Gouvernement d’union nationale: Messaoud toujours en piste
Messaoud Ould Boulkheïr, leader de l’Alliance Populaire Progressiste (APP) et président de l’Assemblée nationale, est revenu à la charge pour faire aboutir son initiative visant à instaurer un véritable dialogue en Mauritanie.
Au cours des derniers jours, l’opposant historique qui ménage le pouvoir actuel, «dans l’intérêt d’un pays en proie à une crise multidimensionnelle», a rencontré toute la classe politique (majorité et opposition), les organisations de la société civile, les centrales syndicales, les organisations patronales et personnalités indépendantes. Un véritable marathon, mené pied au plancher, dont l’objectif est l’organisation d’assises réunissant toutes les forces vives de la Nation. Un forum inclusif qui dégage un fort parfum de conférence nationale, sur le modèle africain du début des années 90. Un exercice dont la source historique fut la déclaration du sommet France/Afrique de La Baule, en mai 1990, au cours duquel le président français de l’époque, François Mitterrand, signifia clairement à ses hôtes que la coopération avec les pays du continent Noir serait, désormais, conditionnée par un engagement dans le multipartisme, point de départ d’une ère de «démocratisation» à pas forcés.
Ce dialogue inclusif, dans un pays en crise, doit aborder tous les problèmes de la Mauritanie, selon Ladji Traoré, secrétaire général de l’APP. Pour lui, il est surtout question d’unité nationale. Des questions liées à la sécurité, dans un contexte sous-régional troublé par le terrorisme à visage islamiste. Une réalité basique dont la manifestation la plus cruelle « est l’occupation du Nord-Mali, frontalier de la Mauritanie sur plus de mille kilomètres, par des groupuscules gravitant autour de la nébuleuse Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI)».
Pour un diagnostic de la situation réelle du pays
Ces assises, dont la date serait déterminée de manière consensuelle, devraient également porter sur «l’opération en cours d’enrôlement des populations, la gestion du processus électoral, de l’économie…». Une énumération loin d’être exhaustive. Au finish, une remise au goût du jour du vieux modèle des conférences nationales – peu importe le nom qui sera retenu car l’esprit est dans la proposition – qui aurait pour résultat d’établir l’état des lieux de la Nation. Un diagnostic sur la base duquel les forces mauritaniennes pourraient dégager un tableau de bord, des pistes de solutions et des balises, pour une sortie de crise et la guérison, à terme, de la grande malade.
A travers l’exercice préconisé, les Mauritaniens se donneraient-ils la chance d’aller bien au-delà des sempiternelles querelles politiciennes et de chapelles, pour discuter la lancinante question d’une difficile cohabitation communautaire et de l’exclusion d’une importante frange de la population ? Sur un autre plan, pourrait-on mettre sur le tapis le lien entre les militaires et le pouvoir, véritable frein à la démocratisation du pays ? Quid de l’impunité, pour les auteurs de graves crimes de sang ? Une équation qui ne saurait se résoudre par de simples indemnisations, sans que les responsabilités aient été formellement distinguées. Comme si l’on pouvait passer par pertes et profits la mort de plusieurs centaines d’hommes. Au total, un vaste programme, pour des assises encore incertaines, dans un pays ou la culture du dialogue reste encore très mal partagée.
Ce forum devrait déboucher sur la formation d’un gouvernement de large union nationale, intégrant toutes les forces politiques, des organisations représentatives de la société civile et des personnalités indépendantes. Avec mission de mettre en œuvre les décisions issues du nouveau dialogue national. Chimères ? Dans un climat politique encore marqué par de nombreux signes de crispation, l’aboutissement de l’initiative de Messaoud Ould Boulkheïr est, certes, loin d’être évident. Mais la persévérance de l’homme dans sa démarche, bien au-delà du forum de septembre-octobre 2011 – limité à une majorité consolidée et quatre partis de l’opposition – montre clairement qu’il bénéficie d’une approbation, au moins tacite, du président Mohamed Ould Abdel Aziz.
Amadou Seck.
Source: Le calame