Le général Tchiani justifie le coup d’État au Niger par “la dégradation de la situation sécuritaire”
France24 – Chef de la garde présidentielle, le général Abdourahamane Tchiani a lu, vendredi, un communiqué à la télévision nationale nigérienne en tant que “président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie”. La junte qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum a justifié le coup d’État par la montée de la violence de groupes terroristes.
Le nouvel homme fort du Niger a parlé. Le général Abdourahamane Tchiani, chef de la garde présidentielle à l’origine du coup d’État ayant renversé le président élu Mohamed Bazoum, est apparu, vendredi 28 juillet, à la télévision nationale.
Il y a lu un communiqué en tant que “président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNPS)”, la junte qui a renversé Mohamed Bazoum.
Le général a justifié le coup d’État de mercredi par “la dégradation de la situation sécuritaire” dans un Niger miné par la violence de groupes terroristes.
Sous le président Bazoum, il y avait “le discours politique” qui voulait faire croire que “tout va bien”, alors qu’il y a “la dure réalité avec son lot de morts, de déplacés, d’humiliation et de frustration”, a-t-il dit.
Selon lui, “l’approche sécuritaire actuelle n’a pas permis de sécuriser le pays en dépit de lourds sacrifices consentis par les Nigériens et le soutien appréciable et apprécié de nos partenaires extérieurs”, la France et les Etats-Unis faisant partie des principaux.
“Le CSNP, par ma voix, demande aux partenaires et amis du Niger, en cette étape cruciale de la vie de notre pays, de faire confiance à nos Forces de défense et de sécurité, garantes de l’unité nationale”, a-t-il ajouté.
“Illégitime et dangereux”
Ce haut gradé discret commande la garde présidentielle depuis sa nomination en 2011 par Issoufou Mahamadou, prédécesseur de Mohamed Bazoum.
Sa prise de parole est intervenue au troisième jour de la séquestration du président déchu dans sa résidence privée située à l’intérieur du camp militaire de la Garde présidentielle, dont les commandants figurent parmi les putschistes.
Mohamed Bazoum, retenu avec sa famille, est en bonne santé et a pu s’entretenir au téléphone avec d’autres chefs d’État, parmi lesquels le président français, Emmanuel Macron, qui a condamné, vendredi, “avec la plus grande fermeté” le putsch l’ayant renversé et exigé sa libération.
“Ce coup d’État est parfaitement illégitime et profondément dangereux pour les Nigériens, pour le Niger, et pour toute la région”, a-t-il déclaré depuis la Papouasie-Nouvelle-Guinée où il se trouve en visite.
Jusqu’à cette déclaration, la France ne considérait pas comme “définitive” la “tentative” de coup d’État au Niger.
L’état-major de l’armée nigérienne avait apporté jeudi son soutien aux militaires putschistes.
Wagner en embuscade
“Ce qui s’est passé au Niger, ce n’est rien d’autre que la lutte du peuple nigérien contre les colonisateurs qui essayent de lui imposer leurs règles de vie”, aurait affirmé Evguéni Prigojine, selon un message diffusé jeudi soir par une organisation russe liée au groupe paramilitaire Wagner, dont l’authenticité n’a pu être confirmée.
Après le Mali et le Burkina Faso, le Niger, jusqu’alors allié des pays occidentaux, devient le troisième pays du Sahel, miné par les attaques de groupes liés à l’État islamique et à Al-Qaïda, à connaître un coup d’État depuis 2020.
Le Mali et le Burkina Faso se sont notamment tournés vers la Russie après avoir exigé le départ des soldats français de leur territoire.
Sur le terrain, les militaires putschistes ont annoncé “la suspension jusqu’à nouvel ordre des activités des partis politiques” et appelé “la population au calme” après des incidents lors d’une manifestation, jeudi, à Niamey, organisée pour les soutenir, pendant laquelle des drapeaux russes flottaient et des slogans anti-français étaient scandés.
La junte menacée de sanctions
En dépit de l’interdiction décrétée par les militaires, une nouvelle manifestation est prévue, vendredi, à l’appel d’une coalition de partis d’opposition au président Bazoum, qui “tout en désapprouvant tout changement par la force, soutient les motivations” des putschistes, selon un communiqué.
La junte, qui rassemble tous les corps de l’armée, de la gendarmerie et de la police, a suspendu les institutions, fermé les frontières terrestres et aériennes, et instauré un couvre-feu de 22 h à 5 h (21 h à 4 h GMT).
Les militaires ont également mis en garde contre “toute intervention militaire étrangère” évoquant dans une allocution télévisée “certains anciens dignitaires terrés dans des chancelleries en collaboration avec ces dernières [qui] sont dans une logique de confrontation”.
Le putsch a été vivement condamné par les partenaires occidentaux du Niger et l’ONU qui ont demandé la libération de Bazoum.
L’Union européenne (UE), par la voix du chef de sa diplomatie, Josep Borrell, a menacé, vendredi, de suspendre “tout appui budgétaire”.
Selon la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) “va tenir une réunion au sommet vraisemblablement dimanche” où “d’éventuelles sanctions pourraient être décidées”, que la France soutiendra.
Avec AFP