l’Holocauste Africain” , ou Mafaa [« holocauste », en swahili], une organisation à but non lucratif d’intellectuel(les) artistes, cinéastes, universitaires et militant(es), dévoué(es) à récupérer les récits d’histoires, des cultures et des identités Africaines

A la lecture de cette partie de notre Histoire commune, nous pouvons voir comment une grande partie des Arabes, y compris celles et ceux d’entre nous qui nourrissons le racisme Anti-Noir, sommes les Fils et les Filles de Femmes Africaines, qui ont été enlevées de nations d’Afrique de l’Est, comme esclaves Sexuelles.

Contrairement à la traite européenne, la traite arabe n’était pas une caractéristique importante de l’économie arabe, elle était principalement ciblée sur les Femmes, qui sont devenues membres de harem et dont les enfants étaient héritiers complets sur les noms, les héritages et la fortune de leurs pères, sans égard à leurs caractéristiques physiques, aussi les esclaves n’ont pas été acheté(es) et vendu(es) comme du bétail, à la façon dont nous comprenons le commerce des esclaves ,ici ils/elles ont été capturé dans les conquêtes ou carrément enlevé(es) et transporté(es) à travers le Sahara.

La race n’était pas une ligne de démarcation et les personnes asservies n’avaient pas une seule destinée, mais avaient la possibilité d’une mobilité ascendante par divers moyens, y compris par le fait de mettre au monde des Enfants ou en se convertissant à l’islam, si bien que Personne ne sait le nombre exact de Femmes Africaines qui ont été réduites en esclavage par les Arabes, mais il suffit de regarder en nous-mêmes pour voir l’ombre de ces Mères Africaines qui nous ont donné naissance, et dont nous avons oublié l’identité Africaine.

Certains argumentent l’excuse discréditée selon laquelle les Africains eux-mêmes ont été impliqués dans la traite des esclaves, avec des tribus en guerre se capturant et se vendant les unes les autres mais peu importe la manière dont vous regardez l’histoire de la traite des esclaves, vous ne verrez qu’une rue à sens unique, avec toujours des Africains qui sont les victimes réduites en esclavage, aussi je ne connais aucune tribu Africaine qui ait kidnappé les Européens pour les mettre en esclavage pour des générations; je ne connais aucune Tribu Africaine qui ait capturé les Femmes Arabes depuis des siècles et les transformer en esclaves Sexuelles

Je pense que l’Humanité n’a vraiment jamais connu un Holocauste d’une plus grande ampleur et la Sauvagerie dans une telle longévité que celle perpétrée contre les peuples d’Afrique. Ce Mafaa n’a jamais été pleinement reconnu et n’a certainement jamais été expié, si bien que les blessures ou les legs durables de transformer les êtres humains depuis des siècles en Meubles, n’a jamais être comprise ou mal expiés mais nous devrions essayer parce que,  tout comme nous héritons des privilège de nos Ancêtres, nous héritons aussi de leurs péchés et de la responsabilité de ces Péchés.

A la fin de son règne, le colonel Mouammar Kadhafi avait compris cela, il avait utilisé son pouvoir et sa richesse pour tenter de racheter notre histoire commune. Il est le premier dirigeant arabe à s’être excusé auprès de nos Frères et Sœurs Africain(es) au nom des peuples arabes, pour la Traite Arabe et le rôle des Arabes dans la traite européenne des Esclaves (…)

Ainsi, l’urgence de l’OTAN d’empêcher les « massacres » en Libye, a été fabriquée et vendue en masse puis dans la crainte de la solidarité Afro-Arabe, ils ont répandu des rumeurs selon lesquelles des mercenaires «Noirs Africains» commettaient des atrocités contre des Libyens car Kadhafi était devenu une menace encore plus grande lorsqu’un accord avait été conclu avec la grande force anti-impérialiste de l’Amérique du Sud et que Hugo Chanel voulait servir d’intermédiaire pour une solution à l’insurrection en Libye. Maintenant, ces deux champions de leurs Peuples ont disparu, et les soi-disant révolutionnaires libyens exécutent des «Africain(es) Noir(es)» dans tout le pays,

J’ai écrit précédemment que la lutte palestinienne contre l’effacement de notre Existence, notre Histoire et notre Identité était spirituellement et politiquement Noire par Nature, de même que dans d’autres luttes, comme celle des travailleurs migrants dans de nombreux pays arabes. Ce sont nos camarades. Ils et elles sont les damné(es), exploité(es), volé(es) et/ou, enfin, libéré(es) .

Je me réfère à Noir(e) comme à un terme politique, pas nécessairement comme un descriptif racial ou ethnique parce que ce mot a été récupéré, redéfini, et injecté avec toute la Puissance, l’Amour, le Défi, et la Beauté de l’Afrique, pour le reste d’entre nous, et sans s’approprier le mot, «Noir», il est aussi pour nous un phénomène de résistance, de fermeté ce que nous les Palestinien(nes) appelons sumud ou la beauté de la culture qui renaît de l’esclavage et de l’oppression.

Pour finir, la solidarité provenant des Africain(es) n’est pas équivalente à celle qui vient de nos camarades européens, dont les gouvernements sont responsables de l’effacement permanent de la Palestine,  cependant les peuples Africains ont toutes les raisons de regarder dans l’autre direction, tout comme les Ethiopien(nes) ont toutes les raisons de dire : « Vous méritez ce qu’il vous arrive pour les siècles d’esclavage et d’industrie néo-esclavagiste de vos voisins arabes. » Les Afro-Américain(nes)  ont toutes les raisons de dire : « Pourquoi devrais-je montrer de la solidarité avec des Arabes qui viennent ici pour nous traiter comme les personnes Blanches le font, et parfois Pire ? »

Nous pouvons remplacer le mot « Arabe » par « Américain » dans cette phrase, et ce serait une déclaration valable mais pourtant, l’Afrique est là avec nous, les intellectuel(les) Afro-américain(es) sont les plus grands champions de notre lutte aux États-Unis et l’impact de la solidarité de quatre personnes en particulier Desmond Tutu, Alice Walker, Angela Davis et Cynthia McKinney ne peut jamais être surestimé.

Je voudrais que mes compatriotes réfléchissent longuement et sérieusement à cela, jusqu’à ce qu’elles et ils comprennent vraiment la Beauté humble de cette solidarité, de la part de personnes qui ont toutes les raisons d’être Anti-arabe.

Je souhaite que mes compatriotes puissent regarder à travers mes yeux, alors Elles et Ils pourraient voir que le Noir est profondément Beau, Elles et Ils pourraient voir que l’Afrique coule dans nos veines aussi, que Nos aïeules Africaines réduites en esclavage méritent d’être honorées et aimées par leurs Enfants Arabes et que c’est à nous de racheter leurs douleurs avec la Reconnaissance et l’Expiation dues de longue Date.  Et Arriver à cette compréhension est un bon point de départ pour la solidarité réciproque avec les Nations et les Peuples qui sont debout avec nous, dans le Cœur et dans l’Action.

**Susan Abulhawa est une écrivaine palestinienne et l’auteur du roman best-seller international : «Les Matins de Jenine » (Bloomsbury 2010). Elle est également le fondateur de Playgrounds pour la Palestine, une ONG pour enfants***

Hotep.

 

 

La CENI dans un rapport secret au gouvernement : « nous ne sommes pas prêts… »

La CENI dans un rapport secret au gouvernement : « nous ne sommes pas prêts… » La commission électorale nationale indépendante a signifié au gouvernement, dans un rapport confidentiel, qu’elle n’était pas prête ni techniquement ni humainement pour l’organisation du referendum sur les amendements constitutionnels dans deux mois.

Le gouvernement avait fixé au 15 juillet prochain l’organisation du referendum, que doit précéder la révision des listes électorales, les dernières lors des élections de 2014.

Des sources propres à Sahara Media ont confirmé le rapport établi par les 7 sages de la CENI et adressé au gouvernement.

Dans leur rapport les sages précisent que le gouvernement n’a pas mis à la disposition de leur institution les moyens matériels et logistiques pour préparer le referendum, à travers le recrutement du personnel et l’opération de révision des listes.

La CENI déplore l’accumulation de dettes impayées en l’absence de volonté de la part du gouvernement de lui donner les moyens de les payer.

Dans sa réponse, le gouvernement a déclaré qu’il chargera un conseiller de la présidence de coordonner avec la CENI afin d’aplanir les difficultés qui se dressent devant l’organisation de cette échéance.

Depuis que la date du referendum a été fixée, la commission électorale nationale indépendante n’a publié ni communiqué ni avis en l’absence d’étapes pratiques sur la voie de l’organisation de l’échéance.

 

saharamedias