Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Meeting UPR : Pari gagné ?

L’Union pour la République (UPR), principal parti de la majorité présidentielle a réussi le pari de la mobilisation lors du meeting qu’il a organisé, le samedi 25 décembre, dans l’après-midi, à l’ancien aéroport de Nouakchott, sous le thème de l’« équité ». C’est en tout cas le moins que l’on puisse dire, eu égard à la forte foule qu’il y a eu. Comment ? C’est la question que les observateurs se posent. Parce que ce sont des vagues de citoyens qui sont venus de tous les quartiers de Nouakchott, à pied ou à bord de véhicules. On a senti comme une espèce de « compétition » des différentes fédérations et hauts cadres dans la mobilisation. On s’est, par la même occasion, rappelé des méga meetings d’Ould Abdel Aziz en 2009 à la centrale thermique de Nouakchott quand il clôturait sa campagne présidentielle ou celle de l’aéroport en 2019, au terme d’une tournée au profit de son alter ego et candidat, Ould Ghazwani. Ce mega meeting renseigne que des leçons apprises depuis le PRDS de Ould Taya restent, au vu des pratiques, toujours vivantes. En dépit de belles paroles dont on nous arrose, les autorités mauritaniennes, les hauts responsables continuent à démontrer au peuple mauritanien combien ils sont passés maîtres dans la métamorphose politique. L’opportunisme et l’hypocrisie quand elles nous tiennent !

Un nouveau tournant ?

Si l’objectif de ce meeting était de réaffirmer le soutien du parti au président de la République, à ses engagements, l’UPR peut se frotter les mains. Et si on était dans une compétition électorale, on peut affirmer sans gros risque de se tromper que le président Ghazwani sortira victorieux, haut la main au premier tour de son 2e mandat. Seulement, on n’en est pas encore là. Il lui reste presque la moitié du parcours. Le président et son parti ont réussi cette rentrée politique et partant à renvoyer aux oubliettes, aussi bien l’ancien président Aziz qui ne baisse pas les bras et dont les soutiens continuent à se battre pour le sauver, mais également l’opposition dont les grands partis ont presque sombré dans un mutisme préoccupant

C’est là une situation paradoxale dans la mesure où ce meeting intervient dans un contexte social particulièrement difficile. Les prix des denrées de première nécessité ne cessent de flamber, rendant davantage précaire la vie de la majorité des populations. Au vu du meeting, on comprend pourquoi les mauritaniens qui grognent dans leur majorité ne manifestent pas, comme ailleurs contre la hausse des prix. Pourtant dans les rues, bureaux et transports, ils ne cessent de pester contre le pouvoir, contre la dégradation continue de leurs conditions de vie, contre les lenteurs dans les changements qu’ils attendent de leur Rais, lequel vient de se rendre compte, deux après son élection que ses promesses tardent à profiter aux populations. Aussi, il aura fallu que le président fasse le constat pour que l’UPR se rappelle peut-être que celui qu’elle avait choisi comme « référence » contre celui qui l’avait fondée, que celui-ci a besoin de son soutien. Un soutien pas très déterminant depuis son congrès de fin décembre 2019. Comme on dit ailleurs, quand le président tousse, c’est le gouvernement ou le Parlement qui s’enrhume.

Le contexte politique est quant à lui aussi grippé ; le dialogue en gestation peine à accoucher d’un consensus autour d’un comité de pilotage. Et si cela met en mal l’opposition, cette situation réjouit certains faucons de l’UPR et du gouvernement, opposés à toute idée de dialogue.

Au sortir de ce meeting dit de l’« équité », le président est conforté par sa majorité et peut désormais aborder un nouveau tournant dans sa gouvernance. Le recentrage de l’Inspection générale d’Etat, rattachée désormais à la présidence de la République et les changements opérés, il y a quelques jours à la tête des forces armées et de sécurité seraient-ils un prélude à la refonte du gouvernement et des établissements publics qui servent à caser « les recyclés » qui perpétuent la gabegie ? On ne fait pas du neuf avec du vieux, surtout quand l’équipe peine à gagner parce que constituée de gens « mouillés » jusqu’au cou. On a vu comment certains ont essayer de se repositionner à l’occasion du meeting de l’équité. Recyclage quand tu nous tiens !

« L’équité », disent-ils

Le meeting de l’UPR a été l’occasion de revisiter les thèmes de prédilection du président de la République, mainte fois répétés dans ses discours dont celui récent d’Ouadane. C’est celui- là qui a été le déclic pour sortir l’UPR du silence.

 Aussi, le président de l’UPR a-t-il repris ces thématiques. Il d’agit des archaïsmes sociaux et leurs pesanteurs sur certaines composantes du pays, victimes de marginalisation. « Le temps de la hiérarchisation sociale est révolu », a déclaré Ould Taleb Amar devant un public acquis à la cause ghazwanienne. Il a rappelé la volonté du président de la République de « rebâtir une société unique qui ne présente pas les personnes sur la base de leur appartenance à telle ou telle frange sociale. »  Enfin, pour le président de l’UPR, l’« État ne reconnaîtra le citoyen que sur la base de son rendement pour son pays et à son peuple », et « la justice est désormais consolidée et bâtie sur des bases solides et sures ». Il a aussi évoqué l’unité nationale, la cohésion sociale mais également les réalisations du président Ghazwani, lequel s’est offusqué, il y a quelques semaines des retards dans l’exécution de ses engagements électoraux.

En effet, dans son discours d’Ouadane, le président a prononcé plusieurs fois ce vocable d’ « unité nationale » dont on parle depuis des années sans qu’on sache exactement ce qu’il faut y mettre comme contenu, au point qu’il risque de devenir un slogan creux comme la « lutte contre la gabegie », «le président des pauvres » dont le nombre ne cesse d’augmenter dans le pays. Parce que depuis les évènements de 87-90, très peu de progrès ont été notés dans le règlement du passif humanitaire et les efforts faits pour régler la problématique de l’esclavage n’ont profité que très peu aux victimes de cette pratique et de ses séquelles. ANAIR, TADAAMOUN et aujourd’hui TAAZOUR ont nourri beaucoup plus les hommes d’affaires, les fonctionnaires qui y travaillent et entretenu le clientélisme à travers de juteux marchés qu’à leurs cibles. Il ne suffit pas de parler de cette unité nationale mais la mettre en œuvre, d’enrayer les pratiques qui l’entravent au lieu de traiter ceux qui en parlent de racistes, d’extrémistes et de traitres, A côté des « nominations et établissements monocolores », dénoncés par certains acteurs politiques, il y a aussi ce qui se passe dans les médias publics où des actes sont posés tous les jours pour donner à certains l’impression d’être des  citoyens étrangers dans leur propre pays. La HAPA a eu le courage de dénoncer ce non-respect de la diversité telle que préconisée par la Constitution. Construire l’Unité nationale passe par le respect de l’autre dans sa différence, non dans une volonté de l’« assimiler» à marche forcée.

On ne peut pas construire une unité nationale en oubliant de montrer dans des manifestations pareilles, ce que le pays compte comme diversité (Festival des villes du patrimoine). C’est l’une des raisons qui fait que nombre de citoyens ne se sentent pas concernés par ce genre de manifestations.

 

Exhibition de signes ostentatoires

Dans le contexte de COVID et de grande précarité de la majorité de la population, certains responsables devraient s’abstenir d’exhiber un luxe insolent dans les manifestions politiques. Ce qu’on a vu comme voitures de luxe dont certaines V8 sans immatriculation est tout simplement frustrant, voire provocant. On a assisté comme à un salon d’autos dernier cri. Bon Dieu, d’où ont-ils tiré cette richesse ? L’ont-elles acquise honnêtement ? On peut en douter. La gabegie et la vente de produits illicites pourraient aussi être à l’origine de ces richesses ostentatoires. Pour les étaler, certains responsables de Moughataa n’ont pas hésité à planter des tentes pour installer, avec nourriture et eau des populations dont certaines ignorent pourquoi elles sont là. D’autres distribuent masques et des bouteilles d’eau aux passants. Certaines sociétés ont déporté sur le terrain leur logistique pour se faire voir. On aura tout vu. Comme toujours ! C’est dire combien la tâche d’ éradiquer la gabegie avec ses corollaires, le faux et l’usage  de faux, le trafic d’influence et autres, l’incivisme, les inégalités reste encore comme une illusion.

 
                                                                                                                                                                             Dalay Lam

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