Daily Archives: 26/01/2017
Nouvelles d’ailleurs de Mint Derwich : Gambiegate
Nous sommes tellement en manque de héros que nous finissons par nous en inventer, genre « J’ai un ami imaginaire, un super pote ».Oum Tounsy et tous les discours hystérico-patriotiques qui ont suivi n’ayant servi à rien et, surtout pas, à ancrer, dans l’imaginaire collectif, la figure d’un ou de héros tutélaires qui expliqueraient qui nous sommes, à quoi nous jouons et à quel avenir confier nos serouals, il a bien fallu continuer la longue réécriture historique. A défaut de héros morts depuis des lustres, nous voilà affublés d’un héros non seulement contemporain mais encore bien vivant, notre Président.
Oublié Oum Tounsy et son symbole de la valeureuse guerre anticoloniale et patriotique menée par notre encore plus valeureux et talentueux et patriotique peuple de héros, sous la houlette de sauveurs des petits peuples opprimés ! Bienvenue au « Gambiegate » ! Jammeh ou l’art du super patriotisme…Je ne veux pas casser une si belle ambiance de tournage autour du nombril et d’édification de pyramides humaines mais il me semble que la médiation « Aziz/Condé » ne mérite pas tant de youyous.
D’un, notre duo de choc a désavoué, sans vergogne, et la CEDEAO et l’ONU et le peuple Gambien lui-même, envoyant, donc, un très mauvais signal à tous ceux qui seraient tentés de s’accrocher au pouvoir sur notre beau continent. Rien que ça. Sans oublier le petit jeu très « bataille navale » qui a opposé notre pays à son voisin du Nord, le Maroc. « Touché coulé » a dû rigoler notre Sultan, quand la médiation marocaine a fait chou blanc.
De deux, il a, non seulement, négocié avec Jammeh, quand les Gambiens n’en demandaient pas tant et, surtout pas, Barrow, le nouveau président gambien, mais lui a permis (aux frais de qui ? demande la petite voix dans ma tête) de sauver ses biens. De trois, il a échoué. Les duos qui deviennent trios ne réussissent pas toujours. De quatre, Barrow a, vertement, remis à sa place notre Raïs qui s’est empressé de lui rendre la monnaie de la pièce.
De cinq, le Sénégal fait la gueule. De six, nous nous félicitons. De sept, ça devient ridicule. De huit, je ponds cette chronique. De neuf, vous n’en avez rien à fiche. De dix, je m’en fous et je continue. Je reprends donc. Voilà donc le message que notre Président Super Héros et plus encore a passé au monde : « Dictateurs de tous les pays, pas de panique ; vous avez tué ? Vous avez emprisonné ? Vous avez refusé de quitter le pouvoir ? Don’tworry, be happy, vous ne serez pas poursuivis par la justice, vous n’aurez pas de comptes à rendre à votre peuple ; vous pourrez embarquer tout ce que vous avez volé et détourné et partir finir vos jours dans un exil doré, foi de mauritanien ».
Remarquez, de la part du président d’un pays qui n’a jamais jugé ni puni un seul auteur des atrocités commises pendant les années de sang, les années de honte, c’est une attitude « normale ». Pourquoi imposer aux autres ce que l’on ne s’applique pas à soi-même ? CQFD. Résultat de la manip : nous voilà en bagarre avec tout le monde. Nous sommes devenus les sales gosses de la récré. Au nord, avec le Maroc c’est ambiance polaire. Maintenant, le Sud nous boude. A l’Est, après la belle merde que nous avons foutu au Mali, nous assistons à l’implosion de notre voisin.
Dans la sous-région, il nous reste qui ? Le Front Polisario que nous n’avons jamais autant aimé ni caressé dans le sens du poil. Je pense que nous avons gardé de bonnes relations avec la Papouasie Nouvelle Guinée, le Vanuatu, l’Île Hans (allez, allez, on « google »…), l’Île Pourquoi Pas, Tuvalu et Saint -Saint-Kitts-et-Nevis…Ah, j’oubliais. Nous avons notre meilleur ami, le pote, le vrai, celui sur l’épaule duquel on vient raconter ses malheurs et dont les poches sont pleines, l’Arabie saoudite. Vous savez, le pays qui tue au Yémen dans un silence assourdissant, qui affame ses populations…On a les amis que l’on peut.
Bref, voilà un Gambiegate qui est un fiasco total, juste une opération de com à usage intérieur mais qui est révélateur d’un amateurisme dangereux et contre productif. J’entends, de ci, de là, des « On a sauvé la paix ».
Ouais. « On » a surtout sauvé les fesses de Jammeh. Et voilà comment on se fabrique des super héros…La prochaine fois, votre Héros national vous décrochera la lune ? Oui, m’sieur, la lune et même le soleil et même RR245, la dernière nano-planète découverte cette année (si vous la cherchez sur une carte, elle n’est pas loin de 2003 OP32).Tout ça mérite bien deux bandes rouges sur notre futur drapeau national, non ? Salut,
Mariem mint Derwich
le calame
Amina Mohamed : « La RASD est un membre de l’Union Africaine et doit le rester »
La ministre des Affaires étrangères kényane, candidate au poste de présidente de la Commission de l’Union africaine, a reçu Jeune Afrique en marge du 30e Conseil exécutif du Sommet de l’Union africaine.
Candidate à la succession de Nkosazana Dlamini Zuma, la ministre des Affaires étrangères du Kenya, Amina Mohamed (55 ans), s’appuie sur sa longue expérience au sein de l’exécutif et des organisations internationales pour convaincre les chefs d’État qu’elle a le meilleur profil pour ce poste.
« Mes équipes et moi-même avons visité tous les pays du continent, à l’exception de la Libye et de la Gambie », confie-t-elle. Le 24 janvier, elle s’est entretenue avec le président béninois Patrice Talon à Cotonou. Elle a reçu Jeune Afrique dans l’ambiance feutrée de l’hôtel Sheraton d’Addis Abeba, ce jeudi 26 janvier.
Pourquoi pensez-vous être la meilleure candidate pour ce poste ?
Parce que j’ai une expérience variée au sein du gouvernement kényan, et au sein d’organisations internationales. Dans mon pays, j’ai dû gérer la plupart des grandes réformes. Ce fut un moment difficile de notre histoire, juste après la crise post-électorale de 2007-2008. Il fallait construire un système capable de répondre présent en cas de nouvelle crise. Toute cette expérience peut servir l’Union africaine.
Quels seront les principaux défis du prochain ou de la prochaine présidente de la Commission de l’UA?
La paix et la sécurité, la réforme du financement, s’assurer que le secrétariat est efficace et réactif aux besoins du continent. Il faudra étudier les programmes qui sont actuellement mis en place, décider de ceux qui sont complets ou de ceux qui doivent être améliorés. Il faudra aussi, systématiquement, avoir une longueur d’avance pour répondre aux demandes des populations.
Nous avons un agenda que nous commençons juste à mettre en place. Il faut se concentrer sur sa mise en œuvre pour qu’enfin, les gens puissent apprécier le travail de l’Union africaine.
De quelle réforme l’UA a-t-elle prioritairement besoin ?
De la réforme qui porte sur le financement de notre organisation. Vous ne pouvez pas dépendre des autres pour identifier vos priorités. Il faut être capable de les financer. Ce qui a été décidé à ce sujet lors du dernier sommet de Kigali, la taxe de 0,2% sur les importations, est en ce sens une bonne chose.
Cela n’affectera pas les relations des États avec les autres pays. Ce n’est en rien une violation des règles du commerce international, puisque les importations sont de toutes manières taxées. Cet argent appartient déjà aux pays africains. Il faudra néanmoins être très vigilant sur le choix des secteurs qui seront concernés par cette taxe.
Serait-ce un moyen de répondre aux questions posées par Donald Trump à l’ancienne administration américaine, sur l’efficacité de l’aide extérieure accordée au continent africain ?
Le diable est toujours dans les détails. Nous avons entendu cela à la télévision mais personne n’est venu nous en parler. Nous attendons de voir ce qu’il sera décidé pour juger.
L’élection de Donald Trump vous inquiète-t-elle ?
Nous sommes plutôt inquiets par l’atmosphère globale dans le monde, pas aux États-Unis spécifiquement. Mais encore une fois, nous voulons voir quelles politiques sont mises en place. Faudra-t-il s’en réjouir ou s’asseoir autour de la table pour négocier ? Il est encore prématuré de se positionner.
Que pensez-vous du retour du Maroc dans l’UA ?
C’est un pays fondateur de l’OUA [l’organisation de l’unité africaine, devenue UA en 2002, ndlr], qui fut là pendant très longtemps et qui peut revenir quand il le souhaite. C’est d’abord un désir du Maroc, que nous appuyons.
Sa cohabitation au sein de l’UA avec la République arabe sahraouie démocratique (Rasd) ne risque-t-elle pas d’être compliquée ?
La république sahraouie est un pays africain, un membre de l’UA, et doit le rester. Tous les membres de notre organisation sont en bons termes. Nous parviendrons à surmonter ces divisions.
Le Kenya fait partie de la Mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom). Pourquoi cette force a-t-elle tant de mal à venir à bout des shebabs ?
Je pourrais vous poser la même question pour tous les pays frappés par le terrorisme. Depuis combien de temps dure l’intervention en Afghanistan ? Ces sujets sont si complexes que nous n’avons d’autres choix que d’y consacrer tous nos moyens.
Les troupes de l’Amisom ont fait beaucoup mieux que d’autres dans des situations similaires, et auraient pu faire encore mieux si nous lui avions accordé les moyens nécessaires. Mais nous passons notre temps à nous battre pour des ressources supplémentaires. Se procurer un hélicoptère, c’est déjà difficile ! Nous avons besoin du soutien de la communauté internationale et pas de réduire le petit budget de l’Amisom. Si on réduit ce dernier de 20%, son travail sera 20% moins efficace.
Le Burundi a récemment menacé de quitter l’Amisom, ses soldats n’étant pas payés depuis un an à cause des sanctions de l’UE et de l’UA…
Tout le monde doit être traité de la même manière. Les troupes burundaises doivent être traitées de la même façon que les troupes kényanes ou éthiopiennes. La discrimination sur le champs de bataille ne sert personne. Sinon, comment les convaincre de se battre pour une cause importante ?
Le Kenya avait envisagé de quitter la CPI. L’Afrique du Sud a annoncé qu’elle en claquerait la porte, tout comme la Gambie et le Burundi pour des raisons différentes. Les pays africains doivent-ils suivre ces exemples ?
C’est une question de souveraineté nationale. On peut développer une stratégie collective, mais pas l’appliquer collectivement. Chaque pays doit décider pour lui-même s’il accepte de rester ou non. Je respecte la décision de tout le monde.
Michael Pauron et Vincent Duhem
jeune afrique