Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Daily Archives: 13/09/2022

Ould Abdel Aziz libre : En attendant le prochain épisode

L’ex-président Ould Abdel Aziz, qui croupissait sous contrôle judiciaire depuis des mois, vient de recouvrer sa liberté. Grand ouf de soulagement dans son entourage et de ses conseils ! Lesquels affirmaient récemment dans un communiqué qu’il n’y avait pas d’autre solution que de libérer leur client, « les accusations à son encontre ne reposant sur rien ». C’est fait depuis le 7 Septembre. Les avocats avaient également ajouté que leur client attendait désormais le procès. Adieu donc l’article 93 martelé jusqu’ici par le prévenu et ses avocats ! On croit que l’ex-Président va enfin parler, répondre aux questions du tribunal, affronter peut-être ses anciens ministres qui l’ont lâché. Un évènement très attendu et qui risque d’éclabousser pas mal de monde. Jusque-là, Ould Abdel Aziz qui s’est dit harcelé, humilié n’a pas révélé grand-chose lors de ses conférences de presse, comme s’il n’avait, en fait, pas d’arguments à faire valoir. Mais en attendant ce « grand » moment – en tous les cas, un précédent dans le pays – les Mauritaniens restent dubitatifs et se demandent si le procès aura bel et bien lieu.

L’organiser sera, pour la justice mauritanienne, réussir un gros challenge. Et, pour le gouvernement, prouver, d’une certaine manière, la séparation effective des pouvoirs. La fin du contrôle judiciaire et la remise des passeports à l’ancien Raïs paraît constituer le premier pas du processus. Si Ould Abdel est blanchi par la justice, il pourrait, comme il l’a promis, se relancer dans la politique et, pourquoi pas, se présenter à la prochaine présidentielle. Une hypothèse au demeurant difficilement envisageable pour les observateurs car les relations entre l’ex et son successeur ont quasiment atteint un point de non-retour, même si rien n’est impossible en politique. Le gouvernement suspecte, voire accuse, l’ancien président de détournements de montants colossaux. Pourrait-il se dédire et restituer le patrimoine consigné à Ould Abdel Aziz ? À quel prix ? Une chose est sûre, il en perdrait définitivement sa crédibilité et la confiance des Mauritaniens. Depuis trois ans qu’il dirige le pays, le successeur d’Ould Abdel Aziz n’a pas réussi à se séparer des hommes de confiance de son prédécesseur dont le régime est si décrié. Cette absence de rupture d’avec la gouvernance antérieure a fait – fait encore – grincer les dents et penser à une espèce de cirque, auquel il nous faut assister depuis le déclenchement du fameux « dossier de la Décennie ». Certains n’hésitent pas à y voir comme un deal. Et racontent, depuis la fin du  contrôle judiciaire d’Ould Abdel Aziz, qu’après même une condamnation, celui-ci pourrait bénéficier d’une grâce présidentielle. Une amitié de quarante ans ne se perd pas si facilement.

Réhabilitation ?

Pour Ould Abdel Aziz, le procès sera peut-être l’occasion de se défendre mais surtout celle de laver « l’affront ». Qui l’eût cru ? Celui qui régna presque onze années à la tête du pays, cet homme craint et fonceur, a été accusé, entre autres, de détournement de deniers publics, recels et entrave à la justice. Arrêté, il a été jeté dans une prison taillée sur mesure. Ses demandes répétées de liberté provisoire et de sortie du pays pour se faire soigner à l’étranger ont toutes été rejetées, alors que certains de ses anciens Premiers ministres et ministres se retrouvaient pratiquement blanchis. « Règlement de comptes et harcèlement », « politique de deux poids, deux mesures ! », glapissaient ses proches et conseils.

Ould Abdel Aziz semble déterminé à recouvrer son entière liberté et son honneur foulé au pied. Il ne ratera pas l’occasion d’exploiter le mécontentement des citoyens face au pouvoir de Ghazwani, surfer sur la hausse continue des prix des produits vitaux, le chômage, le recyclage des anciens cadres suspectés de gabegie, la gestion des eaux de pluies à Nouakchott…Même si le chahut du public au stade Boïdiya et l’appel à Ould Abdel Aziz peuvent être considérés comme phénomènes épidermiques, le gouvernement doit les prendre au sérieux. La gouvernance de Ghazwani semble bel et bien faire l’affaire pour… l’affaire d’Aziz.

Dalay  Lam

Lire aussi: http://lecalame.info/?q=node/13717

Génocide en Mauritanie : le débat ! / Par Boubacar Diagana et Ciré Ba

Le débat actuel sur le génocide peul en Mauritanie qui ne dit pas son nom révèle un juste, une âme honnête : Maître Sidi El Moctar qui est Professeur de droit privé, conseiller juridique international, avocat à la Cour de Cassation…. Il s’insurge arguments à l’appui, comme nous et d’autres, contre l’insultante appellation passif humanitaire. Il démontre techniquement qu’il s’agit d’un génocide peul.

Il serait fastidieux de reprendre ici son argumentaire implacable résumé par Cherif Kane dans ce lien https://kassataya.com/2022/09/10/mauritanie-lavocat-sidi-el-moctar-persiste-et-signe-le-genocide-des-peulhs-de-ould-taya/. Les audios sont surpartagés sur WhatsApp. Il a parlé avec ses qualités énumérées plus haut et se présente naturellement comme Maure. Lui ne pourrait être taxé de « nationaliste étroit ».

Il a, par ailleurs, fait une révélation extrêmement grave. Il y a 3 ou 4 ans, dit-il, un avocat a évoqué devant ses pairs l’idée de trouver le moyen d’empêcher les peuls de « se reproduire », « d’avoir des enfants ». La gravité des faits, de l’ensemble des faits, et l’importance de leur qualification au juste nous commandent de rester concentrés, de ne pas nous laisser disperser ou distraire par des analyses doctrinaires.

En requalifiant ce qui s’est passé en Mauritanie entre 1989 et 1991 voire 1992, nous avions pris le soin d’en discuter largement avec une pluralité d’acteurs qui l’ont jugé recevable. Cette démarche a été portée et validée par un pôle génocide et d’illustres fils et petits-fils de victimes de génocide sur le sol européen. Le précédent régime était au courant. A sa suite, le pouvoir actuel tente par tous les moyens d’étouffer la manifestation de la vérité. Voilà qui explique sa tentative malsaine de trouver « une solution » avec des ayants-droit.

Que l’opérationnalité du concept et sa reconnaissance soient assujetties à l’administration de la preuve de l’intentionnalité des faits puissent s’inscrire dans un long terme, notre détermination ne doit en aucun cas être entamée.

Les langues commencent à se délier, un coin du voile se lève également. Ce n’est donc pas le moment de céder à la fatalité.

Boubacar Diagana et Ciré Ba

Paris, le 10/09/2022