Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Monthly Archives: January 2015

Mauritanie –Perspective : Problématique de L’unité nationale Contribution de Samba THIAM- Inspecteur de l´Enseignement et Président des Forces Progressistes du Changement(FPC)

Dans le cadre d’une invitation à un diner débat organisé par Mauritanie- perspectives  autour du thème « Unité nationale »  Mr  Samba Thiam, Inspecteur d’Enseignement et Président des Forces Progressistes du Changement (FPC),  a produit cette contribution.

Bonne lecture. LLC!

Je voudrais, avant d’entrer dans le vif du sujet, saluer l’initiative, en même temps, rendre hommage aux initiateurs du projet, de par leur posture d’intellectuel, dont le rôle « n´est pas de plaire ou de séduire mais de porter la plume sur la plaie, de dire  ce qui est ». Un rôle, par-dessus tout, « de vigile, d’alerte au danger, à la manière des Oies du Capitol ».

Au regard des menaces de péril en la demeure l’initiative est bien venue, opportune plus que jamais, et reflète, par ailleurs, la  sagesse et un patriotisme certain. Je ne puis également ne pas souligner son caractère mémorable et historique. En effet, pour la première fois, dans l’histoire de notre pays,  on choisit  de parler du problème de « l’unité nationale », rien que de l’unité nationale. Directement, frontalement, posée comme  thème  central, sans amalgame… 

La seule petite réserve que je me permets d’émettre ici est relative à la démarche choisie, qui consiste à agencer des thèmes, cloisonnés, que l’on  nous propose de traiter. Or, à mon humble avis, aborder ainsi ces thèmes, de manière isolée, sans qu’ils ne découlent de l’analyse préalable de la problématique générale (l’unité nationale), risquerait de nous mener vers de  fausses pistes, car on les  traiterait à vide, en leur apportant des réponses essentiellement techniques, sans lien  apparent avec la problématique centrale qui, elle, est éminemment politique. Pour me résumer, j’aurais  plutôt suggéré  de définir et cerner  d’abord « la problématique de l’unité nationale », de laquelle découlera  le traitement des thèmes choisis, parce que  les problèmes et disfonctionnements existant, ici et là, dans tel ou tel secteur particulier, résultent, en fait, de cette problématique –cause première –  d’essence politique. Si l’Enseignement est actuellement en dérive et que la justice ne fonctionne pas, ou que la discipline et l’équité  se soient envolées dans l’Armée,  c’est bien à cause des idéologies …

A  la  réserve plus haut, j’ajouterai une recommandation, nécessaire me semble-t-il, à savoir les dispositions psychologiques à attendre de  chacun des intervenants pour réussir ce débat : esprit d’ouverture et d’écoute, franchise et réelle volonté de chercher et trouver des solutions…

 Entrons maintenant dans le vif du sujet.

 Les questions qui surgissent sont du type  quelle  problématique ? Comment se caractérise-t-elle ? Quelles en sont les causes ? Quelle(s) solution(s) s’il en existe ? 

Il  y a un réel «  problème d’unité nationale » ou de cohabitation, incontestablement; L’unité actuelle (bancale, osons le dire) semble menacée de voler en éclats. Pourquoi ?

L’unité est en danger, en raison principalement, me semble-t-il,  de la rupture du fragile équilibre entre les composantes nationales, au sortir de la colonisation;  Hier nos communautés nationales se partageaient les charges, aujourd’hui une seule composante nationale, un groupe ethnique s’arroge tous les droits, contrôle, voire monopolise, pour l’essentiel, tous les rouages de l’Etat, tous les secteurs de la vie publique, à cause ou  par la complicité de l’Etat. La réalité des pouvoirs  politique, économique, diplomatique, militaire, culturel, social, médiatique, reste aux mains d’une seule composante nationale, excluant quasiment Négro-africains et Haratines ; Cette discrimination -ou racisme d’Etat- ouvertement menée,  suscite, en réaction,  un fort sentiment d’injustice, des frustrations, de l’exaspération , et  par-dessus tout  un sentiment d’inutilité chez les victimes, à leur pays ; or ,  « personne, pas même un saint, ne peut vivre sans le  sentiment de sa valeur individuelle » nous dit  J.H. Griffin . La grande Justice, d’essence politique, que l’Etat est censé garantir et distribuer à tous, a fait place, aux inégalités nombreuses, aux injustices  flagrantes, érigées en Système de gouvernement.

 Pour illustrer mon propos  Je  citerai  quelques exemples marquants, caractéristiques  de  cette discrimination :

 Dans  les forces armées et de sécurité le corps de commandement est composé essentiellement d’Arabo-berbères, Négro-africains et Haratines, constituant le gros de la troupe, se retrouvent au bas de la pyramide;  Comme par provocation, la langue arabe vient d’être instituée dernièrement comme langue de cette institution, excluant, de facto, les Négro-africains déjà épurés de la grande muette depuis les évènements de 1986-1990.

         _ Si nous  considérons le gratin  scolaire, c’est-à-dire nos « grandes Ecoles », comme  l’école des mines, l’école de médecine, l’école polytechnique, l’école de la magistrature et de la haute administration, le Prytanée militaire, l’école des officiers, nous constatons que toutes ces écoles  recrutent à  99 %  dans la composante arabo-berbère. Il faut souligner que la base même de l’exclusion raciale ou du groupe Négro-africain ce sont  les réformes scolaires engagées en séries, qui visent à  imposer et à instrumentaliser la langue arabe, à des fins de discrimination, d’assimilation et de domination. A côté  du  français, langue étrangère face à laquelle  tous les enfants ont des chances égales, on a imposé non seulement la langue arabe, mais on l’a imposé en la fragmentant, en matières éclatées – cinq (5) – affectées  du coefficient deux ou trois (2 ou 3),  pénalisant ainsi exclusivement les élèves négro africains. L’échec massif des élèves et étudiants négro-africains aux examens et concours est imputable, en grande partie,  à  cet état de fait.
 Il est bon de comprendre, comme le rappelait quelqu’un, que l’unité nationale ne se fait pas, forcément autour d’une langue; l’unité se fait lorsqu’on parle le même langage, plutôt que la même langue…

                _  Au niveau des médias  il n’y a pas mieux;  pas un seul n’a été cédé à un négro-africain; pis, après  21h-22h  toutes les chaines privées et publiques émettent en langue arabe ou hassanya jusqu’au matin;  une portion congrue est accordée aux langues nationales africaines, et encore  dans des périodes de plus mauvaise écoute !

 Pour clore ces illustrations, examinons  la représentativité des communautés nationales au parlement : 

                 _Le parlement mauritanien compte 203 parlementaires (sénateurs et députés confondus); parmi les 203 parlementaires il y’a 150 Arabo-berbères soit  (73 %), contre 20 Haratines et 33 Négro-africains, alors que les deux dernières composantes constituent près de  80 % de la population totale ! Second cas, non moins flagrant de discrimination, entre autres : le Guidimakha – région Sud-compte 20.7000 âmes et la région de l’Adrar  62.000 âmes ; cette dernière est représentée au parlement  par 5  députes et 4 sénateurs alors que le Guidimakha, 3 fois plus peuplé, ne compte que 6 députés et 2 sénateurs.  Où est donc l’équité ?
Je vous fais l’économie des secteurs de la justice, de l’Economie, (banques et entreprises privées et publiques) où certaines composantes sont quasiment absentes; un  enrôlement au dessein obscur, exécuté par des commissions mono-ethniques censées recenser une population pluriethnique; enrôlement qui divise le couple, la mère et l’enfant, octroyant  à l’un le statut de mauritanien, à  l’autre celui d’apatride !

Le journaliste Dahane ould Taleb Ethmane, dans une recherche  intitulée « partage régional des hautes fonctions de l’Etat », menée en 1990 (Mauritanie-Nouvelles), affirmait que « l’Etat mauritanien apparait comme un compromis entre les grandes tribus ».  Le chercheur Olivier Leservoisier, dans  « Question foncière en Mauritanie » ressortit des  travaux de Dahane  la part de « pouvoir » attribuée aux Négro-africains dans l’Etat : « pouvoir politique 12%, pouvoir économique 6%, pouvoir administratif 21%, pouvoir diplomatique 12%, pouvoir militaire 15% ».

Que reste-t-il de ces chiffres  au regard de la réalité  de 2014 ? Rien …

Au vu de ces  illustrations de discriminations et d’inégalités criantes, nous pouvons affirmer que nos difficultés actuelles de coexistence pacifique  résultent essentiellement de l’absence de justice;  non pas  la justice au sens restreint du terme, mais  la grande justice, d’essence politique comme le dirait Yehdih Bredeleil; celle assurée par l’Etat dans tous ses démembrements. Cette Justice symbolisée par  l’équité, l’égalité des chances, l’égalité des droits effectifs, l’égalité devant la loi  garantie par l’Etat, impartial, sur lequel le faible et la victime peuvent s’appuyer;  l’Etat  – le nôtre – est malheureusement devenu, hélas, l’instrument au service d’un seul groupe ethnique, au service  des  membres puissants de ce groupe ethnique. Le vivre- ensemble doit avoir pour socle et condition le respect de la diversité (culturelle, ethnique, religieuse etc), sinon il ne se justifie pas. 

Souvent, on nous oppose l’argument du nombre (majorité) pour justifier l’ordre inique actuel, comme si la « minorité », pour avoir se droits, devait dépendre de la générosité de la majorité ! 

L’une des  sources principales des problèmes d’unité que nous rencontrons  est à chercher dans le  soubassement idéologique de nos dirigeants qui ont  manqué de vision, s’obstinant à  vouloir faire de ce pays un pays arabe, exclusivement, « au mépris de la réalité  factuelle de sa diversité »; s’y ajoute le flou ayant entouré l’usage, sans clairvoyance, des  concepts  d’unité, de nation, d’Etat-nation, à revisiter  … Que voulaient nos pères fondateurs ? Que voulons-nous ?

Voulons –nous  Unir ou  unifier  nos nations ? Cherchons-nous à construire l’unité ou à faire de l’unitarisme ?

 En optant pour l’unitarisme  à la place de  l’Unité, l’on  gommait, de facto, toute identité qui n’était pas arabe, afin d’accoucher, au forceps, une « nation » arabe, au mépris de toute identité non arabe. Nos pères fondateurs et leurs successeurs se sont fourvoyés dans l’option du  concept  d’Etat-nation – qui n’existe  toujours pas  – à la place de l’Etat multi-nations, plus adapté à la réalité africaine, fédérateur de la pluralité des  nations, des langues et cultures. Le concept d’Etat-nation est inadapté à la réalité africaine plurinationale, à logique différentielle et segmentaire, selon M  Tshiyembe, l’Etat-nation, rappelle par ailleurs Cheikh  Anta Diop dans « Civilisations ou barbarie »,  suppose au préalable des nations  rendues homogènes par la violence … Ce qui  n’est pas notre cas !

En vérité, si notre unité est actuellement mise à mal, c’est parce qu´en réalité, elle a toujours été une unité  de façade, bancale, et qu’elle ressemblait davantage à « l‘unité du cavalier et de sa monture » !  L’explication de notre crise actuelle d’unité  pourrait se résumer  simplement par cette formule triviale : hier  la monture acceptait de subir ce qu’elle refusait, aujourd’hui elle se cabrait  et refusait de se faire monter. C’est aussi simple que ça !

 Quelles solutions ?

 Avant d’exposer mes  propres vues sur les solutions possibles, je voudrais revenir sur  celles évoquées,  ici et là, vis-à-vis desquelles je nourris  des réserves, de fortes réserves…

 D’abord  « la solution par l’Islam »…

 Si  l’Islam, comme le prétendent certains, était  un facteur à 100%  unificateur, on n’aurait pas assisté à la naissance de  tous ces schismes  dès sa prime enfance, tout de suite après la disparition du Prophète Mohamed (paix sur lui).

  J’observe, par ailleurs, que « l’Islam  mauritanien », au regard de ses expressions et  prises de position, de ses silences… est un Islam particulier, à deux vitesses, voire hypocrite … Enfin, à supposer que l’Islam soit  la bonne solution à nos problèmes, où sont les musulmans  pour l’appliquer ?

Enfin, je récuse cette solution au regard des expériences historiques de l’Inde, du Pakistant, du Bengladesh, de l’Irak et du Soudan qui ont prouvé que le facteur déterminant de la bonne coexistence était, non pas le facteur réligieux, mais le facteur ethnique.

 Examinons maintenant « la solution par la Démocratie » que soutiennent d’autres courants  

 J’affirme, d’emblée, qu’elle n’emporte pas non plus mon adhésion …

 En effet, il nous souvient que  la Démocratie de  l’Apartheid n’avait pas éliminé la discrimination raciale et  les bantoustans en Afrique du Sud ;  tout comme la Démocratie made United States –première démocratie du monde – s’était accommodé  de la ségrégation raciale, et  demeure  encore familière du racisme  au quotidien !  Que dire enfin  de notre « démocratie  mauritanienne » qui s’est toujours fort bien accommodé de l’esclavage et du racisme, du déni d’humanité et de citoyenneté ? On voit bien que sous une égalité de principe peuvent se camoufler discrimination ethnique et esclavage !

 Ajoutons que la  citoyenneté – socle de la démocratie – contrairement à la vision libérale, ne peut être disjointe de l’ethnicité nous rappelle M Tshiyembe ;  «  La vison  communautariste insiste sur l’impossibilité d’une telle  séparation ». Bref une  citoyenneté, ethno-culturellement neutre, qui impulse et guide, seule, l’individu quand il interagit sur l’espace public, est une citoyenneté   abstraite, une fiction, une utopie  …encore plus  dans le contexte africain. «  La mobilisation citoyenne est bien souvent imparablement culturelle et ethnique »  soutient Souleymane Bechir Diagne. Peut-être, se demandait-il, faut –il penser l’ethnicité comme forme de citoyenneté …

 Non, la solution par la démocratie ou par l’Islam n’était pas la mienne ; Elle me semblait trompeuse, fallacieuse …Mais si elle devrait malgré tout s’appliquer à défaut de mieux , il faudrait alors qu’elle aie pour  socle des règles pré-établies fondant les modalités de l’unité,  à la manière de la Suisse, de la Belgique, de la Bosnie, du Liban, ou de la Birmanie .

 Ces réserves étant faites, quelles solutions ?

* La Solution par les lignes principielles, base essentielle de toute solution juste, viable et durable …

Si nous devions rebâtir notre unité, construire la bonne unité – la vraie –  celle-ci devra  reposer sur des bases justes, sur les lignes principielles que voici : Egalité, égale dignité, respect mutuel, respect des différences,  partage  équilibré du pouvoir,  justice sociale.

 Peu importe les solutions spécifiques des uns et des autres, pourvu que ces lignes en constituent le socle.

 De ces lignes principielles découlera, par voie de conséquence,  une  modification radicale de notre vision de l’unité en cours, une nouvelle redéfinition de l’identité du pays, une  rupture totale d’avec  nos  pratiques actuelles…

 Voilà pourquoi, pour être en phase avec cette démarche de rupture, nous proposons l’autonomie.

 Une fois la problématique de l’unité  passée au crible, on s’acheminera  alors vers la  réconciliation nationale  dont le processus se déclinera en trois étapes :

                                                 – Apaisement du climat social  (par un train de mesures positives d’apaisement, allant dans le sens du règlement global du passif humanitaire et des  effets collatéraux de l’enrôlement, doublé d’un appel fort en direction des organisations anti-esclavagistes à rassurer)

                                                 – Débat national devant déboucher sur des solutions consensuelles portant sur les grands axes de  réformes  constitutionnelle ( charte de la cohabitation, séparation des pouvoirs,  partage équilibré du pouvoir, droits et devoirs de l’opposition, gouvernement consensuel ou, au contraire , contrôle des actions du gouvernement de la majorité par l’opposition, etc), institutionnelle  (direction collégiale à présidence rotative , observatoire national des libertés et de la cohabitation , etc ) suivront alors, et alors seulement    

         – Les Etats généraux  … (de l’Armée, de l’Education, de la Justice, de l’Administration)    

 Les problèmes sont inhérents aux sociétés et aux  groupes humains. Nous avons les nôtres …

Nous devons donc replacer notre problématique de coexistence, en dépit de son intensité et de son acuité , dans le cadre de la lutte naturelle entre groupes humains, inscrite  dans l’ordre naturel  et normal des choses, régie par des lois naturelles ( lois de sociologie)…

 Bien que nos gouvernants aient, par leurs politiques nocives, une large part de responsabilité dans ce qui nous arrive, il n’empêche que des lois  naturelles nous gouvernent, à l’emprise desquelles on n’échappe pas … ; il en est ainsi, selon Ceikh Anta Diop, de la loi–disons  de proximité – qui pose que « lorsque des groupes ethniques partagent le même espace, ils ont tendance, chacun, non pas à assujettir mais à assimiler l’autre » ; une autre  loi stipule que « Lorsque le pourcentage de la minorité augmente la lutte des classes a tendance à se transformer en lutte des races » . Comprendre ces phénomènes  aide à replacer notre problématique dans la  juste mesure des choses. Il existe d’autres lois, telle la loi  de la distance, la loi du phénotype etc,  qui expliquent, à leur tour, la nature des rapports entre groupes humains …

 Mais il y’a les lois de la nature, et il  y’a la volonté des hommes …

 Avec une volonté forte, clairement affirmée,  de la  vision, l’on vient à bout de l’emprise des lois, l’on réussit à déplacer des montagnes, à résoudre, en un mot, toute problématique, fut-elle complexe et délicate. Il suffit de  vouloir, car nous dit l’adage, rien, absolument rien ne peut arrêter une volonté sans réserve.

 Le bon sens nous souffle à l’oreille que l’exclusion est socialement explosive, politiquement corrosive, économiquement mauvaise, alors ressaisissons-nous; faisons comme les Birmans, en nous demandant comment, chacun pour sa part, pourrait contribuer à la grandeur de la Mauritanie.

 Il nous faut nous ressaisir  … 

La lutte continue !

 Samba Thiam

 Inspecteur de l’Enseignement Fondamental 

 Président des Forces Progressistes du Changement (FPC) 

Décembre 2014.

 

WWW.FLAMNET.INFO

Les FPC mettent en garde contre une condamnation des militants de l’IRA

Les Forces Progressistes pour le Changement (FPC) en Mauritanie  (ex FLAM)-issues de la mouvance nationaliste négro africaine, mettent en garde contre une éventuelle condamnation de militants antiesclavagistes de l’Initiative de Résurgence du mouvement Abolitionniste (IRA), arrêtés le 11 novembre dernier et dont le verdict du procès devant le tribunal correctionnel de Rosso (200 kilomètres au Sud de Nouakchott), est attendu le 15 janvier prochain, dans une déclaration rendue publique dimanche soir.

Parmi les militants en détention préventive figure Biram Ould Dah Ould Abeid, leader du mouvement, classé deuxième à l’élection présidentielle du 21 juin 2014 et prix des Nations Unies (ONU) pour les droits de l’homme en 2013.

A l’issue d’une série d’audiences entamées fin décembre, le parquet a requis une peine de 5 ans de prison ferme contre ces activistes antiesclavagistes pour « appartenance à une organisation non reconnue » et diverses autres infractions liées au trouble à l’ordre public.

Les FPC rappelle la condamnation récente  à la peine de mort d’un jeune reconnu coupable « d’apostasie » par la cour criminelle de Nouadhibou.

Un verdict rendu par “une justice qui constitue l’excroissance d’un système féodalo-raciste aux forfaits duquel elle apporte une onction légale.”

Ce mouvement de l’opposition  redoute un « nouveau simulacre de procès » dans le traitement du dossier des militants antiesclavagistes « suite à des signaux émis par les tenants de l’ordre discriminatoire, une frange de religieux déterminés à tirer la Mauritanie vers le bas » par la violation des règles de droit et du principe d’une justice indépendante et équitable.

La déclaration rappelle les lourdes  condamnations contre les militants négro-africains dans la seconde moitié des années 1980.

 

le calame

Festival des villes anciennes: O. Abdel Aziz appelle au dialogue depuis Chinguetti

ALAKHBA (Chinguetti)-Le chef de l’Etat mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz a réitéré son appel au dialogue depuis Chinguetti (Nord) où il se trouve pour le lancement de la a cinquième édition du « Festival des villes anciennes».

«Je renouvelle notre entière disposition pour l’instauration d’un dialogue inclusif pour la réalisation des intérêts suprêmes de la nation», a dit le chef de l’Etat mauritanien.

Ould Abdel Aziz a rappelé: « Nous avons annoncé dans le discours d’investiture du nouveau mandat présidentiel notre constante disponibilité à rester ouvert au dialogue avec toutes les composantes nationales parce que nous sommes convaincus de la nécessité de la participation de tous à l’œuvre de construction nationale. »

Le président mauritanien a procédé ce dimanche au lancement officiel de la cinquième édition du festival des villes anciennes qui va se poursuivre jusqu’au 10 janvier à Chinguetti.

Déclaration de presse des FPC sur les simulacres de justice du Système

altAprès Mohamed Cheikh Ould Mohamed, condamné arbitrairement à mort pour satisfaire des Mollahs, c’est au tour de Biram Dah Abeid et des militants des droits de l’homme de subir les foudres de notre justice aux ordres. Une justice qui  constitue l’excroissance du Système féodalo-raciste aux forfaits duquel elle apporte une onction légale. Il est à craindre que le tribunal de Rosso, à l’instar  de celui  de Nouadhibou, ne puisse  s’affranchir des injonctions du régime désireux de plaire à cette frange rétrograde de nos religieux  qui veut  tirer la Mauritanie vers le bas.

Ces simulacres de procès en cascade envoient un  signal, un seul signal de menaces, émis par le pouvoir et les tenants  de l’ordre discriminatoire en direction de tous ceux qui s’érigent contre le Système ou tentent de le remettre en cause. Comme en septembre 1986 contre les dirigeants des FLAM, en novembre 1987 contre les militaires  négro-africains, puis contre SOS-Esclaves, et maintenant contre l’IRA, la justice répressive du Système se révèle n´être qu´un instrument de dressage et d’assujettissement des communautés  traitées comme  inférieures.

Ni les principes d’équité islamique, ni le droit, ni encore moins la légitimité n’ont de valeur face à la volonté des régimes arabo-berbères  de  perpétuer l’ordre inique  établi.

De quels crimes les marcheurs de la “caravane contre l’esclavage foncier” sont-ils coupables? Ils ont juste eu tort de dévoiler à la face du monde l’horreur des fosses communes que le pouvoir couvre par la diversion et les fuites en avant, le honteux bradage du patrimoine foncier de la vallée et l’archaïsme d’une tradition qui prive les couches les plus productives du droit à l’accès à la terre.  En somme, tout ce qui traduit  la faillite d’un Etat qui se veut islamique mais  s’accommode de l’arbitraire et de l’illégalité et tente de brider les libertés fondamentales pourtant garanties  par la Constitution.

Attachées aux principes de justice et d’équité, les Forces Progressistes du Changement ( FPC )

–   Rappellent que rien ne peut  contenir les aspirations légitimes et irrépressibles des communautés discriminées à l’égalité, à la liberté et à la dignité,

 

–   Expriment leur totale  solidarité aux militants de l’IRA

 

–   Dénoncent fermement ces mesures arbitraires qui annoncent le retour des pratiques et réflexes autoritaristes,

 

–   Condamnent avec énergie l’instrumentalisation de la justice et la religion à des fins politiciennes,

 

–   Réclament la relaxe pure et simple des caravaniers du foncier et du leader de l’IRA et exigent la reconsidération de la peine du jeune Mohamed Cheikh Ould Mohamed au regard de ses regrets dûment exprimés et des fondements douteux  du chef d’accusation.

           La Lutte continue!

      Nouakchott le 04 janvier 2015

 

      Département national à la communication.

  www.flamnet.info

solidarité

Dr Mariella Villasante Cervello : Chronique politique de Mauritanie décembre 2014 (9)

Réélection du président Mohamed Ould Abdel Aziz, avancée de l’islamisme radical et mouvements sociaux contre l’esclavage interne et pour les droits civiques des minorités noires

Congrès extraordinaire des FLAM: Résolution de politique générale— Les FLAM se transforment et se divisent
Les dirigeants des FLAM, notamment son président Samba Thiam, est revenu àNouakchott en septembre 2013 après 23 années d’exil volontaire en France. Les principaux dirigeants, dont Thiam, Ibrahima Mifo Sow et Mamadou Wane, ont rencontré le président Aziz en avril puis en novembre 2013, et ont tenu des discussions apparemment cordiales sur les problèmes du pays [Moussa N’Diaye, CRIDEM du 19 juillet 2014]. Cependant, en juin 2014, Samba Thiam a fait des déclarations qui critiquent de front ce qu’il appelle « le système », c’est-à-dire l’ordre étatique qui
discrimine les Noirs. Dans cet entretien au journal Le rénovateur [CRIDEM du 5 juin42], centré sur les élections présidentielles de 2014, Samba Thiam déclare : « Pour nous ces élections sont sans enjeu parce que nous pensons que notre problématique est ailleurs ; et que cette problématique ne peut être résolue par des élections ; c’est notre conviction. Nous le constatons, depuis 50 ans des élections passent et repassent, sans que cela ne change quoi
que ce soit dans notre condition d’exclus ! Mieux, nous croyons fermement que ce ballet d’élections contribuent à cacher, voire à banaliser notre exclusion. Alors, si l’on devrait se résoudre à aller aux élections, par la force des choses, autant au moins le faire avec grâce et style ! Rappelons que notre problématique tourne autour d’un Système que nous voulons détruire et que d’autres (ils sont légion et de tous les bords) s’évertuent à préserver. Un Système qui tire sa source de l’idéologie Afrikaner : “Annihiler la force numérique et la force de travail que représentent les
Noirs afin de les transformer en instruments, sans qu’aucune possibilité ne leur soit laissée de sortir de cette situation”. Nous oeuvrons pour des changements en profondeur, visant à refonder la Mauritanie sur des bases égalitaires, justes, démocratiques, afin de garantir son unité, préserver sa stabilité et assurer son avenir. » [C’est moi qui souligne]. De fait, si le président des FLAM défend avec raison les principes républicains pour la Mauritanie, sa comparaison avec l’ancien système d’apartheid de l’Afrique du Sud, maintes fois repris dans le passé, est déplacée. En outre, il semble paradoxal qu’une formation politique refuse de participer aux élections, qui restent la seule instance de gouvernance démocratique. Mais cette position changera plus tard avec la fondation d’un parti politique par une aile des FLAM. Cela étant, les FLAM ont déployé une campagne de prise des contacts avec les dirigeants nationaux et les fonctionnaires des ambassades. Ainsi, le 16 juillet Samba Thiam a reçu en audience le conseiller politique de l’ambassade des Etats-Unis à Nouakchott, James Ermarth, accompagné du chargé des programmes. On a rapporté que les deux parties ont eu des échanges intéressants sur la situation du pays [CRIDEM du 18 juillet].
Le retour des FLAM a soulevé la question de leurs relations avec les deux mouvements existants dans le pays, l’IRA et TPMN, qui ont été très actifs ces dernières années. Ainsi, lors d’un entretien effectué le 2 août, Samba Thiam a considéré que, contrairement à ces mouvements de défense des droits humains, les FLAM sont une force politique, voici un extrait43 :
« Je trouve d’abord cette comparaison inappropriée, même surprenante ! IRA et TPMN sont des organisations des droits de l’homme, tout court, alors que les FLAM constituent une formation politique. En second lieu, leur champ d’action, plus restrictif, est différent du nôtre, même s’il pouvait y avoir un recoupement, par endroits. IRA et TPMN viennent de naître alors que les FLAM sont une force politique vieille de 30 ans, forgée dans la douleur de la répression et de l’exil, traînant un passé lourd, un parcours singulier. Enfin nous venons juste d’arriver… Nous avons donc besoin d’un peu temps pour reprendre complètement notre place ici, mais nous y travaillons,
avec patience et acharnement, rassurez-vous. »
Communiqué de presse: Une délégation américaine au siège des flamJames Ermarth visite Samba Thiam
[CRIDEM du 18 juillet]
Certes, on peut dire que l’IRA et TPMN ont des revendications centrées sur la défense des droits humains ;cependant, contrairement à ce qu’affirme Thiam, ces revendications ont des objectifs politiques dans la mesure où elles expriment la volonté de justicesociale des groupes concernés. Du reste, l’IRA a fait le choix de sa conversion en parti politique, le RAG, même s’il n’a pas été accepté par les autorités mauritaniennes. Et onaurait tort de minimiser la force politique que représentent tant l’IRA que TPMN seulement parce qu’ils sont nés il y a quelques années ; ils étaient et restent des forces politiques importantes avec lesquelles il faudra compter. La volonté affichée par les FLAM d’assumer la défense des revendications des Noirs mauritaniens a trouvé une limite sérieuse après le mois d’août. En effet, le 29 août, les FLAM ont tenu leur 8e Congrès à Nouakchott, placé sous le sceau de la « mutation ». En effet, après l’annonce de l’abandon de la lutte armée et leur entrée en politique, les dirigeants ont annoncé la transformation des FLAM en parti politique et un programme politique nouveau pour l’Autonomie du Sud de la Mauritanie [CRIDEM du 27 août44]. Dans son allocution, Samba Thiam a proposé, entre autres, l’adoption de l’appellation « Afro-mauritanien » qui remplacerait « Négro-mauritanien » lancée en 1989, et un projet d’Autonomie, voici deux extraits45 :
« Les Négro-africains ont mal, très mal à leur pays. Pour emprunter la formule d’El Said, je dirais que notre présent nous interpelle sur les questions existentielles de notre avenir, dans ce pays, nous « Afro-mauritaniens », pour user d’une terminologie dans l’air du temps ! (…) En guise de solution, pour ce qui nous concerne, nous optons pour l’Autonomie, projet qui sera, sous peu, porté à l’attention du public et de la classe politique. Cette Autonomie, objet de tant de conjectures, agitée comme un épouvantail par nos adversaires, je puis vous assurer et vous rassurer, ne sous-tend aucune arrière-pensée trouble, alors aucune ! Cette Autonomie demeure un projet de réorganisation territoriale et administrative, plus adaptée à notre réalité socio-culturelle, ethnique et tribale, sans plus ! Elle se fonde sur des critères objectifs, naturels, plus à même de réduire les tensions ethniques récurrentes et favoriser la cohésion sociale. La Mauritanie comporte une réalité tribale, ethnique et régionale têtue. Nous ne pouvons en faire table rase sans tomber dans d’autres travers ! Il faut la reconnaître, essayer de la moduler, de l’atténuer avec discernement, avec patience, afin de forger doucement, progressivement, une autre mentalité
sociale ! » [CRIDEM du 30 août]. Comme on pouvait s’y attendre, le projet d’Autonomie a été durement critiqué par les tenants du pouvoir. Le président de l’UPR, Sidi Mohamed ould Maham, a déclaré qu’il « ne rencontre aucun intérêt au sein des composantes du peuple mauritanien » ; les populations de la vallée rejettent, d’après lui, ce discours séparatiste [Saharamedias, Noorinfo du 21 septembre]. Ould Maham a promis enfin de « combattre les
extrémismes et les promoteurs de divisions », et a appelé les autorités à « frapper d’une main de fer sur tout groupe ou individu à tendance raciste ou séparatiste. ». Cependant, certains analystes, comme Ahmed Jiddou Aly, ont considéré que la proposition de décentralisation et d’autonomie est une proposition de bon sens46. Rappelant qu’il existe un Livre blanc de la décentralisation publié en décembre 2009, réalisé à la demande de l’ancien ministère de la Décentralisation et de l’aménagement du territoire, soutenu par le ministère de l’Intérieur, et financé par la coopération espagnole47. Cependant, Jiddou Aly remarque que le découpage envisagé par les FLAM n’est pas réaliste car on suggère la création de quatre régions dans un pays de plus d’un million de km2. Ce qui est
certain, comme il l’avance, c’est qu’il faut réinventer le découpage régional actuel et modifier la gestion des collectivités territoriales.

L'ambassadeur de France en Mauritanie au siège des FPC à Nouakchott à NouakchottL’ambassadeur de France, Joël Meyer, avec Samba Thiam [Noorinfo]
Au mois de septembre, la création d’un parti politique proposé au congrès d’août fut réaffirmée ; les FLAM devinrent ainsi les Forces progressistes pour le changement (FPC) [Le Calame du 1er septembre]. Mais cette tentative s’est soldée par la division du mouvement car les flamistes historiques ont refusé la reconversion en parti légal. Cette faction considère en effet que faire des FLAM un parti revient à légitimer le régime, alors que les FLAM doivent rester un « mouvement de libération nationale ». Cette position est défendue par des groupes mauritaniens et par la diaspora mauritanienne, notamment en France, qui dénonce la tenue d’un congrès « illégitime » et revendiquent la poursuite d’un militantisme radical déconnecté du jeu démocratique48. Il n’est pas encore clair de savoir comment se poursuivra cette division factionnelle qui ne présage rien de bon pour le programme de l’aile légaliste dirigée par Samba Thiam. Celle-ci est cependant appuyée par des personnalités politiques nationales, comme Jemil ould Mansour et Ahmed ould Mouloud, mais aussi étrangères, comme l’a montré la visite que le nouvel ambassadeur de France, Joël Meyer [qui a pris son poste en octobre], a rendue le 13 novembre 2014, à Nouakchott, au Président des Forces Progressistes du Changement, Samba Thiam. [CRIDEM du 16 novembre].

A suivre …/

Dr Mariella Villasante Cervello Institut de démocratie et droits humains (idehpucp, Lima, Pérou)  [mariellavillasantecervello@gmail.com]

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