Flamnet- rétro: Cinquantenaire de la Mauritanie: notre vision des choses
Cinquante ans d’oppression, de répression et de régression…
Le cinquantenaire des Etats Africains rime généralement avec régression, répression, et renvoie à une Afrique marginalisée, qui ploie sous le poids de la dette, écrasée par des rapports marchands impitoyables, inégaux et iniques; une Afrique appauvrie, meurtrie et exsangue par cinquante années de régimes despotiques, aux peuples déçus, pessimistes, en désillusion totale vis-à-vis de leurs gouvernants.
Si ces indépendances africaines ont procuré la satisfaction d’avoir délivré les peuples d’Afrique de l’insupportable sentiment de l’aliénation politique, il reste que ces mêmes peuples, en général, les ont ressenties comme une traversée du désert; ils les ont vécues comme un calvaire à cause de la “mal- gouvernance”, qui se décline en corruption des moeurs , pillage des ressources, répression et oppression, ethnicisme et népotisme, pauvreté et famine, arbitraires et abus des dictatures, surtout militaires .
Tableau sombre qui amena ce vieux maure de l’Est de la Mauritanie à demander un jour : à quand donc la fin de l’indépendance? même constat amère qui faisait dire à Ahmadou Kourouma , à travers son personnage de roman, « comme une nuée de sauterelles les indépendances sont tombées sur l’Afrique » !
La Mauritanie, le miroir brisé
La Mauritanie, ce morceau hybride de l’Afrique, n’échappe pas à cette sombre caractérisation. Loin s’en faut ! en effet la Mauritanie constitue un des cas achevés des ratés des indépendances africaines que décrivait, si bien Ibrahima Ly : « Nous avons déjà eu ce qu’on appelle “indépendance”, quelle tristesse ! Nous avions ensemble tué la bête immonde . Quelques- uns ont traîné le cadavre dans un fourré, et avec sa dépouille se sont confectionné des masques. Ils nous font maintenant terriblement peur ».
Par la faute de nos dirigeants politiques nationaux, nous mauritaniens sommes aujourd’hui ce que nous sommes, c’est- à-dire au bas du classement des pays, à l’échelle du globe.
Génèse : Maitre Moctar ould Daddah artisan du Système
Le Président Moctar ould Daddah ( paix à son âme ), par ces choix subjectifs, partisans, hypothéqua la marche de notre pays vers le progrès, l’entraînant dès le départ dans des dérives politiques et nationalistes qui continuent encore aujourd’hui de compromettre et son unité et son développement.
Daddah s’attaqua dès les premières années de son règne à l’institution parlementaire, pour en modifier le pouvoir. Afin de concentrer plus de pouvoirs entre ses mains, il supprimera le régime parlementaire hérité de la France, pour instaurer un régime présidentiel, taillé sur mesure, s’octroyant ainsi un pouvoir autocratique, fort. Le parlement fut donc dépossédé de son pouvoir, inféodé et vidé de sa substance, pour répondre à ses désirs et à son plan.
Il faut rappeler, qu’avant de s’attaquer au parlement le marabout avait, au préalable, pris la précaution de faire, doucement , supprimer le multipartisme en germe, en amadouant les partis politiques mauritaniens naissants, en les embrigadant. A la place il instaura, à la hussarde, le monopartisme, muselant ainsi les voix discordantes; il ira jusqu’à créer une confusion des pouvoirs en instituant la primauté du parti sur l’Etat, pour mieux asseoir son pouvoir autocratique, et exécuter son agenda secret visant la réorientation des équilibres politiques et culturels internes.
Le Parti unique à pensée unique était né, qui allait compromettre, pour une longue période de temps , la trajectoire démocratique dans laquelle notre pays s’était engagé, au sortir de la colonisation.
En éliminant subtilement ces partis politiques naissants, il éliminait du même coup le cadre naturel du débat et des projets contradictoires, essence même de la démocratie qui reposait sur les differences et la confrontation d’idées. Notre démocratie balbutiante fut assassiné et enterrée au nom du parti unique, qui ne réussit, hélas, ni à forger notre unité nationale qu’il était censé viser, ni à nous guérir du mal tribal contre lequel il fut institué .
Ould Daddah dévia non seulement cette trajectoire vers la démocratie, mais compromit également le progrès du pays, en s’adossant sur les forces rétrogrades et conservatrices, poussant les éléments les plus progressistes de son régime vers la démission ou le reniement .
Après avoir réussi à éliminer les formations politiques existantes et inféodé le parlement, il entama l’exécution de son plan secret : rétablir l’équilibre politique entre arabo-berbères et négro-africains, alors favorable aux négro -africains. Ould Daddah était obnubilé, obsédé par cette situation héritée de la colonisation , qu’il jugeait impérieuse de corriger au plus vite ; seulement au lieu de se limiter à redresser le déséquilibre – chose légitime et juste en soi – il versa dans l’excès inverse, en éliminant progressivement mais systématiquement, les négro africains des instances décisionnelles et de nombreux secteurs de la vie publique.
C’est donc en toute connaissance de cause que Ould Daddah commença à mettre en place, lentement mais obstinément, les bases de son projet hégémonique d’une « Mauritanie arabe », surtout arabe. La loi non écrite, arbitraire, du quart étant déjà appliquée pour les compositions de gouvernements, il s’attaqua alors à la réforme de secteurs clefs, indispensables pour mener à bien son dessein : l’Armée, l’Ecole, l’Economie, trois verroux essentiels dont il fallait s’assurer, indispensables, pour qui voulait maîtriser l’Etat .
Pour un contrôle futur de l’Armée (encore sous le commandement du commandant Diallo issu de l’Armée coloniale française), Ould Daddah s’employa à mettre en place un premier noyau du corps de commandement futur de notre Armée « nationale » en gestation, par la reconversion de certains enseignants: Mbareck ould Bouna Moctar et Ould Saleck (arabo-berbères naturellement) sont choisis , et constitueront à l’issue d’une formation sommaire à l’étranger, les premiers officiers de l´Etat major naissant; (Il faut rappeler que les candidatures d’instituteurs négro-africains furent, pour la circonstance, systématiquement éliminées).
– L’Ecole sera la seconde étape du marabout. Il engage, préssé, les réformes éducatives, essentiellement centrées sur le renforcement progressif de la langue arabe à l’école; langue qui sera instrumentalisée à loisir pour les besoins de la cause, afin d’accélerer le processus de liquidation des uns, et hâter la promotion sociale des autres. Cela se traduira par un recrutement de maîtres coraniques, essentiellement arabo-berbères, sans qualification, une croissance exponentielle d’écoles en zone arabo-berbère, sans rapport aucun avec la densité de population habituellemt requise.
Dans le Sud, à l’opposé, on assistera à une sorte de frein à l’expansion scolaire, où villages et adwabas( campements haratines) ploient sous le poids démographique, et malgré des demandes insistantes des populations; il ne fallait surtout pas repondre à ces sollicitations ! car ce serait gêner gravement la politique de “rattrapage scolaire” entreprise, à pas de course, par Moctar.
L’arabisation à outrance, sans les conditions minimales requises, sans contenu et sans préparation? peu importait, pourvu qu’elle permît la liquidation des uns et la promotion sociale rapide des autres !
– Secteur de l’Economie où, pour boucler la boucle, Ould Daddah mettra très vite en place son 1er noyau de cadres économiques et financiers, chargé de veiller au grain; ça sera, comme par hasard, Ahmed Ould Daddah, Ismael Ould Amar, (tous Arabo-berbères, une fois de plus !). Ce socle constitué, il initia alors sa “politique financière” qui permit, là aussi, à la composante arabo-berbère d’asseoir son hégémonie; Pour ce faire il créa alors l’ouguiya,- plus adapté au projet que le Franc CFA sous l’oeil vigilant de la métropole -, et fit venir à flot les fonds arabes; deux sources où les arabo-berbères puiseront sans compter ! Deux actes qui permettront «l’ accumulation primitive (décisive) du capital » par un bon nombre d’entre eux; en effet, ceux -ci bénéficieront de prêts à volonté et sans restriction, interdits aux autres ( Négro-africains et Haratins). La gestion laxiste de ce secteur ouvrira la voie aux détournements massifs des deniers publics et de ces fonds arabes, dans l’impunité totale, par une classe de prédateurs économiques, devant un pouvoir préoccupé par la promotion d’une bourgeoisie tribalo-raciale.
Voilà qui explique peut être pourquoi Oud Daddah ne combattit jamais sérieusememt la corruption et l’enrichissement illicite. Voilà qui aussi expliquait peut-être ce paradoxe chez l’homme : honnête et très intégre sur le plan de gestion des déniers publics, il laissa faire presque librement les prédateurs, sans jamais sérieusement les inquiéter. Cette déplorable habitude qui constitue un des handicaps majeurs de notre développement a pris racine hélas, et devient chaque jour, plus difficile à extirper.
Les secteurs de l’Armée, de l’Education et de l’Economie maîtrisés, Daddah se tourna vers l’extérieur .
Il s’employa, ici, à masquer ses intentions et son projet par un écran de fumée auprès de ses pairs africains qu’il mystifia à fond, en se faisant passer pour un tiers-mondiste sincère, avec un slogan, encore plus trompeur, à la bouche : « une Mauritanie trait d’union » entre le monde arabe et africain, dont il fera toujours fi !
Les éléments du plan se mettaient doucement en place, enserrant petit à petit les négro-africains, resserrant de plus en plus l’étau autour d’eux. Le plan appliqué, méthodiquement, reproduira, à peu près à l’identique, les effets et les objectifs souterrains de l’idéologie Afrikaaner, ainsi définis : “annihiler la force numérique et la force de travail que représentent les Noirs pour les transformer en instruments, sans qu’aucune possibilité ne leur soit laissée de renverser cette situation”.
Voilà l´homme au sombre héritage que l’on s’apprêtait à sacrer en ce 50ème anniversaire de notre indépendance !
Bilan : Un pays divisé , un peuple appauvri , assoiffé de justice .
De par sa vision ethniciste et de par sa gestion partisanne, Ould Daddah nous léguait un pays en proie à des crises inter-ethniques cycliques récurrentes, dangereuses pour la paix et la stabilitité de la Mauritanie, qu’il ne chercha, du reste, jamais à sérieusement résoudre -et pour cause !-, repoussant leur solution toujours au lendemain. Tout comme il ne voulut jamais s’attaquer au fléau, terrible, qu’est l’esclavage, qu’il dira comprendre, au lieu de l’abolir. Il laissa, consciemment, ce phénomène odieux qui défiait pourtant notre humanisme se perpétuer .
La création d’une nation mauritanienne égalitaire, juste et démocratique, toutes races et ethnies confondues, ne fut ni le souci, ni le projet de Moctar Ould Daddah. S’il nourrissait cet idéal c’était pour la nation arabo-berbère, exclusivement; « père de la nation » il l’était, assurément, pour la nation arabo-berbère !
Si nous sommes aujourd’hui un peuple divisé, appauvri, sans repères, une nation en gestation compromise, c’est bien, en grande partie, à cause de Ould Daddah.
Il ouvrit le chemin des dérives, de la politique de l’inégalité, du laxisme, de la complaisance, et les militaires s’y engouffrèrent, à coeur joie; militaires du genre Ould Taya, ( S. Doe, Y.Jammeh, L. Konté) et combien d’autres, tristes symboles et prototypes mêmes des ratés de ces indépendances africaines que Ibrahima Ly, toujours lui, caricaturait à peine ainsi : « hier ceux qui s’emparaient du pouvoir avaient une certaine instruction, aujourd’hui ils lisent en titubant sur certaines syllabes».
Le projet d’une Mauritanie arabe, initié et nourri par Moctar, sera poursuivi et consolidé par les régimes militaires dictatoriaux qui lui succédèrent; quelque fois dans le sang, avec la cohorte des spoliations et expropriations foncières de négro-africains et de haratines, les déportations de populations, la radiation de milliers de fonctionnaires noirs pour faire place nette aux arabo-berbères dans la fonction publique, les exécutions extra -judiciaires de milliers de civils et militaires négro africains, l’épuration ethnique, en un mot, le génocide; Si tous les régimes dictatoriaux militaires qui succédèrent à Ould Daddah ont poursuivi avec conviction et determination son projet d’une Mauritanie arabe, c’est sans conteste Maouiya Ould Sid’ Ahmed Taya qui l’a surtout consolidé, en l’élevant sur le terreau des horreurs. . .
Enfin, la radicalisation de l’arabisation à l’école au sein de l’administration et de la justice dans la négation ou le mépris total de l’identité des autres. Une Ecole divisée, à genoux, dans l’impasse totale, avec son corollaire: les échecs massifs des écoliers négro-africains, et des générations d’enfants sacrifiés à vie, toutes ethnies confondues.
Ould Taya accentua donc gravement la division léguée par Daddah .
Des politiques à caractère chauvin et raciste sont renforcées, politiques à deux poids deux mesures qui font qu’ici, on assiste à la multiplication d’écoles, à croissance exponentielle sans critères objectifs réels, la démultiplication de centres administratifs ( arrondissements, préfectures) ; et là, bizarrement on notera la stagnation de l’expansion scolaire, la multiplication de postes frontières harcelants, de postes de contrôle routier intempestifs, de postes de police, hier, inconnus des villages de la vallée du fleuve. Pour les uns une identité culturelle reconnue et assumée par l’Etat, pour les autres la négation même de leur culture. Ici, une sureprésentation arbitraire au parlement, et là une sous-représentation de populatons qu’aucun poids démographique ne justifie.
Dans cette vallée du fleuve les populations vivent des vexations quotidiennes, les déportations, les viols, des contrôles intempestifs excessifs, un rançonnage aux frontières devenu routinier, des expropriations foncières arbitraires, sans fin. Il se développe dans cette vallée du fleuve, sourdement et de plus en plus, ce sentiment d’assiégés permanents; les nouveaux arrivants et ces préfets, gouverneurs et chefs d’arrondissement, tous arabo-berbères, connaissant si peu le milieu, ne cherchant souvent même pas à s’y intégrer,- “migrants”se comportant généralement comme en territoire conquis-, exacerbent hélas ce sentiment de ras le bol !
Un moment de répit dans tout de même cette vallée du fleuve meurtrie et quelque espoir, de courte durée, ressentie chez les négro-africains, sous le Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi qui, non seulement amorça la réconciliation nationale, mais en même temps tenta, avec courage et sans tricher, de renouer avec le fil, rompu, de la trajectoire démocratique. Seulement l’homme de foi, sincère, mais si peu habitué aux méandres de nos moeurs politiques atypiques, avait mal mesuré les enjeux en cause et les résistances de tous ordres ; d’où l’intrusion, pour la seconde fois, des militaires, au travers d’un putsch auquel, hélas, des forces politiques se disant attachées au jeu démocratique comme seul cadre d’expression et d’accés au pouvoir, donnèrent du mou!
Le résultat de toutes ces politiques nocives est que nous vivons aujourd’hui côte à côte en nous tournant le dos, dans la suspicion du voisin !
Le pays physique lui-même est resté presque à l’état dans lequel l’avait laissé le colon: aucune infrastructure notable, pas de réseau routier, ni de parc automobile, pas d’aeronefs, pas d’industrie, pas de plan général d’urbanisation, pas d’eau courante, rien ! Le peu qui avait été bâti par le colon est dans un état piteux, sans entretien ! Bref un pays aux immenses ressources qui se meurt de faim !
La vallée du fleuve et sa population ont été les plus affectées par ces tristes politiques. Ce cinquantenaire ce sont 50 ans d’oppression et de régression des populations de la vallée du fleuve, transformée en vallée des larmes!
Etat actuel de lieux …ère Azizienne : Qu’est ce qui a changé?
On ne peut ne pas remarquer ces tentatives de lutte contre « la gabégie » à l’actif du régime; même si celle-ci se menait sans trop tricher, un peu sélectivement, sans toute la fermeté requise, elle a au moins le mérite de limiter le taux des prédateurs, et gêner, quelque peu, les vols à ciel ouvert. Tout comme on ne pouvait ne pas accueillir favorablement ces tentatives nouvelles, que sont ce nivellement amorcé dans le traitement des disparités des capitales régionales, et cette lutte contre le terrorisme enfin, qui doit être implacable et sans concession, face à ces fanatiques soldats adeptes de l’obscurantisme, si peu soucieux de la vie et des droits ;
Seulement l’égalité ne se réduit pas à la lutte contre la gabégie ou contre le terrorisme. C’est beaucoup plus que ça !
Aziz hésite encore à aborder les questions essentielles qui minaient toujours l’unité nationale. Le régime observait un profil bas sur la question du passif humanitaire, et réchignait à prendre en charge cette question endémique et lancinante de l’esclavage. Il ne se passe pas de semaine sans que l’IRA ou SOS-ESCLAVES ne révèlent des cas avérés d’esclavage, plus pathétiques les uns que les autres, mais qui restaient toujours impunis.
Le gouvernement reculait, visiblement, sur le dossier des réfugiés, réticent à leur rendre leurs terres, s’essayant à la politique du fait accompli, dangereuse et sans issue, qui suscitait rancoeurs et frustrations durables .
Le rapatriement s’était arrêté côté Sénégalais, que l’on reprend de mauvais gré, en rognant sur le chiffre d’inscrits : sur près de 5000 cas de réfugiés inscrits qui attendent encore, il semble que le régime se serait maintenant rétracté, et ne souhaite plus en accueillir qu’une partie infime ! il va jusqu’à nier l’existence des réfugiés du Mali ! Ce régime était entrain de revenir sur les engagements officiels et publics de l’Etat mauritanien, et tentait, en réalité, de remettre en cause le droit fondamental du retour !
Voilà que l’on multipliait des points de passage sur le fleuve, compliquant encore davantage le quotidien des populations déjà intenable, comme si « la menace venait (encore) du Sud » !
La timide tentative d’équilibre ethnique au sein du gouvernement à ses premières heures a vite pris fin; on a limogé, rapido-presto, ces ministres qui avaient à coeur leur job, et voulaient rompre avec l’anarchie et le laxisme ambiants. Celle de la fonction publique aurait été jugée d’en faire un peu trop, d’avoir cherché à traiter, avec trop de zèle, ce dossier,”encombrant”, de « ses parents fonctionnaires» arbitrairement radiés, dossier qui depuis est sous le coude. Celui des Finances s’est vu préférer un homme qui avait comme top priorité « la version en caractères arabes » des bulletins de salaire !
En réalité le Président Aziz se refusait à operer cette rupture, indispensable, d’avec les hommes et ces pratiques nocives, symboles du triste passé. Voilà pourquoi, le Système, pour l’essentiel, demeurait encore en place.
Voilà qui justifie la poursuite, à la même cadence, de ces nominations à caractère ethniciste. Toujours les mêmes qui sont sélectionnés, promus.Toujours les mêmes quotas, la même portion congrue dans les médias d’Etat, et que l’on se proposait de reconduire, jusque après la libéralisation de l’audio-visuel !
Une “double nationalité” tape-l’oeil qui s’averera être un mirage pour beaucoup, au vu des conditions absurdes dressées pour y accéder. Un parti qui grossit, dangereusement, avec tant de satellites autour, qu’il glissait doucement vers le parti-Etat, vers le parti unique à la pensée unique- source de nos malheurs-, et menaçait de porter préjudice au pluralisme véritable .
Le Système demeurait encore vivant, ténace …sous l’ère Azizienne !
Puisque le Président dit contrôler tout, c’est donc qu’il bloquait tout !
Quelle voie, quelles solutions pour la Question de la cohabitation
Il nous est encore possible de créer cette nation unie, égalitaire et démocratique, à condition qu’il existe une volonté politique réelle; à condition de prendre à bras le corps cette question lancinante de la cohabitation et de l’esclavage, toujours escamotée, objet de fuite en avant permanente; à condition, enfin, d’en déterminer les bases justes.
Ces bases devront reposer sur les axes clairement définis, ci-après :
– Un équilibre dans la gestion du pouvoir , entre toutes les composantes nationales.
– Une réforme politique et constitutionnelle, qui consacrent les libertés démocratiques, reconnues et protégées, introduit des amendements constitutionnelles spéciaux portant sur l’Identité de la Mauritanie, l’égalité des communautés, des langues et des cultures nationales, la fin de l’esclavage, la création d’un observatoire national des libertés et de la cohabitation.
-Une réforme de l’Education, fondant une Ecole moins élitiste, ouverte sur le monde moderne et respectueuse de nos identités multiples.
-Une réforme de l’Armée, pour en faire une armée républicaine et de développement, ouverte équitablement à toutes les composantes nationales.
– Une réforme de l’Administration et de la justice, basée sur l’autonomie régionale, un redécoupage territorial qui tienne compte des aires culturelles et historiques, une justice modernisée enfin.
– Une réforme agraire – dont la vallée serait certainement le pivot – fondée sur le droit de propriété reconnu et réaffirmé, reposant sur une politique d’investissement agricole qui respecte ce droit de propriété, associe les populations concernées, respecte les espaces vitaux des villages, ouvre des couloirs de parcours pour le bétail, préserve les droits séculiers des pêcheurs sur le fleuve, détermine les zones d’investissement dans la vallée, que sont le Waalo, le moyen Jeeri et le haut Jeeri à affecter, respectivement, aux autochtones locaux, aux hommes d’affaires nationaux et régionaux, au grand capital international .
Ces réformes devront être précédées, pour mieux accrocher, par des mesures immédiates d’apaisement social de la part du Gouvernement qui se traduiront ainsi :
– Un réglement correcte du dossier des réfugiés qui passe par la restitution des terres de culture et des villages aux uns, et l’ indemnisation pour les autres.
– Une volonté politique affirmée de mettre fin à l’esclavage, ( par l’annonce de mesures préventives immédiates ).
– Un réglement immédiat du passif humanitaire, qu’on ne pouvait solder par de l’argent, dont la solution passait par la création d’une Commission Vérité- réconciliation, guidée par cette tryptique : « Equilibre à trouver entre le refus de l’impunité, les exigences de vérité et des réparations, et la nécessité du pardon ».
Il n’y a pas de paix sans réconciliation , et il n’y a pas de réconciliation sans Justice .
Tout comme il n’y a pas de concorde là où il n’y a pas d’égalité. Et puisque cette égalité n’a pu émerger après 50 ans, à travers le cadre de “l’Etat unitaire centralisé” dans sa forme actuelle, la raison commande de rechercher d’autres voies, telle, entre autres, l’Autonomie. L’autonomie nous parait la solution la mieux appropriée, dans notre cas d’espèce, pour constituer un mode d’organisation entre des groupes humains aux habitudes mentales, langues et tradition différentes, visant à diluer le pouvoir et le répartissant entre ces groupes, de manière à permettre à chacune de nos communautés de promouvoir elle- même son propre développement, dans l’unité préservée du pays; historiquement et politiquement cette option se justifie amplement.
Les FLAM appellent :
– Les réfugiés à rester mobilisés, à ne pas céder, à résister à la spoliation de leurs terres de culture; à ceux qui demeuraient encore à l’extérieur des frontières elles leur demandaient de continuer à se battre, chaque jour davantage, pour leur droit légitime au retour.
– Elles appellent la jeunesse négro-africaine à cesser de courber l’échine, cesser de gémir et de supplier, et à compter d’abord sur ses propres forces.
– Aux Haratines, de refuser d’être les victimes consentantes de leur propre esclavage.
– Et à toutes les victimes du Système de prendre conscience « que la lutte en ordre dispersé n’a pas d’autre issue que la défaite pour tous ».
– Aux forces démocratiques et progressistes, aux compatriotes arabes et berbères honnêtes et Justes, soucieux de notre devenir en commun, de prendre leur responsabilité face au racisme d’Etat, à l´esclavage et à la pauvreté grandissante.
– Enfin au Président de la République, ce poème de Maouloud Mammeri, en guise d’appel :
« Quand trop de sécheresse brûle les coeurs
Quand la faim tord trop d’entrailles
Quand on rentre trop de larmes
Quand on baillonne trop de rêves ,
C’est comme
Quand on ajoute bois sur bois sur le bûcher
à la fin il suffit du bout de bois
d’un esclave pour former
dans le ciel de Dieu
et dans le coeur des hommes
le plus énorme incendie».
Nous devons nous persuader – c’est vital pour nous et pour ce pays – que la voie choisie jusqu’ici était dangereuse et sans issue! « Une nation ne pouvait vivre moitié libre moitié esclave»; elle ne pouvait non plus se construire avec des citoyens à-démi et des citoyens à part entière.
Il est possible de faire de ce pays un foyer régional des plus attractifs, un havre de paix et de prosperité si nous nous ressaisissons.
Il nous faut nous ressaisir, il est encore temps !
La lutte continue!
Stockholm le 24 novembre 2010.
Le département de la Communication des Forces de libération africaines de Mauritanie