Conférence de presse des FPC «La célébration du 28 novembre à Kaédi est une manipulation et une provocation du pouvoir vis-à-vis des populations négro-africaines qui n’ont pas fini de sécher leurs larmes», dixit Samba Thiam, président des FPC.
Le président des forces patriotiques du changement (FPC), M.Samba Thiam a tenu, ce jeudi, à midi, une conférence de presse au siège de son parti, situé près de l’hôtel Ikarama, à Sebkha.
A cette occasion, le président des FPC a abordé plusieurs questions de l’heure. La célébration des festivités de l’indépendance, le 28 novembre à Kaédi, le projet de régionalisation en gestation du pouvoir, l’emprisonnement des parents d’élèves à Sélibabi, l’affaire Ould Mkhaïtir et la participation des FPC au G8.
28 novembre à Kaédi : « Une manipulation et une provocation »
Abordant le premier point, le président des FPC n’est pas passé par quatre chemins. Pour lui, organiser les festivités de l’indépendance à Kaédi est non seulement une manipulation grotesque, mais en même temps, une provocation des populations de la vallée.
Pour Samba Thiam, les populations de la vallée ont d’autres priorités, d’autres préoccupations que de festoyer. Elles souffrent de plusieurs maux dont notamment l’enrôlement. Il n’est un secret pour personne que nombres de négro-mauritaniens peinent à s’enrôler et si ça continue, certains deviendront des apatrides puisque, selon les informations, l’enrôlement des adultes prendra fin en décembre 2018.
Une provocation parce que le 28 novembre n’est plus une fête nationale pour réjouir, mais un deuil pour les négro-africains qui ont perdu les leurs, le 28 novembre à Inal, ou à l’occasion des évènements douloureux des années 86 -90..
Et le président des FPC de prévenir : tant que le « génocide » perpétré par le régime d’Ould Taya n’est pas réglé, il est inopportun de se réjouir. Tant que le dossier du passif humanitaire n’est pas apuré, estime Samba Thiam, « certains mauritaniens célébreront cette fête dans la joie, d’autres dans le deuil. »
Et pour régler ce dossier définitivement, il n’y a pas d’autres voies que d’accepter les 4 devoirs : devoir de vérité, devoir de réparation, devoir de justice et devoir de mémoire, avec au bout une réconciliation nationale.
Il n’y a pas de stabilité sans réconciliation et il n’y a pas de réconciliation sans justice, pense M. Thiam. Quelques pécules ne suffisent pas pour évacuer ce drame humain que le pays a connu. On doit savoir qui a fait quoi, qui a donné les ordres pour que jamais plus ça en Mauritanie, tonne Samba Thiam.
Libye : un débat de fond s’impose entre l’Afrique Noire et le monde arabo-musulman sur le racisme
Abordant ce qui se passe en Libye, avec des images de ventes aux enchères des migrants noirs, Thiam parle d’ignominie et de barbarie abjecte, inacceptables au 21 siècle que tous les démocrates du monde doivent condamner et dénoncer. L’Afrique Noire se sent touchée voire agressée dans sa dignité.
Pour Samba Thiam, ce qui vient de se passer dépasse le cadre Libyen, il touche le traitement subi par plus de 80 millions de noirs au Maghreb, en particulier, et dans le monde arabo-musulman, en général.
Il sévit un racisme en Algérie, dit Kamel Daoud. C’est la raison pour laquelle, le président des FPC estime qu’un débat de fond s’impose entre l’Afrique Noire et le Maghreb, entre l’Afrique Noire et le monde arabo-musulman en général , un débat qui abordera la responsabilité historique de ces derniers dans la traite transsaharienne de dizaines de millions d’africains noirs que l’on pourrait qualifier, pense M. Thiam de «Naqba » africaine.
Le président des FPC dénonce le fait que des intellectuels africains se plaisent à critiquer et à stigmatiser l’Occident qui a fait son mea culpa en la matière, mais épargnent bizarrement les intellectuels du monde arabo-musulman, comme par «solidarité religieuse ». Pourtant, s’étonne Samba Thiam, la traite transsaharienne fut plus, sinon aussi désastreuse que celle transatlantique par sa cruauté (castration entraînant plus de 80% de perte), et par son ampleur (plus de 20 millions de morts) et par sa durée, 14 siècles.
Projet de régionalisation : « Nous attendons de savoir le contenu de ce projet en gestation »
Sur le projet de régionalisation dont parlent les médias ou de ce qui fuite du comité de suivi du dialogue, si ces rumeurs se confirmaient, Samba fait observer qu’il s’inspire de la proposition de son parti, une décentralisation poussée, mais déplore le fait que certaines dimensions essentielles de l’objectif général du projet sont dévoyées, qu’il arrache le Guidimakha de son ancrage géographique et économique pour le rattacher à l’Assaba.
En effet, rappelle le président des FPC, la régionalisation préconisée par son parti a pour but principal de résoudre, à défaut d’atténuer les tensions tribales et ethniques récurrentes dans notre pays, en s’adossant sur les aires naturelles, homogènes des composantes culturelles nationales.
Si pour les régions de l’Est (élevage) et du nord (mines), ce critère semble avoir été respecté, il reste que pour la vallée du fleuve (agriculture), on lui a une fois de plus, dénié sa spécificité et son identité historique…Le Guidimakha, le Fuuta, le Waalo, doivent constituer une région, à part entière, homogène à plusieurs égards.
Il faut, exige le patron des FPC corriger le projet en gestation, et renoncer, pour de bon, à cette volonté inavouée et obstinée de « domination et d’assimilation », car le vivre ensemble requiert le respect des différences ou des identités respectives.
Sélibaby: « Le gouvernement ne compatit pas au malheur des citoyens »
Relativement aux événements de Sélibaby, qui ont vu l’arrestation et l’emprisonnement des parents d’élèves pour avoir réclamé les enseignants pour leurs enfants, le président des FPC, tout en réjouissant du début de leur libération, croit fermement que le pouvoir ne compatit pas aux problèmes des populations, sinon comment emprisonner des parents d’élèves désemparés face à leurs enfants privés d’enseignants, privés donc d’éducation qui est un droit reconnu par la constitution ? Samba Thiam condamne l’attitude des autorités administratives locales et déclare la solidarité de son parti aux victimes.
Affaire M’Khaitir : « ambigüité des relations entre le président Aziz et les islamistes radicaux »
A propos de l’Affaire M’Khaitir et des manifestations qui ont suivi sa libération, le président Thiam l’explique par les agitations qu’Ould Abdel Aziz entretient avec les islamistes radicaux.
Tant que ça l’arrange, il laisse faire, et si ça le dérange ou le met-en mal avec l’opinion internationale, il sévit, remarque le président des FPC.
Et de rappeler, que le président Aziz avait reçu les islamistes venus réclamer la tête du blogueur accusé de « blasphème » devant les grilles de la présidence, promettant une sanction contre le blogueur, avant de refuser leurbmanifestation, le vendredi qui a suivi le verdict, ensuite de l’autoriser, une semaine plus tard et enfin décider de durcir le code pénal, en son article 306 pour les calmer.
Samba Thiam dénonce cette « ambigüité » du gouvernement qui cherche constamment à mystifier l’opinion international. Au FPC, nous refusons l’instrumentalisation de l’islam pour appeler à la mort, martèle Samba Thiam qui prône l’islam pacifique et tolérant que le monde musulman a connu par le passé.
Comparant ce qui se passe aujourd’hui chez nous et en Arabie Saoudite, référence en matière d’Islam et d’orthodoxie, le président Samba Thiam salue l’attitude du nouveau prince héritier qui prêche la lutte contre la corruption et qui adapte son pays à l’évolution du monde moderne, en incitant à la réécriture du dogme, en autorisant les femmes à conduire. Pendant ce temps là, la Mauritanie se radicalise et les islamistes radicaux appellent au meurtre.
Enfin évoquant la place des FPC au sein du G8, Samba Thiam reconnaît qu’il n’y a pas de nuages et que son parti joue sa partition se réjouissant au passage que l’opposition a gagné son pari en faisant échec au référendum du 5 aout dernier. Nous travaillons au sein du G8 pour une rupture d’avec les pratiques actuelles, pour la refondation de la Mauritanie, une Mauritanie juste et égalitaire pour l’ensemble de ses fils.
Le calame