Fenêtre Sur : Démocratie ne rime pas avec pauvreté.
Le Rénovateur Quotidien – La démocratie d’un Etat fonctionne relativement bien en premier lieu lorsqu’elle s’applique dans une nation, au sens civique comme au sens ethnique.
La première suppose que les citoyens se retrouvent autour d’un projet politique commun, en dehors de toute référence ethnique. La deuxième conception de la nation suppose une très forte homogénéité ethnique et culturelle.
Si le concept de nation est très fortement ethnique, le partage du pouvoir politique s’avère difficile, donnant lieu à des conflits inter-ethniques, des refus d’alternance en faveur de « l’autre ». La démocratie fonctionne d’autant plus mal que la préoccupation principale des populations est bien souvent de manger à sa faim.
Un pied dans le pouvoir politique pour un membre d’une famille, d’un village, d’une ethnie peut changer totalement la capacité de cette famille, de ce village, de cette ethnie à survivre.
La solidarité ethnique prime pour résoudre ce problème de pauvreté, d’où les conflits ethniques/claniques pour le pouvoir. L’accès à la richesse passant par le politique, les ressources de l’Etat sont réparties au sein du clan au pouvoir.
La démocratie n’a aucune garantie de bien s’implanter dans un Etat où l’immense majorité de la population vit dans la misère. Manger à sa faim et pouvoir se soigner relativement correctement évitent généralement les solidarités de l’ethnisme ou du népotisme et tous les fanatismes qui vont avec. Il faut des lors remettre en adéquation démocratie et nation en permettant la prospérité.
Il faut sans doute revoir la pratique démocratique au niveau de gens qui veulent vivre ensemble. C’est la grande leçon du principe de subsidiarité : que les problèmes se résolvent d’abord au niveau local si possible parce que les populations y ont la connaissance requise pour traiter ces problèmes et l’envie de le faire ensemble. Cette décentralisation politique, c’est la démocratie du bas vers le haut. La sérénité politique limite l’incertitude institutionnelle, extrêmement néfaste au développement.
Développement économique et développement politique peuvent aller de pair pour peu qu’on n’impose pas des schémas, préconçus ailleurs, à des niveaux inadéquats et en n’étouffant pas les libertés locales et individuelles.
L’émergence d’une société démocratique ne se décrète pas. Elle résulte d’un processus long et douloureux. Il appartiendra à la classe politique mauritanienne de revenir sur des dossiers difficiles comme celui du passif humanitaire et des crimes économiques de l’ère Ould Taya avec le risque de voir s’accentuer les solidarités tribales, régionales et ethniques.
Mais « lL démocratie est toujours une entreprise à risque, et parfois à haut risque », le pire en l’espèce sera de négliger ces dossiers et d’ériger l’impunité en mode de gouvernance car dans ce domaine aussi la démocratie ne va pas de soi. Il faut se battre chaque jour pour elle, sinon, nous risquons de la perdre.
Enfin, la responsabilité première demeure celle de l’élite mauritanienne, de la classe politique et des pouvoirs publics et surtout de la jeunesse du pays. Osons faire le pari que cette dernière saura s’approprier les valeurs de la démocratie et de l’État de droit.
BAC