Monthly Archives: November 2017
LA MORT HÉROÏQUE DE NOTRE CAMARADE ET MARTYR BA SEYDI :
Le lieutenant Bâ Seydi de la Marine Nationale condamné à mort, s’était particulièrement distingué par son orgueil, son courage et sa témérité depuis l’enquête préliminaire jusqu’au poteau d’exécution. Pendant la phase instruction, lorsqu’il avait été confronté avec certains de ses subordonnés, il avait dit au juge d’instruction : « Monsieur le juge, mon honneur d’officier m’empêche d’accepter d’être contredit par mes subordonnés, c’est pourquoi je vous demande de considérer comme vrai tout ce qu’ils vous disent me concernant ».
Après le verdict, il avait dit à ses avocats : « On avait aucune intention de massacrer qui que ce soit, mais on avait bien l’intention de prendre le pouvoir par la force. Et si c’était à refaire, je suis prêt à recommencer. »
A quelques minutes de son exécution, on lui avait demandé, comme en pareille circonstance, s’il avait quelque chose à dire ou des souhaits à formuler. L’audacieux lieutenant a répondu sereinement à son avocat maître Mohamed Cheine Ould Mouhamadou, avant de regagner le poteau d’exécution: “Oui maître, j’ai deux commissions et un témoignage. La première commission concerne mes parents, ma mère et mon père. Ils sont venus de Boghé et ont beaucoup souffert en apprenant mon arrestation. Ils souffriront encore plus en apprenant mon exécution, je te demande d’aller les voir pour leur demander de me pardonner.
La deuxième commission concerne mon frère qui travaille dans une banque de la place, il faut le voir pour qu’il paye une dette de 7000 ouguiya à mon créancier, un boutiquier aux environs de l’hôpital national. Quant au témoignage je voudrais vous prendre à témoins.” Puis il prononça la chahada en arabe: «J’atteste qu’il n’y a qu’un seul Dieu et que Mohamed est son prophète.” L’avocat lui avait promis de payer lui-même cette dette de 7000 ouguiyas et qu’il ferait sa commission pour ses parents immédiatement.
Ensuite, le lieutenant Ba Seidi pria deux rakaa, avant de se diriger seul en marchant tranquillement vers le poteau d’exécution où il s’installa dos au poteau, les mains derrière le poteau, face à ses bourreaux en attendant d’`être ligoté avant sa mise à mort. Selon les avocats présents, c’est pour la première fois dans l’histoire des exécutions des peines de mort au niveau mondial, qu’un condamné a une peine capitale, se dirige seul en marchant tranquillement vers son lieu d’exécution.
Attachés tous les trois sur les poteaux d’exécution, tenus en joue par trois tireurs à une distance de six mètres, les trois officiers attendaient dignement la fin de leur vie qui ne tenait plus qu’à un ordre du chef du peloton d’exécution. Puis vint le moment fatidique: ” Feu.” Les trois premiers coups partirent, le tireur chargé de tuer le lieutenant BA Seidi le blessa à la hanche, l’officier aurait dit, selon plusieurs témoins, à son bourreau : « Tu m’as blessé, lève le tir, vise très bien ». Seidi BAH. Seidi BAH. Seidi BAH.
Colonel Oumar Ould Beibacar.
FLAMNET RETRO : 28 novembre : INAL, la face sanglante de l’indépendance mauritanienne
Difficile d’évoquer les festivités qui s’annoncent pour le 28 novembre 2014, jour de l’accession au pouvoir de la Mauritanie. Ce jour rappelle à toute une communauté du pays un moment de son histoire, où le système d’état à sa tête a tenté, littéralement d’oblitérer les forces vives, militaires et intellectuelles noires mauritaniennes. Le 28 novembre 1990, 28 militaires, marins et policiers, tous noirs et pulaars, sont pendus à Inal près de Nouadhibou, après d’innommables séances de tortures rapportées par un des rescapés, Mahamadou Sy, dans son témoignage biographique, “L’enfer d’Inal”.
Il y a un an et demi, j’étais invité au Lycée français Théodore Monod à présenter mon dernier recueil de poèmes, «Les musulmans d’Inal» à des élèves de Première L. Devant l’assistance, sera lue le poème éponyme, lecture suivie d’une mise en perspective de ces éléments. Quel choc terrible et inoubliable, de la bouche d’un gamin de 17 ans, à la fin de la présentation :
– «S’ils ont été pendus c’est qu’ils le méritaient» juge-t-il laconique et visiblement énervé.
Cet enfant n’était pas né au moment de cet événement intervenu le 28 novembre 1990, un an et demi après le début des «évènements». Mais j’entendais plutôt son père, et son discours qui reflétait le déni d’une élite du système politico-tribalo-financier en place depuis l’avènement des militaires, qui le lui a inculqué dans la tête. Et le refus de mémoire, donc le refus de cautériser une plaie, parmi d’autres qui tâche le contrat social entre concitoyens, qui pose la question de la cohabitation, qui n’est qu’une question au final politisée par une minorité d’un système.
– «En quoi le méritaient-ils?» demandai-je, essayant de le pousser dans ses retranchements. Autour de lui ses camarades le regardaient ahuris. Dans l’assistance d’une vingtaine d’élèves, seule une avait entendu parler des pendus d’Inal. «Un ami de mon père y a été pendu» explique-t-elle simplement.
– «Ils ont voulu faire un coup d’état !» s’enhardit le jeune homme. «Mon père est colonel ; il me l’a dit» continue-t-il. «Et puis les sénégalais nous faisaient la guerre» ajoute-t-il, comme pour paraître informé devant ses camarades qui le regardaient avec gêne.
– «Laissez-le monsieur, il dit n’importe quoi» soupire une de ses camarades.
Mais c’était révélateur d’un malaise social : comment admettre, honnêtement, justement, sans aucun parti pris, que l’horreur a déferlé sur les consciences lors de cet événement. Que tout ce qui s’est passé à Inal durant cette période, était la même forme de manifestation haineuse que ce qu’on a vu quatre ans seulement après au Rwanda, dans des proportions beaucoup plus atroces : la déshumanisation d’un groupe ethnique, social ou culturel, sur la base d’une «infériorité» supposée, pour mieux la liquider. Des «cafards» au Rwanda, des «juifs» à Inal, comme en témoigne Mahamdou Sy dans «L’enfer d’Inal».
«Ue civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. (…) … Que déférée à la barre de la conscience, comme à la barre de la raison, cette Europe-là est impuissante à se justifier ; et que de plus en plus elle se réfugie dans une hypocrisie d’autant plus odieuse qu’elle a de moins en moins de chance de tromper. L’Europe est INDEFENDABLE» commence Aimé Césaire dans «Discours sur le colonialisme». Remplacez «Civilisation» et «Europe» par «système d’état mauritanien» ou «groupe politique criminel» et vous pouvez transvaser ces propos en Mauritanie par rapport à cette question de 1989, qui n’était en réalité, et il faut le dire de temps à autres, par honnêteté historique et intellectuelle, qu’une tentative avortée d’épuration ethnique.
Il n’y a pas d’argumentaire à cela, de propos justificatifs. Il y a cette froide et horrible réalité. Il faut l’accepter, en faire la catharsis et avancer, pour le salut du pays entier. Mais la politique de l’autruche, le déni, le mensonge ne sont pas possibles. Comment faire un deuil sans corps ? Comment pardonner sans accusés ? Comment pardonner sans dire la faute ? Une chimère religieuse, morale, sociale et intellectuelle : ça ne passe pas dans le monde réel que l’on vit. Comment justifier cela ? Il n’y a pas de justification, sinon une haine terrible, qui a donné la démence de faire, ce que peu d’êtres humains doués de conscience pourraient faire, chapelets à la main, ablutions apprêtées…
C’est le même hébétement qui touche Mahamadou Sy rescapé de cet «enfer d’Inal», au moment même où il assiste à des pendaisons :
«Entre deux pendaisons, Khattra s’assoit sur un cadavre pour siroter son verrre de thé ou au pied d’un pendu en récitant le coran. Il va d’un pendu à l’autre, achevant ceux qui tardent à mourir à coups de barre de fer, s’appliquant à porter les coups dans la région du cou. Pendant ce temps Souleymane et les autres préparent les prochaines victimes tout en veillant à respecter l’ordre des numéros.
Quand arrive le tour du numéro onze, Diallo Sileye Beye ne peut s’empêcher de pousser un cri. Il recoit un violent coup de pied pour avoir osé perturber le déroulement de la cérémonie. Ses yeux ne se détachent plus de cet homme à qui on est en train de passer la corde au cou. Cet homme qui n’est autre que son petit frère, le matelot Diallo Abdoul Beye, qui cessera d’exister dans moins de trois minutes et que plus jamais il ne reverra. Abdoul Beye ne proteste même pas, il est hissé au bout de la corde sous le regard ahuri de son frère. Il n’y a pas de mots pour exprimer la douleur de Diallo Silèye Beye. Quand arrive le tour de Diallo Oumar Demba et son frère le soldat Diallo Ibrahima Demba (le hasard a voulu qu’ils soient,tous les deux séléctionnés pour les pendaisons et que leurs numéros se suivent, ils ont toujours tenu à rester ensemble), chacun d’eux, ne voulant pas assister à la mort de l’autre, demande à passer en premier.
Un tirage au sort organisé par les bourreaux les départage, Ibrahima Demba l’ainé, passe le premier. Le soldat de première classe, Ndiaye Samba Oumar, le chauffeur qui conduisait le véhicule le jour de mon arrstation, fait partie du lot. Le deuxième classe Samba Demba Coulibaly de Djeol, un soldat de mon escadron, qui porte le numéro 28 ferme cette macabre liste. Les pendaisons durent plus d´une heure. Après cela, tel des bêtes excités par l´odeur du sang, le groupe de bourreaux, pris d´une euphorie collective, s´acharne sur les autres prisonniers et tape sur tout ce qui bouge.
Conséquences de cette folie collective, cinq morts supplémentaires. Parmi eux, le soldat de première classe Ly Mamadou Ousmane, le seul spécialiste de l´arme antiaérienne de calibre 14,5mm de toute la région militaire.(…) La démence a été poussée jusqu´à symboliser la date du trentième anniversaire du pays par 28 pendaisons. Vingt -huit vies humaines sacrifiées sur l´autel de la bêtise humaine. Plus jamais 28 novembre n´aura la même signification pour les Mauritaniens. Quand certains sortiront dans les rues des villes ou dans les campagnes brandissant fièrement les couleurs nationales sous les youyous des mauritaniens, pour d´autres, ce sera un jour de deuil et de recueillement à la mémoire de ces 28 militaires pendus.»
Cet événement doit être rappelé à tous les mauritaniens, pour leur montrer que malgré cette horreur, les choses peuvent être dépassées mais pas, jamais, sans justice. Quelle justice sans vérité ? Quel pardon sans identification de la faute et des tenants de celle-ci ? Ni en droit humain, ni dans le Saint Coran. Le refus d’une telle justice, donc d’une telle réconciliation des cœurs, l’un n’allant pas sans l’autre, a été légalisé par la loi de 1993.

La loi «scélérate» de 1993
La loi «N° 93-23 du 14 juin 1993 portant amnistie» dont l’article 1er disposait qu’une «amnistie pleine et entière est accordée aux membres des forces armées et de sécurité auteurs des infractions commises entre le 1er janvier 1989 et le 18 avril 1992 et relatives aux événements qui se sont déroulés au sein de ces forces et ayant engendré des actions armées et des actes de violence».
Pourtant cette loi est reconnue par les avocats qu’elle n’est pas valable. «Elle repose sur une conception erronée de la notion même d’amnistie et viole des normes impératives du droit international auxquelles il ne peut être dérogé. Elle ne peut, donc, faire obstacle à la recevabilité de plaintes, l’investigation des faits, la poursuite, l’arrestation et la punition des auteurs de ces violations» explique l’avocat Omar Ould Dedde Ould Hamady.
Le président du collectif des victimes de la répression (COVIRE), Mamadou Kane, victime lui-même de la répression d’état de 1992, va au-delà de cet aspect illégal de cette loi d’amnistie : «On parle d’unité depuis quelques années maintenant dans ce pays. Allez voir ces orphelins et veuves qui sont à dix mètres de nous, qui n’ont jamais pu prier sur le corps de leur parent. Allez leur dire qu’il n’y aura ni vérité, ni justice, ni réparation décente, ni mémoire pour le mal innommable qui leur a été fait. C’est cela que cette loi empêche : déposer des plaintes pour mettre en branle ces quatre points qui constituent la base de la réconciliation dans ce pays».
Le cas symbolique d’El Arby Ould Sidi Aly Ould Jiddeine
L’ex-colonel El Arby Ould Sidi Aly Ould Jiddeine, ancien vice-président de l’assemblée nationale, est symbolique et significatif à plus d’un titre : il est un des rouages essentiels de l’institution qui devrait permettre l’abrogation de cette loi d’amnistie, et dans le même temps, leCOVIRE le dénonçait clairement et précisément par rapport aux officiers torturés et abattus, dans une liste de ses victimes parue il y a trois ans. «Il a sur les mains le sang de 89 personnes. 89 Bon Dieu ! Et il se trémousse librement sur son fauteuil à chaque session de l’assemblée nationale !» enrageait l’an passé Aboubacri Sy, représentant du collectif des rescapés militaires, (COREMI), lors d’une marche pour l’abrogation de la loi de 1993.
Mamoudou Lamine Kane
FLAMNET-RETRO: FÊTE DU 28 NOVEMBRE : ENTRE FIERTÉ ET CRISE DE CONSCIENCE
La Mauritanie s’apprête à célébrer le 55ème anniversaire de son indépendance nationale, le 28 novembre 2015. Déjà, la symbolique de cette date est surchargée de sentiments mitigés, entre ceux qui éprouvent une fierté renouvelée face à la célébration d’une souveraineté acquise le 28 novembre 1960, et ceux qui voient dans tous les 28 novembre, «un bal des vampires » où le buffet n’est qu’une énorme plaque de sang, celui de milliers de victimes d’un crime génocidaire qui a jalonné l’histoire de la Mauritanie de 1989 à 1991, et qui atteignit son macabre raffinement un certain 28 novembre 1990, avec les 28 pendus d’Inal.
Rarement la célébration d’un 28 novembre a suscité autant de réminiscences. Par delà les aspects factuels liés aux différentes cérémonies prévues en ce jour de grand rassemblement, jamais dans le passé, la réflexion n’a été aussi dense sur la symbolique que représente cet évènement jusque-là fêté dans l’allégresse par certains, dans la douleur et le silence par d’autres.
En effet, pour une partie de l’élite, le 28 novembre est le lieu de bilans à dresser et de failles à combler pour l’émergence d’un Etat-nation imprégné des valeurs républicaines et citoyennes, à l’image de la pertinente contribution de Brahim Salem Ould Bouleïba sous le titre «Dans quelques jours un nouveau 28 novembre : quelle signification lui donner aujourd’hui ». Dans cet article publié dans la presse, cet ancien haut fonctionnaire de l’Etat qui fait partie des rares intellectuels dont les positions sont jugées par certains de non partisanes, l’élite mauritanienne doit se démettre de «ses égoïsmes conjugués à sa démission collective» pour non seulement «empêcher les pouvoirs de contraindre les esprits » mais aussi «les entraîner à la réflexion». Il regrette l’incapacité de ces «veilleurs et éveilleurs, que sont les élites nationales, à imposer la raison et non la passion dans le débat politique.
Ould BouleÏba revient sur l’histoire de la colonisation de la Mauritanie et sur la naissance de l’Etat nation mauritanien, ainsi que le caractère particulier d’un espace dont le seul intérêt fut qu’il permit de relier les possessions françaises du Maghreb au Nord à celles du Sénégal et du Mali au Sud. D’où l’absence d’un héritage étatique et républicain qui fut celui de la Mauritanie, où tout devait se construire à l’indépendance, des infrastructures de base au citoyen mauritanien encore prisonnier de ses schémas socio-traditionnels.
Face à un monde qui a énormément changé, Ould Bouleïba invite «la nouvelle génération moulée à la société de consommation et au monde virtuel, à puiser dans l’héritage laissé par les pionniers de la Mauritanie indépendante, notamment leurs valeurs, leurs principes et codes moraux pour bâtir de grands et perdurables projets d’avenir».
C’est la même angoisse qu’éprouve El Wely Sidi Haïba, face à un pays qui n’a pas pu se doter, selon les analystes, du même legs colonial que les autres colonies, en termes de traditions administratives, de primautés de l’Etat et de la République, de citoyens formés à l’exercice de leurs droits et de leurs devoirs. Dans son article qu’il vient de publier à l’occasion de la célébration du 28 novembre, et intitulée «Quelle élite stimulée pour quelle indépendance à commémorer », il interpelle l’élite intellectuelle du pays auprès de qui il tente de susciter «un certain éveil équilibré et une capacité d’analyse » face à ce qu’il appelle «les fluctuations inhérentes aux imperfections de la gouvernance, aux humeurs versatiles des populations et aux influences externes incontrôlables mais abordables». Alors que le pays s’apprête à célébrer avec emphase son indépendance dans une ville de Nouadhibou drapée de toutes ses rénovations, il s’interroge, «alors, quelle importance peut revêtir aujourd’hui la commémoration de la fête d’indépendance en cette situation toujours ambigüe et hypothétique », celle d’un pays qui selon lui, «marche vers une consistance qui traine le pas depuis cinquante cinq longues années d’indépendance ?»
El Wely de se demander en outre, quelle classe intellectuelle et politique mauritanienne viendrait mimer, dans la situation actuelle que traverse le pays, son alter ego français qui vient de s’unir dans un grand élan de solidarité, face à l’épreuve du terrorisme qui frappe la France, à la lumière des derniers attentas de Paris. Cette élite, selon lui, a pourtant toutes les raisons de s’unir pour «défendre ensemble les grandes lignes de mutation pour un pays qui a tout, absolument tout, pour opérer un changement de cap vers un réel établissement des fondements et valeurs de la République».
Mais n’en déplaisent aux chantres de la «Résistance à la colonisation française» qui, à travers un groupe de pression qu’ils ont réussi à créé, semant déjà la discorde au niveau national en imposant le nom d’une controversée ancienne bataille coloniale, «Oum Tounsy», au futur aéroport de Nouakchott, Ould Moine vient de jeter une pierre dans leur marre, en soutenant que l’indépendance de la Mauritanie fut l’œuvre du seul général De Gaule. Pour lui, la Mauritanie a obtenu son indépendance sur un plateau d’argent, car c’est la France qui avait continué à assurer la protection de son territoire, qui finança entièrement la construction de la capitale Nouakchott et qui alimenta entièrement les premiers budgets de l’Etat naissant. Cette indépendance, comme celle de toutes les autres colonies, furent selon lui une conséquence de la deuxième guerre mondiale, car la France désormais préoccupée par sa reconstruction, devait se concentrer sur son propre développement interne, trouvant encombrant ce vaste territoire aux trois quart désertiques et difficile à régenter. Même si, dira-t-il, rien ne nous lie à une France mécréante, lieu de dépravation et de paganisme, comme les chantres de la «Résistance » aiment à la décrire, elle fait désormais partie de la réalité intrinsèque de la Mauritanie, une partie indissociable de son histoire, n’en déplaisent à certains, note-t-il.
Mais c’est sans aucun doute le cri d’indignation de l’ancien colonel de la garde à la retraite, Oumar Ould Beibacar, qui fait plus de mal. Dans un article publié le 19 novembre dernier, et repris dans plusieurs sites et dans les réseaux sociaux, il soutient que la Mauritanie n’a plus aucune raison de célébrer le 28 novembre, car cette date fortement entachée de sang est devenue un point de discorde sur le plan national. Ould Beibacar qui fut acteur lors des douloureux évènements qui ont ensanglanté la Mauritanie entre 1989 et 1991, trouve qu’à la «joie de l’indépendance et de la liberté, se sont désormais mêlées la souffrance morale et la détresse de la cruauté, pendant ce jour mémorable ». Ce jour est selon lui désormais immanquablement marqué par la pendaison de 28 soldats négro-africains, le jour aussi où en 2001, la Mauritanie livra le citoyen Mohamedou Ould Sellahi au USA, souillant un peu plus cette journée mémorable. Le 28 novembre n’est plus, d’après lu, le symbole de la réconciliation, mais celle de la fracture nationale. Il propose à cet effet le 25 novembre, date «encore intacte» selon lui et qui marque la création des forces armées nationales. Le 28 novembre quant à lui devra être dédié, selon lui, aux martyrs, pour permettre à tous ceux qui ont souffert ou qui souffrent encore de la cruauté de leurs propres concitoyens de partager leur souffrance morale et leur détresse.
Dans cet article réquisitoire contre le régime du CMSN, de l’armée et contre son propre corps, Ould Beibacar livre des informations sensibles, égrène des faits liés au génocide des Noirs de Mauritanie durant cette période, où des centaines d’entre eux ont été tués, des milliers déportés et déchus de leur nationalité dans une vaste épuration à caractère ethnique. Il nomme des endroits qui renferment encore des charnières, fait le récit des viols collectifs, des tortures physiques, des meurtres élevés jusqu’au raffinement. Dénonçant la scélérate loi d’amnistie du 14 juin 1993 qui consacra l’impunité aux bourreaux, voire leur récompense, leur décoration et leur élévation à des grades ou à des fonctions supérieurs, il trouve que cette journée du 28 novembre n’en est que plus maudite, plus insultante aux yeux des martyrs, plus chargée de frustration pour les ayant droits, un coup fatal porté à l’unité nationale et à la justice.
«Le 28 novembre ne peut plus constituer une fête nationale pour notre peuple » martèle Ould Beibacar, car selon lui, «on ne peut pas fêter le sacrifice de 28 martyrs pendus pendant ce jour », car leur «sang entache à vie l’anniversaire de notre indépendance et souille notre drapeau national ».
PAR AIDARA
Rimweekly.net
Des dirigeants africains appellent à permettre au continent d’assumer sa propre sécurité
Africanews – Des dirigeants africains ont appelé lundi à aider leurs Etats à assurer leur propre sécurité, à l’ouverture de la quatrième édition du Forum de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique.
“La réponse militaire doit être solidaire et globale pour ne laisser aucun sanctuaire aux groupes terroristes”, a déclaré le président sénégalais Macky Sall, en présence de ses homologues rwandais Paul Kagame et malien Ibrahim Boubacar Keïta.
“Le risque aujourd’hui, c’est de voir des terroristes vaincus ailleurs chercher des zones de repli en Afrique”, a dit M. Sall, en référence notamment aux revers subis par le groupe Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie.
“Il faut se garder des solutions toutes faites, conçues sans les Africains”, a-t-il ajouté. “Les conséquences de ces interventions, nous les vivons au Sahel, sont souvent pires que le mal qu’elles étaient censées soigner”, a-t-il ajouté, faisant allusion à l’intervention occidentale en Libye en 2011.
“Si nous laissons les autres définir nos défis et prendre la responsabilité de régler nos problèmes, nous ne pouvons nous en prendre qu’à nous-mêmes.“
La ministre française des Armées, Florence Parly, a salué la mémoire des victimes des attentats du 13 novembre 2015, qui ont fait 130 morts à Paris et dans sa banlieue.
“Nous n’oublions pas que nos amis africains savent ce que signifie d‘être frappé dans sa chair par la barbarie terroriste”, a-t-elle dit, réitérant le soutien de la France à la “force conjointe” de lutte contre les jihadistes que sont en train de constituer les pays du G5 Sahel, avec l’appui de la force française Barkhane déployée dans la région (4.000 hommes).
La force du G5 Sahel (Tchad, Niger, Mali, Burkina Faso et Mauritanie) est “une initiative africaine qui est un succès”, a assuré la ministre française. “Je crois que c’est cela le sens de l’Histoire”, a-t-elle commenté en répétant qu’il était “important que la communauté internationale apporte son plein soutien à cette initiative”.
“L’idée (de cette force) moquée, raillée au départ, a je crois aujourd’hui convaincu de sa pertinence”, a affirmé de son côté M. Keïta, président en exercice du G5 Sahel.
“Quand on voit comme on mégote aujourd’hui le financement dont nous avons besoin pour une oeuvre commune…”, a-t-il déploré, alors que la force conjointe peine à attirer des financements, au-delà des contributions promises par la France, l’UE et les Etats-Unis.
Selon le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, “la force multinationale contre (le groupe jihadiste nigérian) Boko Haram et (celle du) G5 Sahel sont les dernières illustrations de la doctrine africaine des opérations de soutien à la paix”.
“Il est de la plus haute importance que les Nations unies apportent le soutien requis à ces initiatives pour leur permettre de réaliser leur potentiel”, a-t-il plaidé.
M. Kagame, qui présidera l’UA en 2018, a exhorté ses pairs africains à se prendre en main. “Si nous laissons les autres définir nos défis et prendre la responsabilité de régler nos problèmes, nous ne pouvons nous en prendre qu‘à nous-mêmes”, a-t-il lancé, tout en reconnaissant l’importance de la coopération internationale.
“Il faut que l’Afrique prenne en charge sa sécurité, mais pour cela il faut que nos partenaires nous accompagnent”, a insisté Macky Sall. “La maintenance des forces, les indemnités à payer, le comblement d’effectifs… Là, l’Union européenne, les Nations unies pourront venir en appoint. Mais la base doit être assurée par les Africains”.
AFP
FLAMNET-RETRO : Interpellation des intellectuels arabo-berbères : par SAMBA
‘’ Un pays est d’abord fondé sur une volonté des diverses parties de coexister , de vivre ensemble dans la paix. Sans ce choix et cette volonté c’est une partie perdue ‘’.
‘’… Si l’on ne peut vivre ensemble qu’au prix de l’oppression à l’égard d’une composante, c’est une position pas raisonnable qui , surtout , n’est pas tenable ‘’.
On croirait lire le cas mauritanien … Et pourtant il n’en ait rien !
Il s’agit en fait du cas malien , traité par un mauritanien bien particulier : l’éminence grise du Président ould Abdel Aziz , selon certaines sources , en l’occurrence Yehdih ould Bredeleil qui , à travers un article intitulé ‘’ l’Azawad’’, prend nettement, résolument et légitiment position pour les Touaregs opprimés du Mali …en abstraction totale cependant de sa Mauritanie !
Le plus curieux c’est qu’il ne vient , à aucun instant , à l’esprit de Yehdih que sa description de principe s’appliquait aussi et rigoureusement au cas mauritanien , à travers la difficile coexistence actuelle ! Manifestement il n’a pu se déprendre de ces solidarités grégaires qui souvent nous retiennent ; prisonnier d’une vision partisane et du prisme déformant de la solidarité mécanique, il ne fait ni retour sur soi , ni flexion sur sa propre réalité…Surprenant de la part du grand cerveau !
Cette attitude est assez courante hélas chez un bon nombre d’intellectuels et d’hommes politiques arabo-berbères qui tombent , généralement , dans le déni dès que nos problèmes sont évoqués ! Le mal existe ailleurs et pas en Mauritanie…
Cette attitude qui interpelle ne serait –elle pas fondée par hasard sur une tentation de vouloir copier le maghreb ? Le Maghreb ( Egypte incluse ) compte , aux dires de Cheikh T Ndiaye, quatre vingt millions de Noirs . 8o millions absents de la superstructure ; des ombres portées … Noirs pourtant assimilés , pourtant musulmans … Vouloir copier ce maghreb -là, pour ceux tentés de le faire, serait , sans aucun doute , une cruelle méprise au regard de la géographie physique et humaine de la Mauritanie …
Cette attitude ou position singulière m’amène de plus en plus à penser qu’un débat interne s’impose au sein de la communauté arabo-berbère, qui devra se déterminer sur le‘’ vivre ensemble’’, préliminaire à tout dialogue inter-communautaire sur la question.
Le nœud du problème , me semble-t-il , réside davantage chez elle que chez les Négro-africains . Les Arabo-berbères veulent –ils vivre avec les Négro-africains ? si oui , sous quelle forme et à quelles conditions ? Dans l’assimilation ou dans le respect des identités respectives ? Dans l’accaparement de tous les secteurs de la vie publique par les uns ou le partage équilibré du pouvoir entre tous ? Au travers de l’unité ou de l’unitarisme ? Une clarification à ces niveaux s’impose à l’élite qui devra se parler , la minorité courageuse des Justes débattre avec la majorité silencieuse qui assiste, sans rien dire, au mensonge triomphant , au péril montant … Ils devront se parler afin de nous éviter de continuer de tourner en rond , de vivre sans cesse des crises sans fin, de nourrir un pessimisme chaque jour plus accusé sur notre commun devenir .
Initier et parrainer un tel débat interne au sein de la communauté arabo-berbère voilà, pour les segments actifs de la Société civile , un chantier urgent, porteur et autrement plus important que tous ces ateliers autour de questions, parfois sans diagnostique et sans débat de fond .
Enfin les amis et partenaires internationaux de la Mauritanie devront comprendre que ‘’la Mauritanie sans cohésion interne,’’ est porteuse de tous les dangers que leur ‘’tout- sécuritaire ‘’ ne pourrait juguler…La Mauritanie d’abord !
“Si l’on ne peut vivre ensemble qu’au prix de l’oppression à l’égard d’une composante , c’est une position pas raisonnable qui , surtout , n’est pas tenable ‘’.
La lutte continue!
Samba Thiam président des FPC