Monthly Archives: January 2019
Trois Questions à M. Samory Ould Beye, secrétaire général de la CLTM et président du Mouvement El Hor : “Le discours du 9 janvier est une machination”
Le Calame : vous avez probablement suivi le discours du président de la République prononcé, le 9 janvier dernier au terme de la marche de l’UPR consacrée à l’unité nationale. Quelles appréciations vous cette sortie?
Samory Ould Beye : Les mauritaniens ont tous compris, à mon avis que cette marche était l’occasion pour ne pas dire un prétexte pour Ould Abdel Aziz de dire devant les mauritaniens qu’il est le seul garant et protecteur de cette communauté, il est son rempart contre le danger des Harratine et entend poursuivre cette tâche. Dans ce discours, il a voulu remobiliser les maures et leur cohésion autour de lui. Il a voulu créer la psychose chez les maures pour se maintenir au pouvoir, parce que l’option du 3e mandat a avorté déjà.
Pour lui, les Harratines veulent se venger des maures et il faut leur faire le barrage et les protéger. Il l’a dit clairement, « votre armée », c’est-à-dire, celle des maures va assurer « votre protection ». Le discours du 9 janvier est une machination, une intimidation pour les Haratines et les négro-africains. C’est clair comme l’eau de roche, mais nous nous opposerons à ce projet d’exclusion.
– Cette sortie intervient quelques jours après une vive polémique qui vous a opposé au ministre de la fonction publique qui demandait aux syndicalistes que vous êtes de prendre part à la marche décidée par l’UPR. On vous a accusé, suite à un Tweet d’avoir tenu des propos incitant à la violence et pouvant constituer une menace sur l’unité nationale et qui vous ont valu une interpellation par la police. Vous sentez-vous visé par les propos du président qui a menacé de traduire devant la justice tous ceux qui tiennent les discours haineux les qualifiant même de « criminels » ?
-Je pense qu’Ould Abdel Aziz a un agenda caché. Le meeting du 9 janvier participe de cela. Je vous rappelle que lors de son discours de Néma, il s’était attaqué vertement aux Harratine dont les femmes faisaient, selon lui trop d’enfants. Pire, lors de la dernière campagne électorale, il a enfoncé le clou en déclarant que les groupes extrémistes ne vont pas entrer au Parlement. L’allusion était claire, il visait les candidats Samory Ould Beye et Maalouma Mint Bilal.
Nous avons acquis, nous, la certitude qu’Ould Abdel Aziz s’évertue, depuis son arrivée au pouvoir, à créer un Etat exclusivement Beidane et l’ensemble des actes qu’il a posés tendent à le confirmer. Les festivals des villes anciennes sont une parfaite illustration. Ces rencontres au cours desquelles sont conviés des Sahraouis, des Touaregs et des Arabes mêmes constituent l’occasion pour Ould Abdel Aziz de vanter et de magnifier la culture exclusivement maure.
Il s’y ajoute une campagne pour la résistance contre la colonisation qui voudrait accréditer la thèse selon laquelle seuls les maures ont opposé une résistance à la pénétration coloniale. Tout cela vise à fragiliser, réduire et à effacer l’élément noir de l’histoire de ce pays. C’est la politique du président Aziz, de ses généraux et de l’aile bath du régime.
Et pour avoir dénoncé ce projet macabre, il s’attaque aujourd’hui à nous, Haratine mais aussi aux négro-africains et menace même de nous jeter en prison ; c’est peine perdue, nous ne reculerons pas devant ces menaces. Il est aujourd’hui acquis qu’Ould Abdel Aziz est en guerre ouverte avec les Harratines dont des leaders se battent pour déjouer ses plans en dénonçant la marginalisation et l’exclusion dont ils sont l’objet dans ce pays. Allez voir ce qu’ils représentent dans tous les secteurs du pays. C’est incompréhensible et inacceptable parce que ça engendre les crispations entre les communautés. Ce qui vient de se passer au sein du ministère de la fonction publique pendant une réunion et que j’ai dénoncé dans un Tweet en est une parfaite illustration. Un citoyen déclare publiquement que les maures sont armés et qu’ils vont descendre le jour de la marche avec leurs armes. Il n’avait pas besoin de le dire parce que cela n’est un secret pour personne. Voilà ce que j’ai tenu à dénoncer. J’ai simplement sonné l’alerte, en invoquant le cas du Rwanda. Au lieu de prendre toute la mesure du risque, c’est toute la République qui s’agite et me tombe dessus.
–Que pensez-vous de la décision du gouvernement d’instituer une journée nationale de lutte contre la discrimination ? N’est pas là un pas important ?
-L’institution de cette journée et l’arrestation de gens ayant prononcé des propos jugés « haineux » participent de la politique de diversion à laquelle le pouvoir nous a habitués. C’est un leurre. Elle vise à nous détourner de l’essentiel, à savoir construire un Etat de droit au sein duquel tous les citoyens cohabitent avec le respect de leur différence et de leur diversité ; un Etat au sein duquel tous les citoyens sont égaux devant la loi et dispose des mêmes droits. Tout le reste n’est que chimère. Un texte ne peut pas régler une question aussi importante et délicate que celle-ci. Que de textes avons-nous vus passer ? Ont-ils été appliqués ? C’est un leurre. Conscient de tout cela, nous continuerons à dénoncer cette politique, à nous battre pour un véritable Etat de droit. Quel qu’en soit le prix.
Propos recueillis par DL
le calame
Maroc : Migration Sans Frontières confirme la disparition en mer de plusieurs migrants mauritaniens
ALAKHBAR (Nouakchott) – L’ONG Migration Sans Frontières a confirmé la disparition de 53 migrants clandestins, dont trois femmes, qui tentaient de rejoindre les côtes espagnoles, via le Royaume chérifien.
La plupart des disparus sont de nationalité mauritanienne, note Migration Sans Frontières. Ils venaient surtout de la zone de Guidimakha dans le Sud mauritanien.
Les 53 avaient emprunté la mer, vendredi dernier, à bord d’une pirogue qui a chaviré après avoir heurté « quelque chose ». Les secouristes espagnoles et marocains n’ont pas pu retrouver l’embarcation.
Migration Sans Frontières a confirmé l’accident après avoir écouté le témoignage du seul survivant de l’accident qui est actuellement hospitalisé au Maroc. Il s’agit du 54e passager de la pirogue.
L’ONG préfère parler de « disparus » car aucun corps des 53 n’a été retrouvé.
Contactées par Alakhbar, des familles des disparus ont confirmé la mort d’au moins 19 occupants de la pirogue. Elles affirment avoir obtenu l’information auprès des passeurs.
Du côté de Nouakchott, les autorités mauritaniennes sont entrées en contact avec leurs homologues marocaines pour recueillir plus de détails sur les passagers de la pirogue.
Ce vendredi, l’ONG (mauritanienne) pour le sport et la culture a organisé une “prière de l’absent” en mémoire des disparus.
Alakhbar
Présidentielle en RDC : l’Union africaine sort de sa réserve
Le Monde Afrique – L’Union africaine (UA) a fini par rompre avec sa tradition de déclarations prudentes et consensuelles.
Dans un communiqué diffusé jeudi 17 janvier au soir à l’issue d’une réunion à Addis-Abeba, en Ethiopie, l’organisation panafricaine a émis « des doutes sérieux sur la conformité des résultats provisoires » proclamés une semaine plus tôt en République démocratique du Congo (RDC).
En conséquence, « les chefs d’Etat et de gouvernement demandent la suspension de la proclamation des résultats définitifs des élections ». Ce que nulle organisation internationale n’avait osé faire.
L’UA est présidée pour quelques semaines encore par le chef de l’Etat rwandais, Paul Kagame, qui a convoqué cette « réunion de haut niveau » sur la situation post-électorale en RDC. Président réformateur de l’organisation, M. Kagame agit alors que les résultats provisoires annoncés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) proclament la victoire de Félix Tshisekedi, peu apprécié par Kigali mais avec qui le président congolais sortant, Joseph Kabila, a pactisé pour partager le pouvoir. Or, son rival de l’opposition, Martin Fayulu – qui, selon une fuite de données de la CENI, l’a emporté –, conteste ces résultats. Les résultats définitifs sont censés être annoncés sous peu, le président devant prêter serment le 22 janvier.
Longtemps discret, s’interdisant de prendre position publiquement sur la crise politique de son voisin congolais, où il a soutenu des milices et considérablement profité des ressources naturelles, le président rwandais a fini par intervenir diplomatiquement par le biais de l’UA. Et par mettre la pression sur M. Kabila, qu’il connaît bien pour l’avoir encadré puis soutenu après avoir structuré la rébellion de son père, tombeur de Mobutu Sese Seko en 1997.
Les Nations unies paralysées
Joseph Kabila, dont le dernier mandat s’est achevé en décembre 2016, est désormais considéré comme une menace sérieuse pour la sécurité de pays voisins. Ses ruses politiques et son recours à la force pour se maintenir au pouvoir ont fini par considérablement agacer certains de ses parrains régionaux comme l’Angola, l’Afrique du Sud, l’Ouganda et le Rwanda.
« Ce communiqué, c’est du pur Kagame !, observe un haut responsable de l’UA. Kabila est affaibli et isolé. On veut le forcer à recompter les voix sans utiliser le terme de “recomptage”. Le successeur de Kagame à la présidence de l’UA, l’Egyptien Abdel Fattah Al-Sissi, n’est pas du tout sur cette même ligne interventionniste. »
Il est rare que l’UA, faisant fi du sacro-saint respect de la souveraineté, se mêle de la politique intérieure de l’un de ses pays membres. Ce qui lui vaut aujourd’hui d’être accusée d’« ingérence » par les stratèges de M. Kabila. L’organisation, qui avait déployé une mission d’observation électorale en RDC, adopte une position bien plus tranchée que les Nations unies, paralysées par les rivalités entre puissances. Après avoir appelé – puis renoncé – à un « recomptage des voix » et à la formation d’un gouvernement d’union nationale, la Communauté de développement d’Afrique australe, qui s’est réunie quelques heures plus tôt, s’est contentée d’inciter les acteurs congolais au calme.
L’UA, elle, a « convenu d’envoyer en urgence en RDC une délégation (…) dans le but de trouver un consensus sur une issue à la crise post-électorale dans le pays ». Avec une mission délicate : faire valoir la vérité des urnes en évitant une invalidation des élections qui maintiendrait au pouvoir M. Kabila.
Par Joan Tilouine
le monde
L’injustice endémique/Par El Wely Sidi Heiba
Les tribus et ethnies du pays des grandes contradictions sont comme l’eau qui prend la forme du récipient qui la contient. Si quelques tribus brillent dans l’art des alliances, certaines le sont dans celui de l’allégeance, plusieurs dans le troc des positionnements et du louage des loyautés, tandis que d’autres s’assujettissent, l’échine basse, au présent comme par le passé aux axes de la force. Au fond rien n’a changé depuis l’ère moyenne de la grande pagaille “Seiba”, que l’avènement de la colonisation a pourtant tempérée sans pourtant réussir à en éradiquer la profonde insurrection contre:
· L’ordre,
· La Justice,
· L’égalité,
Ni obtenu son divorce d’avec :
· L’injustice taciturne envers ceux qui s’y soumettent et obéissent,
· L’hypocrisie, qui se profile derrière l’apparence de la religion travestie et d’une jurisprudence compatissante et factice,
· L’arrogance de la poésie des “mœurs” avilies et de la morale déformée,
· L’allégeance opportuniste au pouvoir et à l’argent,
· Le retournement des alliances,
· La trahison,
· L’égocentrisme absolu,
· Le penchant à la domination par l’argent, la force et la fausse notoriété,
· Le dégoût du travail et l’exploitation des personnes vulnérables.
Réalité amère d’un état de fait exceptionnel, que les esprits occultent sciemment dans la ferme intention de le perpétuer aux fins d’un satisfecit de ceux qui en bénéficient. Et c’est délibérément ceux-là mêmes qui le maintiennent dans le socle d’un système social moyenâgeux imposé, pour qu’il demeure bien ancré dans les moules tribaux et de castes du passé ; Ne voulant surtout pas que cet état des choses change pour que restent préservés leurs intérêts restreints et égoïstes, ils usent de la stature, de la situation et de la prépondérance de leurs :
· Hauts responsables politiques et militaires,
· Dignitaires médiévaux
· Parlementaires,
· Maires et conseillers municipaux,
Une situation qui voue le pays à la corruption et à la déliquescence.
Ce sont eux qui mettent en dérision la politique avec leurs partis gendarmes, qui n’ont pas de discours saillants, moins encore de programmes édifiants, faisant au pire ramper le pays à l’arrière du peloton des nations, tout en se tenant hypocritement, par une attitude contradictoire, loin d’une telle monstrueuse responsabilité.
Et c’est bien là que réside l’injustice flagrante qui règne dans le pays par la faute de concepts d’un temps révolu et qu’établissent, sous des masques hideux, des obsédés par l’injustice et la corruption à l’ère de la démocratie et des entités étatiques normales qui comptent sur les meilleurs de leurs citoyens de par leurs connaissances et leurs compétences en matière de leadership.
Il ne fait aucun doute que l’injustice, quelle que soit sa source, est l’un des facteurs les plus importants pour alimenter le discours de la haine et de la rancune, le répandre et soutenir ses adeptes, politiciens opportunistes et prétendus militants des droits de l’homme qui veulent la sédition et l’embrasement du pays.
Il est également certain que les opportunistes, arrivistes, poètes travestis et intellectuels moribonds n’hésiteront pas à suivre la vague du “nouvel appel” de combat contre le discours de la haine. Par son biais, ils chercheront à le détourner de sa juste voie pour parvenir à des fins égoïstes et, à défaut de cela, verser au détour l’huile sur le feu tout en se moquant de savoir si le pays va en brûler.
Une équation qu’il faudrait sans ambigüité résoudre, au plus vite, en frappant sans merci sur les deux parties sur fond d’instauration de la justice et de l’équité.
le calame
L’Editorial du Calame : Jusqu’au jour où…
Lors de la cérémonie de clôture du dialogue inclusif, en 2016, entre les partis de la majorité et une partie de l’opposition, Ould Abdel Aziz déclara, dans un discours très applaudi par l’assistance, qu’il n’était pas question de toucher les articles de la Constitution limitant les mandats présidentiels.
Et que ceux qui le demandaient étaient des ennemis de la Nation dont ils cherchaient la perte. Il aura répété, plusieurs fois, à des organes de presse étrangers, qu’il respectera le texte fondamental et ne se présentera pas à un troisième mandat. Le pays tout entier, tant les partisans du généralissime que ses détracteurs, poussa un grand ouf de soulagement.
Celui qui a mis le pays en coupe réglée va enfin passer la main. A n’importe qui. Pourvu qu’il parte. Pourtant, malgré le verrou constitutionnel et ces déclarations de bonnes intentions, il restait toujours beaucoup de gens persuadés qu’Ould Abdel Aziz ne céderait jamais le pouvoir de gaieté de cœur et ferait tout ce qui est en son pouvoir, pour y rester le plus longtemps possible.
Et les faits, malheureusement, sont en train de leur donner raison. Des membres de son cercle proche et des députés de l’UPR se mobilisent, en effet, depuis quelques jours, pour obtenir un maximum de signatures de parlementaires en faveur d’amendements constitutionnels modifiant les articles limitant à deux les mandats du président de la République.
L’initiative à laquelle Ould Abdel Aziz serait « étranger » (!) aurait déjà recueilli près de soixante-dix signatures mais elle rencontre, parallèlement une forte opposition de divers députés de la majorité. Rumeurs et contre-rumeurs circulent. N’ayant pu obtenir les voix des deux-tiers des députés et risquant, du coup, faire voler le camp du Président en éclats, l’initiative aurait, dit-on, été abandonnée. Que nenni !, rétorquent d’autres sources, elle continue son petit bonhomme de chemin et ses soutiens ne cessent d’augmenter. Difficile, dans ces conditions, de démêler le vrai du faux.
Ce qui est sûr, en tout cas, c’est que le pays est à un tournant. Des députés irresponsables sont en train de le mener vers des lendemains périlleux. Rarement une initiative n’aura été autant décriée et ses auteurs vilipendés, sur les réseaux sociaux. Comme si les Mauritaniens s’étaient donné le mot d’ordre que, cette fois, ils ne se laisseront pas faire et n’accepteront plus qu’on les prive de leur dernier espoir, qu’enfin ce pays se normalise, grâce à une alternance pacifique. La frustration et l’amertume seront d’autant plus grandes que ce pouvoir tant décrié se maintiendra, de longues années encore.
Si elle aboutissait, l’initiative desdits députés serait-elle la goutte qui fera déborder le vase ? Elle laissera, en tout cas et à coup sûr, des traces. Lorsqu’il essaya, en 2011, de modifier la Constitution sénégalaise, le président Abdoulaye Wade dut faire face à une opposition déterminée. En tête de cortège, ses leaders s’enchainèrent aux grilles de l’Assemblée et ses militants affrontèrent, avec courage, les forces de l’ordre. Les amendements firent ainsi chou blanc, Wade annonçant, le soir même, qu’ils étaient retirés. Mais, chez nous, où en est notre opposition ?
Continuera-t-elle à se contenter de communiqués de dénonciation… jusqu’au jour où il sera trop tard ?
Ahmed Ould Cheikh
le calame