Entre notre ambassadrice à Paris et le consul rien ne va plus : L’argent de 5.000 visas payés cash ne laisse pas de traces comptables
Notre représentation diplomatique à Paris est dans la tourmente d’une affaire pour le moins rocambolesque. L’affaire porte sur les frais de 5.000 visas payés à raison de 72 euros le visa, qui se seraient évaporés sans laisser de traces sur les écritures comptables de l’ambassade.
Depuis la fermeture du consulat de Mauritanie à Paris, en juin 2010, le service des visas a été transféré à l’ambassade, où un employé avait été chargé par l’ambassadrice, de s’occuper des visas jusqu’à nouvel ordre. L’employé en question s’est mis, semble t-il, à encaisser directement les frais de visas en cash, au lieu d’utiliser les timbres comme il est partout de vigueur. Cependant, le nouveau consul Ould El Hadj Sidi, a refusé à sa prise de service, en septembre 2010, d’hériter d’une telle situation et exigé une commission d’enquête. Le président de la république et ses collaborateurs avaient été estomaqués, lorsqu’ils se sont aperçus qu’il s’agit non d’un acte isolé, mais d’une pratique généralisée.
Le ministère des finances qui avait procédé à un vaste mouvement des comptables en poste à l’étranger, a dépêché de toute urgence en France, une commission d’enquête pour passer au peigne fin la comptabilité de l’ambassade, où de graves malversations financières ont apparemment été décelées. Notons au passage que sur les 37 représentations diplomatiques et consulaires, 24 héritaient de nouveaux comptables. Scandalisé, le chef de l’Etat a eu pour une première réaction de suspendre les visas de courtoisie pour limiter les tentations de malversation.
Pendant qu’au plus haut sommet de l’Etat le souci est plutôt de faire en sorte pour ne pas trop ébruiter ce scandale, voilà que des indiscrétions nous rapportent que le bureau du consul, M. Ould El Hadj Sidi, aurait reçu de la visite dans la nuit du jeudi 27 janvier dernier. Les visiteurs se seraient emparés de quelques documents comprenant, à ce qu’il paraît, une liste des versements effectués auprès de sa tutelle. Ils ne se seraient pas intéressés qu’aux documents comptables seulement. Dans leur forfaiture, il semble qu’ils aient fait main basse sur des bijoux en or et des pierres précieuses appartenant à la progéniture du consul. Dès que le consul fit part de son intention d’avertir la police française pour les besoins du constat et de l’enquête, explique t-on, l’ambassadrice Lematt Mint Ewnen s’y serait opposée, préférant que l’enquête soit diligentée par une juridiction proprement mauritanienne, en l’occurrence le tribunal de Nouakchott, plutôt que de mêler la police française à ce scandale dans la chancellerie. Peu convaincu des arguments de l’ambassadrice, d’autant que le consul tenait, semble t-il, à retrouver les bijoux de son épouse, la discussion entre les deux fonctionnaires de la chancellerie s’est transformée en dispute. Gênés par cette atmosphère électrique, des témoins auraient préféré s’éclipser pour ne pas encore en entendre plus.
Vrai ou faux, le consul aurait en fin de compte renoncé à recourir à la police française quand l’ambassadrice lui avoua détenir les documents disparus dans son bureau. Les accusations vont bon train tant et si bien que l’atmosphère est devenue exécrables dans la l’ambassade. Au fond ce scandale n’a pas encore révélé tous ses mystères. Trop de zones d’ombre subsistent encore.
En attendant d’en savoir plus sur ce qui agite cette ambassade à Paris, nous apprenons que la commission d’enquête aurait trouvé la valeur de quelques millions d’ouguiyas de timbres dissipés, alors que le comptable du consulat prétendait en être, en rupture. Il semblerait que la signature de celui-ci serait gelée, ce qui expliquerait par ailleurs le retard des salaires.
A l’heure actuelle, la commission d’enquête devrait être rentrée à Nouakchott amenant dans ses valises la signature de reconnaissance des faits par les concernés pour la contre valeur de frais d’émission de 5.000 visas. Ces derniers auraient prétendu que le retard des aveux est imputable à la pression que leur mettrait l’ambassadrice pour tout nier. Comprenne qui pourra les dessous de cette affaire !
Moussa Diop- LE QUOTIDIEN DE NOUAKCHOTT.