FLAMNET-AGORA: Si je pouvais voter, je voterais… ( par ABOU HAMIDOU SY)
Si je pouvais voter, je ne jetterais pas mon bulletin de vote (le verbe jeter est utilisé souvent à la place de voter dans plusieurs langues africaines: Zerg en hassaniya; Sanni en wolof) Je le garderai jalousement par devers moi pour d’abord faire chanter, punir et me venger de tous ces politicards qui m’ont promis monts et merveilles la dernière fois. Ensuite je ferai le tri et le retri entre tous ces marchands d’illusions, et ceux qui auront passés a travers le tamis n’auront pas pour autant acquis ma voix, car je ne me laisserai pas avoir cette fois-ci. Des élections, j’en ai vues, mais mon sort n’a connu aucun essor contrairement au leur.
Si je pouvais voter, je demanderais des comptes à tous les élus sortants, chacun me fera son bilan, pas financier car je sais que la plus part d’entre eux ne tirent plus le diable par la queue, mais le bilan de leur mandat.
Aux députés de la majorité de m’expliquer le sens de toutes ces lois qu’ils ont entérinées par la seule volonté du pouvoir. Pourquoi ils n’ont pas eu le courage des sénateurs et s’opposer à ce referendum anticonstitutionnellement imposé.
Ils me répondront certainement qu’ils ne font que faire leur travail; voter des lois.
Je retoquerai alors non sans sarcasme: « pourquoi n’avez vous pas votez une loi qui interdit d’interdire les manifestations de l’opposition? Une autre qui criminalise tout acte qui entrave la liberté de participation des organisations des droits humains aux fora de leurs choix fussent ils en Mauritanie ou à l’étranger ? Et une qui gèle toute expropriation foncière sous quel motif que ca soit. Et enfin et surtout pourquoi ne pas voter une super loi qui prohibe formellement toute évocation du troisième mandat d’Aziz en public ou en privé ‘’ ? Qui plus est, cette évocation constitue un crime de lèse- majesté, puisque notre cher président Mohamed O. Abdel Aziz nous a toujours assuré qu’il ne fera que deux mandats. Même s’il est vrai qu’ ‘’ il n’y a jamais deux, sans trois ‘’…
Assurément, mis à part une poignée de valeureux députés de l’opposition aucun de ces revenants ne mérite ma voix, ni la majorité des nouveaux prétendants d’ailleurs. Et le spectacle auquel on assiste ces jours-ci me conforte dans ma position. Il suffit de voir les cascades de démissions qui secouent les partis politiques suite aux investitures sur les listes électorales pour savoir combien certains Hommes politiques ne sont mus que par leurs propres intérêts. Il n’est pas exagéré de dire qu’ils ont une perception mercantile de leurs mandats électifs. Et le phénomène n’est pas propre hélas, à l’UPR et ses alliés, même l’opposition n’est pas épargnée. En fait on assiste à la naissance d’une nouvelle caste d’Hommes politiques, ceux que j’ai envie d’appeler les “ wopposants” qui n’hésitent pas à laisser leur parti et les principes qu’ils défendaient pour se faire élire à n’importe prix.
Un mandat électoral ne doit pas être un privilège, ni un honneur encore moins une source de revenu. C’est un engagement plein et entier au service d’un projet plébiscité par la population et incarné par des Hommes juges aptes à le conduire. Chez nous comme dans toutes les démocraties similaires, il y a une confusion entretenue; une inversion totale des rôles. Si honneur et privilèges il y’a, ils devraient revenir aux populations, véritables dépositaires du mandat. Une fois élu, l’Homme politique n’est plus tributaire ou responsable devant son parti, il est redevable à la population. C’est ainsi que dans certaines démocraties avancées, des mécanismes sont prévus pour permettre aux citoyens de destituer tout élu et provoquer le cas échéant des élections anticipées.
En Mauritanie, certes on n’est pas encore à ce niveau, mais la population peut saisir ces occasions périodiques que constituent les élections pour évaluer ses représentants. Les questions que l’on doit se poser à la fin de chaque mandat sont très simples; mes conditions de vie se sont elles améliorées depuis la dernière élection? A part distribuer de l’argent pendant les tournées du président qu’est ce que mes élus ont fait de concret? Ce questionnement constitue un début de prise de conscience qui peut libérer nos pauvres compatriotes de l’exploitation par la majorité des hommes politiques.
Une démocratie réelle repose sur trois piliers essentiels: des institutions fortes, des Hommes politiques intègres et des citoyens engagés.
Si on ne peut pas pour l’instant libérer nos institutions de la chape du pouvoir, on peut agir au niveau des hommes et femmes qu’on est appelés à choisir. Et à mon avis les premiers critères de choix doivent être l’éthique, la probité morale et la conviction dans la cause qu’on défend. Bien qu’ils ne courent pas la rue ces hommes et femmes existent bien chez nous. Ils sont dans la véritable opposition, dans la société civile et parmi l’intelligentsia de toutes nos communautés. Malheureusement, leurs discours et leurs causes sont étouffés par le brouhaha politique général, la seule chose que notre démocratie a produit jusque là. Il est donc impérieux de les habiliter pour le triomphe de leurs idées en s’engageant à leur cotes.
Si je pouvais voter, je voterais utile. Je voterais pour tout parti qui s’engage à œuvrer pour l’unité national en permettant l’égale expression de toutes les identités qui composent la Mauritanie. Concrètement il s’agira de bannir immédiatement toutes formes de discrimination et toutes les lois liberticides qui causent méfiance et suspicions creusant ainsi le fossé entre nos ethnies.
A mes yeux, l’AJD/MR est le parti qui incarne le plus ces aspirations.
Si je pouvais voter, je voterais donc partout AJD/MR.
A ce point vous vous demandez certainement pourquoi je ne peux pas voter?
Je ne peux pas voter, car victime du génocide biométrique en cours en Mauritanie qui, par je ne sais quelle logique a décidé que toute ma famille est mauritanienne excepté moi; mais ceci n’est qu’une partie du combat.
La lutte continue !
Abou Hamidou Sy
FPC/Amerique du Nord