Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

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Appel de Djéol, du berger à la bergère ….

Par Samba Thiam 

Au regard de la situation actuelle grave que traverse notre Pays, à la croisée des chemins, je souhaite, face aux  défis et menaces qui planent, que  nous soyions tous animés par une volonté réelle d’y faire face, en vue de  trouver des solutions. Pour ce faire, nous devons nous parler honnêtement, sincèrement. Face à nos responsabilités historiques devant ce tournant  décisif de notre pays, nous  nous devons  d’oser voir les problèmes, d’oser les affronter, objectivement, honnêtement , sincèrement, oser, courageusement, crever enfin l’abcès  …

I-Diagnostic

a- Historique : en 1958,  nous nous sommes retrouvés à Aleg pour dire, en majorité, non aux convoitises marocaines qui ne furent pas sans convulsions, non à l’intégration au Mali ou au Sénégal, avec pour chaque option des partisans. Nous  avons dit  Oui pour la Constitution d’une Mauritanie où  Blancs et Noirs acceptent de sceller leur destin face à l’avenir, c’est-à-dire de  vivre ensemble. Pour être juste  les Haratines n’étaient pas alors intégrés à cette équation  dont ils constituent aujourd’hui un des  paramètres essentiels, après une longue et âpre lutte  pour leur émancipation.

Nous nous  sommes donc engagés dans cette aventure passionnante avec optimisme, mais à la va-vite, sous la pression des évènements et de la France, sans définir les bases de la coexistence entre ces entités qui vont constituer la Mauritanie. Sans dresser les contours de notre unité ou du vivre-ensemble, devenu problématique.     

Ce fut le raté d’Aleg, qu’il faut aujourd’hui tenter de rattraper…

 Pour se faire, nous devons, à travers ces assises, procéder à un diagnostic sans complaisance des choses, nous parler franchement,  sincèrement, sans langue de bois habituelle, animé chacun, encore une fois, par une volonté réelle de trouver des solutions justes  et équilibrées aux problèmes qui minent ce vivre-ensemble.

Ces problèmes devenus structurels, s’aggravant chaque jour un peu plus, se déclinent  en exclusion marquée, en discriminations flagrantes, en inégalités multiformes, en raison de  l’hégémonie, de facto, d’un seul groupe ethnique, à travers son noyau. Une seule composante nationale, à travers son élite, contrôle tout, monopolise tout, détient, seule, la réalité du pouvoir ! Nous sommes face  à ’’ l’hégémonie d’une langue, d’une culture , d’une race sur les autres’’, par option politique ! Les autres sont réduits  en de simples consommateurs, en éléments d’appoint , au plus. Les quelques exceptions à la règle sont  là comme des faire-valoirs pour masquer le  Système et mieux le pérenniser, des objets de vitrine pour mystifier la communauté  internationale et masquer  la réalité mauritanienne concrète ! 

 Notre Unité est minée par trop d’injustices, trop d’inégalités ; inégalité dans la représentation parlementaire , inégalité dans  les Forces armées et de sécurité, dans l’accès aux emplois, dans l’accès aux ressources, dans les  médias qui véhiculent quasiment une culture, une seule,  à la quelle il faut formater les autres . Nos enfants n’ont plus les mêmes chances et les mêmes opportunités à l’école  comme  à l’ère pré et post- indépendance…Le  patronat est quasi monocolore, la Fonction publique  purgée, suite aux évènements de 1986 et 1989 . 

Trop d’injustices, trop  d’inégalités…Inégalité politique, inégalité sociale, inégalité raciale …

Dans les régions Sud, pourtant densément peuplées, l’Etat se retient  depuis 1960 de créer des projets sérieux, viables, ou  se garde d’exploiter les ressources du sous-sol pourtant identifiées, parce que ces populations du Sud seraient soupçonnées de nourrir des velleités  séparatistes; et cela  de l’aveu même de quelque  responsable de la haute administration  en charge,  il n’y a pas si longtemps. Même l’Hymne National, censé fouetter le patriotisme chez tous et chacun, ignore totalement et délibérement notre diversité, comme par mépris  … La ‘’fraternité’’ et la  ‘’justice’’ sur lesquelles  repose   notre Devise sonnent bien mais ne fonctionnent pas ; ce sont de simples slogans !

Cette situation d’injustices cumulées a eu pour conséquence de créér  un climat de méfiance profonde entre nos communautés. Nous vivons désormais côte à côte, en nous tournant le dos. Notre Unité est aujourd’hui  gravement compromise  par des lignes de fracture profonde. Toutefois je crois, qu’en dépit des crises graves et récurrentes de notre unité, il n’ y a jamais eu, que je sache , de remise en cause du devenir en commun, de notre volonté  de rester ensemble. Il a été plutôt question de réaménagements, de réajustements, de réforme profonde pour une cohabitation plus harmonieuse, mais jamais de remise en cause du vivre-ensemble lui même…

Tout n’est pas perdu,  malgré qu’une partie importante a céssé de croire que l’Etat était le sien…Il suffit de nous ressaissir. 

L’heure est venue de remédier à ces manquements graves et corriger ces nombreuses injustices qui  minent notre vivre-ensemble, en lambeaux , pour conjurer les périls futurs , dans notre intérêt à tous, car l’ordre actuel imposé n’est pas viable; Il n’est bon pour personne, à terme … Les hommes de bon sens et de raison peuvent comprendre qu’il conduit à l’impasse pour ne pas dire au désastre…Il y va  du devenir du pays, de son existence même, en tant que pays ! Nous avons l’obligation morale, pour les générations futures, de nous arrêter un instant, de repenser notre vivre-ensemble à travers un pacte national, ou mieux , une Charte Nationale, aux dessus des contingences partisannes,  qui régirait cette unité, aujourd’hui fortement compromise.

II- Quelles solutions après ce diagnostic posé ?

Il existe deux types de solutions; il y a celles qui relèvent d’un changement dans l’attitude mentale, puis celles qui touchent à la réalité physique factuelle.

Mais l’efficacité de toutes  solutions, quelle qu’elles soient,  réside dans le changement 

d’attitude de quelques compatriotes qui doivent cesser de camper dans le  déni permanent; les problèmes existent et les enjeux de coexistence  sont réels et  sérieux. Il faut le reconnaître ! Autre attitude mentale, non moins pernicieuse, dont il faut nécéssairement se débarrasser, c’est cette logique suprémaciste qu’on retrouve chez  bon nombre  parmi nous.

 Il va falloir, par ailleurs, dans la gamme des solutions virtuelles, veiller à nous éviter des  solutions-clichés, conçues par paresse intellectuelle ou raccourci facile, du genre ‘’ l’Islam constitue la solution toute faîte; il n’y a pas de problèmes puisque nous sommes tous musulmans! Ou encore cette autre approche qui pose que  la Démocratie électoraliste actuelle suffirait à  résoudre le problème ‘’ ! Des expériences historiques d’autres pays controdisent formellement ces assertions  et montrent que ce sont des solutions illusoires … La démocratie a besoin de socle solide, de garde-fous pour fonctionner correctement et se protéger de ses propres dérives qui étouffent l’expression des minorités ou, parfois, s’accommode de tares  graves, comme ce le fut avec  l’apartheid ou la démocratie israëlienne actuelle  … Les pays qui nous entourent cherchent  à solder correctement leurs querelles internes ou d’identité  pourquoi ne devrions–nous  pas nous en inspirer, au lieu de rester à la traîne ou  constituer  l’exception ? Tous cherchent à devenir des pays émergents , sauf nous !

B- Solutions concrètes aux  injustices concrètes qui minent note vivre- ensemble  :

A la base de toutes les solutions sectorielles à identifier, il y a celle de principe qui doit  être le socle, qui  passe par la reconnaissance de notre diversité culturelle et ethnique – point nodal de notre crise identitaire. Reconnaissance de notre Diversité – à traduire dans les faits- qui, elle même, se décline en Egalité, en Equité, en Egale dignité, respect mutuel   et  justice sociale.

– Suivra alors la série de solutions, de type sectoriel, aux multiples injustices dont la première à redresser est d’ordre linguistique et culturel. Nos cultures, différentes, doivent être reconnues et traitées pareillement, et nos langues élevées toutes au rang de langues officielles. On ne saurait comprendre l’ exigence, légitime, des uns à s’enraciner  dans leur culture et attendre des autres qu’ils y renoncent et endurent leur propre aliénation culturelle…

– Un  accès égal  au secteur économique, la possibilité ouverte à l’entreprenariat égale pour tous.

– Des richesses du pays qui bénéficient à tous les mauritaniens, sans distinction.

– Un Pouvoir politique partagé de manière équilibrée, de façon à ce que la diversité nationale se reflète dans les grandes institutions de l’Etat et dans tous ses démembrements.

– Une prise en compte des aires culturelles et des vocations économiques des différentes zones qui serviront de base à une véritable décentralisation poussée, qui permettrait aux populations locales de gérer elles-mêmes leurs terroirs, voilà, entre autres, des solutions possibles.

Dans le domaine du foncier, il faudra procéder à l’arrêt et à la réparation des spoliations arbitraires, par la mise en place d’une réforme foncière uniforme et équilibrée, qui associe les populations dans l’exploitation de leurs terres.

– En matière de réforme, procéder à la réforme  des forces armées et de sécurité , du secteur de la justice monocolore, de façon à réfléter la diversité culturelle et ethnique du pays.

– Enrôlement correct et définitif des populations négro-africaines et haratines, victimes de discriminations en la matière, soit par  la recomposition des commissions techniques et de supervision de l’enrôlement- quasi mono-ethniques, de façon à refléter la diversité, soit par  le retour de la prestation aux mairies.

Résoudre la question du génocide dit “passif humanitaire”, dans toutes ses dimensions de violations de droits humains intervenues entre 1986 et 1992, à travers une Commission-Vérité/Réconciliation; violations qui se sont traduites par la déportation de populations  avec son lot de biens pillés et de bétail razzié, de villages occupés, de terres spoliées, de viols et de violence; s’y ajoutent les purges massives  au niveau de la  Fonction publique d’agents de l’Etat  négro-africains, les  éxécutions extra-judiciaires dans la vallée du fleuve et dans les casernes militaires. Résoudre la question du “Passif humanitaire” revient à panser des  blessures, sans plus, ce n’est pas une solution à la question du vivre-ensemble qui est d’essence politique ! Il ne faut  pas se tromper en confondant la cause et l’effet ! Le Passif n’est pas la cause mais l’effet; il est  une conséquence et découle de politiques nocives et funestes …  Pour, donc, éliminer définitivement l’effet -ici le “passif humanitaire” -,  il faut  d’abord s’attaquer à sa cause première qui est  d’essence politique, encore une fois. Pour qu’il ne se reproduise plus il faut éliminer les politiques en cause !

Il nous faut enfin résoudre la question de l’esclavage, correctement et définitivement, œuvrer  à l’ancrage  de la  démocratie-flanquée de garde-fous- ce qui doit se traduire par des élections honnêtes, libres et transparentes, c’est-à-dire crédibles.…

Mais avant de glisser vers ce stade d’Etat de droit, démocratique, qui ne reconnaît que le citoyen, sans couleur et sans appartenance tribale, ethnique ou religieuse, nous devons d’abord poser les bases générales qui constitueront le socle de notre vivre-ensemble, en complément à la démocratie, au dessus des contingences partisannes, comme soulignées plus haut. Puis doucement, mais irréversiblement, avancer dans la mise en place progressive de l’Etat de droit, neutre. 

Nous nous devons, par ailleurs,  de restaurer et assumer notre histoire authentique, et faire  l’effort de changer notre regard sur l’homme …Considérer l’individu pour ses valeurs et  ses qualités intrinsèques, et non pour son appartenance ethnique, sociale ou réligieuse . Mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut en nous débarrassant du carcan tribal et ethnique qui emprisonne…

Il me semble, enfin, nécéssaire de nous interroger sur ce  qu’il  nous coûte de changer de vision, de penser positivement et de construire une authentique et réelle fraternité. Nous ne sommes pas nombreux, nous disposons de ressources et ne manquons pas d’espace, pourquoi donc devrions -nous refuser de penser positif, de partager ? Notre pays, s’il était bien géré, pourrait offrir à chaque mauritanien un revenu décent qui lui permettrait d’assurer, dignement, son rôle de père de famille ! Imaginez ce qu’on aurait pu faire avec ces milliards emportés par Abdel Aziz ! 

Je voudrais, pour terminer, m’adresser à ces hommes et à ces femmes de bon sens, à ces hommes de raison, lucides, honnêtes et courageux, pour leur demander, de grâce, d’agir et de peser, afin de redresser, dans la bonne direction,  la trajectoire actuelle dangereuse de notre pays. Nous avons tout pour réussir, beaucoup plus que  nos voisins, pour faire de notre pays un foyer des plus attractifs dans la sous-région, un pays émergent qui ‘’accepte sa diversité, partage ses richesses, cultive la solidarité’’.  Il ne tient qu’à nous d’essayer et de le réaliser, pleinement, par la  force de notre volonté politique.

 Appel de Djeol c’est bien, mais nous attendons des Actes pour y croire. Des Actes, rien que des Actes…

Samba Thiam Président des FPC.

Nouakchott le 25 Avril – 2023

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DÉCLARATION DE PRESSE DES FPC SUR L’ÉPURATION ETHNIQUE EN MAURITANIE

UNE IMPORTANTE DÉCLARATION DE PRESSE DES FPC SUR L’ÉPURATION ETHNIQUE EN MAURITANIE

Des tractations sur le dossier du Génocide des années de braise, dit par certains du ”Passif humanitaire”, entre les émissaires du Président Ghazouani et certains représentants des victimes et ayants droit regroupés au sein des coalitions de défense de leurs intérêts sont en train d’aboutir à des résultats viciés par la détermination de l’Etat à solder au rabais des crimes odieux consécutifs à l’épuration éthnique subie par la commuanauté négro-mauritanienne. Cette enième machination va connaitre le même sort que celui des précédentes infructueuses tentatives d’un réglement consensuel qui élude ce qui devrait en constitue la substance, à savoir la vérité sur les faits et la justice pour les victimes.

Le pouvoir et ses démarcheurs ont cru pouvoir compter sur l’usure du temps, la précarité des conditions sociales des victimes et le sentiment de lassitude grandissant pour imposer une solution pécuniaire et une mise en scène symbolique en lieu et place d’une prise en compte exigeante des devoirs de Vérité et de Justice, conditions obligatoires pour tout réglement sérieux des crimes contre l’humanité de l’ampleur de ceux commis dans notre pays. Ne pas faire face ici et maintenant à la prise en charge courageuse de ces douloureux évènements par des voies et moyens expérimentés par des pays ayant connu les mêmes faits, c’est reporter la nécessaire réconcialition nationale que de nombreux patriotes mauritaniens appellent de tous leurs voeux.
Rappelons encore une fois que ce dossier tragique concerne et interpelle le peuple mauritanien dans son ensemble et non seulement les principales victimes et leurs familles.

Les FPC appellent les victimes et les ayants droits à ne pas céder aux tentations, à préserver leur unité et à poursuivre la défense des principes qui ont guidé jusque-là leur combat: le refus de l’impunité, les exigences de vérité et de réparations et, la nécessité du pardon en tant qu’aboutissement. Ce combat est juste. Il préserve leur dignité et celle des disparus.

Les FPC invitent le Président Ghazouani à s’inspirer de l’expérience malheureuse de ses prédécesseurs sur ce dossier. La solution que tentent d’imposer ses émissaires reconduit les mêmes travers qui ont compromis les tentatives de réglement précédentes. Les intermédiaires auront changé mais le contentieux et les exigences de justice demeureront dans toute leur acuité.

Nouakchott le 17 septembre 2022.

Le département de la communication et de la presse.

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Entretien avec Samba Thiam, président des FPC

Le Calame – Pour Samba Thiam, président des FPC, “l’échec du dialogue est plus imputable au pouvoir qu’à l’opposition”. Entretien…

Le Calame: Le président du comité préparatoire des concertations a annonce, ce 2juin, l’arrêt du processus d’organisation du dialogue dont le lancement officiel était pourtant donne pour imminent. Avez vous été surpris par cette annonce? Quelles sont selon vous, les raisons qui peuvent fonder la décision du président Wagf ?

Samba Thiam : Oui ,quelque peu surpris en effet par la forme ,c’est-à-dire de la façon dont la décision ,unilatérale, a été rendue publique. Ils tentent de s’en tirer, à bon compte, en faisant porter le chapeau à l’opposition, et à elle seule. Ce n’est pas très élégant, c’est le moins qu’on puisse dire. La réalité est un peu plus complexe que ça !

Quant au fond, je n’ai pas été vraiment surpris , parce que je sentais la chose venir, au regard de certains indices …

Vous avez d’abord dû remarquer comment ce dialogue a été négocié … comme une prière. Puis, dès le début, le quiproquo sémantique surgi autour des termes concertations et dialogue sur lequel l’Opposition, prompte aux concessions, par essoufflement ou lassitude, a cédé ! Ensuite ,la façon dont certaines questions , majeures étaient traitées sous la table ,alors même que le dialogue se profilait … Mais encore, ce ‘’ dialogue’’ n’a pas emprunté les voies-standard habituelles, propres aux dialogue, bien souvent …En effet , l’on sait , qu’en général , un dialogue résulte de deux cas de figures : soit il émane de l’exécutif qui, après analyse froide et lucide d’une situation politique tendue, juge de la nécessité d’en organiser un , entre les parties ; soit il découle d’un rapport de forces , favorable à l’Opposition qui l’impose au pouvoir.

Or nous ne sommes ni dans l’un, ni dans l’autre cas . A tout cela sont venues s’ajouter les claudications survenues à mi-parcours du processus, qui ont précipité sa fin. Vous comprenez à quoi je fais allusion, la Mauritanie a ses réalités, têtues. Mais, par-dessus tout, le plus déterminant des arguments à mon avis, réside dans les réticences pour ne pas dire les résistances du commandant en chef sur la question , qui n’ont ,fondamentalement , pas varié à ce sujet ,du début à la fin ; l’absence, claire, de volonté politique réelle, affirmée …

La sortie du coordinateur du Comité provisoire du dialogue n’a été , en réalité , qu’un prétexte , un faux alibi , pour se sortir d’une passe qu’ils avaient empruntée ,contre leur gré, rien de plus ! Si on devait situer les responsabilités de l’échec je dirais qu’elles sont bien plus imputables au pouvoir exécutif qu’à l’Opposition, même si ….

Des propos haineux tenus à l’endroit des Peuls de Mauritanie et des menaces et invectives contre certaines personnalités, à des arrestations. Que vous inspire cette atmosphère à la veille du démarrage des concertations politiques nationales ? Comment avez-vous réagi à la décision de la justice d’ouvrir une enquête puis de faire arrêter l’auteur de ces propos ?

-Concernant les propos haineux que vous évoquez -qu’il faut, ici, condamner sans équivoque- ils découlent du climat délétère généré par l’acuité de tensions sociales créées par trop d’injustices, trop d’inégalités, et dont le Président ne semble pas prendre conscience. IL faut d’autant plus condamner ces propos qu’ils généralisent ; or la généralisation est toujours abusive , excessive , car il n’y a pas de peuple , de communautés ou de groupes totalement bons ou totalement mauvais , totalement gentils ou méchants . Il y a des bons et des mauvais partout, des Justes partout…C’est donc une erreur de jugement ; il faut incriminer le Système et non pas le peuple.

Il n’empêche, la loi sur la ‘’protection de la personne du Président’’ ou sur la cyber criminalité, telle que formulée, consacre un recul grave et net de la démocratie , pour bâillonner les opinions et les libertés fondamentales ! On ne peut plus dénoncer des dérives sans risquer de se voir intimidé ou embastillé, il n’y a pas de liberté d’association ,on ne peut se réunir encore moins manifester , même la presse est sous pression, alors dans quelle démocratie sommes-nous ?

Un des acquis dont se prévalait la majorité et son Président , brandi à tout va , était l’apaisement du climat politique ; ils viennent de griller cette carte, la seule dont ils pouvaient se prévaloir. L’apaisement politique est mort, et bien mort, de leurs propres mains …Or, si nous pouvions être plus attentifs aux alertes à nos frontières, au tumulte et à l’agitation du monde qui nous parlent , plus qu’à tout autre, nous nous empresserions de sortir de cette voie sans issue ! l’Histoire jugera, elle jugera chacun de nous …

-Depuis des années, presque tous les acteurs expriment, à travers séminaires, colloques, conférences débats leur souci de trouver des solutions au problème de l’unité nationale. Tous semblent d’accord pour que ce thème soit mis sur la table. D’abord, qu’est-ce qui justifie, à votre avis cette espèce de regain d’intérêt pour cette thématique ? Ensuite, pensez-vous que de ces concertations, pourraient sortir des solutions consensuelles autour des questions nationales ?

Je pense que s’il y a un regain d’intérêt pour la question de l’unité nationale ces derniers temps, c’est sûrement qu’elle est devenue d’une certaine acuité, problématique et source de tensions plus vives . Pour le reste je crois y avoir déjà répondu , en ajoutant encore ceci , que même s’il sortait de ces assises des solutions consensuelles, je doute qu’elles soient appliquées , pour les raisons soulignées plus haut .

-Avec quel sentiment avez–vous décidé d’aller à ces concertations ? Avez-vous décelé chez les autres acteurs, la détermination de trouver des solutions définitives aux problèmes du pays ?

-J’ai expliqué mes réserves, dès le début, sur la façon dont ce ‘’dialogue’’ a été négocié, et amorcé… Dès le départ, j’étais donc sceptique quant à l’issue ,puisque le bon sens me dit que tant que le chef suprême n’a pas pris conscience de l’existence et de l’acuité des problèmes , de leur danger, tant qu’il n’a pas perçu l’intérêt ou la nécessité d’un dialogue autour , il serait utopique de penser qu’il se serait encombré de solutions, pensées ailleurs, et pour des questions qui n’existaient pas à ses yeux ! Il n’y a pas de crise disait-il, souvenons-nous en ! Il ne servait donc à rien de s’engager sur ce chemin, sauf que chaque parti politique a ses réalités …Si nous y sommes allés , c’était pour nous en servir comme d’une tribune , mais nous étions sans illusions.

Au cours d’une récente conférence de presse, le président de IRA, Biram Dah Abeid a comparé les prochaines concertations au Congrès d’Aleg de 1958. Que vous inspire cette comparaison ?

-Je crois que chacun a la liberté de se livrer à des comparaisons qu’il veut et comme il veut… Avec des arguments choisis et sous l’angle désiré. On peut donc concéder , que sous certains angles , cette ‘’ comparaison soit raison’’, entre ce dialogue et le Congrès d’Aleg … A cette différence, toutefois , qu’à l’époque certaines franges n’étaient pas dans l’équation dont elles sont ,aujourd’hui , un paramètre essentiel …

Pour ma part, je me serais plutôt saisi de ces assises pour rattraper l’erreur d’Aleg : fonder un pays sur la base d’un vivre ensemble, volontairement choisi entre des entités différentes , mais sans en définir, clairement, les bases et les contours . ..

Pendant que les acteurs politiques s’activent autour de la tenue du dialogue, le gouvernement s’attèle quant à lui à éponger le passif humanitaire avec certaines organisations des veuves, des orphelins, des rescapés et des rapatriés, comme il prépare une loi d’orientation pour la réforme du système éducatif, ceci après la tenue des assises sur l’école. Ces deux questions avaient été retenues parmi les thématiques des concertations désormais suspendues. Qu’en pensez-vous ?

– Il n’y a pas que le dossier de l’éducation ou du ‘’passif’’. Et c’est bien pourquoi on ne pouvait attendre grand-chose d’un projet de dialogue, complètement désossé, au départ …

-Que vous inspire la gestion du dossier de la décennie dont on enregistre une avancée dans la mesure où les personnes présumées viennent d’être déférés devant un tribunal pour être jugé? Pensez-vous que le travail de la CEP de l’Assemblée nationale a permis de prévenir la gabegie ?

– N’allons pas trop vite en besogne, au vu des hésitations, des demi-mesures, des atermoiements auxquels on nous a habitués .Il ne faut croire que ce que l’on tient en main…

Prévention de la gabegie dites-vous ? Avec des choses , toujours faites à moitié ou de travers et tous ces atermoiements , vous y croyez vous ?

– Quelle évaluation vous faites de la gouvernance du président Ghazwani ?

– Si j’entends bilan, je dirais décevant ,au regard des attentes et de l’immense espoir suscité auprès , tant des populations que des politiques, au départ du mandat. Inégalités, injustices, discriminations perdurent, ne le perdons pas de vue .

Dans l’une de ses déclarations, le président de IRA Biram Dah Abeid a affirmé que la candidature de feu Kane Hamidou Baba soutenu par la Coalition Vivre Ensemble (CVE) dont le FPC, votre parti, était membre avait pour objectif d’affaiblir sa candidature à la présidentielle. Un commentaire?

Je trouve cette question anachronique et la remarque quelque peu déplacée … Celui qui aurait été le mieux à même d’y répondre c’est certainement feu Kane H Baba lui-même , aujourd’hui disparu ! Paix à son âme. Il s’y ajoute que je n’aime pas revenir sur des questions qui renvoient au passé et de surcroît polémiques ; ce n’est pas productif … Cela dit, il faut quand même rappeler que feu KHB s’est toujours présenté aux élections présidentielles, pour son propre compte , avec d’autres concurrents . Pourquoi en serait -il autrement pour cette élection dernière? Pourquoi, même s’il le fit à travers une coalition, cela devrait-il être dirigé contre quelqu’un ?

L’humilité, disait Mani – personnage de A Maalouf-‘’ c’est ‘’de savoir parfois rire de soi’’!

-Au fait, où en est votre dossier administratif ? Pourquoi ne prenez –vous pas contact avec la CNDH ?

-Toujours au point mort … Je n’ai pas un dossier mais deux, politique et administratif …

Le dossier politique – contentieux avec l’Etat- depuis 2015 autour du récépissé des FPC , est toujours en souffrance à la Cour suprême qui, pourtant, dénoue régulièrement des contentieux du même genre .Puis le dossier administratif relatif à mes droits à pension , que l’on continue de me refuser …Dossier qui avait été engagé par le ministre de la Fonction publique sortant , l’ arrêté devant me régulariser ,lancé dans le circuit , mais reste bloqué au niveau de la législation ,depuis plusieurs mois . Il y a comme un retour de l’ère de Abdel Aziz qui avait limogé un Directeur général de la fonction publique pour avoir tenté de me remettre dans mes droits, légitimes…De tous les prisonniers politiques de Walata de 1986 , il faut le rappeler, je reste le seul à qui on refuse ce droit…En raison de ma posture politique de penseur libre et d’honnête opposant.

Oh, c’est fait pour la CNDH ! J’avais saisi son Président, voilà plus de deux ans, mais rien… J’avais toujours pensé, honnêtement, que ce président était à équidistance, vraiment indépendant. Eh bien ! Je découvre, au vu de cette expérience et bien d’autres, qu’il choisit ses dossiers, manifestement…

Propos recueillis par Dalay Lam

le calame

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 Remaniement du gouvernement, quelle lecture ?

Paradoxes, incohérences, hypocrisie…la montagne qui accouche d’une souris ! Lorsqu’on a de l’ambition pour ce pays, on éprouve, chaque jour que Dieu fait, des frustrations , de la douleur, un mal-être profond, face à cette navigation à vue, à ces paradoxes, à ces incohérences et cette hypocrisie ambiante…

Un Président, décu, par un coup de sang, décide de vider la moitié de son gouvernement pour incompétence … mais le voilà qui garde le premier des ministres, à qui pourtant incombe la responsabilité première de l’échec ou du succès !

Dans la foulée, il tient une séance de travail physique avec les gouverneurs des régions, sermonés, pour leur manque de proximité avec les populations, et voilà que, là aussi, leur commandant en chef se retrouve propulsé au rang de premier des diplomates !

Incohérences, quand elles nous tiennent …

D’aucuns rapportent que parmi ces gouverneurs, certains auraient décidé, comme pour faire un pied de nez au Président, de suspendre tout bonnement l’enrôlement des populations –en région Sud ! Il n’est pas superflu de rappeler pour ces régions Sud que l’ensemble des personnes qui avaient passé la première phase d’enrôlement, grâce aux commissions itinérantes, mises sur pied avec l’arrivée de Ghazouani, ont vu, toutes, leurs dossiers bloqués au niveau de la Commission centrale de Validation ! la raison invoquée ? “Ce serait des Sénégalais qui se font enrôler”, murmure-t-on.

Comme toujours, partout au Sud ! Même suspicion à l’égard des résidents de Sebkha et du 6ème à Nouakchott . De cette affaire d’enrôlement seuls les Négro-africains et les Haratines en souffrent, véritablement, voilà près de 20 ans . Et on nous parle d’équité !

Mais revenons à nos moutons…

Je constate, et nombre de mauritaniens avec moi , que le Président a limogé des éléments dont certains sont reconnus pour leur probité et sérieux au travail, pour faire entrer quelque négros, quelque négrita, avec pour seul critère visible la dévotion et l’allégeance au Système ! Ces hommes et ces femmes qui ont été poliment remerciés, s’ils n’étaient pas les meilleurs , n’étaient pas non plus en deçà de ceux qui sont restés. Un des Mohicans a échappé par miracle à la purge, mais au regard des traditions du pays qui s’accommodent mal des hommes sérieux, probes et travailleurs, ça ne saurait tarder…

On prend les mêmes et on recommence. Une fraction pour les Hodhs, une autre pour l’Assaba, le Trarza, tel quota pour telle tribu, tel autre pour telle fraction tribale. Un sooninke s’en va un autre fait son entrée ; les wolofs sont oubliés, mais sans susciter aucune indignation; pas même des intéressés eux-mêmes !

Ce pouvoir se dit attaché à l’équité, à la justice, au respect des droits des citoyens, mais ce sont là juste des slogans ! Des mots, rien que des mots, et je suis l’exemple vivant, entre autres, qui l’illustre, à travers et mon dossier politique (récépissé des FPC arbitrairement bloqué), et mon dossier administratif (– seul ancien locataire de Walata de 1986 qui n’a été , jusqu’ici, ni indemnisé, ni admis à faire valoir ses droits à pension) ! Combien sont-ils tous ceux-là qui souffrent d’injustices flagrantes non résolues au quotidien ? Si ould Abdel Aziz ne fut, manifestement, pas notre Président, celui-là, non plus, ne semble pas acter dans le sens contraire. Loin s’en faut !

Avec ce régime on glisse, lentement, vers le culte de personnalité, vers la répression de la moindre contestation ou velléité de changement, comme avec ce jeune blogueur de Toujounine, arrêté et torturé , dont le seul crime fut de s’être proclamé “président d’un Mouvement pour le Changement”. Niveau auquel même le général, déchu, se gardait de tomber, au nom de la liberté d’expression !

Nous avons mal à notre gouvernement, mais que dire de notre peuple, ou plutôt des nos populations, tous horizons confondus, qui ne cessent de se lamenter sur leurs misères, mais qui attendent, tranquillement, la solution du Ciel …Que dire de nous autres, exilés dans notre propre pays, toujours dans l’expectative comme frappés d’hébétude ?

Que dire de nos leaders politiques, de nos intellectuels qui gardent le silence sur des orientations et manquements graves qui mettent en péril notre unité ? Qui ferment les yeux sur un génocide qui se déploie, dans toute sa laideur, à notre frontière Est, par amalgame d’une junte militaire pustchiste!

Que dire des Organisations nationales des droits de l’homme, de l’Union Africaine, de la CEDEAO-obsédée par les élections- qui font profil bas sur cette question cruciale ?

Que dire de cette Opposition, éclatée, par dysharmonie entre ces tendances dans et hors -Système, qui ne veut même plus s’opposer ?

Que dire, enfin, de nos partenaires internationaux qui pleurent pour l’Ukraine et se détournent des charniers dramatiques du Macina et de ce qui s’installe insidieusement en Tunisie ? Que penser de ceux-là qui disent venir en aide à notre cohésion sociale, mais qui injectent chaque année des millions d’Euros en soutien à un secteur de justice arriéré, mono-ethnique et grabataire ?

Hypocrisie quand tu nous tiens !

Samba Thiam
Président des FPC

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CONTRIBUTION: A  Propos de la loi d’orientation …
Par Samba Thiam. 

J’ai lu  attentivement la loi d’orientation du ministre de l’Education nationale portant sur la réforme du système éducatif. L’appréciation que j’en fait  est qu’elle constitue un recul  net par rapport aux ambitions du Comité Militaire de Salut National (CMSN), pour reconduire et renforcer les aspects négatifs et désastreux de l’arabisation, issue de la réforme de 1999. Elle  consacre , de facto, une ‘’folklorisation’’ de nos langues nationales pulaar, sooninke et wolof, ni plus, ni moins. Et c’est inacceptable !
Le CMSN prônait, à travers l’exposé de motifs et le décret 81017/Pg/MEN, ceci : ‘’ Elaborer  un système éducatif {…} qui se fondera sur l’officialisation de toutes nos langues nationales, la transcription en caractères latins et l’enseignement du pulaar, sooninke et wolofs qui devront donner les mêmes débouchés que l’arabe ‘’. Le ministre choisit de passer sous silence  toute éventualité ‘’d’officialisation’’ de ces langues. Le CMSN poursuit : « les langues nationales doivent prendre place  et être utilisées  comme véhicules  du savoir , sous toutes ses formes… » , à quoi ce ministre oppose qu’elles seront des langues de communication ; que la langue ’arabe  sera enseignée à tous les enfants non arabophones comme véhicule d’apprentissage des sciences et autres disciplines, que  ‘’l’apprentissage des connaissances et aptitudes de compréhension  et les disciplines scientifiques se fera dans la langue arabe’’.Le CMSN insiste et  rappelle «  qu’il ne s’agit pas d’utiliser ces langues nationales  comme relais ayant pour fonction de faciliter les apprentissages dans une autre langue – c’est exactement ce que fait ce ministre -, mais de les installer d’emblée dans une dynamique propre  à assurer leur plein développement et leur insertion dans tous les secteurs de la vie sociale » ,  tout le contraire de ce projet !Enfin  le CMSN  met  en garde : «  il est  indispensable que vous compreniez tous que cette décision  n’est pas une mesure ‘’politicienne’’ qui cache un calcul sordide  et sans lendemain». Exactement le cas d’espèce qui nous occupe avec cette  loi d’orientation scélérate ! A la clarté de langage du CMSN dans les choix opérés, le ministre oppose des calculs et des agendas inavoués , l’ambiguité  et le flou le plus total sur bien des aspects …Flou sur le statut des langues; tantôt l’arabe est langue véhicule  de toutes les disciplines pour tous, tantôt elle est langue de communication ; tantôt ce sont les langues pulaar, sooninke et wolof qui le sont, tantôt c’est le français !Flou sur les caractères arabes de l’alphabet introduits au préscolaire  sans en fixer les limites, ce qui , par glissement et par stratégie, pourrait s’installer et signifier, sans le dire, une remise en cause même des caractères latins, acquis …Ce texte  parle de généraliser l’enseignement des langues nationales mais à la carte ! On fait preuve de  cynisme, lorsqu’on  pose  qu’il faut   ‘’capitaliser l’experience réussie de l’ILN  qui a été abandonnée sans justification valable’’ et, qu’en même temps, on annihile  la substance et l’essence même de ce qui  ‘faisait de  cette expérience une réussite’, à savoir l’érection du pulaar , sooninke et  wolof en  langues d’enseignement , langues véhicules du savoir, et non  comme  langues de ‘’facilitation pour l’apprentissage d’autres langues’’ comme c’est le cas proposé ici ; c’est-à-dire comme langues d’appoint et d’appui essentiellement à l’arabe,  ici dans ce projet. C’est hors de question ! C’est faire fi des raisons cognitives et pédagogiques qui sont à la base même de la théorie du recours aux langues maternelles dans l’approche nouvelle de l’apprentissage ! Non seulement ce projet fait abstraction de toute idée d’officialisation, mais remet en cause et le statut de  langues véhicules et le choix des caractères latins acquis depuis les années 70. Nous faisons face à un choix partisan qui  installe les enfants d’un même pays dans des conditions de départ  inégales et injustes d’acquisition du savoir. C’est inique et immoral ! L’injustice semble inscrite dans  l’ADN des pouvoirs mauritaniens !Enfin et surtout, les auteurs du projet de loi  parlent ‘’d’égalité des langues comme patrimoine national ‘’, mais   refusent  le caractère officiel à toutes .  C’est inacceptable ! Ce sera Identité contre Identité !                 Pour divertir l’opinion on  continue, bien sùr , à travers ce projet ,  à jouer sur l’opposition, fictive, entre le Français et l’arabe , disparue  depuis longtemps  à l’école ! Même stratégie de dupe qui s’exprime  par : ‘’ la  généralisation interviendra aussitôt que l’expérience aura été jugée probante’’ …Un piège à con !  Comme si  nous n’avions pas vécu similaire promesse, envolée en pleine expérimentation de l’ILN !  Seule l’officialisation de nos langues pourrait nous garantir la pérennité de leur usage , et nous prémunir des humeurs capricieuses de plaisantins, légion….Toute la problématique du système éducatif mauritanien réside dans son inégalité et et dans son  iniquité structurelles entre enfants devant l’acquisition du savoir. « La crise identitaire en mauritanie existe,  nous dit Maitre Taleb Khyar, en raison de plusieurs facteurs dont le plus important est l’école républicaine  {…} dans laquelle un enseignement  suprémaciste  faisant l’apologie de la superiorité d’une culture, d’une race, d’une langue sur les autres  est dispensé ». C’est exactement le cas  qui nous occupe  précisément ,  mais exprimée de façon sournoise et cynique à travers  cette loi  d’orientation  … La culture continue ‘’ d’être pensée, en mauritanie, comme un instrument de conquête et de confiscation du pouvoir’’, soulignait-il ; à des fins de domination ,d’assimilation et de prolétarisation des négro mauritaniens , devrait-il ajouter… L’agenda d’assimiler les négro africains n’est pas abandonné, loin s’en faut ! Il  explique cette  résistance acharnée et obstinée de nos gouvernements successifs à refuser toute officialisation de nos  langues nationales, à l’image du  berbère -Tamazight  au Maroc et en Algérie. C’est Identité contre Identité.
Nous sommes face à un projet non viable , qui va accentuer davantage les inégalités , sécréter deux sociétés parallèlles. Nos partenaires doivent comprendre  qu’il y a toujours  un écart entre ce qui se dit et ce qui se fait  chez nous … Nous excellons dans le faire-semblant et dans l’art de mystifier nos partenaires ou le reste du monde, même si certains partenaires internationaux ne sont pas dupes , mais optent pour la complaisance . Ces journées nationales de concertations et toute la suite sont  de la poudre aux yeux, un maquillage destiné  à faire  valider et légitimer, par un semblant  de  cachet populaire , un projet concocté et ficellé, en amont, par le ministère .La réforme scolaire préconisée  dans cette loi d’orientation  s’inscrit en droite ligne d’un  Système qui  cherche à imiter l’ordre social au  maghreb , où des  millions de  noirs, assimilés, sont rélégués aux basses besognes, à la culture de l’olive ,au  creusement de diguettes d’irrigation, au travail  de la forge ou au  débouchage d’égoûts, comme en Algérie avec près de 6 millions de noirs . Des millions de noirs , quasiment  invisibles dans la superstructure, dans tout le Maghreb… Voilà  le projet en gestation , voilà  le destin ,à moins et long terme, qui nous guette dans notre pays et que nous réservent les tenants du Système . Nous ne l’accepterons pas ! Comme nous n’accepterons pas  l’unité du cavalier et de sa monture …Nous affirmons  notre choix  pour  un pays qui accepte réellement et franchement son identité plurielle , sa diversité culturelle et ethnique .C’est  feu Yehdih qui disait ,plaidant pour l’Azawad, – ‘’ que si l’on ne peut vivre ensemble qu’au prix de l’oppression à l’égard d’une composante , c’est une position pas raisonnable qui, surtout,  n’est pas tenable’’. Trop d’injustices de nos gouvernements ! Un racisme d’Etat chaque jour plus accentué , affirmé et assumé ! Nous sommes poussés  dans nos derniers  retranchements . L’entêtement à vouloir poursuivre et préserver un ordre inique, un Système où un seul groupe ethnique  a contrôle sur tout , la main mise sur tout  est  dangereux à terme  . C’est le bon sens qui nous le souffle . ..Notre pays est à la croisée des chemins , à chacune et à chacun  de prendre ses responsabilités aux fins de redresser sa trajectoire , pour  un devenir en commun plus sain et plus équilibré .
Propositions concrètes de réajustement , pour la paix sociale :Revenir à l’esprit et à la lettre de la réforme du CMSN , à ses ambitions pour  l’enseignement de toutes nos  langues nationales  ; s’en tenir à ce principe : ‘’ le choix des langues d’enseignement dans l’Ecole repensée, au service d’une cohésion nationale apaisée, doit obéir à l’impératif d’offrir l’accès le plus efficace, surtout le plus équitable au savoir’’. D’où lever  le flou et les ambiguïtés qui  entourent ce projet  sur le statut des langues, en posant  clairement les options ci-après:                -Toutes les langues nationales sont officielles  et  toutes  sont des langues véhicules de savoir ou d’enseignement                 – Que chaque enfant démarre ses apprentissages dans sa langue maternelle                – le pulaar, le  sooninke, le wolof sont des langues d’enseignement au primaire pour les enfants non arabes, en attendant leur plein développement                    pour l’expansion au secondaire et au supérieur.               – l ’arabe est  enseignée à tous les enfants non arabophones, comme langue de communication et inversement               –  la langue arabe sera  la langue d’enseignement pour enfants arabophones                      – le Français est enseigné comme langue de communication au primaire .              – Dans les Examens et Concours il sera introduit, dès à présent,  une épreuve en langues nationales ( pulaar, sooninke ,wolof).
Au préscolaire, poser  clairement                   – que Les enfants apprendront dans leurs langues maternelles (1ere et 2ème année ), en alphabet latin pour les non arabophones                 – que l’apprentissage du Coran se fera dans des mahadras, librement  choisies par les parents d’élèves
Pour les mesures administratives et juridiques, – Réhabiliter immédiatement  l’ILN et  le  détacher du Supérieur- Associer, au plus près, la Direction première de l’ILN aux préparitfs de démarrage des travaux d’implémentation de la réforme. – Convoquer et réemployer, à titre transitoire, l’ensemble du personnel enseignant et technique disponible, impliqué dans l’expérience de 1979  de l’ILN – Sur le plan législatif, s’appuyer sur les textes initiaux de 1979,  à réactualiser au besoin .En période  transitoire :   _opérer un réajustement des coefficients, fantaisistes, affectés aux  matières en arabes qui  pénalisent  les enfants non arabophones.  _Délester les élèves de matières  et contenus  de tout ce qui n’est pas indispensable  pour la formation personnelle, professionnelle, ou pour la poursuite des études , et  consacrer l’essentiel du temps à la formation de l’esprit critique, d’analyse et de raisonnement.
Samba Thiam, Inspecteur de l’Enseignement Fondamental ,Président des FPC.Nouakchott, le 15 mars 2022.

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