Point de vue: Partage des hautes charges de l’Etat: Avec Aziz, nous avions espéré, hélas!
Le dernier mouvement de fonctionnaires, dans l’administration territoriale de la police, vient renforcer la désillusion des couches marginalisées de la République qui espéraient, avec l’arrivée du président Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir, la fin du signe indien ou du signe maure. Lorsque celui-là s’en emparait, un certain 6 août 2008, nombre de Négro-mauritaniens et de Haratines avaient cru, peut-être naïvement la fin d’une certaine marginalisation, instituée en système, depuis la fondation de la Mauritanie. Les déclarations puis les engagements électoraux du général incitaient, il faut le reconnaître, à cet optimisme. Annoncer le règlement du passif humanitaire sur lequel le régime d’Ould Taya avait tiré un trait définitif et la fin de l’esclavage faisait bien vendre.
Le tombeur de Sidi Ould Cheikh Abdallahi laissait entrevoir un changement, profond, du système politique et de la gouvernance en Mauritanie. Une manœuvre, pour les avertis, arguant que l’homme, comme son cousin Ely, lors de la première transition militaire 2005-2007, ne pouvait scier la branche sur laquelle il était assis, le système qui l’a enfanté. Pour nous, « les autres », ce langage populaire, pour ne pas dire populiste, un tantinet semblable à celui de feu Thomas Sankara, paraissait pourtant sincère. Mais comparaison n’est pas raison, me diront certains et je le concède car la désillusion est vite arrivée. Au galop. La rectification n’a pas fait dans la dentelle. Chaque conseil des ministres apporte son lot de déceptions et de surprises. Les règles de trois, au sein du gouvernement, n’ont pas bougé d’un iota, même si certains esprits malins ont voulu trouver, dans la nomination d’Ould Boïlil au poste de ministre de l’Intérieur, un signe de changement, la règle est restée inamovible. Les extrémistes, qui avaient réussi à débarquer Yall Zakaria du ministère de l’Intérieur, pour sa témérité à vouloir remettre en question les règles intangibles, réussiront vite à « phagocyter » l’homme du 6/08 et à le dévier de sa ligne affichée.
Les nominations, au sein de plusieurs ministères, laissent penser que les cadres issus des communautés non-beydanes n’existent pas. Allez au Ministère de l’Equipement et des Transports, à l’Hydraulique et Assainissement. Oublions le cas des forces armées et de sécurité où est passé le coup d’éponge, sanglant, de la dénégrification déclenchée par le régime du 12/12/1984. Certains rescapés militaires des évènements de 1989 diront que l’actuel président de la République ne porte aucune responsabilité, dans les massacres perpétrés dans les casernes, et c’est d’ailleurs pourquoi il a décidé d’enclencher le processus de règlement du douloureux passif humanitaire. Ce qui est sûr, c’est que, depuis son arrivée au pouvoir – pouvoir qu’il n’a jamais, d’ailleurs, vraiment quitté, depuis 1984 – rien n’a changé. Le président de l’AJD/MR dira, dans une récente interview accordée au site web de son parti, reprise par CRIDEM : « avant 1986, même Moawiya n’osait pas décréter des nominations de ce genre, en Conseil des ministres, mais, comme disent les Pulaars, « Be kawii Be kanndiima », (la boucle est bouclée !) Le même président Sarr avait proposé, lors de ses premières rencontres avec le président du HCE, l’institution d’un service militaire obligatoire, pour tous les jeunes mauritaniens, ce qui, non seulement, leur offrait des chances égales mais permettait, en outre, de renforcer l’unité nationale et réhabiliter la notion de « frères d’armes »
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La promotion des cadres mauritaniens, au sein des différentes structures de l’Etat, continuent, donc, à obéir à des critères très subjectifs : raciaux, tribaux et mêmes politiques, ce qui fragilise l’Etat, en le privant de la totalité de ses compétences nationales. Les espoirs, suscités par l’arrivée de Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir, peinent, sur ce point précis, à se matérialiser, au grand dommage de ce pays musulman. Le changement constructif reste à édifier. Espérons que le président Aziz ne tardera pas à enclencher, d’ici peu, une deuxième rectification.
KT
Source: Le calame