Daily Archives: 25/03/2025
Sénégal: le FMI évoque une dette «cachée» d’environ 7 milliards de dollars entre 2019 et 2024

RFI Afrique – Au Sénégal, le Fonds monétaire international affirme qu’entre 2019 et 2024 une dette d’un montant de 7 milliards de dollars environ a été « cachée » par l’administration Macky Sall, confirmant ainsi les conclusions de la Cour des comptes. Dans son rapport publié en février 2025, l’organe pointait une dette sous-évaluée et des manquements dans la gestion des finances du pays.
« Il y a eu une décision très consciente de sous-estimer le stock de la dette » pendant les cinq dernières années, affirme Eddy Gemayel à la tête de la délégation du Fonds monétaire international (FMI).
« Donc on est d’accord avec la conclusion du rapport de la Cour des comptes », continue Eddy Gemayel. Un montant délibérément « caché » qui s’élève à environ 7 milliards de dollars, selon l’institution financière et qui correspond à la différence entre les deux estimations de la dette publique.
Celle déclarée sous l’administration Macky Sall à plus de 70 % du produit intérieur brut (PIB) et celle calculée par la Cour des Comptes qui se situe à près de 100 % du PIB.
« Il y a une sous-estimation. On a une partie de la dette qui a été caché et ceci a permis aux autorités de pouvoir s’endetter plus sur les marchés, de donner un signal plus positif aux marchés financiers et aussi de pouvoir s’endetter à des taux plus favorables que ce que ces taux auraient été si la dette était plus élevée », explique le chef de la délégation du FMI.
Dans tous les cas de figure, c’est un montant très élevé qui creuse le déficit public et qui a provoqué la suspension du prêt du FMI au Sénégal. Ce programme d’aides du FMI au Sénégal, d’un montant de 1,8 milliard d’euros, est suspendu depuis que les nouvelles autorités, arrivées au pouvoir il y a un an, ont révélé en septembre des erreurs dans les chiffres officiels des finances publiques sous l’ex-président Macky Sall.
Ce prêt ne pourra reprendre qu’une fois que les autorités sénégalaises auront identifié quels mécanismes ont permis de dissimuler la réalité de la dette. Il faut également que des mesures correctives soient adoptées, assure le FMI, pour éviter qu’un tel cas ne se reproduise. Avoir un compte unique pour le trésor public par exemple, centraliser aussi les entités en charge de la gestion de la dette.
Le FMI devra ensuite décider dans les semaines qui viennent si le Sénégal décroche une dérogation ou si l’institution internationale demande à Dakar de rembourser ce qui a déjà été prêté par le FMI avant de reprendre un nouveau programme. La décision sera prise à Washington, au plus tôt, début mai.
Avec notre correspondante à Dakar, Léa-Lisa Westerhoff
RFI
LIVRE BLANC : dialogues, leurres et lueurs. Par Pr ELY Mustaphav – DEDICACE

Pr. ELY Mustapha — « Mon fils était brillant, il aimait l’école et voulait devenir ingénieur. Le jour de l’accident, il était si content car il devait recevoir un prix pour ses bons résultats. Puis le toit s’est effondré…”
A Mme Aïcha, mère de Moussa,
l’un des enfants tués lors de l’effondrement de l’école de Dar El Barka
Victime d’une gouvernance qui se perpétue par le Dialogue.
Un Livre, des illusions et de l’espoir
J’introduis, ici, ce livre blanc commencé il y a bien longtemps et muri par des articles et essais successifs qui, publiés sur mon blog et dans les médias nationaux et internationaux en constituent la chaine et la trame.
Aujourd’hui et au crépuscule d’un paradoxe, soit celui d’une nation qui, depuis près d’un demi-siècle, cultive l’art du dialogue comme rituel politique, étouffe méthodiquement la voix de son peuple, je publie ce livre blanc.
Ce livre blanc n’est ni une chronique de plus sur les échecs mauritaniens, ni un pamphlet vengeur.
C’est une radiographie que j’ai voulue sciemment critique, du fait de la gravité de la situation, d’un système où le dialogue, promesse de démocratie, s’est mué en outil de domination.
Imaginez un paysage politique où chaque décennie apporte son lot de tables rondes, de concertation nationale, de feuilles de route – des mots nobles vidés de leur sens.
Derrière ces termes se cache une réalité brutale : depuis le coup d’État de 1978, la Mauritanie a connu 14 processus de dialogue officiels, tous aboutissant au même scénario. Des opposants se transforment en complices, des révoltes s’éteignent dans des compromis truqués, et le peuple, spectateur impuissant, voit ses espoirs s’évaporer au rythme des déclarations solennelles.
Je pars d’un constat cruel : 45 ans de dialogues n’ont produit aucune alternance politique, aucune réforme structurelle, aucune justice pour les maux qui frappent le pays et ses habitants et moins encore pour ceux criants des victimes de l’esclavage ou des purges ethniques. Pire, ils ont permis à des régimes successifs de se recycler en « garants du consensus », tout en maintenant intactes les racines de l’autoritarisme.
Ce travail s’ancre dans les récits des oubliés : ces jeunes diplômés au chômage qui ironisent sur les « accords entre costards », ces femmes haratines exclues des négociations, ces opposants emprisonnés pour avoir refusé de jouer la comédie du dialogue.
Notre approche combine trois grilles de lecture :
1. L’histoire critique : De la junte d’Ould Salek (1978) aux « Assises pour la Réconciliation» de 2023, je retrace chaque dialogue comme un épisode d’une série tragique où le pouvoir réécrit les règles du jeu à son avantage. Pour entretenir la mémoire contre l’oubli, pour les jeunes générations et pour l’Histoire qui est le premier témoin des errements humains.
2. Le miroir africain : En confrontant l’expérience mauritanienne à celles d’autres pays, tels le Tchad, le Congo pays que j’ai visités, je montre des mécanismes communs de confiscation du politique par les élites.
3. La théorie politique : Toute démarche pratique qui ne puisse être éclairée par un processus intellectuel théorique éclairant ses constats aux fin de compréhension et de partage est limitée Aussi de la « démocratie autoritaire » (Levitsky & Way) au concept de «résilience autoritaire » (Heydemann), j’essaie de décrypter comment les régimes mauritaniens ont détourné les outils démocratiques pour survivre.
Mais ce livre blanc va plus loin. Il démontre comment ces pseudo-dialogues ont hypothéqué le développement du pays :
– En détournant l’attention des urgences sociales (31% de pauvreté, 25% de chômage des jeunes).
– En légitimant un système économique de prédation (50% des richesses contrôlées par 0.3% de la population).
– En alimentant les fractures identitaires (discriminations persistantes contre les Haratines et les Négro-Africains, qui apparaissent tant dans la répartition des richesses que dans les droits aux emplois publics).
Ce travail est aussi un acte de foi. Je crois qu’en démontant les rouages de cette machinerie du faux-semblant, je participe humblement à éclairer la nécessité de renforcer une véritable démocratie par le bas.
Les pages qui suivent ne se contentent pas de critiquer positivement – elles esquissent les contours d’une citoyenneté consciente, nourrie par les leçons amères du passé et les aspirations d’une génération connectée, lucide, et déterminée à briser le cycle.
À toi qui tiens ce texte, ce livre blanc, – citoyen désenchanté, militant découragé, diplomate désireux de comprendre -, je te dis ceci : Ceci n’est pas un livre sur la Mauritanie, mais sur la condition humaine aux prises avec le pouvoir. C’est l’histoire d’un peuple qui, malgré les trahisons répétées, refuse d’abdiquer son droit à rêver.
C’est une plongée au cœur des leurres et des lueurs de la Mauritanie politique, à travers un dialogue, miroir aux alouettes, qui est la preuve manifeste et intangible des dégâts qu’il cause au devenir et au développement du pays. Et qui est, au-delà de ces aspects critiques, une offense à la conscience de tout un peuple.
Que ces pages soient à la fois un miroir, un maillet pour briser les illusions, et une boussole pour ceux qui osent imaginer l’impensable : un dialogue qui libère au lieu d’asservir.
La justice n’est pas un cadeau des puissants, disait si justement Me Fatimata M’Baye, mais une conquête des peuples. (Me Fatimata M’Baye, Avocate mauritanienne des droits humains. Discours à Genève, 2019)
Lien de téléchargement libre du livre :
Pr ELY Mustapha