Daily Archives: 11/01/2015
Forum sur l’unité nationale – Conférence avec le Ministre d’Etat belge Charles Ferdinand Nothomb à la CCIAM
Mauritanie Perspectives – Dans le cadre du projet « Observatoire de suivi citoyen du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté en Mauritanie», financé par l’Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement (AECID), Mauritanie Perspectives (MP) a organisé une conférence animée par le Ministre d’Etat belge Charles Ferdinand Nothomb pour comparer les évolutions de la Belgique et de la Mauritanie sur la question de l’Unité Nationale.
Mauritanie Perspectives a fait de l’unité nationale une question majeure de son plan d’action pour contribuer à la consolidation de l’état de droit.
Différentes actions sont organisées à ce propos, entre autres le lancement d’un forum sur son site internet (www.mp.mr) qui constitue une plate-forme de dialogue pour la consolidation de l’unité nationale et un dîner –débat avec des personnalités de premier plan, de la société civile, de partis politiques, du secteur privé et du monde universitaire.
Dans son ambition de rechercher des débuts de réponse et de contribuer à l’ébauche d’un élargissement des champs possibles, MP a organisé mercredi 7 janvier une conférence sous le thème :
Quelles similitudes et quelles différences des problèmes de structuration de l’unité nationale en Belgique et en Mauritanie ? Quels enseignements éventuels à tirer pour la Mauritanie des évolutions en Belgique.
En effet, compte tenu des similitudes entre la Belgique et la Mauritanie sur les questions de structuration de leur unité nationale, MP a jugé opportun de tirer des leçons de l’expérience belge à travers le Ministre d’Etat Monsieur Charles Ferdinand Nothomb, qui a animé la conférence-débat.
Les principales idées de l’exposé sont :
Quelles similitudes et quelles différences des problèmes de structuration de l’Unité Nationale en Belgique et en Mauritanie?
A/ Similitudes
Pays de population moyenne (4 millions et 11 millions), réparties en 3 groupes principaux s’exprimant à travers le suffrage universel dans l’attribution des pouvoirs exécutif et législatif, ayant du obtenir et organiser leur indépendance nationale ensemble par différenciation avec des voisins partageant des caractères identiques à ceux des 2 groupes principaux (pour la Belgique néerlandais au nord et français au sud).
B/ Différences
L’Etat belge indépendant est installé depuis 180 ans, le suffrage universel s’y exprime seulement pour l’élection du Parlement et l’option pour le suffrage proportionnel évite la bipolarisation et conduit à des coalitions. En Belgique, les polarisations et les problèmes sont d’ordre Linguistique et non Ethnique. Ils résultent de :
• L’usage prédominant du français par les élites de la région flamande au XIX siècle (région nord, 6 millions et demie d’habitants aujourd’hui),
• Et de la volonté d’imposer la langue néerlandaise comme instrument d’émancipation et de progrès social du peuple flamand par :
– l’usage exclusif du néerlandais dans l’administration, la justice et l’enseignement en région flamande,
– et le bilinguisme dans la gestion de l’Etat fédéral.
Ce double objectif est progressivement atteint par de nombreux combats politiques pour des changements de législation nationale entre 1860 et 1960 et pour l’autonomie culturelle.
Pendant cette période, la partie francophone du pays (région sud wallonne, 3.5 millions d’habitants et 80% de la population bruxelloise) est économiquement dominante.
A partir de 1960, la problème linguistique est doublé et relayé par une polarisation économique, résultant
• de l’affaiblissement radical de l’industrie lourde qui faisait la richesse de la région sud et de l’implantation d’industries modernes (automobile etc.) attirées par le marché Commun dan l’Europe des 6.
• Et des besoins financiers considérables de la région sud pour maintenir les structures publiques développées du temps de sa prospérité et pour assurer sa reconversion et son son autonomie économique.
Cette double pression pour l’égalité et l’autonomie culturelle des uns et pour le soutien financier et l’autonomie économique des autres a contribué à former des majorités nationales larges pour régionaliser l’exercice de nombreuses compétences à travers des entités régionales autonomes disposant de parlements et de gouvernements différents du gouvernement fédéral qui continue à gérer les compétences restées nationales.
Quels enseignements éventuels à tirer pour la Mauritanie des évolutions en Belgique
La transformation institutionnelle s’est réalisé en 40 ans, 6 étapes commençant par des régionalisations préparatoires au sein du gouvernement national, avec de larges majorité constitutionnelles de 2/3 au parlement, issues de majorités diverses, et conformément à la Constitution originelle.
Ce transfert de compétence s’est effectué vers de nouvelles institutions régionales et non vers les anciennes structures provinciales de décentralisation sous tutelle. Le respect des limites de ses compétences par chaque institution est contrôlé par une Cour Constitutionnelle. La Constitution a garanti l’égalité entre les Belges sous contrôle de la Cour constitutionnelle.
Le système proportionnel facilite les alternances et les coopérations entre majorités différentes, Les entités sont « équipollentes » mais la concertation est organisée.
La législation européenne (convenue entre les Etats membres), directives et règlements, prévaut sur la législation nationale (fédérale et régionale). Les membres de la Cour constitutionnelle sont désignés par le Parlement, à la proportionnelle des différents partis, le gouvernement fédéral est paritaire (7 ministres francophones + 7 ministre flamands + 1 premier ministre) En résumé la leçon essentielle est que le fédéralisme a deux entités principales est difficile par suite de l’influence directe et réciproque du fédéral et du régional même s’ils sont autonomes car il y a un même corps électoral et une double opinion publique selon la langue utilisée.
Ce qui tient la Belgique ensemble, ce sont les Belges qui n’ont pas envie de se séparer même s’ils argumentent sans cesse entre eux et devant la double opinion publique sur la base de leurs différences. Ils partagent, néanmoins, une même culture politique très différente de la culture politique française ou néerlandaise ainsi que les respect de l’Etat de droit dont la règle est la même pour tous.
Les compétences décentralisées relèvent surtout des politiques publiques tandis que la législation de base comme les droits individuels restent nationaux. Enfin la stabilité des administrateurs est un élément clé de leur influence.
Courte biographie de Charles Ferdinand Nothomb
– Né en 1936
– Docteur en Droit en 1957
– Licencié en Sciences Economiques en 1958
– Député de la province du Luxembourg de 1968 à 1999
– Président du Parti Social Chrétien Francophone de 1972 à 1978 et de 1996 à 1998
– Ministre des Affaires Etrangères 1980- 1981
– Ministre de L’Intérieur, de la Fonction Publique et de la Décentralisation 1982 à 1987
– Président de la Chambre des députés de 1988 à 1995
– Ministre d’Etat depuis 1994
– Depuis 2004 Président de la Fondation du Dialogue Sud Nord de la Méditerranée
Marié, père de trois enfants et grand père de neuf petits enfants Publications
– La vérité est bonne 1987
– La démocratie belge 1991
– Principes de démocratie 1994
– Au fond des choses 1998
– La réussite de cinquante ans (1960-2010) de développement d’une province rurale 2014
CRIDEM