RESISTANCE “NATIONALE” ? PAR MARIEM MINT DERWICH
Pour revenir sur ce concept, rabâché jusqu’à la nausée, de résistance “nationale” : pour qu’il y ait ” résistance NATIONALE” il faut qu’il y ait Nation, c’est à dire ensemble politique et sociologique. Avant 1960 y a t’il eu une Nation mauritanienne? Un modèle politique, quelque qu’il soit, centralisé? Nous n’étions, pour les émirats, que mini “formes” politiques, chacun évoluant à sa manière, soit dans une sorte “d’indépendance” toute relative, soit dans une allégeance au Makhzen marocain. Nous n’avons pas une mémoire de pouvoir centralisé. Nous n’étions pas un seul et monolithique bloc appartenant à telle ou telle entité politique de la région ou de la sous région. De ce vide politique, politique entendu au sens contemporain du terme, c’est à dire un ensemble de règles, une appartenance commune, un appareil politique supra national, la colonisation française a décidé, pour X et X raisons, de créer une Nation. C’est bien à Coppolani que nous devons notre pays actuel, notre Nation actuelle. Il y a eu des actes de résistance épars, très vite victimes des guerres inter tribales et des alliances avec les Français, ces derniers devenus alliés et moyens et buts au gré des stratégies tribales. Mais ces actes là, dont les derniers furent ceux des tribus du Nord coincées entre la colonisation espagnole et la colonisation française et, plus important, ostracisés et craints par les tribus plus au Sud qui ont vu dans des alliances avec les Francais un moyen de faire plier ces gens là, ne font pas une “Résistance Nationale”. Les mots ont leur importance en Histoire. Ils ne se suffisent pas à eux mêmes. Falsifier l’Histoire au profit de l’écriture d’un roman National est un crime. Un crime contre la vérité. Un crime contre notre Nation actuelle. Un crime contre nos mémoires. Nous avons fait l’économie d’une vraie pensée de ” Qui sommes-nous? Comment créer une Nation et une citoyenneté? Comment, de ce passé chaotique, pouvons-nous nous vivre, nous entendre, nous penser?” Voilà le résultat de l’inculture généralisée, de la captation de la mémoire par des groupes politiques qui ne se pensent qu’en termes politiques venus de milliers de kilomètres et d’un autre débat important qui fut ” Qu’est-ce que la Nation Arabe?” et dont de brillants théoriciens ont débattus, intellectuels qui n’existent pas chez nous. Voilà le résultat : toute cette pathétique et mensongère agitation autour d’une résistance pseudo nationale. Et ces mêmes faiseurs d’histoire falsifiée devraient donc, soyez logiques messieurs, donner à nos rues, toutes nos rues le nom de nos fameux résistants… Ils ne le feront pas car ils déclencheraient ainsi, des “guerres” tribales. Car,, Messieurs, la mémoire est toujours là. ET vous le savez bien. De plus, cette vision tronquée et mensongère de notre passé, laisse de côté les groupes ethniques de la Vallée. Comme d’habitude. Elle ne parle pas de la vraie résistance, celle qui a vu tomber, à la falaise de Bandiagara par exemple, des hommes issus de toutes nos composantes… La falaise de Bandiagara. Là bas, au Mali actuel. Pas en Mauritanie. Vous insultez, Messieurs, les résistances ailleurs en Afrique. Vous insultez la mémoire. Vous n’êtes que des sculpteurs de nuages politisés. Pas des historiens.
Mariem Mint Derwich
Facebook – Le 5 juillet 2017
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