Que vaut l’homme politique du système ?
Les mauritaniens de toutes les classes et catégories sociales semblent de plus en plus se détourner de la chose politique.Et pour cause elle ne nourrit plus son homme.La politique au temps de Taya, était pour tous ceux qui voulaient profiter des placements financiers à des fins de propagande politique du parti au pouvoir,un sacerdoce.Les rangs qui se formaient devant les bureaux ou au domicile des barons politiques étaient impressionnants.L’argent était distribué en abondance. Chaque cadre politique avait une mallette pleine de billets de banques destinée aux laudateurs qui défilaient tous les jours. Les cadres de l’administration rivalisaient en courtisans et autres troubadours pour se faire une célébrité indispensable à leur assurer une promotion dans la haute hiérarchie politique. L’argent de l’Etat servait à fabriquer des hommes du sérail et à recruter un bétail électoral. Les barons avaient carte blanche de puiser à leur guise dans le trésor public pour élargir le parti-Etat dans tout le pays. Au détriment de l’intérêt commun. C’est dans cette anarchie qui a duré plus deux décennies, que les cadres politiques issus des rangs du PRDS et de ses satellites se sont bâtis une fortune colossale. Les chefs de tribus et autres personnalités de l’aristocratie traditionnelle disposaient d’avantages énormes auprès du pouvoir en contrepartie des services qu’ils rendaient durant les élections à Taya. Les anciennes gloires de ce système déchu n’ayant plus aujourd’hui d’entrée au palais brun ou à la primature observent un repos doré dans leurs villégiatures ou leurs résidences à l’étranger. D’autres se sont recyclés au sein de la nouvelle majorité. Nombreux sont ceux qui s’accrochent encore dans l’espoir de rebondir dans le système actuel qui garde toujours des reliques du défunt parti de l’ex-majorité. Si dans la pratique les méthodes ont changé de forme, dans le fond le commerce politique n’a pas totalement été vidé de sa substance. Certes les hommes politiques ne peuvent plus se permettre d’user de l’argent public de façon très ostentatoire, mais les nominations à des postes de responsabilité sont toujours déterminés par des critères purement politiques. Un cadre non issu des soutiens du président ne peut compter sur ses compétences pour accéder à un poste clé dans l’administration publique. Celui qui déroge à cette règle n’a que quelques délais limités pour adhérer au parti de la majorité sous la pression de ses proches ou de cadres de sa localité d’origine. On ne saurait délimiter clairement les frontières entre la politique et la technocratie. Si le pouvoir a changé de main son entourage n’a pas totalement refait peau neuve. L’UPR qui rassemble la famille politique de la majorité sert de réservoir politique pour la nomination des cadres de l’administration. Mais la commande est entre les mains de l’homme fort du pays avec quelques pouvoirs accordés au Premier ministre et des hauts gradés de la hiérarchie militaire. Les autres arrivants à la majorité ayant fait allégeance n’arrivent pas encore à se sucrer et ne sont pas toujours aux mêmes loges que les cadres du parti de Ould Abdel Aziz. Certains ne cachent plus leur impatience d’attendre depuis plusieurs mois sans rien voir venir. De façon générale, les hommes politiques du système actuel ne sont pas très « chauds » comme l’étaient les anciens barons en terme d’investissement politique. Et ce d’autant plus que les ristournes et autres dividendes qui résultaient du travail politique accompli, ne sont plus accordées avec la même attention. Si bien que les partisans de l’actuel système ont du mal à appréhender la ligne de conduite à suivre en l’absence d’une nouvelle boussole à l’aune de laquelle se repérer…
Cheikh Tidiane Dia –LE RÉNOVATEUR