Monthly Archives: November 2021
Seigneur de miséricorde, abrège nos souffrances !
Le document faisant état de malversations à la banque Centrale de Mauritanie au temps d’Ould Abdel Aziz, que l’ex-conseiller du ministre de la Justice affirmait détenir par devers lui et qui lui valut d’être interpelé pendant deux jours par la police, a été divulgué par l’Observatoire du Civisme et des Libertés. Et il n’a dévoilé qu’une infime partie de ce que tout le monde savait déjà, un petit morceau d’un énorme iceberg de prévarication et de gabegie, une symphonie savamment jouée par tout un clan. Où la BCM joua allègrement sa partition, comme toutes les autres institutions de l’État. Comment aurait-il pu en être autrement, d’ailleurs ? Quand, dans un pays qui se dit islamique, son raïs reconnait avoir lui-même trempé dans des affaires louches avant même d’arriver à la tête de l’État, il faut s’attendre au pire une fois qu’il aura toutes les cartes en main. Et l’on n’a pas été déçu. On aura tout vu en une décennie. Même la banque Centrale, dont les méthodes de gestion et les procédures étaient systématiquement frappées du sceau de la rigueur – n’exagérons toutefois pas outre mesure… – n’a pas échappé à la boulimie ambiante. Elle s’est transformée en passoire où les principales devises se retiraient ou s’échangeaient en toute opacité. La suspecte N°1 dans l’affaire dite de la BCM déballa tout aux enquêteurs. Le procureur de la République en fit rapport à sa tutelle. C’est de cela que parlait Ould Haroun. Mais il n’y eut jamais de suite : pouvait-on, de fil en aiguille et d’aveux en dénonciations, inculper toute la république ? Il ne s’agit pas de couper un doigt gangrené ; la main, le bras – la tête ? – sont pourris. Y a-t-il donc une chance de sauver notre Nation ? On se prend parfois à souhaiter que le Jour Dernier vienne au plus vite…
Ahmed ould Cheikh
Remous fonciers en Mauritanie : les bords du fleuve en terres troubles de Trarza à Brakna
Afrique Midi – Des populations en colère, manifestant désarmées face à des forces de l’ordre lestées de gaz lacrymo et matraques pour protéger des opérations foncières au profit de riches entrepreneurs. Les uns arguent la légalité d’autorisations dûment signées, les autres la légitimité d’une occupation plusieurs fois séculaires.
Le synopsis qui peut se filmer dans toutes les zones du continent africain, se trame à Ngawlé dans la Wilaya de Trarza, en Mauritanie. et l’opposition ne détonne pas : des riverains contre des étrangers voulant s’approprier leurs terres cultivables.
David vs Goliath
La situation est sous tension à Ngawlé où des habitants qui, ce 3 novembre 2021, s’opposaient pacifiquement à l’installation de gros engins envoyés par de riches entrepreneurs à la solde de nababs qui veulent s’approprier des terres.
En lieu et place d’une posture d’arbitre, les autorités locales, le parti-pris flagrant, ont fait cavalièrement intervenir les forces de l’ordre qui, non contentes de gazer les manifestants, ont procédé à l’arrestation musclée de quelques notables détenus au commissariat de Lexeiba II, envenimant la situation et suscitant la colère de toute une contrée laissée à elle-même et délestée de la seule richesse vivrière qui lui restait : ses terres.
Pis, des oiseaux de mauvais augure y ont mêlé leur langue provocatrice, mettant dos à dos des communautés qui ont longtemps cohabité dans la paix et la cohésion.
Laisser-aller étatique
C’est à croire que le gouvernement ne perçoit pas l’enjeu vital de la terre pour des autochtones qui, face aux crises multiformes et l’absentéisme étatique du quotidien des populations, pour se prendre en charge, cultivent leurs terres.
Aussi laisser des promoteurs et autres nantis de la République envahir ces terres pour imposer leurs sous sonnants et trébuchants, relève-t-il d’une cécité programmatique et d’une surdité aux clameurs des peuples défavorisés.
Vigie citoyenne
C’est tout le sens de l’appel de politiques et autres activistes ou membres de la société civile qui, dans cette opposition entre les populations Ngawléennes et le richissime homme d’affaires Ould Wedi’a, rappellent au Wali de Trarza, Moulaye Brahim Ould, que la solution ne doit pas qu’être policière. Et pour cause, l’expropriation de terres de cultures communautaires et ancestrales est foncièrement illégale et la revendication des populations légitimement établie.
Ils en veulent pour preuve l’injustice des travaux d’aménagement au profit de l’usurpateur qui n’a que le soutien du Wali face aux documents légaux brandis par les populations de Ngawlé attestant leur propriété des terres en litige.
Dar el Barka
Tout comme à Ngawlé, la région du Brakna dans sud mauritanien bruit aussi de bottes policières chargeant des peuplades qui n’ont que le recours à la manifestation pacifique pour contrer la cession par l’Etat de leurs terres de culture de céréales à un investisseur arabe du Golfe qui, depuis 2015, s’acoquine avec deux hommes d’affaires mourabitounes en possession de permis fonciers pour mettre en valeur 3200 ha de terres agricoles. Une initiative louche en passe d’être évitée grâce à la vigilance citoyenne des populations autochtones.
C’est dire que la diplomatie intérieure gagnerait à disposer de ses lettres de nobles créances pour éviter que la grenade foncière ne se dégoupille, car les ondes de la déflagration pourraient éclabousser d’autres secteurs et induire d’autres crises pas facilement apaisables.
Par Mamadou LY
Samba Thiam à propos des conclusions des journées de concertation sur l’Education
J’avais promis, suite à mon retrait des journées de concertation, de revenir sur un certain nombre de choses, notamment sur certaines reformes, les concertations, le sens et les limites mêmes de la démarche du ministre. Nous y voilà !
Je le fais après lecture et du rapport final de 123 pages de la Commission Nationale des Etats généraux de l’Education et de la synthèse finale des Ateliers régionaux. D’abord arrêtons-nous un instant sur la réforme de 1999, réforme la plus vicieuse ,la plus inique, la plus anti-nationale de toutes, s’il en fut !
Elle naît dans le contexte du système à filières; filière arabe obligatoire pour tous les enfants arabo-berbères, et filière bilingue où, pour l’essentiel, se retrouvent orientés les écoliers négro-africains.
Système à filières concomitante à l’expérience de l’ILN, arrivée presque à terme( 5ème année, devant être généralisée à la 6eme, en raison même de son plein succès- taux de réussite situé entre 70 et 80 % -), et qui remplacerait donc ce système à filières…A un an de l’échéance, voilà qu’on arrête tout, brutalement, et qu’on change d’orientation, contre tout bon sens…Et sans explication aucune!
Pour quelles raisons ou quelle motivation arrête-t-on une expérience satisfaisante à tous points de vue, se demanderont les hommes de bon sens ?
L’explication réside à la fois et dans l’échec patent de la filière arabe qui était dans l’impasse, et dans l’idéologie chauvine : enseignement du hassanya et non de l’arabe littéraire, incompétence des Professeurs des sciences à dispenser correctement les cours dans cette langue, et qui finiront par être relevés et reversés dans la diplomatie, étudiants envoyés à l’extérieur incapables de suivre les cours!
Idéologie chauvine-raison principale -qui choisit , à la faveur du traumatisme subie par les négro-africains suite à une répression féroce, de liquider tout legs colonial et d’imprimer le choix d’une Mauritanie arabe, exclusivement, qui passe par l’assimilation du groupe dit minoritaire, conformément à la loi de proximité en sociologie.
C’est pourquoi, au lieu de se limiter à corriger les défaillances de la filière arabe par le rétablissement de l’enseignement des matières scientifiques en français-chose normale et légitime-, comme ils le firent, ils décidèrent aussi et surtout de pénaliser, par la même occasion, les enfants pulaar, sooninko et wolofs en dispensant l’enseignement de toutes les matières littéraires en arabe ( Philos, histoire, géographie, langue , morale, instruction civique et religieuse),affectées de coefficients qui défient l’entendement.
Pire ils décidèrent de supprimer l’ILN et son expérience à succès, à un an de l’échéance fixée pour sa généralisation et l’officialisation des langues pulaar, sooninke et wolof !
Voilà pourquoi, depuis 1999 c’est l’échec massif en milieu négro africain, dans les examens et concours, conduisant aux abandons massifs de l’école.
Cela fait 22 ans que ça dure, les dégâts sont incommensurables… Ceci, l’exposé de la 1ère journée des Concertations nationales, portant sur le diagnostic du système, le passe sous silence…Il fait table rase du succès de l’expérience menée par l’ILN …Le problème d’équité est posé, certes, mais il l’est sous l’angle d’équité du genre et de classes, au sens de P Bourdieu.
L’exposé tout comme le rapport final de synthèse tait l’iniquité ou l’inégalité structurelle du système devant l’accès au Savoir entre enfants à la base, beaucoup plus grave ( 2 langues étrangères au sens pédagogique du terme, imposées aux uns au départ du processus d’apprentissage .)
Que retenir à la fois et de ces journées de concertation et du rapport final ?
Dans le libellé des rapports quelque chose frappe tout de suite après lecture : la formulation des conclusions partielles avec l’usage répétitif de termes comme ‘’ la plupart’’ recommandent que, ’’la majorité’’ retient que…Et vu l’absence ,flagrante, d’une juste représentativité des communautés nationales dans le choix des participants, on devine aisément où se situe la ‘’majorité’’ …Mais l’on sait ‘’qu’il n’y a pas de majorité en matière de vérité’’ ; tout comme il n’y a pas de majorité en matière d’identité.
Rien n’est plus faux que de croire (ou faire croire)que l’avis majoritaire est forcément le plus juste, le plus bon. C’est un raisonnement spécieux et pernicieux .Il n’y pas de majorité en matière de vérité, encore une fois. Du reste, dans ce genre de conclave c’est le consensus qui doit être requis ou de mise et rien d’autre.
A noter, par ailleurs, le flou sur lequel ‘’surf’’ les rapports concernant le statut des langues négro-africaines; tantôt on parle de ‘’langues d’enseignement’’, tantôt de langues de communication’’ tout court, ou de langues ‘’devant faciliter les apprentissages’’, c’est-à-dire de facilitation pour l’acquisition d’autres langues. Tantôt c’est l’arabe qui est la langue principale d’enseignement, tantôt ce sont toutes les langues qui le sont !!!
‘’Sur la langue d’enseignement, la majorité des participants a insisté sur les langues maternelles comme moyen le plus efficace pour véhiculer les sciences modernes. A cet effet la langue arabe, en tant que langue nationale devrait être la langue d’enseignement des SMT( les sciences ), sans négliger le rôle que pourraient jouer les autres langues nationales dans la promotion de ces matières.’’(fin de citation -page 109).Ca dit ce que ça dit, ambigüité à dessein !
L’ opinion et le bon sens exigent, clairement et sans ambages, que les langues nationales pulaar, soninke et wolof soient des langues officielles et dans lesquelles on enseigne, pour donner les mêmes débouchés que la langue arabe .
Toute équivoque doit être levée à ce sujet. Pourquoi le Maroc et l’Algérie , depuis 2002, reconnaissent-ils leur diversité culturelle et officialisent-ils la langue berbère tamazight, et la Mauritanie se cabre ou hésite à le faire pour nos langues ? Au nom de quelle logique ?
…Quelque part dans les rapports, on parle de commencer les langues maternelles dans le pré-scolaire , à la maternelle. C’est une supercherie ! Les classes maternelles existent à peine à Nouakchott où elles sont rarissime, à fortiori à l’intérieur du pays ! Non, il faut reprendre l’expérience de l’Institut là où on l’avait laissée …
Cette réforme, menée tambour battant tombe comme un cheveu dans la soupe , au regard du dialogue en perspective; à moins que …A moins d’indiquer, en sourdine, un rétropédalage dans la volonté politique ‘’d’en haut’’ d’organiser les fameuses ‘’concertations-dialogue’’. Bref , à certains égards et au vu du timing, l’idée de mener cette réforme paraît suspecte !
Toujours dans le rapport final, une sorte de dilemme transparaît dans les termes de choix ; démocratisation de l’enseignement et qualité, ouverture à la modernité et ‘’enracinement dans notre authenticité’’, c’est-à-dire dans nos valeurs traditionnelles islamiques qui , on le sait ,sont adossées au droit musulman lui-même assis sur la charia islamique …du 6ème siècle !
Les auteurs du rapport ne semblent pas prendre conscience du caractère antinomique de ces deux orientations : la charia-source de notre Droit-et l’orientation moderne .La seconde s’oppose à la philosophie socle même de la pensée libre et libérée.
Le questionnement philosophique , dit-on , ne présuppose rien sans examen de la raison , alors que le conservatisme réligieux, dogmatique, bride la pensée …Dichotomie ! Ne pas penser est plus dangereux que penser { pensée critique}, nous dit Anna Arendt .
Alors que nous avons toutes les difficultés du monde à concilier ces termes de choix , les voilà qui parlent d’intégrer le préscolaire, l’enseignement originel , et envisagent la prise en charge des personnes handicapées, ( chose que même les Etats-Unis n’arrivent pas à résoudre). Il faut savoir ce qu’on veut et ce qu’on peut …Qui trop embrasse mal étreint dit le proverbe !
Que penser de la tentative du ministre à mener, en solo, cette réforme ?
J’avoue, pour ma part, être admiratif de la foi ou de l’enthousiasme débordant de ce ministre qui croît possible de mener et réussir, en solo, la réforme du secteur éducatif. Il ne voit pas ou refuse de voir que c’est le ‘’ tout entier’’ qui s’est écroulé…Il ne perçoit pas qu’ ’’il n’y a plus d’Etat depuis la réorganisation judiciaire sous Haidalla des années 80’’,( dixit : Isselmou ould Abdel kader).
Chose que confirme amplement Abdallah Sidya Ebnou – grand commis de l’Etat- dans son ouvrage intitulé ‘’quarante ans au service de l’Etat mauritanien’’ – véritable réquisitoire contre les régimes militaires, cause première de cette déliquescence de l’Etat.
Ould Ebnou y relate quelques anecdotes , comme la réponse que lui fit, sans gêne , l’agent chargé du bureau des Archives nationales : les documents que vous demandez n’existent pas ! Puis cet administrateur qui jette les archives dans la cour pour faire de la place ; à noter que d’autres les brûlent…
Le Ministre ne semble pas prendre conscience de l’ampleur des dégâts mais surtout du désordre, pour ne pas dire de l’anarchie générale qui règne partout dans ce pays ; de la circulation routière et urbaine au plus haut sommet de l’administration ; et ce, pourtant, jusques dans son propre secteur -l’Education elle-même- !
En effet , combien d’Enseignants flottent sans rien faire ,alors que les besoins sont là ? combien sont détachés pendant que des écoles en manquent et qu’on parle d’en recruter 6000 ? Combien sont dans leurs boutiques et continuent à émarger ? et ceux-là, censés être dans les classes , combien sont assidus ?
Combien de faux diplômes à la fonction publique qu’on n’ose pas nettoyer, pour ne pas fâcher X ou Y ou tel électorat ? Je pourrai répéter ce tableau, à loisir, dans le secteur de la santé, de l’administration générale, de la Justice , des sociétés d’Etat, de l’Armée, partout …Dans ses propres bureaux du ministère où je me suis aventuré , par accident , lors de notre rendez-vous privé ,je suis tombé sur deux dames qui dormaient , à points fermés, sur le plancher !
Et ceci , on ne le rencontre pas qu’au ministère de l’Education seulement … La corruption gangrènne tout , jusqu’aux bureaux des Examens et Concours …Il n’y a plus de suivi rigoureux du personnel, et la multiplication des Inspecteurs jusques dans les départements est une fausse solution.
Bref, le mal est général et profond, au point qu’il est utopique de songer à redresser un secteur isolé. Pour réussir le redressement il eût fallu que, dans un vaste mouvement d’ensemble impulsé d’en haut, tout se redressât en même temps .
Ce n’est pas hélas le cas pour l’instant. Dans le secteur de l’Education, comme dans celui de l’administration générale, nous avons besoin, pour nous relever, de l’aide de la coopération internationale et d’un retour de la vieille génération au moins pour une tutelle deux ans ! les dégâts sont énormes et le mauvais pli pris, profond…
Maintenant que dire des solutions , des bonnes solutions ?
Elles doivent, à mon sens, toutes- si toutefois le vivre-ensemble demeure le cap-, reposer sur le constat que nous sommes un assemblage de peuples , agrégés par la seule volonté du colon. Nous ne sommes pas encore une nation , que l’on cherche à forger par l’assimilation forcée. Nous appartenons à deux espaces géographiques, deux aires culturelles différentes, deux entités politiques historiques distinctes, deux récits nationaux , deux peuples, en un mot, aux traditions et habitudes mentales différentes .
Toutes solutions imaginées, pour être viables et durables, doivent découler de cette réalité têtue de notre Diversité et Identité plurielle.
Par dessus tout, une question essentielle – presque existentielle- qui précède toutes les autres, demeure : voulons -nous réellement changer ? That’s is the question !
21 Novembre 2021
Samba Thiam
Président des FPC
Mauritanie : Samba Thiam quitte la concertation nationale sur la réforme du système éducatif à Nouakchott
Kassataya – La première journée de la concertation nationale sur la réforme de l’éducation nationale à Nouakchott révèle le début de tous ses secrets.
Un public éclaté dans des ateliers multiples traitant du même thème, des interventions limitées à 2 ou 3 mn, un échantillon du public de toutes catégories, venu de tous horizons. Autant de couacs relevés par le président des FPC qui vient de suspendre sa participation.
Cette colère du président des FPC invité aux Assises nationales sur la réforme du système éducatif et pourtant son parti n’est pas reconnu officiellement jusqu’ici, est partagé par les observateurs d’autant plus que la question des langues nationales qui tient à cœur le leader négro-mauritanien, ne figure pas sur les sujets de débat qui sont tous libellés en arabe sans la moindre traduction.
Il s’agit d’un blocage communicationnel voulu par les organisateurs en tête le ministère de l’éducation nationale, qui s’inscrit dans le cadre d’une exclusion des non arabes.
Autrement dit, le régime de Ould Ghazouani semble ne pas tenir compte des échecs des 5 précédentes réformes en mettant en première ligne son idéologie linguistique arabe au détriment de la diversité culturelle.
C’est une première journée décevante qui augure ce que les observateurs pointent comme une concertation nationale pipée. Le coup d’envoi des assises nationales par Ould Ghazouani est significatif. Il est venu parachever l’arabisation en Mauritanie.
Cherif Kane
Document sur les malversations à la BCM du temps d’Aziz : La montagne a accouché d’une bombe
Le document, que l’ancien conseiller du ministre de la Justice, Ahmed Ould Cheikh Sidiya, affirmait détenir et où il est fait état d’opérations de malversations à grande échelle à la Banque centrale de Mauritanie (et qui lui a valu d’être interpelé par la police), a été publié aujourd’hui par l’Observatoire du civisme et des libertés. Il dévoile six opérations dont la BCM a été le théâtre du temps de l’ancien président Ould Abdel Aziz. En fait, un secret de Polichinelle qui n’est que la partie visible d’un énorme iceberg. Lisez bien :
1-Une somme d’un million de dollars auprès d’un haut responsable occupant actuellement le poste de Secrétaire Général de la Présidence de la République. Ce haut responsable est rentré dans le bureau du Gouverneur de la Banque Centrale, s’était assis à ses côtés. Le Gouverneur convoqua la fonctionnaire chargée de la vérification de l’authenticité des billets de banque en lui demandant de vérifier la qualité de ces billets. L’authenticité étant vérifiée, le haut responsable repartit avec cet argent.
2- Un montant d’environ 800.000 euros retiré par l’ex-ministre des Finances en personne, actuellement Administrateur Directeur Général (ADG) de la SNIM. Le retrait a été effectué par chèque, de nuit, après la fermeture des guichets. L’argent a été emporté par l’ADG dans une sacoche que le Gouverneur avait pris le soin de lui préparer.
3-Une somme d’environ 500.000 euros retirée par chèque par un employé de la Présidence. Selon les dires de la prévenue Tebbiba Ali N’Diaye, cet argent était destiné à gratifier le président d’un État africain dont elle ne se rappelle pas le nom mais qui avait quitté Nouakchott le jour-même. Selon le témoignage de la personne qui avait retiré l’argent et qui est un militaire actuellement à la retraite, après avoir servi dans les rangs de la garde spéciale, le président en question serait celui de la Guinée Bissau. Ce témoin avait déclaré ignorer le montant de la somme mais affirme avoir procédé à son retrait sur instruction du Directeur de Cabinet du Président de la République. Et Tibbiba Ali N’Diaye d’ajouter que de tels retraits d’argent destinés à des présidents africains en visite à Nouakchott se sont répétés à maintes reprises et toujours dans l’extrême urgence.
4-Un montant de 500.000 euros en coupures de 500 a été apporté par la chef de protocole de l’épouse de l’ancien président, en vue de changer les billets de 500 euros en plus petites coupures de 200 et de 100 euros. L’échange a eu lieu après vérification de l’authenticité des billets.
5-Un montant de 400.000 euros en coupures de 500 a été envoyé par la Présidence, en vue de changer les billets de 500 euros en coupures de 200 et de 100 euros. L’échange a eu lieu après vérification de l’authenticité des billets.
6-Une somme de 5.000.000 dollars pour l’examen de laquelle l’Ex-gouverneur avait convoqué la fonctionnaire en charge de cette mission. La dit-fonctionnaire déclare avoir trouvé l’Ex-gouverneur en compagnie de deux officiers de l’armée aux grades de colonel. L’un des deux colonels occupe le poste de Directeur Adjoint de la Direction Générale de la Sûreté Extérieure et de la Documentation. Vu le fait que l’argent était dans des boîtes fermées, la fonctionnaire s’est contentée d’en prélever quelques échantillons pour les examiner avant de voir les officiers emporter la somme par devers eux.
Le procurer de la République, auteur de la lettre adressée à sa tutelle et qui énumère ses opérations, prend soin de préciser qu’étant donné ‘’le fait que ces informations sortaient du champ de l’enquête en cours sur l’affaire de la Banque Centrale, vu le caractère spécial et, selon les dires des déclarants, peu courant de ces informations et à la lumière des spécificités de la loi de lutte contre la gabegie et celle contre le blanchiment d’argent, et vu la compétence des appareils judiciaires mauritaniens ainsi que les engagements internationaux de la Mauritanie en ce qui concerne la transparence’’, il demande ‘’conseils et orientations’’. Qui ne viendront jamais puisque la lettre n’a pas été suivie d’effets ? Pire, certains responsables épinglés ont soit été maintenus soit ont bénéficié de promotions.
A présent que le document a été rendu public, des têtes devraient tomber. A moins que la lutte contre la gabegie ne soit qu’un slogan creux. Comme elle l’a toujours été.
le calame