Sahel : Le G5 tiendra-t-il tête longtemps à Alger ?
Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz, s’impose au grand dam des algériens comme une nouvelle pièce maîtresse dans l’échiquier de la lutte contre le terrorisme au Sahel, constate-t-on à la lumière de la rencontre qui se prépare à Nouakchott pour trouver une issue à la crise malienne.
Le président Mohamed Ould Abdelaziz, par ailleurs, président de l’Ua et du groupe dit du G5 perturbe ainsi les cartes algériennes qui se doutent que la France n’est pas loin de cette immixtion « forcenée » des autorités mauritaniennes dans la gestion du foyer terroriste le long du Sahel.
Une intrusion qu’Alger voit d’un mauvais œil mais contre laquelle elle est fait contre mauvaise fortune bon cœur en continuant à courtiser le président Aziz dans l’objectif évidemment d’éviter que l’étau ne se resserre davantage contre elle.
Mais le président Aziz sait, sans doute qu’il est pris entre plusieurs feux et qu’il faudra ménager sa monture pour aller loin en besogne. Sa préférence aujourd’hui malgré les apparences d’un rapprochement qu’Alger entretient est à l’évidence pour la France qui ourdie dans l’ombre toutes les stratégies pour le Sahel, en étroite collaboration avec ses alliés américains.
La situation quoique bénéfique pour le régime mauritanien n’est cependant pas dénuée de toute surprise. Certaines sphères continuent en effet de voir dans le rôle des autorités de Nouakchott soit un rôle trouble du fait de leur proximité avec les séparatistes maliens, ce dont elles se défendent, soit une nouvelle stratégie franco-américaine visant à contourner l’Algérie sur le dossier malien en particulier et sahélien en général avant un autre printemps encore en laboratoire pour ce pays.
Cet état de fait constitue plus cyniquement encore la relation incestueuse de la françafrique sous la gauche française désarçonnée et en perte de vitesse avec le retour fracassante du FN aux premières loges de la politique française. Un revers au Mali sonnerait certainement le glas pour une réélection du président socialiste, François Hollande qui ne convainc pas toujours les français de sa capacité à gérer son pays à lui redorer son blason.
La France qui a sauvé Bamako d’une capitulation certaine face aux terroristes d’Aqmi et des mouvements touaregs dissidents, ne serait-ce que pour cette raison présidentielle, s’est jetée de tout son poids pour cette cause.
Outre le contrat passé avec le G5 qu’elle aura aidé à réunir sous la coupole du Palais des Congrès et surveillé la césarienne qui a apporté à ses commandes le président Aziz, la France veut accompagner son « épanouissement » par la mise en synergie des efforts des 5 pays africains où ses intérêts économiques vacillent du fait de l’instabilité permanente et de la mésentente fraternelle entre plusieurs d’entre eux.
Une bien triste nouvelle pour Alger qui faisait de la lutte contre le terrorisme son créneau. Mais Aziz peut compter sur «l’amitié agissante » d’Alger pour transformer ce revers en une « exception » pourvu que le président Aziz continue de contempler les artifices sous un prisme algérien. C’est d’autant plus important que dans les rangs des terroristes sont souvent arrêtés de vieux combattants démobilisés du Polisario qu’Alger est censée avoir l’oeil.
Là est pourtant le grand danger. Car qui mieux que le président Aziz se doute que le G5, qui bénéficie de la baraka française, est bel et bien un coup de poignard dans le dos des autorités algériennes.Une manière de marcher sur les plantes bandes des officiers supérieurs algériens?
C’est dans ce cadre inéluctablement qu’il faut voir que les accords d’Alger (2006) et de Tamanrasset (1991) avec leur homme Iyad Al Ghali, devenu soudainement un chantre du terrorisme et qui -il faut bien le reconnaitre n’ont apporté que désolation et implosion pour le Mali sous la gouvernance corrompue de l’ancien président Amadou Toumani Touré– sont aujourd’hui dépassés par la tentative de Nouakchott qui visiblement a bien « dompté » le MAA (Mouvement Arabe de l’Azawd) et parvient à le faire asseoir autour de la même table que le nouveau gouvernement malien, tout en cherchant à l’éloigner de la nébuleuse terroriste.
Mais jusqu’à quand Alger va-t-elle continuer à regarder les pays voisins et notamment la Mauritanie à lui voler la vedette sur son terrain de prédilection par excellence. Elle n’acceptera donc pas à se faire «griller» la politesse et tentera de récupérer le gouvernail pour être au poste de commandement quitte à caracoler un bout avec le président Aziz derrière lequel elle voit nettement la main française.
Une situation qui si Alger l’avait accepté ainsi l’aurait depuis belle mise en branle. Elle n’avait certainement pas besoin de ponts avec Paris. Mais fidèle à sa diplomatie sournoise Alger continue de baiser la main qu’elle ne peut encore couper. C’est aussi le cadeau empoisonné que la France fait au président Aziz en boostant la mise en place du G5 au prix de fermer l’oeil sur les contestations intérieures.
J.D
Source: Mauriweb