Daily Archives: 07/08/2012
La COD critique sévèrement « la rencontre avec le peuple »
Le président en exercice de la Coordination de l’Opposition démocratique, Saleh Ould Hanana, lundi soir, au cours d’une conférence de presse que la commémoration de l’arrivée du président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, s’effacera bientôt avec son départ et la fin de son règne après des années de dictature, l’ignorance et les souffrances infligées aux populations.
Ould Hanana avait également affirmé que les chiffres présentés par Ould Abdel Aziz étaient une grande mystification, un camouflage du vécu et un mépris de la conscience des mauritaniens.
Il a par ailleurs déclaré : «Nous sommes en présence d’une nouveauté que la Mauritanie n’a jamais connue : c’est celle où la plus haute autorité de l’Etat se spécialise dans le mensonge et les contrevérités quitte à bafouer toutes les règles morales».
Ould Hanana s’est dit étonné du fait que le président de la République parle d’un excédent d’électricité alors que Nouakchott vit au rythme des délestages d’un quartier à l’autre , tout comme les villes de l’intérieur. « Les voies s’élèvent pour réclamer l’électricité que le président prétend avoir fourni en grande quantité », a-t-il souligné.
De son côté Me Mahfoudh Ould Bettah, président de la Convergence démocratique, a indiqué que la Coordination de l’opposition démocratique n’est pas concerné par ce qui s’est passé à Atar.
Quant à Ahmed Ould Lafdal du RFD, il a affirmé que le discours du président Mohamed Ould Abdel Aziz en tant que président des pauvres s’est effrité et que les chiffres qu’il a avancé ne sont pas exacts.
Pour sa part Ahmed Ould Sidi, président du RDU a affirmé que :« Ce que nous avons vu hier est la gouvernance de la Mauritanie par le biais de l’ignorance, de la sottise et de l’éloignement de tout élitisme ».
Source: ANI
Gaye Silly SOUMARE (1930 – 2012) : Un acteur majeur de la construction nationale s’est éteint
Gaye Silly Soumaré s’est éteint le mercredi 18 juillet 2012 à Nouakchott dans l’indifférence presque totale. Pourtant, l’homme fut un des acteurs majeurs de la construction de la Mauritanie. Si les propositions relatives à la cohabitation nationale du comité paritaire qu’il a présidé en 1958, après le congrès d’Aleg, avaient été explorées et prises en compte par les politiques, notre pays aurait peut être fait l’économie des tragédies connues.
Homme d’Etat au parcours exceptionnel, un des premiers administrateurs civils mauritaniens, militant anticolonial dans sa jeunesse, Gaye Silly Soumaré mérite un hommage national.
Le contexte politique de son engagement
Né en 1930 à Wompou, au Guidimakha, il a effectué sa scolarité au collège de Rosso avant d’intégrer l’école Normale William Ponty au Sénégal où il a obtenu le baccalauréat en 1951, puis un Certificat d’Aptitudes Pédagogiques (CAP) en 1953. Il exercera le métier d’instituteur jusqu’en 1957. Il fit ses premiers pas politiques, la même année, comme membre du bureau politique de l’Association de la Jeunesse Mauritanienne (AJM) fondée le 24 novembre 1955 à Rosso.
L’AJM était animée par des jeunes comme Mohamed Ould Cheikh, Ahmed Baba Ould Ahmed Miské, Tiécoura Dembelé, Yacoub Ould Boumédiana…, en rupture de banc avec les adultes de la maison mère, l’Union Progressiste Mauritanienne. Sensibles aux luttes de libération dans les colonies, les jeunes militants de l’AJM s’étaient fixés comme programme : « réaliser l’unité de tous les jeunes mauritaniens sans discrimination…. en vue de contribuer à l’éducation culturelle et civique des populations , de réaliser les objectifs et les aspirations légitimes du peuple à la dignité, au savoir, à la liberté et à l’égalité sociale, de combattre le népotisme, l’ignorance, le régionalisme, les séquelles de l’impérialisme et les visées du néocolonialisme ». L’AJM ne survivra pas aux coups de l’UPM et donnera naissance à la Nahda.
Cette expérience forgera la future carrière de Gaye Silly Soumaré lorsque souffle le vent des reformes politiques instituées par la Loi – Cadre en 1957 (loi dite Defferre, adoptée le 23 juin 1956) accordant l’autonomie interne aux territoires d’Outre–mer. Il répondra en 1958 à l’appel de regroupement de Mokhtar Ould Daddah élu Vice – Président du Conseil de Gouvernement (premier gouvernement de Mauritanie) en Mai 1957. L’existence de la Mauritanie, dans ses frontières actuelles, était menacée surtout par des visées territoriales du royaume chérifien qui avait trouvé un allié en la personne de Horma Ould Babana. Le président de l’Entente Mauritanienne, après sa défaite à la législative de 1956, trouva refuge au Maroc d’où il mena des attaques armées contre la Mauritanie jusqu’à la veille de l’indépendance.
Le Congrès d’Aleg qui lui a confié une mission de consolidation de l’unité nationale révèle un homme de dialogue et de consensus
C’est dans ce contexte que fut convoqué et organisé le congrès d’Aleg du 2 au 5 mai 1958 pour préparer l’indépendance de la Mauritanie dans sa forme actuelle. Pour cela, Mokhtar Ould Daddah, chef du parti de l’Union Progressiste Mauritanie (UPM), pris soin d’inviter toute l’opposition intérieure – y compris ce qu’il reste de l’Entente Mauritanienne – à créer un rassemblement à travers sa formule restée célèbre « Faisons ensemble la patrie mauritanienne ».
Ce congrès verra donc la participation de tous les poids lourds de la politique de l’époque qui optent pour :
– participer à la communauté française avec option pour l’indépendance
– créer un nouveau parti, le Parti du Regroupement Mauritanien (PRM), qui remplace l’UPM, et deviendra le Parti du Peuple Mauritanien (PPM)
– désigner un comité paritaire (quatre noirs et quatre maures) chargé de faire des propositions sur la cohabitation nationale, présidé par Gaye Silly Soumaré et Mohamed Ould Cheikh. Les conclusions de ce comité sont restées lettres mortes, enfouies dans les tiroirs du PPM.
La non application de ces recommandations, conjuguée à une volonté politique de non prise en compte la lancinante question de la cohabitation, eurent pour conséquences à court, moyen et long termes :
– La création en juillet 1959 et en 1960 de deux partis à assises régionalistes. D’un côté l’Union Nationale Mauritanienne (UNM) qui entendait « préserver les liens historiques avec la Fédération du Mali » et de l’autre l’Union Socialiste des Musulmans Mauritaniens (USMM), une formation politique plutôt implantée à Atar.
– En 1963, plusieurs cadres noirs, déçus de la suite réservée aux résolutions du congrès fondateur d’Aleg, regroupés au sein de l’Union Générale des Originaires de la Mauritanie du Sud (UGOMS) écrivent en substance ceci au Président de la République « Nous ressortissants de la Mauritanie noire, adjurons le Congrès, le Parlement et le Chef de l’Etat de réviser immédiatement les structures de l’Etat, dans un sens Fédéral pour répondre à la volonté du pays ».
– En février 1966 c’est au tour de 19 cadres noirs de rédiger le manifeste dit des 19, un manifeste qui inspire un autre vingt ans plus tard ….. Puis 1986, 1989……..
Conscient de la situation, Gaye Silly Soumaré sera un des rares Maires à protester officiellement en 1989, en écrivant au Président de la République de l’époque pour dénoncer et demander l’arrêt des exactions commises contre ces administrés du village de Wompou.
Un homme d’Etat, à la carrière bien remplie, paradoxalement peu connu
Ayant répondu à l’appel au rassemblement, Gaye Silly Soumaré fut nommé en mai 1958 chef de cabinet du Ministre de l’Urbanisme. Il a occupé depuis de hautes fonctions de l’Etat en rapport avec son diplôme de droit et d’administration publique (cadre des administrateurs civils) obtenu au tout début des années 60 à la prestigieuse Ecole Nationale de la France d’Outre–mer qui devient l’Institut des Hautes Etudes d’Outre–mer.
A son retour en Mauritanie, il exerce tour à tour dans l’administration territoriale les fonctions de :
– Chef de Subdivision (Préfet) de Boutilimit
– Commandant de Cercle (Gouverneur) du Trarza, du Brakna et du Tagant d’où il est rappelé pour avoir refusé d’exécuter certains ordres contre les 19 signataires du Manifeste cité plus haut. La sanction ne se fait pas attendre, il est affecté à l’administration judiciaire
Dans l’administration centrale, entre 1962 et 1969, il est nommé :
– Directeur de l’administration judiciaire
– Directeur de cabinet du Ministre de l’Intérieur et Directeur de l’Administration Territoriale
– Inspecteur Général de l’administration
– Inspecteur Général des Finances auprès de la Présidence de la République, un poste qui est devenu le Contrôle Général de l’Etat.
– Secrétaire Général du Ministère de la Défense puis du Ministère des Finances.
Il quitte l’administration centrale en 1971 pour entrer dans la diplomatie :
– Conseiller à Bonn, Allemagne, à ce titre, il représente la Mauritanie aux Assemblées Générales des Nations Unies.
– Ambassadeur en Tunisie (1973–1976) accrédité en Turquie, Grèce et Yougoslavie
– Ambassadeur en URSS (1975–1980) accrédité dans chacun des pays européens membres du Pacte de Varsovie.
Il mettra ses qualités de dialogue et de négociateur à nouveau au service de son pays en 1975-1976 comme membre de la délégation mauritanienne à la Cour Internationale de la Haye qui devait se prononcer sur le litige qui a opposé la Mauritanie au Maroc sur le Sahara Occidental.
Admis à faire valoir ses droits la retraite en 1984, il se consacra aux siens, à son village, Wompou qui l’élit Maire en 1989 et en 1991. En 1994 puis en 1998, il est élu Sénateur, représentant les Mauritaniens de l’étranger (zone Europe).
Gaye Silly Soumaré est parti comme il a vécu, discrètement. La patrie doit lui être reconnaissante. A l’image de ses compagnons historiques, la Mauritanie doit se souvenir d’eux et inscrire dans la mémoire collective de nos concitoyens des hommes et des femmes qui ont construit notre pays, parti de rien. A ce titre, la Mairie de Nouakchott en association avec les autorités centrales qui ont hérité de son savoir faire, devrait consacrer une artère de la capitale à son nom.
Que son âme repose en paix dans la terre de Mauritanie pour laquelle il s’est investi. Amine.
Ciré BA et Boubacar DIAGANA – Paris.
Source: ODH.
Le Grand Oral en est- il un ?
Le grand oral entre le Président Aziz, qui fête ses trois ans d’arrivée au pouvoir et le peuple a été pour bien des commentateurs de la scène politique des airs du déjà vu. D’une part les réponses apportées aux questions des journalistes n’étaient pas à la hauteur des attentes de nombreux téléspectateurs qui ont passé une longue nuit blanche soit au stade soit devant le petit écran à écouter le déroulement de l’événement. En tout cas les intervenants n’étaient pas nombreux à passer un coup de fil téléphonique pour participer à un échange entre le président et son « Chaab » qui avait beaucoup de choses à dire. Hélas seuls quelques individus triés à la volée ont été choisis parmi ceux qui doivent s’adresser à l’hôte de la soirée.
Comme on pouvait s y attendre, puisque la rencontre avec le peuple du chef est plutôt axée sur un inventaire de bilan du président de la république depuis juillet 2009, Ould Abdel Aziz a indiqué à son public avoir réalisé 70% de son programme électoral. Des chiffres arborés depuis quelques semaines par des membres du gouvernement, réitérés aujourd’hui par le président. « Le PIB a atteint 1230 milliards d’ouguiyas en 2012 contre 854 milliards d’ouguiyas (en 2008 » a-t-il dit soulignant que pour les devises, elles sont disponibles en réserves suffisantes au niveau de la BCM pour la couverture des importations du pays pour une période de 6 mois. Un actif inédit selon ses propos jamais réalisé par les régimes précédents. « Le Fonds national du pétrole s’élève actuellement à 65 millions de dollars et les recettes fiscales sont passées de 37 milliards d’ouguiyas en 2010 à 58 milliards d’ouguiyas (en 2011 » a-t-il ajouté, précisant avec fierté que ces mêmes recettes avaient déjà atteint 95 milliards d’ouguiyas pendant les 6 premiers mois de l’année en cours. A propos du secteur minier, Ould Abdel Aziz a indiqué que la Mauritanie a créé 14.842 emplois en 2011 au lieu de 7.500 en 2008 et a drainé 107 milliards d’ouguiyas en 2011 contre 44 milliards en 2008. Evoquant la question du passif humanitaire, il a indiqué que seule la question des fonctionnaires déportés reste encore en suspens, affirmant qu’elle est toujours à l’étude au ministère de la fonction publique et qu’une solution lui sera trouvée dans un proche avenir. Ould Abdel Aziz a assuré par ailleurs que le pays ne compte pas un seul prisonnier politique ni journal censuré, réitérant les propos du chef de l’Etat sénégalais Macky Sall selon lesquels il effectuera une visite en Mauritanie après l’Aid El Vitr. Le Mali a été également au menu de ce grand oral où selon le président la Mauritanie n’interviendra pas militairement dans ce pays. « Le problème est très complexe, nous n’en possédons pas la solution » a-t-il ajouté, estimant toutefois que son pays fait partie de la communauté internationale qui doit aider Bamako à trouver une solution à l’occupation de 65% de son territoire par des terroristes. D’ailleurs selon des sources un contingent mauritanien figurera dans les rangs de la force armée mobilisée par la Cedeao de quelque 3.300 soldats pour aider l’armée malienne à reconquérir le nord du pays. Senoussi, la lutte contre le terrorisme et plusieurs autres questions ont été également soulevées au président mais certaines sont restées sans réponses exception faite du cas de l’ex dirigeant libyen dont le cas est de l’avis du chef de l’Etat très complexe soulignant qu’il doit être jugé en Mauritanie pour son entrée avec une fausse identité dans le pays. Certes cette heure du bilan n’a pas été vue du même œil par les mauritaniens, puisqu’aux côtés de la COD qui parle de mascarade, d’autres évoquent un choix tactique à vocation politique de la ville d’Atar opéré par le président de la république pour plier les hommes politiques et d’affaires de l’Adrar après les avoir emprisonnés pour les uns, écartés des cercles de décision pour les autres.
La rédaction du Rénovateur
Entre les vérités du président et les questions des journalistes
« Le grand oral » auquel s’est livré le président Mohamed Ould Abdel Aziz à Atar et qui aura duré 4 heures d’horloge a mobilisé des foules énormes au stade de la capitale “Adraroise” plein à craquer de gens venus d’eux-mêmes ou trimballés par des clans politiques qui se sont fortement investis pour la réussite de l’événement.Il fallait que la dimension du rendez-vous ne trahisse pas les attentes.Est-ce le cas ?
La sortie d’un président sous la batterie orale de 8 journalistes avait toutes les chances de porter haut le débat à travers les réponses à des questions parfois pertinentes, parfois évasives posées par le pool de la presse. Mais dans bien des cas les réponses sont passées à côté de la plaque réduisant l’exercice à une sorte d’autosatisfaction du bilan selon son auteur est réalisé à plus de 70% en trois ans seulement ! Si on accepte de se livrer à un oral on doit aussi bien faire la part des choses sans verser dans des procès d’intention du genre de confondre ce que dit le journaliste avec ce que disent les hommes politiques. On ne peut pas admettre qu’un journaliste indépendant dans la formulation de ses question soit taxé de caisse de résonance au service d’hommes politiques alors que dès le départ on lui assurait de sa liberté de dire ce qu’il pense. Mais dès qu’il use de ce droit on le considère comme une milice politique. Apparemment la liberté de penser gêne beaucoup si cela ne met pas à l’aise celui à qui on s’adresse. Il est paru étonnant de voir le président rappeler à chaque fois le journaliste dérangeant si c’est lui qui parle ou si c’est un commanditaire de l’opposition de la COD. C’est ainsi que les soupçons ont pesé à chaque fois sur une question qui fâche si bien qu’on ne comprenait pas si le jeu en valait la chandelle. Le Président se donnait des droits d’adresser des remarques sur une question dont la formulation a piqué au vif, histoire de brouiller les cartes ! Nous avons vu comment des réponses à certaines questions ont été escamotées au lieu d’être prises à leur juste valeur. D’autres ont été passées sous silence par indifférence calculée. Ce grand oral a déçu bien de téléspectateurs qui s’attendaient à un niveau plus relevé et surtout à plus de clarté dans les idées. De bout en bout c’est d’un Président déterminé à écraser ceux qui pensent pouvoir le faire quitter et qui voient partout des rebelles , qui a été au centre d’un plateau télévisé perturbé par le bruit de laudateurs surexcités et apparemment manipulés par des mains de l’ombre. Ces vieilles pratiques qu’on pensait révolues étaient à l’œuvre durant tout le temps qu’a duré l’oral. Le peuple auquel était principalement destiné l’événement est bien resté sur sa faim durant une longue nuit blanche que des jeuneurs épuisé ont eu du mal à tenir. En tout cas pour l’honneur de la démocratie on ne lisait dans le discours présidentiel aucune volonté de tendre la main à l’opposition et du coup œuvrer au dépassement de cette situation aux conséquences incalculables. Dommage !
Cheikh Tidiane Dia