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Mame Diack Seck : Quand le père de l’éducation nationale mauritanienne disparaît dans le silence le plus total…
Un des bâtisseurs de la Mauritanie s’est éteint le vendredi 23 novembre 2012. Mame Diack Seck, ancien ministre de l’éducation, conseillers de chefs d’état d’Afrique de l’ouest, haut cadre international, qui a formé tant d’éléments brillants de la seconde génération de cadres de ce pays, a été rappelé à Dieu dans l’indifférence la plus générale. Portrait posthume d’un très grand, de ceux dont la médiocrité de ce pays ne veut pas.
Un père de l’éducation nationale mauritanienne
Le silence des autorités sur cet homme, docteur en sciences naturelles de l’université de Paul Sabatier de Toulouse, qui a activement, et plus que bien d’autres, participé à l’érection des fondements de ces mêmes autorités, en dit bien long sur la valeur de cet homme.
«La pyramide des valeurs est inversée en Mauritanie : moins on parle de vous, en dépit de vos qualités reconnues par-delà le pays, plus vous avez de chances d’être quelqu’un de bien» assure un directeur de publication de la place, qui a eu la chance de bénéficier de ses lumières, du temps où Mame Diack Seck était proviseur du lycée de Rosso, de 1970 à 1976.
Et pendant quinze ans, des premiers moments de l’indépendance mauritanienne, il aura été celui qui littéralement aura posé les bases de l’éducation nationale mauritanienne, de 1964 à 1979, période durant laquelle il occupera différents postes stratégiques de cette éducation : inspecteur général de l’enseignement, proviseur du lycée de Rosso, professeur à l’école normale supérieure de Nouakchott, et enfin ministre de l’éducation.
«Mame Diack Seck était très certainement le premier Educateur de ce pays, au-delà de son poste éphémère au ministère de l’éducation (Le 11 juillet 1978, l’annonce de la composition du gouvernement du putschiste lieutenant-colonel Mustapha Ould Mohamed Salek, intègre Mame Diack Seck, en tant que ministre de l’éducation nationale- ndlr). Il a veillé sur la bonne formation et l’éveil intellectuel de centaines de cadres mauritaniens, dont beaucoup se sont révélés brillants par la suite» témoigne Malal Seck, un de ses petits-neveux, cadre à Tasiast.
L’intellectuel engagé

La Guinée est indépendante le 2 octobre 1958. Sékou et son régime sont immédiatement et durablement « mis au coin » par la France officielle et sévèrement critiqués par plusieurs leaders africains (Félix Houphouët-Boigny surtout, et aussi Senghor), qui pourtant suivront son exemple deux ans plus tard, mais sans en supporter les conséquences négatives. Les cadres et la jeunesse africaine s’enthousiasment et portent Sékou Touré au pinacle, comme en témoignent les écrits d’Aimé Césaire, de Jacques Rabemananjara, de Mongo Beti et de bien d’autres. Nombre de progressistes (africains et même français) affluent en Guinée pour aider le jeune État et compenser le départ précipité des cadres français.
Mame Diack Seck sera l’unique mauritanien à suivre ce chemin d’engagement et d’un idéal panafricain qui commençait à prendre forme dans le conscient collectif de ces jeunes cadres africain, et plus particulièrement dans celui de ce mauritanien de 26 ans à l’époque.
«Justement, si on ne devait retenir qu’une chose de Mame en dernier ressort, c’est que c’était un homme intensément et profondément engagé, et entier. Quand il défendait quelque chose, c’était avec une volonté farouche» rappelle Abou Baba Kane.
C’est cette volonté et cet engagement qui l’ont mené à la veille des indépendances africaines, à se rendre dans la Guinée de Sékou Touré, en 1958, comme des centaines d’autres africains, pour lui apporter son soutien et ses connaissances.
«Mais l’illusion déchirée par la découverte de la brutalité et de la paranoïa de Sékou Touré, le ramène en Mauritanie» affirme le notable originaire de Dar El Barka aussi.
La carrière internationale et la maladie

Marqué par cet «acte de trahison», Mame Diack a l’occasion de s’échapper de cet environnement en étant engagé la même année de son éviction de son poste d’ambassadeur de la Mauritanie en France, en tant que secrétaire général du comité inter-états de lutte contre la sècheresse au Sahel (CILSS), dont le siège est à Ouagadougou, où il officiera durant quatre ans.
Suite à cette aventure professionnelle sahélienne, Mamed Diack est repéré par les nations-unies, qui en feront leur représentant pour la FAO au Mali, avant sa retraite en 1992.
Mais cette fin de carrière en ouvrait une autre, certes moins officielle, mais autrement plus intense. De 1992, jusqu’aux prémisses d’une maladie des reins au début de ce siècle, Mamed Diack Seck sera conseiller spécial de plusieurs chefs d’états africains, qui écoutent ses avis et respectent son jugement «d’homme pondéré, avisé et observateur» affirme un diplomate mauritanien à la retraite.
Insuffisant rénal à partir du début de ce siècle, Mame Diack Seck, très éprouvé par la maladie, doit subir une greffe de rein pour pouvoir survivre ; son frère jumeau se porte volontaire, mais les analyses révèlent que ce dernier également supporte la même maladie.
Mis en attente de greffe, dans les hôpitaux français, la bonne nouvelle d’un donneur compatible arrive et Mame Diack est transporté illico à Paris où la greffe se fait avec succès, et où son chirurgien traitant lui administre un médicament qu’il doit suivre durant cinq mois.
«Mais en rentrant à Dakar, et le professeur traitant ayant oublié de le prévenir du délai de traitement, mon oncle prendra ce médicament durant cinq ans. Son état empirera gravement du fait de cette trop longue administration. Son chirurgien traitant lui conseille de porter plainte contre lui-même et contre l’hôpital. En bon musulman il s’en abstiendra. Formellement, c’est cela qui l’a achevé. Cela résume le monsieur qu’il était» rapporte son homonyme, le docteur Mame Diack Seck, à Nouakchott.
Mamoudou Lamine Kane
Intervention au Nord Mali : Ban Ki-Moon prône la prudence
Le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a conseillé la plus grande prudence à propos de l’intervention annoncée des forces de la Communauté Economique de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au Nord Mali, occupé par un conglomérat de groupuscules terroristes proches de la nébuleuse Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI), depuis plusieurs mois.
Des propos contenus dans un rapport adressé mercredi au Conseil de Sécurité des Nations Unies (CS/NU) qui devait à nouveau examiner la question de l’implication des forces sous régionales dans le casse tête malien.
« Je suis tout à fait conscient qui si une intervention militaire dans le Nord n’est pas bien conçue et exécutée, elle pourrait aggraver une situation humanitaire déjà extrêmement fragile et entraîner aussi de graves violations des droits de l’homme ».
Elle comporterait également « les risques de ruiner toute chance d’une solution politique négociée à cette crise, qui reste le meilleur espoir d’assurer la stabilité à long terme au Mali ».
Tout en laissant ouverte l’hypothèse d’une opération armée internationale pour chasser les islamo terroristes du Nord Mali, le haut responsable onusien estime qu’elle doit être « un dernier recours » soulignant au passage « les questions fondamentales qui restent en suspens». Celles-ci concernent notamment « la direction, le financement, l’entraînement et entretien » de cette force.
Il s’agit d’une exigence portant sur l’élaboration d’un véritable plan des futures opérations militaires dans le désert malien.
Mais « avant toute opération militaire, l’accent doit être mis sur le dialogue politique » en particulier avec les touaregs du Nord, a ajouté le Secrétaire Général de l’ONU.
Le 11 novembre dernier, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a approuvé un plan de déploiement de 3300 militaires au Nord du Mali. Une force qui doit bénéficier du soutien logistique des occidentaux.
Horizon lointain.
En réalité, l’intervention de l’armée malienne appuyée par les forces de la CEDEAO bénéficiant d’un soutien occidental est une éventualité qui semble s’éloigner.
L’Algérie, puissance sous régionale et acteur incontournable dans la sous région, qui bénéficie d’une oreille attentive auprès des Etats-Unis, prône l’option diplomatique à travers le dialogue pour sortir de l’imbroglio malien. Que
lles seraient alors les forces en rébellion qui devront être concernées par les négociations ?
Un Mouvement National pour la Libération de l’Azawad (MNLA) quasiment absent du terrain ?
Un Ansar Dine dont la proclamation de l’option pour le dialogue n’a rien de sincère, et qui reste l’enfant adultérin du monstre islamiste AQMI ?
Seul le MUJAO serait alors exclu d’une négociation qui dans tous les cas ne devrait pas déboucher sur un accord de paix crédible et durable.
En vérité, chercher à établir une différence entre MUJAO, Ansar Dine et MNLA dans le contexte sécuritaire actuel relève d’un exercice totalement stérile, une véritable discussion sur le sexe des anges. Tous ces mouvements se recoupent et mènent des activités fortement imbriquées dans le même vaste espace depuis plusieurs années.
En plus, la longue histoire politique et celle des guerres, aussi vieille l’une que l’autre, n’offrent pas un seul exemple d’une force militaire ayant conquis les 2/3 d’un territoire, et qui l’aurait restitué par le simple effet d’une négociation.
Décidément, ce dialogue au Nord Mali est un leurre. Une Arlésienne dont tout le monde parle, mais qu’on verra probablement jamais un jour. Du moins par rapport à l’objectif de paix et de stabilité.
Mais que faire d’autre pour meubler le temps ?
La capacité opérationnelle de l’armée malienne qui a perdu les 2/3 de son matériel (exactement la proportion que le territoire à reconquérir) est proche d’un zéro pointé.
Il faut alors remotiver, équiper et entraîner les troupes. Soigner les blessures profondes nées des sanglants affrontements entre bérets fidèles à la junte de Kati, et paras commandes de Kati, dont les éléments ont payé un lourd tribut au putsch du 22 mars 2012, suivi d’une tentative de contre coup d’état réprimée dans le sang.
En attendant, les forces de ces différents groupuscules s’approchent dangereusement du territoire mauritanien, avec l’entrée des combattants d’Ansar Dine dans la localité de Leré, expulsant ainsi les partisans du MLNA, selon une information rapportée cette semaine par Sahara Médias.
Boutés hors de cette ville, les combattants du mouvement touareg ont fait mouvement vers une zone encore plus rapprochée de la frontière mauritanienne.
Quelles sont les mesures que prendront nos autorités pour gérer une donne sécuritaire de plus en plus imprévisible ?
Amadou Seck.
Source: Le Calame
Discours d’Inal – prononcé le 28 novembre 2012 sur les lieux du massacre de 1990 (Par Sy Mahamadou)
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, Chers amis
En ce jour où beaucoup de mauritaniens commémorent le 52ème anniversaire de l’indépendance de notre pays, ce jour où notre armée parade fièrement dans toutes nos villes, ce jour de liesse populaire, nous voici réunis ici, loin de toutes les réjouissances de nos semblables tels des proscrits ou des bannis. Et pourtant nous ne sommes ni l’un ni l’autre. Nous sommes des citoyens mauritaniens.
Pleinement. Entièrement. Nous sommes des citoyens comme tous ceux qui, partout dans le pays, célèbrent la fête nationale mauritanienne. Mais aujourd’hui cette fête n’est pas la nôtre. Elle n’est plus la nôtre depuis 22 ans. Elle ne l’est plus parce qu’il y a 22 ans des citoyens mauritaniens, en mission de défense nationale furent, en son nom, sacrifiés ici, en ces lieux. Sacrifiés, oui, ils le furent. Etrange situation. Jour de joie et de bonheur pour les uns, jour de peine et de tristes souvenirs pour les autres, au sein d’une même nation.
Comment cette déchirure a-t-elle pu se produire ? Comment, 22 ans après, est-elle encore si vive ? Il y a 52 ans nous avons, nous peuple mauritanien, exulté à l’idée de construire ensemble une nation. Malgré la disparité des populations, toutes les bonnes volontés ont été mobilisées dans ce but. Malgré quelques heurts, inévitables pour toute nation en cours de construction, nous y avons cru. Malgré quelques crises aigües, parfois dramatiques, nous avons persévéré. Mais le ver était déjà dans le fruit. Nous n’avons pas su interpréter les signes avant-coureurs du malheur qui nous attendait. Insidieusement, les nuages s’accumulaient dans le ciel mauritanien, prémices de l’orage à venir. Malgré les alertes lancées par des esprits éclairés, alertes vite étouffées, nous nous dirigions inexorablement vers le désastre.
Soupçons, répressions, clandestinités, radicalisations, répressions, résistance, répressions, répressions, répressions. Schéma classique. L’orage est là. Il n’y a plus de nation. Il n’y a plus qu’un pouvoir contre une partie de la population. Un pouvoir qui devient de plus en plus paranoïaque et qui se radicalise à mesure, face à une frange de sa population désignée à sa vindicte. Désormais, pour ce pouvoir, il y a deux sortes de mauritaniens. D’un côté les « authentiques » mauritaniens et de l’autre, ceux qui ont à prouver qu’ils appartiennent à cette nation Ce réductionnisme manichéen, fruit d’une vision étroite se basant sur la sémantique et les découpages arbitraires de l’ancien colonisateur, conduira à un vaste programme de nettoyage ethnique, avec son lot de tueries et de déportations. Ne tenant compte d’aucune des réalités historiques, sociologiques et ethnologiques qui gouvernent les populations du Sud, une sorte de furia étatique va s’abattre dans la vallée du fleuve Sénégal, exacerbée par le réveil de vieilles rancœurs et les cupidités suscitées par les terres riches du bord du fleuve.
Jamais, au cours de son Histoire, cette région ne connut autant de morts, de réfugiés, de déportés. Pourtant, ce n’était que le début. La fièvre épuratrice gagnera les grandes villes, jusqu’aux deux capitales, économique et administrative que sont Nouadhibou et Nouakchott. On verra ainsi se séparer des familles, se briser des liens que l’on croyait indéfectibles. Dans les institutions et dans les administrations c’est la suspicion et la défiance qui règnent. Certains se sentent désormais étrangers en leur propre pays, parfois aidés en cela par le regard de certains de leurs collègues de l’autre bord. La situation ne pouvait évoluer que vers le pire. C’est ce qui arriva.
La conjoncture internationale aidant, la machine infernale s’emballa. Cette fois il fallait frapper à l’intérieur des structures étatiques et jusque dans le saint des saints : l’Armée Nationale. Selon la même logique, l’ennemi, où qu’il soit, doit être éradiqué. Arrestations, tortures, exécutions sommaires, tout sera utilisé pour déjouer un soi-disant complot. Prétexte ? Paranoïa ? Qu’importe ! La souffrance et la mort, elles, seront bien au rendez-vous. L’armée se retrouva, en quelques jours décapitée de ses élites non arabophones. Du jour au lendemain, le pays se transforme en une vaste prison pour cette jeunesse prometteuse. Des sites de détention, d’interrogatoire et de torture fleurissent un peu partout.
INAL
JREIDA
AZLATT
TIGUINT
AKJOUJT
BIR MOGHREIN.
FDERICK
NEMA
Qui dira la détresse de ces innocents face à leurs bourreaux implacables et déshumanisés !
Nous voici dans l’un de ces sites. INAL. Symbole de l’ignominie. Exemple de l’inacceptable. Nous voici à INAL où résonne encore l’écho des râles et des pleurs. Nous voici à INAL pour être en communion avec les âmes de nos martyrs, et rendre hommage à leur sacrifice suprême pour qu’ils ne soient plus les oubliés de la Nation. Nous sommes réunis ici à INAL pour réhabiliter leur mémoire afin qu’ils retrouvent leur juste place dans le panthéon de nos héros qui comme eux, sont morts pour la Mauritanie, morts pour la patrie. Morts pour la Mauritanie. Morts pour la patrie. Nul ne doit plus ignorer cette réalité-là.
Pour la deuxième année consécutive, nous avons organisé cette manifestation commémorative. Mais cette manifestation va bien au-delà de la commémoration. Elle se veut aussi une demande pressante de justice.
HONNEUR – FRATERNITE – JUSTICE
Telle est notre devise nationale. Ces mots sont aujourd’hui vides de sens. Tous les évènements qui se sont déroulés ici démontrent, s’il en était besoin, de l’inanité de ces mots. Or nos martyrs peuvent permettre à notre devise de retrouver sa pleine signification. Restaurer l’honneur perdu de l’Etat. Réaffirmer er raffermir la fraternité entre tous les mauritaniens. Rétablir la Justice enfin.
Comment ? par :
L’annulation de la loi d’amnistie, L’application du décret d’identification des sépultures, La construction, à INAL, d’un Mémorial pour les Martyrs, L’enregistrement des plaintes, L’organisation d’un procès juste et équitable. L’indemnisation correcte des victimes et ayant-droits.
L’adoption des enfants de Martyrs comme des pupilles de la Nation.
Il y aura même une certaine grandeur, pour un gouvernement, à officialiser la commémoration annuelle des martyrs. Alors, alors seulement, le 28 Novembre sera une Fête Nationale pour tous. Je vous remercie.
INAL le, 28 novembre 2012
Mauritanie: On autorise aux Maures de marcher et non aux Négro-africains (TPMN)
Touche Pas à Ma Nationalité (TPMN) qui organisait, le 28 novembre 2012, une marche pacifique a subi, une énième agression de la police raciste du régime, a affirmé TPMN dans un communiqué parvenu à Alakhbar.
Ce dernier qui tolère pourtant de dizaines de marches quotidiennes qu’organisent des jeunes compatriotes Maures à travers toutes les artères de la ville, ne supporte pas que leurs semblables négro-africains fassent de même, fût-il pour des revendications légitimes, ajoute le communiqué.
Ainsi, poursuit TPMN, le 28 novembre, coïncidant avec l’anniversaire de l’indépendance désormais entaché de sang depuis les massacres racistes contre des soldats négro-mauritaniens à INAL en 1990, a été l’occasion pour le régime et ses forces de l’ordre de renouer avec leurs féroces habitudes répressives en empêchant, par la force brute et la violence sauvage, notre marche réclamant le droit à la vérité, à la justice et le devoir de mémoire et de compensation qui incombent à la nation tout entière pour absoudre les crimes des bourreaux.
Et TPMN se dit s’adresser, en premier lieu, aux pouvoirs politiques pour que les crimes de génocide ne demeurent impunis et protégés en Mauritanie par les génocidaires et leur système raciste.
Le mouvement précise qu’en bravant le refus des autorités de nous permettre d’user de notre droit à la manifestation, nous avions voulu montrer à la face du monde combien le système et ses forces de désordre sont disposés à mater, dans le feu et le sang, toute voix qui s’élève pour dénoncer le génocide silencieux toujours en cours contre les noirs de Mauritanie.
Ce jour-là, raconte le communiqué, à partir de 7 heures, tous les grands axes menant au centre ville étaient occupés par des éléments de la garde nationale et des unités de la police, Ces forces, au lieu d’encadrer la marche pacifique annoncée, ont intercepté les bus qui transportaient les militants qui se rendaient à la manifestation, les obligeant à descendre, manu militari avant d’arriver au point de rassemblement. Convergeant vers le secteur de la polyclinique qui était bouclé par de nombreux véhicules des brigades d’intervention, nos militants ont ainsi été pris en tenaille par les deux unités en présence. Avec l’ordre d’empêcher tout regroupement, ces unités ont chargé les militants sans sommation.
Et pour TPMN malgré une utilisation disproportionnée de la violence contre eux, quelques centaines de ces militants ont réussi à se regrouper à quelques centaines de mètres du point rond de la Polyclinique. Après une vaillante résistance pacifique, nous avons enregistré deux blessés parmi nos militants. En plus, des interpellations ont été opérées. Celles-ci ont touché entre autres, le coordinateur Abdoul Birane Wane, le secrétaire aux Relations extérieures, Sy Mamoudou ainsi que deux lycéens, Sow Mamadou et Sow Alassane qui ont été verbalement et physiquement agressés par les forces de l’ordre. Ils ont été élargis après 5 heures de détention au commissariat de Tevragh ZeinaI.
TPMN rappelle enfin qu’il ne cédera jamais aux intimidations et aux menaces des autorités racistes. Il condamne les méthodes policières du régime chauvin de Mohamed Ould Abdel Aziz. Nous réaffirmons notre volonté de poursuivre, malgré la répression raciste, la lutte pacifique pour que la lumière soit faite sur le génocide commis en Mauritanie entre 1986 et 1991.
Source: Al Akhbar
Flamnet-Agora: Mauritanie : 2012 . 1960 . 1957: Ce que je crois d’elle et d’eux, message à mes compatriotes d’adoption
La preuve par l’actualité ? La preuve par l’histoire ?
L’actualité a été étonnante. Un système érigé par la force – mais une force qui n’est telle que relativement à l’absence d’autres forces… le BASEP, aux ordres du même personnage depuis sa création à l’école irakienne en 1987, moins trois ans de stage pour celui-ci à l’étranger et en regard ni forces de sécurité vraiment conséquentes, ni partis politiques organisés indépendamment de l’Etat, ni un Etat ayant la seule armature qui compte : des hommes, des femmes adhérant à l’idéologie précise de son service et du dévouement au bien commun. Un dévoiement général, y compris celui des urnes électorales dont le système établi par l’administration coloniale convainquait à peine à son époque et devint une « mascarade » selon les communiqués chroniques des opposants, toujours écrasés au suffrage universel par l’homme fort en possession d‘état au moment de solliciter une légitimité pour la montre internationale. Ce système inexpugnable depuis le 6 Août 2008, dormant pendant la transition puis la tentative démocratiques commencées les 3 Août 2005 et 19 Avril 2007, ne pouvait – ne peut encore, semble-t-il – être renversé que par lui-même, c’est-à-dire un nouveau coup militaire.
Le 13 Octobre a été donnée la preuve qu’un autre scenario est possible, celui de l’imprévisible, qui n’est jamais un hasard. Les ressorts de celui-ci ne se connaissent que plus tard. Mais c’est un fait qu’en l’absence du général Mohamed Ould Abdel Aziz, président de la République, l’armée n’a rien décidé par elle-même, la population n’a pas couru aux palais officiels pour les occuper, l’opposition n’a pas forcé l’Assemblée nationale à légiférer la substitution du régime par la préparation d’un autre. Personne ne s’est imposé et le chef d’état-major national n’a assumé aucun rôle public, le Premier ministre, les gouvernants ont été fantomatique et rien de la vie quotidienne, des problèmes de fond et du pays entier n’a changé.
Preuve d’une inertie ou d’une force ? en France, le cardinal de Richelieu gouverna le pays de son lit, pendant un an avant de mourir en 1642… Georges Pompidou continua de régner, intellectuellement intact, mais dans les souffrances et la faiblesse personnelles jusqu’à l’instant de sa mort à laquelle il ne s’attendait pas, le 2 Avril 1974… François Mitterrand, dans un état analogue, prolongea sa présidence jusqu’au terme constitutionnel, en Mai 1995, semi-mourant… et Mohamed Ould Abdel Aziz en aurait fait autant ? Non, car au pays qui s’interrogeait et selon une communication, probablement sans consultant, mais atteignant le chef d’œuvre de la désinformation à l’apparition publique d’un quasi-ressuscité, la réponse est donnée d’un pouvoir personnel qui ne s’abandonne pas et décide de tout.
S’administre alors – paradoxalement autant pour l’homme fort que pour le peuple mauritanien – une contre-épreuve. En l’absence physique du général Mohamed Ould Abdel Aziz, président de la République, le pays reste calme, l’armée muette, le BASEP l’arme au pied, l’engrenage sahélien et nord-malien au point mort. Le voici qui rentre au pays, s’exprime à plusieurs reprises, augmente les salaires – à la manière de Ceaucescu à son balcon, sous l’inspiration de son épouse, tandis que la foule pour la première fois en Roumanie depuis plus de quarante ans conspue le Parti communiste et ses chefs, son dictateur – et commencent les incidents, les manifestations sont précises et violentes, le spectre des divisions et des malentendus, des pétitions ethniques réapparaît comme il était réapparu dès la rentrée scolaire et universitaire suivant le putsch original qui brisa l’évolution nationale le 10 Juillet 1978, comme il était réapparu dès la légitimitation électorale du 18 Juillet 2009. Tout le passé mauvais des années de braise, toute la pauvreté et la sous-médicalisation, toutes les soifs nouvelles de justice et d’équité quand les manifestants, les chefs de certains partis sont molestés ou assiégés… reviennent ensemble. D’un accueil à l’autre, le pouvoir parce qu’il est réputé raffermi, au besoin restauré, semble provoquer bien plus qu’une contestation et ce que va tenter d’exprimer une Coordination de l’opposition démocratique qui n’a pas su s’imposer ni en quatre ans de régime autoritaire, entaché d’illégalité depuis au moins un an, ni en quatre semaines d’absence et d’incertitude…
Comment ne pas souhaiter, en ce jour de fête nationale, de commémoration d’une indépendance très méritoirement acquise, souhaitée, cultivée par de fécondes années fondatrices, que cesse cette longue parenthèse de l’arbitraire. Bien plus qu’un calendrier électoral ou des ajustements salariaux, il faut à la Mauritanie une réflexion partagée par tous, élaborée par tous sur la manière nationale de se gouverner et ne décider des voies et moyens, des personnes aussi à porter au pouvoir, qu’une fois ce consensus établi et assuré, qu’une fois les forces entre lesquelles se répartissent les Mauritaniens, des forces de sécurité aux structures tribales, aux partis politiques, aux tendances religieuses, aux mémoires sociales et ethniques, vraiment réattelées au devenir commun.
Car la preuve de l’histoire est péremptoire. Malgré tant de facteurs centrifuges et de division, malgré si peu de savoir faire et de savoir être démocratique, contrairement à toutes les prévisions d’experts ou d’amis depuis 1957 et périodiquement à chaque changement de régime ou d’autorité, la Mauritanie demeure. Quel est le secret de sa stabilité ? quoi donc fonde bien plus qu’une entente entre tous, ou des intimidations mutuelles entre forces et mouvements divers ? stabilité à l’avantage certes des voisins, certes de l’ancienne métropole.
Il me semble qu’il y a une part de providence – oui – mais surtout une vraie sagesse collective, une intelligence de la possibilité du pire et des bienfaits de la patience. Il y a la psychologie de chacun défiant les mauvais moments et mettant à nu les rodomontades, les dires et promesses du pouvoir quand il est cynique. Cette science de soi, et cette science des autres me semblent exceptionnellement répandues en Mauritanie, elle est source d’égalité mentale et morale entre chacun des Mauritaniens, elle permet des dialogues vrais dès que l’enceinte et le moment sont judicieusement proposés, elle jauge les gens, elle crible le souvenir.
Le secret mauritanien – au moins pour moi, qui suis nativement étranger et intellectuellement d’une formation différente – s’est incarné, en intelligence politique autant qu’en mœurs et dignité de vie personnelle, dans la personne de Moktar Ould Daddah. Le rattrapage des drames possibles, les foyers de désunion et de sécession, les ferments d’abdication face à l’ancien colonisateur ou à la revendication marocaine ou aux tentations fédéralistes ouest-africaines, les discussions à relents ethniques étaient chroniquement mises bien mieux qu’aux voix, devant les consciences et en délibération aussi prolongée qu’il le fallait. Les générations étaient une à une conviées à cela et jusqu’en 1978, malgré des cahots, malgré des périodes répressives et parfois tendues, difficiles à vivre et rétrospectivement à justifier, la caravane mauritanienne a avancé, s’est perfectionnée et se savait susceptible de perfectionnement. La grande élection de Mars 2007, mettant tout le monde et pas seulement les candidats, surtout ceux du second tour, à égalité, pustchistes de 2005 ou de 1978 compris, aurait dû inspirer les principaux acteurs en sorte qu’une union nationale, dans une répartition des rôles où – sur le papier – personne ne semblait oublié, gouverne collégialement le pays. Débonnaire, pieux, pacifique, résolu pour l’essentiel – le discours du 29 Juin 2007 le montra – Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi aurait dû être soutenu par tous au lieu d’avoir à se constituer, par lui-même et donc à grands risques, sa propre structure de pouvoir. Et celui qui depuis le 6 Août 2008 prétend d’une part « régler tous les problèmes » et d’autre part avoir, au vrai, écrit toute l’histoire politique et toutes les successions démocratiques ou pas pendant toute cette décennie, se serait grandi en étant le gardien physique de l’état de droit.
Mohamed Ould Abdel Aziz peut enfin se grandir, maintenant, s’il consacre ses forces et le temps qui lui restent – constitutionnellement ou médicalement parlant – à permettre ce qui est attendu depuis des années. Rien que définir consensuellement cette attente vaudrait une entrée dans l’histoire : positive.
C’est mon vœu ardent et confiant. La Mauritanie a les moyens qu’il se réalise, et il est possible que Mohamed Ould Abdel Aziz reçoive enfin la grâce d’être l’homme du moment. Il est temps. C’est le temps.
Bertrand Fessard de Foucault, alias Ould Kaïge
soir du mercredi 28 Novembre 2012