Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Daily Archives: 02/05/2025

“Samba Thiam, le diable de l’imaginaire maure : entre peur de la vérité et stratégie de déni”

Dans l’imaginaire collectif de certains milieux maures, Samba Thiam est perçu non pas comme un simple opposant, mais comme une figure quasi diabolique. Ce phénomène, loin d’être anodin, est révélateur d’un système profondément enraciné de peur, de déni, de domination et de rejet de toute remise en question. Il ne s’agit pas ici de critiquer un groupe dans sa globalité, mais d’analyser un imaginaire construit, alimenté et utilisé politiquement, au service de l’ordre établi.

Une diabolisation construite dès les premières heures

Dès l’apparition des FLAM et la publication du Manifeste du Négro-Mauritanien opprimé en 1986, le pouvoir mauritanien a mobilisé toute une stratégie de peur dans les milieux arabo-berbères pour faire croire que Samba Thiam et ses compagnons voulaient « détruire la nation », « diviser le pays », « attaquer l’arabité » ou encore « venger les Noirs contre les Maures ». On a sciemment transformé une dénonciation du racisme d’État en discours haineux pour mieux effrayer la majorité arabo-berbère et la souder autour du pouvoir dominant.

Ainsi, Samba Thiam est devenu le symbole vivant de ce que le système ne voulait ni entendre ni reconnaître : la vérité sur l’apartheid mauritanien.

Une peur irrationnelle face à la remise en question

Pourquoi cette peur ? Parce que Samba Thiam ne joue pas selon les codes. Il ne demande pas la charité, il exige la justice. Il ne supplie pas, il accuse avec preuves et intelligence. Il ne s’excuse pas de défendre la dignité des siens. Et dans une société où le pouvoir dominant attend souvent des opprimés qu’ils soient silencieux, reconnaissants, et dociles, un Noir qui parle haut, fort, et clair devient dangereux.

Il incarne une rupture avec le récit officiel de l’unité nationale et de l’harmonie raciale — récit profondément ancré dans l’imaginaire maure, mais totalement déconnecté de la réalité vécue par les communautés noires.

Un refus de la vérité travesti en légitime défense

Samba Thiam ne fait pas peur parce qu’il ment. Il fait peur parce qu’il dit ce que d’autres n’osent pas dire, avec constance, rigueur et courage. Ceux qui le diabolisent ne le réfutent pas sur le fond. Ils ne répondent pas à ses arguments. Ils le caricaturent, l’accusent, l’excluent. C’est plus facile que de se remettre en question, que de reconnaître les crimes du passé, que d’admettre l’existence d’un système de domination.

Ainsi, dans certains cercles, traiter Samba Thiam de « raciste », de « communautariste », ou de « fauteur de trouble » permet d’éviter le débat de fond. On se protège de la vérité en l’accusant d’extrémisme. C’est une stratégie classique d’inversion des rôles, où l’agresseur se dépeint en victime pour éviter de faire face à sa propre histoire.

 Une fracture à surmonter pour construire une Mauritanie juste

Cette image de Samba Thiam comme figure du mal dans l’imaginaire maure est un obstacle à la réconciliation nationale. Tant que des pans entiers de la société continueront à rejeter l’autre dès qu’il parle de ses droits, à diaboliser toute voix noire exigeante, il n’y aura ni paix durable ni unité réelle.

Le dépassement de cette fracture passe par :

 • L’ouverture d’un dialogue historique sincère ;

 • La reconnaissance des souffrances vécues ;

 • La fin des amalgames entre lutte pour l’égalité et haine de l’autre.

Il faut cesser d’avoir peur de ceux qui demandent justice. Car ce ne sont pas eux qui menacent la nation, mais bien ceux qui refusent obstinément de reconnaître les injustices sur lesquelles elle a été construite.

le diable n’est pas toujours celui qu’on croit

Samba Thiam n’est pas le diable. Il est le miroir que certains refusent de regarder. Il est l’interlocuteur qu’un pouvoir dominateur préfère caricaturer plutôt que d’écouter. Il est la mémoire vivante d’un peuple qu’on a voulu effacer. Et tant que l’imaginaire maure restera prisonnier de cette peur fabriquée, la Mauritanie ne pourra pas avancer vers une nation apaisée, égalitaire et véritablement unie. Rétablir la vérité sur Samba Thiam, c’est donc un pas nécessaire pour libérer aussi l’imaginaire maure de ses propres chaînes.

Mamadou Sy. 

سامبا تيام، شيطان المخيال المور: بين الخوف من الحقيقة واستراتيجية الإنكار

في المخيال الجماعي لبعض الأوساط المور، لا يُنظر إلى سامبا تيام كمجرد معارض، بل كرمز شيطاني تقريبًا. هذه الظاهرة، البعيدة كل البعد عن أن تكون تافهة، تكشف عن نظام متجذر من الخوف، والإنكار، والهيمنة، ورفض أي شكل من أشكال المساءلة. لا يتعلق الأمر هنا بانتقاد جماعة بأكملها، بل بتحليل مخيال تم بناؤه وتغذيته واستغلاله سياسيًا في خدمة النظام القائم.

شيطنة ممنهجة منذ البدايات

منذ ظهور حركة FLAM ونشر بيان الزنجي الموريتاني المضطهد عام 1986، أطلق النظام الموريتاني حملة تخويف منظمة في الأوساط العربية-الأمازيغية، لترويج فكرة أن سامبا تيام ورفاقه يريدون “تدمير الوطن”، “تقسيم البلاد”، “الهجوم على العروبة”، أو حتى “الانتقام للسود من المور”. لقد تم عمداً تحويل إدانة للعنصرية المؤسسية إلى خطاب كراهية، بهدف ترهيب الأغلبية العربية-الأمازيغية وتوحيدها حول السلطة المهيمنة.

وهكذا، أصبح سامبا تيام رمزًا حيًا لما لا يريد النظام سماعه أو الاعتراف به: الحقيقة حول الأبارتايد الموريتاني.

خوف غير عقلاني من المساءلة

لماذا كل هذا الخوف؟ لأن سامبا تيام لا يلعب وفق القواعد التقليدية. لا يطلب الصدقة، بل يطالب بالعدالة. لا يتوسل، بل يتهم، بالحجج والذكاء. لا يعتذر عن الدفاع عن كرامة شعبه. وفي مجتمع تتوقع فيه السلطة المهيمنة من المضطهدين أن يكونوا صامتين، ممتنين، وخاضعين، يصبح صوت زنجي يتكلم بجرأة ووضوح أمرًا خطيرًا.

إنه يمثل قطيعة مع السرد الرسمي للوحدة الوطنية والانسجام العرقي — ذلك السرد المتجذر في المخيال المور، لكنه مفصول تمامًا عن واقع المجتمعات الزنجية.

رفض للحقيقة يُقدّم كدفاع مشروع

سامبا تيام لا يُخيف لأنه يكذب، بل لأنه يقول ما لا يجرؤ الآخرون على قوله، بثبات ودقة وشجاعة. من يشيطنونه لا يردون على مضمون أقواله. لا يناقشون حججه. بل يشوهون صورته، ويتهمونه، ويقصونه. فذلك أسهل من مواجهة الذات، أو الاعتراف بجرائم الماضي، أو الإقرار بوجود نظام للهيمنة.

وهكذا، في بعض الدوائر، يُوصم سامبا تيام بـ”العنصرية”، أو “الطائفية”، أو “إثارة الفتنة” كوسيلة لتجنب النقاش الجاد. يُستخدم اتهامه بالتطرف كدرع ضد مواجهة الحقيقة. إنها استراتيجية كلاسيكية لقلب الأدوار، حيث يقدم المعتدي نفسه كضحية لتجنب مواجهة تاريخه الخاص.

شرخ يجب تجاوزه لبناء موريتانيا عادلة

هذه الصورة التي تُقدّم سامبا تيام كرمز للشر في المخيال المور تشكل عقبة أمام المصالحة الوطنية. ما دامت قطاعات واسعة من المجتمع تواصل رفض الآخر بمجرد أن يتحدث عن حقوقه، وتشيطن كل صوت زنجي يطالب بالإنصاف، فلن تكون هناك لا سلام دائم ولا وحدة حقيقية.

تجاوز هذا الشرخ يمر عبر:

 • فتح حوار تاريخي صادق؛

 • الاعتراف بالمعاناة التي عاشها الآخرون؛

 • إنهاء الخلط بين النضال من أجل المساواة وكراهية الآخر.

يجب أن نتوقف عن الخوف من الذين يطالبون بالعدالة. فهؤلاء ليسوا هم من يهدد الأمة، بل من يرفضون بإصرار الاعتراف بالظلم الذي تأسست عليه.

الشيطان ليس دائمًا من نظنه كذلك

سامبا تيام ليس الشيطان. إنه المرآة التي يرفض البعض النظر فيها. إنه المحاور الذي تفضل السلطة المتسلطة تشويهه بدل الاستماع إليه. إنه الذاكرة الحية لشعب حاول البعض محوه. وطالما ظل المخيال المور أسير هذا الخوف المصطنع، فلن تتمكن موريتانيا من التقدم نحو أمة هادئة، عادلة، وموحدة بحق. تصحيح الصورة عن سامبا تيام هو بالتالي خطوة ضرورية لتحرير المخيال المور من قيوده الذاتية.

Déclaration 

La situation politique actuelle que traverse notre pays est marquée par un climat délétère, illustré notamment par la chasse aux migrants subsahariens en situation irrégulière, dont certains vivent parmi nous depuis des décennies. Par un glissement inquiétant, cette politique cible désormais des citoyens mauritaniens noirs. Le cas du jeune Ramadan, déporté au Mali avant d’être renvoyé en Mauritanie par les autorités maliennes, constitue une illustration flagrante entre autres. Par ailleurs, les points de passage fixes entre la Mauritanie et le Sénégal ne doivent en aucune façon constituer une source de provocations ou de vexations, mais être gérés avec souplesse au regard de la réalité du terrain et du vécu des populations locales.

‎‏À ce climat de terreur s’ajoute une campagne d’intimidation et de menaces dirigée contre des acteurs politiques et des militants des droits de l’homme, emprisonnés pour avoir critiqué les politiques du gouvernement du Président Ghazouani. Deux honorables députées de l’opposition, en l’occurrence Mariem mint cheikh et Ghamou Achour, connues pour leur franc-parler, sont maintenant dans le viseur des tenants du Système qui menacent de lever leur immunité parlementaire .

Toutes choses qui démontrent un recul  manifeste  des libertés démocratiques   dans notre pays et créent , simultanément, une situation de tension et de crispation  peu favorable à la tenue d’un dialogue apaisé et serein qui ,du reste  suscitait déjà    doute et  scepticisme, maintenant renforcés , en raison de l’absence d’une volonté politique réelle , solonnellement déclarée au plus haut niveau.

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‎‏Au regard de ce qui précède, la Coalition Anti-Système, profondément attachée à l’unité, au vivre ensemble harmonieux et au respect des conventions internationales ratifiés par la Mauritanie, soucieuse de préserver de saines relations avec le monde et nos voisins, dans l’intérêt de nos compatriotes résidant à l’étranger, 

‎‏                •             condamne fermement cette campagne d’intimidation et de répression ;

‎‏                •             appelle instamment les autorités à prendre des mesures d’apaisement urgentes qui passent par la libération immédiate de tous les détenus d’opinion sans exception, le respect des libertés démocratiques garanties par la Constitution, la reconduction à la frontière des immigrés clandestins en situation irrégulière dans le respect de leur dignité, et, enfin et surtout, la cessation immédiate de  l’amalgame entretenus par les forces de sécurité entre étrangers et citoyens nationaux.

Fidèle à son engagement en faveur des droits, des libertés et de l’unité nationale, la Coalition Anti-Système appelle toutes les forces vives du pays à se rassembler pour l’instauration d’un état de droit qui sauvegardera notre nation.

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Coalition Anti-Système

Nouakchott, 27 avril 2025

UN TÉMOIGNAGE QUI CONFIRME QUE LES ÉVÉNEMENTS DE 1989 ET LES DÉPORTATIONS  ONT ÉTÉ BIEN PLANIFIÉS PAR LE  MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR DEPUIS 1988

Ce n’est pas moi, qui le dis ou qui l’écris, c’est un cadre de la sphère gouvernementale d’hier et d’aujourd’hui, qui a fini par avouer, par se confesser ou par soulager sa conscience trop lourdement chargée. Ainsi, tous ceux qui  ont participé à ce crime et à cette haute trahison de la nation doivent demander pardon au peuple et surtout aux victimes, comme Mr. VADILI.

Ceux, qui continuent de soutenir les pouvoirs passés et présents doivent se repentir et tous les mauritaniens de toutes les ethnies doivent se mobiliser pour se débarrasser de ce système héritier de tous les crimes précédents et qui continue le même idéal d’exclusion, de marginalisation, d’élimination jusqu’à la suprême exterminationation au nom d’une suprématie d’un groupe sur tout le peuple . 

IL EST TEMPS QUE TOUS SE DRESSENT POUR BALAYER LA DICTATURE ET INSTAURER UN ÉTAT DE DROIT.

UN TÉMOIGNAGE QUI CONFIRME QUE LES ÉVÉNEMENTS DE 1989 ET LES DÉPORTATIONS  ONT ÉTÉ BIEN PLANIFIÉS PAR LE  MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR DEPUIS 1988.

Administrer c’est prévoir 

Par Vadili Ould Mohamed Raiss.

Pour le ministère de l’intérieur et de la communication, l’année 1988 était un continuim des deux années précédentes : les attentions étaient focalisées sur la question (de ce qu’on appelait )des negro- Mauritaniens. 

Le terme negro- mauritanien est un ethnonyme d’invention récente et ne correspond à aucune réalité anthropologique. Pourtant il était utile parceque chargé politiquement pour définir les groupes affiliés aux Flam qu’ils soient Toucouleurs ou Peuls. 

Au ministère de l’intérieur et de la communication, j’étais chargé de part mes fonctions de directeur de la synthèse, entre autres, de ce dossier et de ses implications. 

Au cours des événements, j’ai acquis une certitude : la source de la difficile coexistence de nos deux communautés est bien notre voisin le Sénégal et certains services spéciaux occidentaux. 

Je ne suis pas le seul dans cette compréhension. L’ancien président ,feu Moktar ould Dadah, dans son livre la Mauritanie contre vents et marées, décrit à sa manière la même conviction en indexant le rôle de l’université française et de la théorie de la négritude…

Huit mois avant le 9 avril 1989( date de l’incident de Sonko) par une journée du mois de septembre mon téléphone trois chiffres sonna.C’etait la voix implacable et autoritaire du ministre Djibril ould Abdelahi :

– monsieur le directeur, je vous attends. 

Précipité,je pris mon bloc-notes et un stylo pour recueillir les instructions. Il s’agissait là, d’une habitude rendue obligatoire par le ministre : aucun fonctionnaire ne pouvait s’introduire dans le bureau du ministre qu’après avoir satisfait les exigences d’une telle formalité. 

Sur son fauteuil, le ministre lisait un courrier. Sans lever le regard ni répondre à mon bonjour, il me posa la question :

– monsieur le directeur qu’est-ce qu’une simulation ?

Remarquant peut-être la longueur des secondes que je faisais perdre inutilement, pour répondre, il entonna:

– vous allez imaginer que le Sénégal et la Mauritanie ont décidé de fermer leurs frontières respectives après avoir rompu leurs relations diplomatiques. Cette situation générera des conséquences. Lesquelles pour chacun des deux pays ? Quelles solutions vous proposez pour gérer cette situation ?

J’attends un rapport détaillé dans les 24 heures qui suivent, pour cela vous choisirez les cadres qui vous semblent être indiqués pou vous aider.Ne perdez pas du temps. 

La brièveté de l’entretien, la complexité de la tâche et surtout son inopportinuté ( on était en1988 ) tout cela me contrariait à vrai dire mais je n’avais de choix que de commencer le travail. 

Une fois dans mon bureau, les noms et visages des cadres du ministère s’entrechoquaient déjà dans mon esprit. Ils étaient nombreux. Sans être exhaustif, il y’avait Diallo Mamadou Batia,Khatar ould Cheikh Ahmed, Mohamed Mahmoud ould Ahmed, Isselmou ould Abdel Ghader,Isselmou ould Mohamed Val,Mohamed Val ould Abdel Lativ,El Hacen ould mowloud, Mohamed ould Sidi Mohamed…

Pour moi, la majorité sinon la totalité de ces cadres ne pouvait m’être d’aucune utilité . 

En effet, en venant déjà au ministère,en 1986,j’avais vite compris que la formation initiale de nos administrateurs était trop générale pour affirmer une connaissance certaine et avérée. Pour commander les populations locales, les formateurs de l’époque pensaient qu’on avait tout juste besoin des ABC du Droit, de l’Économie, de la Statistique, de la Sociologie…

Il y’avait aussi cette propension des cadres de ce département à ne viser qu’un poste de commandement. A force de s’y accrocher, on finit par oublier que seul le savoir est valorisant,normalement. 

Peut-être, c’est ici l’une des raisons pour lesquelles le ministre avait fait détacher Fal Oumar et moi-même de nos départements respectifs. Fidèle incontesté, Fall Oumar était secrétaire général et avait la lourde mission de tracter la lourde machine du ministère. 

Mais qui cherche finira toujours par trouver c’est dit on la récompense de la patience 

Au fur et à mesure de défiler et de redefiler les cadres, l’image de Dah ould Abdel Jelil s’imposa à moi. Je n’avais aucune raison de l’écarter : il était brillant administrateur discret, politiquement bien formé et surtout libre dans ses opinions quel en soit le prix. 

Au fond de moi-même, je n’avais aucune sympathie personnelle pour l’intéressé et c’était disait on un membre de l’AMD. 

Pour régler ce choix, l’avis du ministre était inévitable. Alors, je demandais au ministre de m’accorder une audience, ce qui fût fait dans l’immédiat. 

En rentrant, je découvris le ministre plus jovial et donc plus réceptif. Sans tarder je lui dit :

– monsieur le ministre, mon choix s’est finalement porté sur Dah ould Abdel Jelil mais je dois à l’évidence vous rappeler qu’il est membre ,dit on de l’AMD, et je n’ai personnellement aucune confiance en lui.

Sans me donner le temps de finir mon argumentation.,le ministre me presisa :

– monsieur le directeur, la confiance que vous accordez ou non,je m’en contrebalance et le fait qu’il soit ou de l’AMD m’importe peu. Mon souci est d’administrer le pays et pour cela j’entends faire feu de tous bois…dites à Dah de passer dans mon bureau. 

Quelque minutes après la porte de mon bureau s’ouvrit, c’était bien Dah qui était en face.

Après déclinaison des Termes de référence, le travail commença. Au bout de quelques heures exetenuantes et sans désemparer, le rapport final était en version définitive. J’ avoue que mon coéquipier m’avait fait une surprenante impression : ses idées étaient limpides et il avait une parfaite maîtrise des enjeux et des réalités sénégalaises. 

Après lecture et relecture du rapport ainsi finalisé ,j’etais comme traversé par une immense joie .Ce sentiment du devoir accompli m’amena à regarder Dah pour lui dire :

– monsieur Dah,avant ce travail commun, je n’avais aucune idée de vos vraies mesures et je ne vous portais que très peu dans mon coeur .

Il me répondit en bégayant, monsieur le directeur, moi aussi, avant ce travail, j’avais le même ressenti à votre égard. 

Ainsi donc, commença une amitié entre nous sans calcul ni intérêt évident .

Les conclusions essentielles de ce rapport que je peux, aujourd’hui,livrer sont :

– l’urgente nécessité d’actualiser la monographie des villages situés de part et d’autre du fleuve. Chaque village devait faire l’objet d’une étude distincte : date d’implantation, nature des habitants, équipements collectifs, cadres ressortissants, liens avec le Sénégal…

Mais l’urgence de cette monographie relevait du fait que jusqu’ici, notre administration n’avait comme référence que les cartes de l’IGN datant de 1956.

Celles-ci étaient largement dépassées et ne donnaient aucun renseignement fiable sur le rythme du repeuplement incontrôlé de la rive droite lié aux conséquences de la grande sécheresse des années 70 et 80. 

– dans ce rapport étaient aussi consignées au détail près toutes les mesures à prendre dans l’hypothèse de la fermeture des frontières. Ce scénario échéant tous les atouts et faiblesses de chacun de 2 États étaient également listés. 

Après lecture du rapport, le ministre, après être concerté avec le chef de l’État avait convoqué les membres d’un comité de crise. Étaient présents à cette réunion : feu Ahmed ould minih,chef d’État major, feu Eli ould Mohamed Val,DGSN,feu Mohammed Lemine ould Ndeyane,secrétaire permanent du comité militaire, feu Ney ould Abdel Malek, commandant de la gendarmerie nationale et Brahim ould Ali Ndiaye, commandant de la garde nationale. 

A l’issue de cette réunion on m’a chargé d’établir cette monographie qui devait couvrir les 4 régions du fleuve. J’avais un délai de quatre mois pour finaliser le travail. 

Le lendemain, j’étais en route pour le Trarza à la tête d’une commission de travail composée du commissaire Mohamed ould Brahim oul Siyed,feu Mewloud ould Sidi Abdela,DG de la Poste et Ba Bocar Soule, directeur du projet Oasis. 

Le wali, Mohamed Lemine ould Dah nous attendait déjà aux environs de Tiguent pour faire mouvement vers Ndiago et ses contrées saisissantes : Bden,Bdehoss,Mboyo et Ntionk. 

Mais tout juste avant de quitter Nouakchott,le ministre m’avait remis une enveloppe en me disant que son contenu pouvait m’aider dans ma mission. Quand j’avais ouvert l’enveloppe j’ai trouvé deux importants documents importants : un journal officiel de la République Française datant de 1917 répertoriant les 36 villages negro- mauritaniens sur la rive droite et un rapport secret défense établi en 1966 par Ahmed OULD Mohamed Saleh ministre de l’intérieur, juste avant les événements de 1966 où sont répertoriés les 79 villages negro- mauritaniens sur la même rive droite. 

Quand ma mission fût terminée, j’avais moi-même répertorié et étudié avec l’aide des wali des régions concernées 206 villages situés en1988 sur la rive droite. 

Comment expliquer ce repeuplement ?

Pour y répondre, je ferais un détour dans l’histoire lointaine et récente de la vallée pour expliquer, archives à l’appui les contours de cette question ( à suivre) .

Puisse Allah couver de sa miséricorde Djibril ould Abdelahi. 

Vadili Mohamed Raiss