Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Daily Archives: 01/04/2013

Crise : horizons bouchés

La Coordination de l’opposition démocratique (COD) s’apprête à redescendre dans la rue pour exiger le départ du président Aziz. Certains qui contestent ce mode opératoire de l’opposition radicale diront « une manifestation de plus ».

Crise : horizons bouchés
 

 

 Car depuis deux ans, il en est ainsi. L’exigence du « rahil » (départ) lancé à la faveur du « printemps arabe » n’a pourtant pas tenu ses promesses : A défaut de faire chuter le pouvoir du président Aziz, on peine aussi à persuader qu’il fait fausse route. Ainsi l’opposition qui manque de véritable stratégie politique contribue-t-elle à entretenir la crise, à enfoncer le pays dans une situation où le pire n’est pas de vivre dans des problèmes apparemment inextricables mais de mal envisager les solutions pour les résoudre. Et tout le monde, à part les leaders de la COD, s’accorde à reconnaître que la rue n’est pas la solution.

La propension à manifester tend même à pousser le pouvoir dans ses derniers retranchements, en choisissant, le radicalisme comme attitude pour faire face à la surenchère de la COD. Tout ce qui est entrepris par le pouvoir est destiné à lui faire gagner du temps, pas plus. A commencer par le dialogue, en arrivant à la date fixée pour les élections et en passant par la création de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et l’enrôlement. Et même si les problèmes économiques et sociaux ont tendance aujourd’hui à submerger la crise politique, il reste que cette dernière est celle par laquelle passe toute solution.

Ce n’est pas la peine de feindre que l’acceptation d’un nouveau dialogue entre les trois parties en présence (coalition des partis de la majorité, COD et Coalition pour une Alternance Pacifique) n’est pas possible à l’heure actuelle, quand on sait pourtant que c’est l’unique voie de sortie de la crise. Le retour en force de l’initiative du président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir, est en réalité un désaveu flagrant pour le dialogue « national » de septembre 2011. Sans la COD, le problème reste entier. On peut certes organiser des élections, avec la participation de la CAP mais ce ne sera pas suffisant pour servir de faire-valoir pour un gouvernement qui s’entête à reconnaitre que la plupart des institutions démocratiques (pour ne pas dire toutes) sont maintenant dans l’illégitimité totale.

On est dans l’administration du provisoire. En attendant que se tiennent les élections. Mais on sait aussi que celles-ci doivent impliquer tout le monde pour avoir une certaine légitimité mais surtout pour empêcher que la COD ne continue à réclamer, avant termes, une remise des compteurs à zéro. C’est le seul moyen de sauver ce qui peut encore l’être au niveau d’une situation où toutes les cartes sont brouillées. Il ne s’agit plus seulement d’’évoquer l’illégitimité du mandat « bonus » des députés mais aussi la présence à la tête du Sénat d’un président dont on ne sait s’il est intérimaire ou « héritier » de facto d’un poste laissé vacant par le décès de son occupant élu.

Un autre souci qui vient s’ajouter à ceux qui alimentent aujourd’hui la polémique sur les contradictions d’une démocratie bien particulière. Où tout ne se fait pas suivant les normes internationales mais les spécificités de la Mauritanie. Un pays où un coup d’Etat peut être validé par des parlementaires qui l’habillent en « rectification ». Où l’argent de l’armée sert à alimenter les affaires des civils, sans que l’on pousse les investigations plus loin pour savoir s’il y a une chaîne de « solidarité » autre que celle qui concerne le comptable et le principal protagoniste de cette affaire. Mais peut être bien que c’est la profusion des crises (ailleurs on parlerait de scandales) qui justifie cette administration du provisoire, l’objectif étant d’empêcher ces débordements qu’on a vu ailleurs et qu’on a appelé le « printemps arabe ». Un retour sur 2008 A quelques exceptions près, la crise actuelle ressemble, étrangement, à celle qui a suivi le coup d’Etat du 6 août 2008.

Qui est loin d’être consommé. La COD joue ici le même rôle que le Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD) mais avec moins d’efficacité, sur le plan intérieur et extérieur. Sans parvenir à convaincre le pouvoir que le rapport des forces n’est plus en sa faveur ou à persuader l’extérieur qu’il faut agir maintenant, comme en 2009, avec l’Accord de Dakar, pour empêcher le pays de sombrer. Ce défaut d’implication de la communauté internationale dans la recherche d’une solution à la crise, et dont on ne sait s’il est positif ou négatif, tient au fait que la COD ne tient pas compte, véritablement, de la singularité de la situation par rapport à celle de 2008 : Elle demande le départ d’un président élu alors que le FNDD réclamait celui d’un putschiste. Une confusion totale entre légalité et légitimité. Si en 2008, la communauté internationale dans son ensemble, menée par la France et les Etats-Unis, était d’accord pour que l’ordre constitutionnel devrait être restauré, même avec des accommodements qui ont permis au général Aziz d’être candidat, en 2013, c’est la démocratie qu’il faut sauver ! La situation actuelle fait de la Mauritanie le Gondwana de Mamane où tout est travesti pour que le Chef s’assure un semblant de tranquillité.

Tout le tintamarre fait donc autour de la tenue prochaine d’élections municipales et législatives, version CENI ou Majorité, ne constitue pas encore une « feuille de route » pour la sortie de la crise, de la formation d’un gouvernement de « compétences » et (et non d’union nationale) pour fléchir la position de principe – et de bon sens – d’une COD qui ne veut pas refaire les mêmes erreurs que lors de l’Accord de Dakar. Du côté de la Majorité, la situation devient intenable. Comme ils le font depuis le 6 août 2008, les soutiens du pouvoir mettent en avant la légitimité populaire qu’ils sont les premiers à avoir transgressée en soutenant la destitution d’un président élu au suffrage universel !

Un double langage qui, de plus en plus, est en train de s’effriter, à mesure que le temps passe et qu’on se rende compte qu’en l’absence de perspectives claires pour un pouvoir qui fait face à des horizons bouchés, la situation d’un Parlement « périmé » est le premier facteur d’un désaveu qui va crescendo. Incapables de se départir de leurs velléités putschistes, incompatibles avec leur statut de parlementaires et de « représentants du peuple », comme ils aiment à le rappeler, les élus de la Majorité semblent privilégier le principe dépourvu de conscience politique du « ça passe ou ça casse » ! En cela, ils rejoignent la COD qui, elle aussi, croit toujours possible une « récupération » du pouvoir par la rue. Fâcheux programme.

Source: Elhourriya

 

Noorinfo




Prière de Kaédi du 25 mars 2009 : Quid du Passif, quatre ans plus tard ?

Cela fait quatre années, depuis le 25 mars 2009, que Mohamed Ould Abdel Aziz avait présidé à Kaédi, capitale du Gorgol et symbole de la communauté négro-africaine, la prière dite de l’Absent, en mémoire de tous les disparus civils et militaires des pogroms de 1989. Cette prière avait pour objectif, selon les ténors du pouvoir, de renforcer l’unité nationale sur la base de valeurs et de tolérance en vue de solder ce que le langage officiel a consacré comme le « Passif humanitaire ».


Prière de Kaédi du 25 mars 2009 : Quid du Passif, quatre ans plus tard ?
 

 

Des mesures ont vite suivi cette symbolique génuflexion ad mortem, sous la guidance du grand imam de la ville. Mais le partage des indemnités entre les veuves et les orphelins ainsi qu’aux anciens militaires et agents des forces de l’ordre, la réintégration des anciens fonctionnaires exfiltrés du pays manu militaire, le retour des rapatriés du Sénégal, suivis par l’annonce officielle de la solde du Passif et la mort de l’ANAIR, laissent encore un goût amer d’inachevé. La célébration de cet anniversaire il y a quelques jours, fut ainsi l’occasion pour les organisations négro-africaines de dénoncer ce qu’ils ont qualifié de persistance des inégalités dans le pays.

Pour le pouvoir mauritanien, le dossier des évènements de 1989 est définitivement clos. Contre quelques millions d’ouguiyas, les Négro-mauritaniens ont en principe accepté de passer par perte sèche la mort de leurs tués, au cours de ces années de braise qui se sont étalés de 1989 à 1991. Plus aucun ayant-droit ou ancienne victime n’a plus le droit de faire la moindre réclamation. Les veuves et les orphelins ont été indemnisés, ainsi que les anciens militaires et agents des forces de l’ordre, les fonctionnaires refoulés ont été soit indemnisés soit réintégrés, tous les réfugiés sont retournés au pays, poussant ainsi l’Agence nationale d’appui et d’insertion des Réfugiés (ANAIR) à fermer boutique. Enfin, la prière de Kaédi de 2009 supervisée par le président Mohamed Ould Abdel Aziz a donné l’ultime onguent aux disparus de ces années de haine. Que certains continuent à réclamer justice n’a plus de sens, dans la mesure où les ayants droits, en signant les documents d’indemnisation avaient renoncé à toute poursuite judiciaire. Le ministre de la Défense pouvait ainsi tranquillement annoncer solennellement la fin du Passif Humanitaire.

Cette version officielle d’un dossier aussi lourd pour la conscience nationale ne semble cependant pas satisfaire tout le monde. Le droit à la mémoire et le pardon restent des exigences morales de pans importants de la communauté négro-mauritanienne qui estiment que le dossier est encore loin d’être épuré. Ils assimilent les solutions appliquées et l’annonce officielle faite comme la cendre qui couve un feu, formant un volcan endormi qui risque de faire éruption à chaque moment. L’impunité des auteurs présumés d’exactions commises à travers la torture, l’assassinat physique et la disparition forcée de milliers de noirs, est considérée comme une braise ardente sur le cœur meurtri des familles éplorées qui croisent chaque jour les bourreaux de leurs proches. Le parti Alliance pour la Justice et la Démocratie (AJD/MR) avait ainsi organisé dans ce sens une manifestation populaire pour dénoncer l’armistice de 1993 qui couvrait tous les auteurs de crimes. Mais cet appel restera certainement orphelin, en l’absence d’une adhésion plus large et plurielle.

Aujourd’hui, les Négro-mauritaniens considèrent qu’ils font face à un péril plus lourd que ceux vécus par les victimes de 1989-1991. Il s’agit de la marginalisation de leur jeunesse dans le marché de l’emploi, celle des fonctionnaires noirs à accéder à des promotions ou à des avantages. Alors que jusqu’en 1989, les Noirs représentaient l’écrasante majorité au sein de la Fonction Publique, dans l’armée et les corps constitués, ils ne sont plus qu’une faible minorité. Eliminés systématiquement dans les concours, ils se voient apatrides dans leur propre pays. D’où l’exil de plus en plus massif des Noirs de Mauritanie, la fuite des compétences et la sourde colère de ceux qui s’estiment désormais citoyen d’un pays où leur chance s’amoindrit de plus en plus. La dénégrification de la société mauritanienne se poursuit ainsi inexorablement à l’heure où des appels de plus en plus nombreux à l’unité nationale deviennent le leitmotiv de ceux-là même qui en détruisent les fondements. La réalité amère montre en effet, de quelques regards qu’on se tourne, que l’heure est au « blanchiment » des institutions, que cela soit dans l’audiovisuel, quatre radios privées et quatre télévisions privées aux mains d’une seule communauté, dans les ministères, les établissements publics, les institutions militaires et assimilées. Seules les organisations internationales et quelques entreprises privées internationales où les critères de compétence valent plus que l’appartenance tribale ou ethnique, restent ainsi le seul salut pour des couches entières de la population mauritanienne laissées en rade.

JOB
Pour l’authentique