Monthly Archives: February 2020
Cette polémique suscitée autour du mot ‘’Apartheid’’ que révèle-t-elle ? Par Samba Thiam
Cette polémique suscitée autour du mot ‘’Apartheid’’ que révèle-t-elle ?
Primo, que la culture du débat intellectuel ne s’installe toujours pas chez nous, loin s’en faut ; on diabolise, voire on insulte et on continue… A travers un lynchage médiatique qui frise le terrorisme intellectuel, on cherche à maintenir une dictature au nom d’une majorité, instaurée par une oligarchie, ( si, bien entendu , toute la frange haratine se reconnaissait dans l’identité arabe), en perdant de vue que toute majorité ne tire sa légitimité que dans le respect des droits des minorités.
Ne pas céder à l’intimidation , surtout pas …
Deuxio, elle révèle un état d’esprit, manifestement, largement partagé dans cette jeunesse arabo-berbère, qui traduit un manque notoire et flagrant d’objectivité et de recul, dès que le pays est touché dans ses péchés sensibles ; c’est épidermique ! Cette réaction est aussi, hélas, perceptible chez une partie de l’élite politique et intellectuelle adulte. En somme, beaucoup de progressistes, mais des progressistes de circonstance, dirons-nous…
Tiertio enfin, que dans cette conception de ‘’l’Apartheid’’ tout n’était pas que négatif, à tout peser ; en effet les Blancs-blancs se gouvernaient et laissaient les Blacks se gérer et gérer leurs bantoustans, tout au moins !et puis, toutes proportions gardées, le système d’apartheid était quand même moins indigne, plus respectueux de l’homme que l’esclavage … Enfin et surtout, cet apartheid là était lui, non pas officieux, sournois et hypocrite , mais codifié et déclaré, et chacun savait donc à quoi s’en tenir …
Ces jours-ci il circule un audio d’un résident, probablement de Rosso, qui dénonçait le blanchissement appliqué de l’administration de cette ville ; du gouverneur au préfet , en passant par le commandant de brigade, le commissaire de police , le chef de la base militaire , jusqu’au juge et cadi, dit-il . L’auteur n’a pas compris que le mal est général et ne sévit pas qu’à Rosso, mais partout dans le Sud , sans épargner Nouakchott avec ses trois gouverneurs . Ceux qui, aujourd’hui montent au créneau, vocifèrent sous l’ indignation, feinte, en entendant le mot ‘’apartheid’’ constatent pourtant, tous les jours, cette réalité triste, sur laquelle ils ferment les yeux, sans rien dire…
Seule une infime minorité courageuse de cadres s’insurge …
Rappelons, pour ceux qui semblent l’oublier, que l’idéologie afrikaner avait pour soubassement “d’utiliser la force numérique et la force de travail des Noirs pour les transformer en instruments , sans qu’aucune possibilité ne leur soit laissé de sortir de cette situation’’. En notre âme et conscience aucune résonnance, aucune similitude avec ce qui se passe chez nous ? Si ce que nous vivons n’est pas de l’Apartheid stricto sensu, ça lui ressemble, au moins par métaphore…
Ma suggestion est celle-là : puisque ceux qui nous gouvernent se dérobent à l’idée d’organiser un dialogue inclusif, sans compenser cette rebuffade par des mesures fortes d’apaisement, que les médias nationaux se saisissent donc de cette polémique qui fait rage dans les réseaux sociaux comme d’une opportunité, pour organiser un débat… civilisé. Pour notre part nous sommes preneurs …
Samba Thiam
Nouakchott le 28 -02-2020
Mauritanie : la CVE-VR esquisse un projet de société réconciliée égalitaire et démocratique
Les observateurs reviennent sur la plateforme de la CVE-VR présentée devant la presse cette fin de semaine qu’ils considèrent comme un projet de société pour une Mauritanie apaisée et réconciliée avec elle-même.
A y regarder de près c’est une plateforme très critique qui met en évidence l’échec d’un État unitaire centralisé depuis le congrès d’Aleg de 58 jusqu’à nos jours. Et également constructive dans ses perspectives d’avenir pour une nouvelle Mauritanie qui devra résoudre la difficile cohabitation entre les différentes composantes née de l’orientation très tôt vers une arabité exclusive de la Mauritanie au détriment de son identité négro-africaine.
En effet la plateforme pointe du doigt la première grande crise post indépendance de 66 avec en toile de fond l’arabisation du système éducatif qui déclencha une contestation scolaire la plus violente de l’histoire du pays.
Le rappel de ces secousses politiques est d’un grand intérêt historique pour comprendre la crise identitaire mauritanienne qui atteint son paroxysme en 86 date de la publication du fameux Manifeste du négro-mauritanien opprimé par les FLAM le premier mouvement de libération africaine en Mauritanie dont les dirigeants seront arrêtés jugés et emprisonnés à Oualata. Quatre d’entre eux y laisseront leur vie.
Parmi les rescapés les présidents de l’AJD-MR et des FPC. Ironie de l’histoire ils sont les sages aujourd’hui de cette coalition de partis politiques et d’organisation de la société civile entre les mains d’une nouvelle génération de jeunes consciente du long chemin de la liberté qui reste à parcourir.
L’histoire retiendra que la période de 86 a 92 ou années de braise est marquée par les exécutions extrajudiciaires de 28 soldats négro-africains à Inal en 90 et des déportations de plus de 100000 noirs au Sénégal et au Mali en 89.
Une épuration ethnique sous le régime le plus long des militaires de 84 a 2005 et qui n’a pas manque de laisser des traces au sein de cette communauté qui tente difficilement de refermer ses plaies.
L’histoire récente retiendra un autre génocide sous le vocable biométrique initié en 2009 par Ould Aziz et qui mettra hors jeu des milliers de négro-mauritaniens devenus des apatrides et des sans papiers chez eux.
Cette plateforme va jusqu’au bout de l’analyse pour mettre en évidence l’exclusion dans toutes les sphères de la nation à l’école dans les médias dans l’armée dans la justice dans l’administration et la fonction publique dans l’économie du pays.
Cette discrimination concerne également la communauté Hatatine qui représente aujourd’hui près de 40 pour cent de la population et dont le combat contre l’esclavage n’est plus à démontrer derrière son leader le président de l’IRA.
Cette exclusion et marginalisation des deux composantes nationales érigées en système de gouvernement minent l’unité nationale et la cohésion sociale et compromettent l’avenir du pays. Des solutions s’imposent avant que le pays bascule dans le chaos.
La plateforme prône des réformes constitutionnelles et institutionnelles sur la base du vivre ensemble. Une nouvelle constitution dans ses grandes lignes qui affirmera l’identité arabe et négro-africaine et l’instauration d’un bicephalisme au niveau de la présidence.
Les réformes sectorielles sur l’éducation la justice l’armée l’économie les médias et l’administration devront rétablir la justice et l’équité sociale entre tous les mauritaniens en privilégiant plus la compétence que l’origine ethnique ou tribale.
Ces réformes ne vont pas sans des réformes démocratiques qui restaurent un État de droit qui respecte la citoyenneté et les libertés et des réformes sociales qui passent par le règlement du passif humanitaire la correction de l’enrôlement surtout en direction des enfants des réfugiés dont la plupart n’ont plus d’identité et l’application de la loi criminalisant l’esclavage et enfin le partage des ressources naturelles entre les mains de l’oligarchie militaire et de la classe dirigeante politique et des hommes d’affaires.
Cherif Kane
Meeting APP : Messaoud dans tous ses “États”
Le Calame – Le parti de l’Alliance Populaire Progressiste a organisé dimanche 23 février un meeting populaire à la place Ibn Abbass. Plusieurs centaines de personnes entre les militants du parti, des sympathisants mais aussi d’autres venus entendre de vive voix le patriarche Harratine, ont assisté à ce rassemblement politique.
Dans son discours, le président de l’APP a appelé à l’engagement d’un dialogue politique entre la majorité et l’opposition. Ould Belkheir a aussi expliqué longuement les raisons de son soutien au président Ghazouani au cours de la dernière présidentielle, rappelant même qu’il a déjà eu à donner cette explication dans une interview accordée au journal Le Calame.
Revenant sur son soutien à Sidi Ould Cheikh Abdallahi contre Ahmed Ould Daddah au second tour de la présidentielle de 2007, Messoud a présenté ses excuses “aux gens du Trarza”.
Sur les rumeurs autour de divergences supposées ou réelles au sein de l’APP, Ould Belkheir a balayé tout d’un revers de “mot” déclarant que tout se passe très bien dans leur parti qui se prépare à lancer sa campagne d’adhésion en prélude à l’organisation de son congrès pour l’élection de ses instances dirigeantes.
Il faut rappeler que depuis 2007, l’Alliance Populaire Progressiste est passée par plusieurs zones de turbulences et d’incompréhension entre ses principaux leaders.
Des dissidences importantes ont été enregistrées comme celles du secrétaire général de la CLTM, Samory Ould Beye et de Mohamed Ould Bourbouss ou de Mohamed Salek Ould Brahim ou du président d’Él Moustaqbal Ould Sidi Mewloud mais aussi de l’ancien maire APP de Zouerate Yacoub Salem Vall et de l’actuel chef de file de l’opposition Brahim Ould Bekaye devenu l’un des plus grands responsables du parti islamiste Tawassoul.
Comme sa décision de soutenir Sidioca en 2007, d’autres choix politiques de Messaoud Ould Belkheir n’ont pas fait l’unanimité au sein même de son parti.
A titre d’exemple, le soutien apporté à l’actuel président de l’Assemblée Nationale au deuxième tour des législatives et municipales de Zouerate en 2018 contre le candidat de l’opposition ou encore le rangement derrière le candidat Mohamed Ould Cheikh Ghazouani à la présidentielle de 2019.
Autour de cela, les rumeurs les plus fantaisistes voire parfois les plus compromettantes ont été entretenues.
Dans des vocaux largement partagés par l’application Whatsapp, l’administrateur de régies financières Ahmed Samba Abdallahi, cadre de l’APP accuse Messaoud d’avoir accepté l’argent du pouvoir. Ould Samba Abdallahi allant même jusqu’à dire qu’il n’assiste pas à un meeting “financé avec de l’argent pris avec Ghazouani”.
le calame
Communiqué de la CVE/VR relatif à la polémique sur les propos de Birame
CVE/VR – La Coalition Vivre Ensemble / Vérité et Réconciliation constate avec étonnement l’émoi provoqué parmi l’élite par le discours du Président de IRA Mauritanie au 20ème sommet de Genève sur les droits de l’Homme et la démocratie.
En effet pour qui connait la Mauritanie, l’exclusion sur des bases d’appartenance raciale, ethnique ou tribal est une réalité indéniable. Pire, l’Etat mauritanien a poussé la logique de l’exclusion jusqu’à engager une épuration ethnique qui s’est traduite par des exécutions extrajudiciaires et des déportations massives de populations noires du pays pendant les années de braise (1986 – 1992).
Cette épuration ethnique continue de plus belle aujourd’hui avec l’enrôlement biométrique discriminatoire et les recrutements à caractère ethno-tribal aussi bien dans la fonction publique que dans le secteur privé.
Les nominations égrenées à longueur des communiqués du conseil des ministres, le corps de commandement de l’ensemble des forces armées et de sécurité, les élèves sélectionnés dans les écoles d’élite du pays, tout cela donne l’impression que la Mauritanie s’arrête à sa seule composante arabe. L’esclavage, dont l’Etat ne reconnait que les séquelles, continue à sévir dans le pays malgré une batterie de lois et d’institutions censées combattre cette tare dont l’existence est pourtant niée.
Quand, à l’intérieur, toutes les voies de recours restent bouchées malgré les cris de détresse et les alertes répétitives, comment, dès lors, s’étonner que les victimes se tournent vers les instances internationales ? L’intelligentsia mauritanienne et les défenseurs du système devraient donc consacrer leur énergie à corriger ces tares qui n’honorent pas notre pays au lieu de continuer à faire la politique de l’Autruche.
Nouakchott, le 24 février 2020
La Cellule de Communication
La CVE/VR dévoile sa plateforme « Nous ne vivons pas ensemble, mais côte à côte, en nous tournant le dos », déclare Dr. Dia Alassane, président de la coalition
Au cours d’une conférence de presse, tenuejeudi 20 février, par la coalition Vivre Ensemble/Vérité-Réconciliation (CVE/VR), son président, Dr. Alassane a déclaré : « nous vivons ensemble sans vivre ensemble, nous ne vivons pas ensemble, mais côte à côte, en nous tournant le dos ».
La CVE/VR venait dévoiler sa plateforme et sa vision de la Mauritanie, de son unité nationale et de sa démocratie…
En effet, explique son président, après la scission intervenue au sein de la coalition vivre ensemble, mise en place à la veille de la dernière présidentielle, la coalition qu’il préside a engagé un intense débat pour préparer et présenter aux mauritaniens sa vision de l’avenir de ce pays.
Une vision consignée dans un document de six pages, distribuée à la presse. Il retrace l’histoire politique de la Mauritanie, depuis le Congrès d’Aleg de 1958 jusqu’à nos jours, en passant par les évènements de 1966, 86 et 90. Et le conférencier de tirer un constat : les mauritaniens ne vivent pas véritablement ensemble, mais les uns à côte des autres, en se tournant le dos. C’est un véritable cloisonnement, s’inquiète le président Dia.
Interrogé sur la nouvelle dénomination de la coalition, Dr. Dia Alassane explique qu’elle vient se démarquer de l’autre coalition, mais aussi pour prouver combien elle est attachée au Vivre Ensemble.
Et pour la CVE/VR, pour vivre ensemble, indique le président Dia, il faut avoir le courage de se dire la vérité sur la cohabitation entre les différentes composantes du pays, mais aussi sur ce qui s’est passé depuis le congrès d’Aleg, sur les évènements de 1966, de 86 et 1989/90, sur la question des terres, sur la répartition des charges de l’état, des ressources du pays, sur la démocratie, sur la liberté d’expression … On ne peut pas continuer à faire comme si de rien n’était, à exclure des pans entiers de la population du pays des institutions et des rouages de l’économie. Résultat des courses, toutes ses composantes laissées en rade ont élevé la voix pour exprimer leur rejet du système qui régente leur pays.
Et Dr Dia Alassane de rappeler la publication du Manifeste des négro-africains de 1986, celui des Harratine, des Soninké, des Ouolof et des Maalimin… C’est un véritable délitement de l’Etat auquel nous assistons depuis quelques années. Et d’ajouter, nous ne vivons pas ensemble, mais côte à côte et en nous tournant le dos. C’est extrêmement grave pour l’avenir de ce pays, prévient Alassane Dia. En se parlant, en se disant la vérité, on finit par trouver une solution consensuelle aux problèmes du pays. Et c’est pour éviter l’ « irréparable » que la CVE/VR exige un débat national autour de l’unité nationale, une préoccupation première de la coalition.
Interrogé sur les dispositions du pouvoir à régler le problème de la cohabitation en Mauritanie, le président de la CVE/VR affirme que les autorités actuelles ne font montre d’aucune disponibilité afin d’apporter des solutions aux problèmes ainsi posés ; pire, elles renforcent l’exclusion des autres communautés. Pour étayer son assertion, il cite les résultats des différents concours de recrutements organisés par le gouvernement, les nombreuses nominations prises à chaque conseil des ministres et qui ne profitent qu’à une seule communauté.
Face à cette situation périlleuse, la CVE/VR appelle à la résistance mais aussi au sens de responsabilité de tous patriotes de toutes les composantes. C’est dans ce cadre que la CVE/VR a salué les rencontres avec les responsables du RAG/IRA et d’autres responsables. Le président Dia a profit d’ailleurs de cette occasion pour saluer les partis politiques et mouvements de la société civile et de jeunes venus assister à cette conférence qui marque le début effectif des activités de la CVE/VR.
Cette coalition comprend un conseil des présidents et un bureau exécutif. Tous les deux sont présidés par des jeunes. Pour Dia Alassane, ils s‘agit là de messages forts à l’endroit de la jeunesse, mais aussi un démenti cinglant à l’endroit de ceux qui déclarent que la coalition est minée par une querelle de leadership.
Le choix porté sur ma personne prouve, vu leur expérience, leur engagement au service de notre noble cause que ces messieurs que vous voyez autour de moi sont mus par l’intérêt de ce pays, pour qui, ils ont sacrifié leur temps et de leur énergie. Ils ont été arrêtes, emprisonnés, humiliés et privés de leurs droits. C’est l’occasion de leur rendre ici un vibrant hommage pour leur combat contre l’oppression et l’exclusion.
Le président Dia a remercié ses ainés pour leur posture responsable avant d’inviter les jeunes à assumer leurs responsabilités et à se montrer au travail pour être à la hauteur de la mission qui leur est confiée. Signalons enfin que la coordination du bureau exécutif est confiée à M. Guindo.