Loupe du Jour : La Mauritanie encore mal -(ré) partie !
La Mauritanie, ce pays aux mille paradoxes où les changements ne produisent pas des effets positifs sur le niveau de vie des populations, où la démocratie n’instaure pas une égalité entre les citoyens, où les réformes de tous genres ne permettent pas d’assainir la vie publique et où la lutte contre la corruption ne change pas les mentalités des responsables.
Le Président Mohamed Ould Abdel Aziz est- il ce que les mauritaniens ont de meilleur ou de triste ? Là aussi les réponses sont confuses selon les motivations des uns et des autres ? Posez des questions aux mauritaniens vous ne saurez pas savoir quel modèle de dirigeant ils aiment voir aux commandes. La preuve est qu’il y a encore de nombreux citoyens qui regrettent le départ deTaya même si avec lui l’argent de l’Etat a été dilapidé, les négro-mauritaniens réprimés sauvagement dans le sang, les trafics de toutes sortes soutenus à ciel ouvert. Cela a été d’ailleurs pour beaucoup dans la longévité de l’ancien dictateur. La courte parenthèse de Sidioca a, elle aussi fait des émules malgré la diabolisation dont il fut l’objet de la part de ceux qui ont assassiné l’espoir d’uneMauritanie qui commençait à se réconcilier avec elle-même. Quand est-ce qu’on pourrait savoir si la Mauritanie est bien ou mal partie ? Les mauritaniens sont-ils capables de faire des jugements objectifs sur ceux qui président à leurs destinées ou se contentent-ils toujours de suivre les consignes des laudateurs qui excellent dans l’art de l’acquiescement ou au contraire se laisser aller aux critiques des opposants et autres mécontentements conjoncturels ? Sur quels arguments faut-il finalement se fonder pour juger les institutions à travers les hommes qui les dirigent ? La Mauritanie c’est comme ce serpent qui se mord la queue, qui fait un pas en avant et dix pas en arrière, où les richesses dépassent de loin le nombre de ses habitants mais où la misère frappe sans pitié les masses populaires. L’autre paradoxe consubstantiel à la création d’un Etat moderne est l’impossible séparation entre un pays qui se veut civilisé et les pratiques anachroniques qui enfoncent la Mauritanie dans l’arriération sur tous les plans. Parce que la rupture est impossible. Cette Mauritanie plus proche de l’Afrique noire qui préfère chercher des voisins plus lointains géographiquement. Nous sommes dans une Mauritanie où les identités culturelles peuvent se féconder pour donner un type décomplexé et fier de sa grandeur. L’obstacle qui empêche cette inter-pénétrabilité est dû à un manque de courage politique de la part de nos décideurs qui eux-mêmes sont sous-influence des mêmes considérations anachroniques. Les chantres d’une Mauritanie de majorité qui impose sa volonté à la minorité refusent de se s’adapter aux exigences d’un monde qui tend à promouvoir l’inter culturalité et le primat des compétences sur la médiocrité. Partout c’est le fameux reflexe de l’exclusion des autres parce qu’ils ne manient pas la langue de la nouvelle bureaucratie, si bien que même dans les choix de certains postes même technocratiques le profil idéal est taillé à la mesure de schèmes professionnels des compétences privilégiées. Entendez par là le tribalisme, le népotisme, le régionalisme autant de vieilles pratiques qui se perpétuent de plus bel. Dans ces conditions comment asseoir une Nation arc-en-ciel décomplexée et bien outillée pour rattraper son retard. Comment faire une rupture avec la génération de présidents fantoches qui méprisent l’excellence et clochardisent une élite pour en faire des suivistes vachement opportunistes ? La Mauritanie est donc loin de sortir de l’auberge…
Cheikh Tidiane Dia (Le Rénovateur)