Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

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Mauritanie : Interview exclusive de Samba THIAM à KASSATAYA

« L’accord UFP-RFD- ressemble à du déjà vu, un fourre-tout où s’enchevêtrent questions de fond, questions superficielles et techniques qui relèvent d’axes programmatiques de parti ou de ministère »

 Samba Thiam, président des FPC

kassataya  – Le président des FPC réagit sur l’accord tripartite UFP-RFD et INSAF, un document politique qui ne fait pas l’unanimité des Mauritaniens. Pour Samba Thiam il ne parle plus de crise politique mais juste de contentieux électoral à régler. Le chef historique du premier mouvement de libération africaine de Mauritanie s’est confié exclusivement à Kassataya pour revenir aux leçons des élections 2023 qu’il qualifie de mascarade électorale où un opposant homme politique et non politicien ne peut gagner sans faire allégeance au système. Samba Thiam est revenu sur son engagement dans des alliances sans calcul mesquin encore moins d’agenda caché avant de considérer la tolérance zéro édictée par Ould Ghazouani au gouvernement comme un simple slogan. Le leader charismatique de l’opposition n’est pas également indifférent au coup d’Etat du Niger.

« Je trouve la démarche inadéquate, quelque peu inélégante, à la limite de la maladresse. En effet, comment compter rallier à cette initiative d’autres fractions de l’opposition, mises devant le fait accompli – qualifiées de surcroît comme elles l’ont été- en plus d’un droit de propriété assumé avec discourtois… »

kassataya : quelle lecture faites-vous de l’accord tripartite entre UFP et RFD et INSAF ?

Samba THIAM : je m’interdis, en général, par principe, d’intervenir sur des questions ou des situations pour lesquelles je n’ai pas d’informations précises, vérifiées. J’ai lu ces derniers temps, comme tout le monde, un texte repris dans les réseaux sociaux sujet à polémique…Si je devais donc m’avancer à son propos ce ne serait qu’au conditionnel. Est-ce qu’il existe ce texte ? et son contenu est-il endossé par les présumés auteurs ? Si oui, alors mon commentaire porterait d’abord sur son objet, c’est -a- dire la reprise d’un dialogue -concertations qui, dit-on, aurait été suspendu pour des raisons de calendrier électoral.

En vérité, il fut abandonné, de façon unilatérale et péremptoire par la Présidence de la République, bien avant toute échéance électorale et sans que l’Opposition et même la majorité ne fussent consultées ; opposition qui, du reste, manifesta alors, diversement, son mécontentement. Le risque encouru ici, c’est justement de retomber dans les travers du dialogue précédent qui avait été arraché, presque forcé …toute chose qui explique son échec.

Maintenant pour en venir au contenu, il ressemble à du déjà vu ; un fourre- tout où s’enchevêtrent questions de fond, questions superficielles et techniques qui relèvent d’axes programmatiques de parti ou de ministère. Le document ne parle plus de crise politique, notons-le, mais juste de contentieux électoral à régler… Il y a à dire également sur l’attitude courroucée post-électorale adoptée (Manif et déclaration cinglante) en raison du scrutin décrié et, tout d’un coup, cette volte-face soudaine, surprenante, comme par ramollissement, qui sonne comme un flop !

Certains parmi nous de l’opposition donnent l’impression, parfois, d’avoir tellement subi et souffert sous ‘’la décennie ’’passée…que chat échaudé craint l’eau froide. Composer à tout prix et non pas s’opposer, quelle que soit la politique chauvine et pernicieuse menée par le Pouvoir, est devenu une option … N’empêche, nous nous devons, malgré tout, de respecter la ligne et les choix de chaque formation politique, lui reconnaître la liberté, le droit et la latitude de porter des initiatives propres, qu’ils jugent opportunes, avec la précaution toutefois de ne pas le passer au nom de toute l’Opposition.

Enfin pour la forme, je trouve la démarche inadéquate, quelque peu inélégante, à la limite de la maladresse. En effet, comment compter rallier à cette initiative d’autres fractions de l’opposition, mises devant le fait accompli – qualifiées de surcroît comme elles l’ont été- en plus d’un droit de propriété assumé avec discourtoisie ? Au juste, qui ‘’cherchent à entraîner le pays dans l’instabilité voire dans le chaos’’ ? Les tenants du Système avec leur politique chauvine, raciste et funeste ou les victimes de l’oppression en tous genres ? Non content de brimer les victimes, il faut encore chercher à les culpabiliser ! Cela étant, pour conclure, un dialogue politique sincère, sous-tendu par une volonté politique réelle est à prendre, toujours. Depuis 1986 nous le demandons, en vain. Toutes les guerres, même les plus féroces, finissent, généralement, sur la table de négociation…

« C’est toute la pyramide de l’administration qui s’est écroulée avec l’avènement des militaires…. »

kassataya que vous inspire la tolérance zéro édictée par Ould Ghazouani pour les manquements du gouvernement aux programmes prioritaires ?

Samba THIAM : c’est juste un slogan, rien de plus, parce qu’il n’en a pas les moyens, à moins de relever tous les agents de l’Etat. Il ne comprend pas que c’est toute la pyramide de l’administration qui s’est écroulée avec l’avènement des militaires. Abdallah Sidya Ebnou l’a bien expliqué dans ses mémoires. C’est le désordre partout ; chacun fait comme bon lui semble, embauche rien que sa parentèle et sert sa tribu. Relevé aujourd’hui pour être nommé le lendemain, avec de surcroît, une promotion ! Il n’y a ni suivi, ni contrôle, ni sanctions, d’où l’anarchie générale qui règne. Cette administration, pour se redresser, aurait besoin d’une tutelle de longue durée d’anciens commis de l’Etat modèles.

Notre Raïs n’a pas les moyens de sa politique pour manquer de vision, de connaissance des hommes, de perception claire sur les véritables maux du pays et l’ordre de priorité des choses. D’où l’instabilité du gouvernement constatée au vu des changements multiples à la tête de certains départements, par trois à quatre fois, en l’espace de quelques mois ! Enfin ce Président n’échappe pas, comme beaucoup parmi nous, à l’emprise de son milieu ; comme pour la plupart, il demeure produit et prisonnier de son environnement, prototype de ‘’ l’homo-mauritanicus’’. Le désert façonne à sa façon, tout comme la savane …Pour se distancier de cette entrave, Souleymane B Diagne -philosophe- rapporte deux idées importantes qui y participent : ‘’savoir penser contre soi’’ ; ‘’se déprendre des significations immédiates dans lesquelles nous retiennent la culture et les religions’’.

kassataya :  Pour revenir aux élections de 2023. Quelles leçons tirez-vous de l’échec aux législatives ?

Samba THIAM : C’était un test, sans grande attente en réalité, mais qu’il fallait passer. Je ne le perçois pas comme un échec comme vous semblez le poser. Quelle leçon ? Si ‘l’on devait comparer les pays africains dans leur résistance à enclencher la démocratie , au regard de l’opacité des élections , des pesanteur et des insuffisances notoires à ce sujet, la Mauritanie serait classée dernière …Ici on assiste, comme nulle part ailleurs, à l’achat massif des consciences, ouvertement encouragé par l’Etat et le parti au pouvoir, aux ’intimidations et menaces , à la chape tribale ,au carcan ethnique, au contrôle exclusif du ministère de l’intérieur en amont et en aval du processus électoral qui s’arroge le droit et la force de priver les opposants jusqu’aux PV des dépouillements du vote ! On ne peut pas parler d’élection mais de mascarade en Mauritanie ; un opposant ne peut pas gagner avec ce type d’élections à moins de faire allégeance au Système.

Quand les véritables conditions pour un jeu démocratique transparent seront un jour instaurées, alors nous gagnerons…S’y ajoute que le parti FPC reste particulièrement ciblé ; la peste en un mot ,au vu de ses déboires : un récépissé de reconnaissance arbitrairement refusé ,un contentieux juridique bloqué voilà 9 ans, six candidatures aux municipales et législatives dont certaines étaient nettement favorites ,toutes recalées , un chef de parti ,enfin ,ancien fonctionnaire de l’Etat, privé jusqu’à ses droits naturels à pension ; le seul des anciens détenus politiques de Walata à voir sa situation administrative irrésolue .Et dire que ce Président avait promis de solder les injustices … Pas même les plus flagrantes ! Reconnaissez-nous donc cet environnement particulièrement hostile.

« J’ai toujours dit que j’étais un homme politique et non un politicien »…

kassataya :  des compatriotes vous reprochent votre stratégie de consentement aux différentes coalitions auxquelles les FPC ont consenti pour aller vers des élections. Quelle analyse faites –vous de ces critiques ?

Samba THIAM : pour ma part, je me suis toujours engagé dans des alliances sans calcul personnel mesquin, sans agenda caché, mu essentiellement par la grande cause, l’intérêt général … Et comme je reste fidèle à cette posture ou manière d’être, on peut craindre que les désillusions ne soient pas près de s’arrêter pour nous. J’ai toujours dit que j’étais un homme politique et non un politicien…

kassataya : que vous inspire la situation au Niger ?

Samba THIAM :  elle me préoccupe au plus haut point comme tout progressiste et bon panafricaniste . Pour l’instant elle est dans l’impasse. Laisser passer ce coup d’Etat, c’est encourager d’autres coups d’Etat qui consacrent un recul démocratique en Afrique de l’Ouest, voire dans tout le continent. Ne pas intervenir, pour la CEDEAO, c’est perdre la face ; intervenir comme elle le voudrait c’est faire courir à la sous-région entière un risque élevé de déstabilisation. Je pense, par ailleurs, qu’il faut distinguer les coups d’Etat ; il y en qui sont légitimes comme celui du Gabon intervenu récemment, celui de Guinée où hélas, le putschiste commence à suivre les pas de Condé…Rien ne justifie à mon avis celui du Niger qui tombe comme un tonnerre sous un ciel serein.

Des chefs d’Etat qui oppriment leurs peuples, mettent à mal l’unité nationale, ne veulent pas de l’alternance au sommet de l’Etat doivent partir… Ma petite idée est qu’on devrait tenter, pour sortir de la crise au Niger, ce schéma : Libérer le Président Bazoum, procéder dans un délai de 3mois au retour de l’ordre constitutionnel, par l’organisation d’une compétition électorale supervisée par un gouvernement d’union nationale civil et un CENI consensuel, ; une compétition électorale ouverte à tous les partis et acteurs politiques, y compris le général putschiste, devant démissionner de l’armée.

En tout état de cause, quelle que soit l’issue de ce scrutin, le retrait de la France, à défaut d’une remise en cause rapide et profonde de ses relations avec l’Afrique noire, sera inévitable, au regard de la pression populaire que personne ne pourra plus esquiver. Je n’ai pas de problème avec ces généraux dans leur posture vis-à-vis de la France, mais ce que je stigmatise c’est leur politique d’épuration ethnique, ouverte et manifeste, les violations massives des droits humains, le musellement de toute voix discordante. Enfin il ne faudra pas que nous chassions un maître pour un autre maître …qui ne dit pas son nom… Ce que les peuples demandent aux généraux c’est de remettre les choses à l’endroit et de s’en aller, exactement à la belle manière de Rawlings, et non pas s’incruster.

Propos recueillis par Chérif Kane, journaliste à Rouen (France)

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M. Samba Thiam président des FPC et candidat à la députation de la coalition CVE-CVE/VR à Nouakchott ouest: ‘’Que peut-on espérer d’une opposition incapable de s’entendre sur le principe élémentaire d’une CENI indépendante ?’’

Le Calame : Commençons si vous le voulez bien par cette question d’actualité tragique : –Apres avoir été arrêté et conduit au commissariat de Sebkha Oumar H Diop y décède, dans la nuit du 29 mai, suite semble-t-il à des tortures. Ce meurtre intervient quatre mois après celui de SOUVI Cheibany .. Que vous inspirent ces  meurtres ?

M. Samba Thiam: Je suis tout simplement sidéré. Comme si nous voulions copier la police des USA ! Deux meurtres déjà sous le Président Ghazouani, en quelques mois  ! Quelle différence entre  ce que nous vivons et ce  qu’Israël fait subir aux Palestiniens ?  Politique d’occupation, exécutions régulières, limitation dans les déplacements en zones Sud, exclusion …Et Lorsqu’on parle d’Apartheid, certains  hommes politiques hypocrites  s’offusquent ! Le développement séparé –sens de l’Apartheid -est encore mieux pour nous aujourd’hui , car lui  au moins  a l’avantage d’être institué ou déclaré ! Mais le plus écœurant

dans tout ça  c’est l’indignité d’une partie de notre peuple. On tue vos enfants et vous votez INSAF …en majorité ! Un fils de M’bagne tombe mais  M’bagne, vote quand même  pour Insaf,.. Comme avec Abass !

 Je termine en exprimant ma profonde compassion à la famille éplorée souhaite que la mort de jeune ne soit pas vaine. Il est mort, mais le combat continue.

-Les partis de l’opposition démocratique ont dénoncé, à travers un grand meeting, les résultats  du 1er tour des élections locales du 13 mai dernier. Dans la foulée, ils réclament la reprise des élections. Pensez-vous que ce meeting a été un succès ?

Je n’ai pas été à ce meeting pour n’y avoir pas été invité. Je ne puis donc en juger, pour vous dire  s’il a été un succès ou un échec dans son organisation ou dans ses objectifs ;  j’ai  oui dire qu’une rencontre se tenait  à la CENI de laquelle rien n’est  encore sorti  que je sache, du moins pour l’instant …Visiblement la CENI semble continuer son chemin … Quant au contenu  des dénonciations rapportées du meeting, j’y souscris entièrement ; même si  je remarque, curieusement, que cette Opposition passe  sous silence, et toujours, le caractère mono-ethnique, frappant, de l’encadrement des bureaux de vote à Nouakchott, et peut-être ailleurs. Ce manquement  est aussi grave, sinon plus grave que tous les autres manquements pour faire fi de notre diversité. Ould Maouloud souligne quantité  d’insuffisances et de manquements liés à ces élections sauf celui-là ; et il n’est pas le seul ! Comme pour  valider, implicitement,  un ordre ou  cette politique funeste  de discrimination ethnique, disons  de négation des uns, du président Ghazouani. Ces meetings et conférences de presse,  tenus récemment, qui  ne s’adressaient qu’aux hassanophones, au mépris de notre diversité culturelle et linguistique, ne font pas mieux…

 Face à ce que l’opposition considère comme le début d’une crise électorale, laquelle pourrait générer une crise politique, une rencontre a réuni les partis de l’opposition, la CENI  et le ministère de l’intérieur. L’objectif est de trouver un compromis autour du différend électoral. Y croyez-vous ? La coalition CVE-CVE/VR dont vous êtes membre pense-t-elle que le pouvoir et la CENI  accepteraient l’annulation  des résultats, ne serait-ce qu’à Nouakchott et à  Boutilimit, comme réclamé par l’opposition ? En cas de refus, que doit-elle  faire ?

 Si je crois que cette rencontre aboutira à un compromis, me demandez –vous ? j’ose l’espérer  sans trop y croire toutefois, au vu d’un  constat amer qui est celui-là : le président Ghazouani, depuis son installation, comme  par  magie, tient  doucement par la main un pan entier de l’opposition. Groupe qui se sent, semble- t-il,  un peu  trahi  dans son allégeance, tacite, avec ces élections. Si ce groupe se reprenait  et que l’opposition se ressaisisse  et  décide, résolument, de jouer pleinement son  rôle, alors on pourrait y croire. Mais une Opposition qui n’a pas été capable de s’entendre  sur le principe élémentaire  d’une CENI  indépendante, que peut-on en espérer ? Restons malgré tout optimiste et ne remuons pas trop le couteau dans la plaie. Si donc cette  opposition  revenait à la raison et faisait bloc tout devient  possible. La difficulté de la chose – et cela le Pouvoir ne le comprend que très bien- réside, hélas, dans cette  confiance, érodée, sans compter des intérêts qui divergent. Comment, sous la pression du temps et des humeurs, colmater  tout ça  en perspective de la présidentielle toute proche ? C’est toute la question !

-Quelques 48 heures avant la tenue du meeting de l’opposition, le député Biram Dah Abeid a été arrêté par la police  puis libéré, le lendemain. On l’accuse d’avoir incité à la violence, au cours d’une conférence de presse. Qu’avez-vous pensé de cette arrestation ?

Biram est un opposant politique que je respecte et  pour lequel j’ai beaucoup  de considération .Et il le sait. C’est une lapalissade  que de dire  que nous appartenons, tous deux,  au camp des opprimés …Je ne puis donc, ne serait-ce qu’à ce titre, ne pas  m’ériger contre son arrestation ; même si la forme du propos prêtait à réserve. La colère, disait un psychologue, est un moment de folie. En effet, on sentait sourdre dans sa sortie beaucoup de colère, légitime disons-le,  de la révolte, engendrée, je crois, par  des  attentes déçues, de la frustration, signant la fin d’un amour  de circonstance  fabriqué  et savamment calculé. Par ailleurs, vous le savez, je suis opposé à tout arbitraire, d’où qu’il vienne ; or cette arrestation relève de l’arbitraire. Tout comme celle de Mohamed Delhahi qui, pour l’heure, est injustement soumis au contrôle judiciaire.

-Vous n’avez donc pas été élu député, comme vous et vos soutiens espériez. Dans l’un des audios  que vous avez fait circuler au lendemain du scrutin, vous  avez déclaré que vous ne vous  faisiez pas d’illusions. Pouvez-vous  nous dire pourquoi ?

Je dois d’abord vous faire remarquer que  je n’ai pu, à la fois, espérer  et être sans illusions, comme vous semblez le poser .. Soit  j’espérais être élu , soit je ne me faisais pas d’illusions.  La vérité, comme je l’ai exprimé dans l’audio en question, est que je ne me faisais,  effectivement, pas d’illusions sur  l’issue du scrutin ;  pour différentes raisons. Mais avant d’entrer dans leur  énumération, j’aimerais redire que j’ai été candidat par la force des choses ; ça dit ce que ça dit ,décodez …

l’Ajd, que  je remercie au passage, nous a  donné l’opportunité de participer à ces élections. Il allait se saisir de cette opportunité, malgré toutes ses limites.

Le choix de la voie politique, à la différence de l’autre voie,  implique, pour un parti politique, d’aller aux élections, de compétir pour la conquête du pouvoir ou d’une parcelle de pouvoir. Même si les conditions optimales ne sont pas  réunies. Et elles le sont rarement  en Afrique. Approche discutable, dira-t-on ;  je le reconnais.  Boycott  ou participation, ce sont là des options sujettes à controverse, avec  chacune des partisans, avec  chacune sa  vérité, insaisissable, à l’image  des kérygmes.

Maintenant pour revenir aux raisons  que je ramasserai, je nommerai en premier l’hostilité marquée du pouvoir à l’endroit des  FPC  et de leur Président, que traduit une peur bleue à nous offrir cette reconnaissance légale  qui nous permettrait d’approcher librement  des populations, intoxiquées par des années de campagne de diabolisation qui ne nous lâche pas. Le contentieux qui  oppose les FPC au gouvernement,  oublié par la cour Suprême voilà huit longues années, puis  mon dossier administratif personnel,  le seul à rester pendant pour les anciens prisonniers politiques de Walata -, sont là pour le prouver.  S’y ajoute  l’espace réduit de Nouakchott-Ouest, doublé d’un électorat  ayant subi des ponctions  pour les besoins  de soutien à nos candidats de l’intérieur. Je crois, sans trop ‘’surfer’’ sur l’égo,  que je pèse quand même un peu plus que le poids des chiffres que l’on m’octroie. Sans fausse modestie. Vous allez sûrement objecter que cette contrainte ou ces conditions frappaient  aussi  les autres  candidats  pour Nouakchott – Ouest ! J’en conviens. Autre raison – pour vous aider –  qui s’imposa à tous, l’Administration  qui mobilisa ses ressources humaines, matérielles et financières au profit du parti au pouvoir. Je n’ai pas cité les intimidations, le trafic d’influence, l’achat des consciences  maintenant banalisé et le bourrage des urnes, bien entendu !

Enfin, – et c’est le plus important- ne perdez  surtout pas de vue  que la CENI – prolongement  du ministère de l’intérieur – ayant emporté les procès verbaux  refusés  aux représentants des partis comme le prévoit la loi,  avait procédé, toute seule, au dépouillement, comme bon lui semblait …L’on devine alors aisément  sur qui  se porterait son choix  dans le lot  des  candidats  en lice. Qui parmi nous  à Nouakchott -Ouest, pensez-vous, constitue pour ces gens-là  le mouton noir du groupe  ? Il n’est  pas besoin d’être devin pour le savoir. C’est donc tout cela qui m’amena  à dire que je ne me  faisais pas  d’illusions. Mais demain il fera jour, inexorablement.

-Quels enseignements vous tirez de ces élections locales ? Partagez-vous le sentiment de ceux qui disent que les élections ne règlent pas les problèmes pour lesquels vous vous battez ?

Ces élections enseignent que nous sommes toujours dans une république bananière. Aujourd’hui plus qu’avant. Que ces régimes militaires, masqués, ne nous feront jamais entrer dans l’ère  démocratique, sans  résistance,  âpre, de notre part. Oui, je partage ce point de vue ; tant que ce sont des militaires, déguisés, qui sont au pouvoir le changement n’est pas pour demain. Telle est ma conviction intime. Dire donc, comme  le prétendent  certains,  que des élections sous des régimes militaires n’apporteront pas le changement escompté n’est pas  faux…

Au titre d’une évaluation globale, je puis dire, sans exagération aucune, que les candidats de l’opposition en général et des FPC en particulier n’ont pas démérité…Malgré la force d’une machine de guerre rôdée à la fraude, massive, qui nous était opposée. Nous avons tenu bon,  à l’intérieur comme à l’extérieur,  en dépit d’un  rapport de force inégal.  Nous avons été, ici ou là, toujours face au parti au pouvoir ou à son autre versant … Experts en duperie, les tenants du Système tentent, à nouveau, de mystifier,  l’opinion nationale et internationale par l’organisation d’un second tour avec un  semblant de transparence … De qui se moque-t-on ?

-Lors d’un point de presse que vous avez tenu au lendemain du scrutin du 13 mai, on a noté la présence du président de IRA, M. BiramDahAbeid. Comment avez-vous accueilli cette présence ? Les victimes du «système » pourraient-elles se retrouver sous peu ?

Mais toujours avec plaisir, naturellement. Il dit  venir nous témoigner  sa solidarité et sa compassion ; ça ne se  refuse pas. Nous  ne pouvions  que nous  en réjouir…Que les victimes du Système se retrouvent, dites-vous, c’est souhaitable  et  même urgent et vital pour  ces victimes-là. Mais cette alliance, si elle devait renaître, devra éviter les embûches du passé,  se bâtir  sur la franchise, la confiance sincère entre partenaires,  la constance dans la  résistance aux chants des sirènes et aux appâts de toutes sortes. Elle devra, enfin,  reposer  sur  une plateforme minimale, requise.  Pour ma part, j’ai toujours milité et souscris à ce que disait cet homme politique : ‘’ la lutte en ordre dispersé n’a pas d’autre effet que la défaite pour tous ’’.

– Quelles sont les perspectives d’avenir de la coalition CVE-CVE/VR ? Pourrait-elle s’allier avec le reste de l’opposition démocratique pour une candidature unique à la prochaine présidentielle ?

 Il faut espérer que cette Coalition se poursuive, pour  la raison (citation) que j’évoquais plus haut. Raison de bon sens. Concernant  la  question de candidature unique de l’opposition, elle  n’a pas été encore discutée en notre sein …Mais, personnellement,  je pense que les enjeux du moment le demandent, même si…

Je ne sais si, à travers vos colonnes, je puis exprimer toute ma reconnaissance à tous ceux-là qui se sont investis, à leur manière, dans cette campagne, en notre faveur .. A mes amis et  parentèle, à tous ces sympathisants du parti, j’exprime toute ma gratitude. Aux militants des FPC, enfin,  que je félicite vivement,  je dis merci, au nom de tous nos candidats du parti qui n’ont pas démérité.

Demain il fera jour. Il faut y croire.

Propos recueillis par Dalay Lam 

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Appel de Djéol, du berger à la bergère ….

Par Samba Thiam 

Au regard de la situation actuelle grave que traverse notre Pays, à la croisée des chemins, je souhaite, face aux  défis et menaces qui planent, que  nous soyions tous animés par une volonté réelle d’y faire face, en vue de  trouver des solutions. Pour ce faire, nous devons nous parler honnêtement, sincèrement. Face à nos responsabilités historiques devant ce tournant  décisif de notre pays, nous  nous devons  d’oser voir les problèmes, d’oser les affronter, objectivement, honnêtement , sincèrement, oser, courageusement, crever enfin l’abcès  …

I-Diagnostic

a- Historique : en 1958,  nous nous sommes retrouvés à Aleg pour dire, en majorité, non aux convoitises marocaines qui ne furent pas sans convulsions, non à l’intégration au Mali ou au Sénégal, avec pour chaque option des partisans. Nous  avons dit  Oui pour la Constitution d’une Mauritanie où  Blancs et Noirs acceptent de sceller leur destin face à l’avenir, c’est-à-dire de  vivre ensemble. Pour être juste  les Haratines n’étaient pas alors intégrés à cette équation  dont ils constituent aujourd’hui un des  paramètres essentiels, après une longue et âpre lutte  pour leur émancipation.

Nous nous  sommes donc engagés dans cette aventure passionnante avec optimisme, mais à la va-vite, sous la pression des évènements et de la France, sans définir les bases de la coexistence entre ces entités qui vont constituer la Mauritanie. Sans dresser les contours de notre unité ou du vivre-ensemble, devenu problématique.     

Ce fut le raté d’Aleg, qu’il faut aujourd’hui tenter de rattraper…

 Pour se faire, nous devons, à travers ces assises, procéder à un diagnostic sans complaisance des choses, nous parler franchement,  sincèrement, sans langue de bois habituelle, animé chacun, encore une fois, par une volonté réelle de trouver des solutions justes  et équilibrées aux problèmes qui minent ce vivre-ensemble.

Ces problèmes devenus structurels, s’aggravant chaque jour un peu plus, se déclinent  en exclusion marquée, en discriminations flagrantes, en inégalités multiformes, en raison de  l’hégémonie, de facto, d’un seul groupe ethnique, à travers son noyau. Une seule composante nationale, à travers son élite, contrôle tout, monopolise tout, détient, seule, la réalité du pouvoir ! Nous sommes face  à ’’ l’hégémonie d’une langue, d’une culture , d’une race sur les autres’’, par option politique ! Les autres sont réduits  en de simples consommateurs, en éléments d’appoint , au plus. Les quelques exceptions à la règle sont  là comme des faire-valoirs pour masquer le  Système et mieux le pérenniser, des objets de vitrine pour mystifier la communauté  internationale et masquer  la réalité mauritanienne concrète ! 

 Notre Unité est minée par trop d’injustices, trop d’inégalités ; inégalité dans la représentation parlementaire , inégalité dans  les Forces armées et de sécurité, dans l’accès aux emplois, dans l’accès aux ressources, dans les  médias qui véhiculent quasiment une culture, une seule,  à la quelle il faut formater les autres . Nos enfants n’ont plus les mêmes chances et les mêmes opportunités à l’école  comme  à l’ère pré et post- indépendance…Le  patronat est quasi monocolore, la Fonction publique  purgée, suite aux évènements de 1986 et 1989 . 

Trop d’injustices, trop  d’inégalités…Inégalité politique, inégalité sociale, inégalité raciale …

Dans les régions Sud, pourtant densément peuplées, l’Etat se retient  depuis 1960 de créer des projets sérieux, viables, ou  se garde d’exploiter les ressources du sous-sol pourtant identifiées, parce que ces populations du Sud seraient soupçonnées de nourrir des velleités  séparatistes; et cela  de l’aveu même de quelque  responsable de la haute administration  en charge,  il n’y a pas si longtemps. Même l’Hymne National, censé fouetter le patriotisme chez tous et chacun, ignore totalement et délibérement notre diversité, comme par mépris  … La ‘’fraternité’’ et la  ‘’justice’’ sur lesquelles  repose   notre Devise sonnent bien mais ne fonctionnent pas ; ce sont de simples slogans !

Cette situation d’injustices cumulées a eu pour conséquence de créér  un climat de méfiance profonde entre nos communautés. Nous vivons désormais côte à côte, en nous tournant le dos. Notre Unité est aujourd’hui  gravement compromise  par des lignes de fracture profonde. Toutefois je crois, qu’en dépit des crises graves et récurrentes de notre unité, il n’ y a jamais eu, que je sache , de remise en cause du devenir en commun, de notre volonté  de rester ensemble. Il a été plutôt question de réaménagements, de réajustements, de réforme profonde pour une cohabitation plus harmonieuse, mais jamais de remise en cause du vivre-ensemble lui même…

Tout n’est pas perdu,  malgré qu’une partie importante a céssé de croire que l’Etat était le sien…Il suffit de nous ressaissir. 

L’heure est venue de remédier à ces manquements graves et corriger ces nombreuses injustices qui  minent notre vivre-ensemble, en lambeaux , pour conjurer les périls futurs , dans notre intérêt à tous, car l’ordre actuel imposé n’est pas viable; Il n’est bon pour personne, à terme … Les hommes de bon sens et de raison peuvent comprendre qu’il conduit à l’impasse pour ne pas dire au désastre…Il y va  du devenir du pays, de son existence même, en tant que pays ! Nous avons l’obligation morale, pour les générations futures, de nous arrêter un instant, de repenser notre vivre-ensemble à travers un pacte national, ou mieux , une Charte Nationale, aux dessus des contingences partisannes,  qui régirait cette unité, aujourd’hui fortement compromise.

II- Quelles solutions après ce diagnostic posé ?

Il existe deux types de solutions; il y a celles qui relèvent d’un changement dans l’attitude mentale, puis celles qui touchent à la réalité physique factuelle.

Mais l’efficacité de toutes  solutions, quelle qu’elles soient,  réside dans le changement 

d’attitude de quelques compatriotes qui doivent cesser de camper dans le  déni permanent; les problèmes existent et les enjeux de coexistence  sont réels et  sérieux. Il faut le reconnaître ! Autre attitude mentale, non moins pernicieuse, dont il faut nécéssairement se débarrasser, c’est cette logique suprémaciste qu’on retrouve chez  bon nombre  parmi nous.

 Il va falloir, par ailleurs, dans la gamme des solutions virtuelles, veiller à nous éviter des  solutions-clichés, conçues par paresse intellectuelle ou raccourci facile, du genre ‘’ l’Islam constitue la solution toute faîte; il n’y a pas de problèmes puisque nous sommes tous musulmans! Ou encore cette autre approche qui pose que  la Démocratie électoraliste actuelle suffirait à  résoudre le problème ‘’ ! Des expériences historiques d’autres pays controdisent formellement ces assertions  et montrent que ce sont des solutions illusoires … La démocratie a besoin de socle solide, de garde-fous pour fonctionner correctement et se protéger de ses propres dérives qui étouffent l’expression des minorités ou, parfois, s’accommode de tares  graves, comme ce le fut avec  l’apartheid ou la démocratie israëlienne actuelle  … Les pays qui nous entourent cherchent  à solder correctement leurs querelles internes ou d’identité  pourquoi ne devrions–nous  pas nous en inspirer, au lieu de rester à la traîne ou  constituer  l’exception ? Tous cherchent à devenir des pays émergents , sauf nous !

B- Solutions concrètes aux  injustices concrètes qui minent note vivre- ensemble  :

A la base de toutes les solutions sectorielles à identifier, il y a celle de principe qui doit  être le socle, qui  passe par la reconnaissance de notre diversité culturelle et ethnique – point nodal de notre crise identitaire. Reconnaissance de notre Diversité – à traduire dans les faits- qui, elle même, se décline en Egalité, en Equité, en Egale dignité, respect mutuel   et  justice sociale.

– Suivra alors la série de solutions, de type sectoriel, aux multiples injustices dont la première à redresser est d’ordre linguistique et culturel. Nos cultures, différentes, doivent être reconnues et traitées pareillement, et nos langues élevées toutes au rang de langues officielles. On ne saurait comprendre l’ exigence, légitime, des uns à s’enraciner  dans leur culture et attendre des autres qu’ils y renoncent et endurent leur propre aliénation culturelle…

– Un  accès égal  au secteur économique, la possibilité ouverte à l’entreprenariat égale pour tous.

– Des richesses du pays qui bénéficient à tous les mauritaniens, sans distinction.

– Un Pouvoir politique partagé de manière équilibrée, de façon à ce que la diversité nationale se reflète dans les grandes institutions de l’Etat et dans tous ses démembrements.

– Une prise en compte des aires culturelles et des vocations économiques des différentes zones qui serviront de base à une véritable décentralisation poussée, qui permettrait aux populations locales de gérer elles-mêmes leurs terroirs, voilà, entre autres, des solutions possibles.

Dans le domaine du foncier, il faudra procéder à l’arrêt et à la réparation des spoliations arbitraires, par la mise en place d’une réforme foncière uniforme et équilibrée, qui associe les populations dans l’exploitation de leurs terres.

– En matière de réforme, procéder à la réforme  des forces armées et de sécurité , du secteur de la justice monocolore, de façon à réfléter la diversité culturelle et ethnique du pays.

– Enrôlement correct et définitif des populations négro-africaines et haratines, victimes de discriminations en la matière, soit par  la recomposition des commissions techniques et de supervision de l’enrôlement- quasi mono-ethniques, de façon à refléter la diversité, soit par  le retour de la prestation aux mairies.

Résoudre la question du génocide dit “passif humanitaire”, dans toutes ses dimensions de violations de droits humains intervenues entre 1986 et 1992, à travers une Commission-Vérité/Réconciliation; violations qui se sont traduites par la déportation de populations  avec son lot de biens pillés et de bétail razzié, de villages occupés, de terres spoliées, de viols et de violence; s’y ajoutent les purges massives  au niveau de la  Fonction publique d’agents de l’Etat  négro-africains, les  éxécutions extra-judiciaires dans la vallée du fleuve et dans les casernes militaires. Résoudre la question du “Passif humanitaire” revient à panser des  blessures, sans plus, ce n’est pas une solution à la question du vivre-ensemble qui est d’essence politique ! Il ne faut  pas se tromper en confondant la cause et l’effet ! Le Passif n’est pas la cause mais l’effet; il est  une conséquence et découle de politiques nocives et funestes …  Pour, donc, éliminer définitivement l’effet -ici le “passif humanitaire” -,  il faut  d’abord s’attaquer à sa cause première qui est  d’essence politique, encore une fois. Pour qu’il ne se reproduise plus il faut éliminer les politiques en cause !

Il nous faut enfin résoudre la question de l’esclavage, correctement et définitivement, œuvrer  à l’ancrage  de la  démocratie-flanquée de garde-fous- ce qui doit se traduire par des élections honnêtes, libres et transparentes, c’est-à-dire crédibles.…

Mais avant de glisser vers ce stade d’Etat de droit, démocratique, qui ne reconnaît que le citoyen, sans couleur et sans appartenance tribale, ethnique ou religieuse, nous devons d’abord poser les bases générales qui constitueront le socle de notre vivre-ensemble, en complément à la démocratie, au dessus des contingences partisannes, comme soulignées plus haut. Puis doucement, mais irréversiblement, avancer dans la mise en place progressive de l’Etat de droit, neutre. 

Nous nous devons, par ailleurs,  de restaurer et assumer notre histoire authentique, et faire  l’effort de changer notre regard sur l’homme …Considérer l’individu pour ses valeurs et  ses qualités intrinsèques, et non pour son appartenance ethnique, sociale ou réligieuse . Mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut en nous débarrassant du carcan tribal et ethnique qui emprisonne…

Il me semble, enfin, nécéssaire de nous interroger sur ce  qu’il  nous coûte de changer de vision, de penser positivement et de construire une authentique et réelle fraternité. Nous ne sommes pas nombreux, nous disposons de ressources et ne manquons pas d’espace, pourquoi donc devrions -nous refuser de penser positif, de partager ? Notre pays, s’il était bien géré, pourrait offrir à chaque mauritanien un revenu décent qui lui permettrait d’assurer, dignement, son rôle de père de famille ! Imaginez ce qu’on aurait pu faire avec ces milliards emportés par Abdel Aziz ! 

Je voudrais, pour terminer, m’adresser à ces hommes et à ces femmes de bon sens, à ces hommes de raison, lucides, honnêtes et courageux, pour leur demander, de grâce, d’agir et de peser, afin de redresser, dans la bonne direction,  la trajectoire actuelle dangereuse de notre pays. Nous avons tout pour réussir, beaucoup plus que  nos voisins, pour faire de notre pays un foyer des plus attractifs dans la sous-région, un pays émergent qui ‘’accepte sa diversité, partage ses richesses, cultive la solidarité’’.  Il ne tient qu’à nous d’essayer et de le réaliser, pleinement, par la  force de notre volonté politique.

 Appel de Djeol c’est bien, mais nous attendons des Actes pour y croire. Des Actes, rien que des Actes…

Samba Thiam Président des FPC.

Nouakchott le 25 Avril – 2023

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DÉCLARATION DE PRESSE DES FPC SUR L’ÉPURATION ETHNIQUE EN MAURITANIE

UNE IMPORTANTE DÉCLARATION DE PRESSE DES FPC SUR L’ÉPURATION ETHNIQUE EN MAURITANIE

Des tractations sur le dossier du Génocide des années de braise, dit par certains du ”Passif humanitaire”, entre les émissaires du Président Ghazouani et certains représentants des victimes et ayants droit regroupés au sein des coalitions de défense de leurs intérêts sont en train d’aboutir à des résultats viciés par la détermination de l’Etat à solder au rabais des crimes odieux consécutifs à l’épuration éthnique subie par la commuanauté négro-mauritanienne. Cette enième machination va connaitre le même sort que celui des précédentes infructueuses tentatives d’un réglement consensuel qui élude ce qui devrait en constitue la substance, à savoir la vérité sur les faits et la justice pour les victimes.

Le pouvoir et ses démarcheurs ont cru pouvoir compter sur l’usure du temps, la précarité des conditions sociales des victimes et le sentiment de lassitude grandissant pour imposer une solution pécuniaire et une mise en scène symbolique en lieu et place d’une prise en compte exigeante des devoirs de Vérité et de Justice, conditions obligatoires pour tout réglement sérieux des crimes contre l’humanité de l’ampleur de ceux commis dans notre pays. Ne pas faire face ici et maintenant à la prise en charge courageuse de ces douloureux évènements par des voies et moyens expérimentés par des pays ayant connu les mêmes faits, c’est reporter la nécessaire réconcialition nationale que de nombreux patriotes mauritaniens appellent de tous leurs voeux.
Rappelons encore une fois que ce dossier tragique concerne et interpelle le peuple mauritanien dans son ensemble et non seulement les principales victimes et leurs familles.

Les FPC appellent les victimes et les ayants droits à ne pas céder aux tentations, à préserver leur unité et à poursuivre la défense des principes qui ont guidé jusque-là leur combat: le refus de l’impunité, les exigences de vérité et de réparations et, la nécessité du pardon en tant qu’aboutissement. Ce combat est juste. Il préserve leur dignité et celle des disparus.

Les FPC invitent le Président Ghazouani à s’inspirer de l’expérience malheureuse de ses prédécesseurs sur ce dossier. La solution que tentent d’imposer ses émissaires reconduit les mêmes travers qui ont compromis les tentatives de réglement précédentes. Les intermédiaires auront changé mais le contentieux et les exigences de justice demeureront dans toute leur acuité.

Nouakchott le 17 septembre 2022.

Le département de la communication et de la presse.

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Entretien avec Samba Thiam, président des FPC

Le Calame – Pour Samba Thiam, président des FPC, “l’échec du dialogue est plus imputable au pouvoir qu’à l’opposition”. Entretien…

Le Calame: Le président du comité préparatoire des concertations a annonce, ce 2juin, l’arrêt du processus d’organisation du dialogue dont le lancement officiel était pourtant donne pour imminent. Avez vous été surpris par cette annonce? Quelles sont selon vous, les raisons qui peuvent fonder la décision du président Wagf ?

Samba Thiam : Oui ,quelque peu surpris en effet par la forme ,c’est-à-dire de la façon dont la décision ,unilatérale, a été rendue publique. Ils tentent de s’en tirer, à bon compte, en faisant porter le chapeau à l’opposition, et à elle seule. Ce n’est pas très élégant, c’est le moins qu’on puisse dire. La réalité est un peu plus complexe que ça !

Quant au fond, je n’ai pas été vraiment surpris , parce que je sentais la chose venir, au regard de certains indices …

Vous avez d’abord dû remarquer comment ce dialogue a été négocié … comme une prière. Puis, dès le début, le quiproquo sémantique surgi autour des termes concertations et dialogue sur lequel l’Opposition, prompte aux concessions, par essoufflement ou lassitude, a cédé ! Ensuite ,la façon dont certaines questions , majeures étaient traitées sous la table ,alors même que le dialogue se profilait … Mais encore, ce ‘’ dialogue’’ n’a pas emprunté les voies-standard habituelles, propres aux dialogue, bien souvent …En effet , l’on sait , qu’en général , un dialogue résulte de deux cas de figures : soit il émane de l’exécutif qui, après analyse froide et lucide d’une situation politique tendue, juge de la nécessité d’en organiser un , entre les parties ; soit il découle d’un rapport de forces , favorable à l’Opposition qui l’impose au pouvoir.

Or nous ne sommes ni dans l’un, ni dans l’autre cas . A tout cela sont venues s’ajouter les claudications survenues à mi-parcours du processus, qui ont précipité sa fin. Vous comprenez à quoi je fais allusion, la Mauritanie a ses réalités, têtues. Mais, par-dessus tout, le plus déterminant des arguments à mon avis, réside dans les réticences pour ne pas dire les résistances du commandant en chef sur la question , qui n’ont ,fondamentalement , pas varié à ce sujet ,du début à la fin ; l’absence, claire, de volonté politique réelle, affirmée …

La sortie du coordinateur du Comité provisoire du dialogue n’a été , en réalité , qu’un prétexte , un faux alibi , pour se sortir d’une passe qu’ils avaient empruntée ,contre leur gré, rien de plus ! Si on devait situer les responsabilités de l’échec je dirais qu’elles sont bien plus imputables au pouvoir exécutif qu’à l’Opposition, même si ….

Des propos haineux tenus à l’endroit des Peuls de Mauritanie et des menaces et invectives contre certaines personnalités, à des arrestations. Que vous inspire cette atmosphère à la veille du démarrage des concertations politiques nationales ? Comment avez-vous réagi à la décision de la justice d’ouvrir une enquête puis de faire arrêter l’auteur de ces propos ?

-Concernant les propos haineux que vous évoquez -qu’il faut, ici, condamner sans équivoque- ils découlent du climat délétère généré par l’acuité de tensions sociales créées par trop d’injustices, trop d’inégalités, et dont le Président ne semble pas prendre conscience. IL faut d’autant plus condamner ces propos qu’ils généralisent ; or la généralisation est toujours abusive , excessive , car il n’y a pas de peuple , de communautés ou de groupes totalement bons ou totalement mauvais , totalement gentils ou méchants . Il y a des bons et des mauvais partout, des Justes partout…C’est donc une erreur de jugement ; il faut incriminer le Système et non pas le peuple.

Il n’empêche, la loi sur la ‘’protection de la personne du Président’’ ou sur la cyber criminalité, telle que formulée, consacre un recul grave et net de la démocratie , pour bâillonner les opinions et les libertés fondamentales ! On ne peut plus dénoncer des dérives sans risquer de se voir intimidé ou embastillé, il n’y a pas de liberté d’association ,on ne peut se réunir encore moins manifester , même la presse est sous pression, alors dans quelle démocratie sommes-nous ?

Un des acquis dont se prévalait la majorité et son Président , brandi à tout va , était l’apaisement du climat politique ; ils viennent de griller cette carte, la seule dont ils pouvaient se prévaloir. L’apaisement politique est mort, et bien mort, de leurs propres mains …Or, si nous pouvions être plus attentifs aux alertes à nos frontières, au tumulte et à l’agitation du monde qui nous parlent , plus qu’à tout autre, nous nous empresserions de sortir de cette voie sans issue ! l’Histoire jugera, elle jugera chacun de nous …

-Depuis des années, presque tous les acteurs expriment, à travers séminaires, colloques, conférences débats leur souci de trouver des solutions au problème de l’unité nationale. Tous semblent d’accord pour que ce thème soit mis sur la table. D’abord, qu’est-ce qui justifie, à votre avis cette espèce de regain d’intérêt pour cette thématique ? Ensuite, pensez-vous que de ces concertations, pourraient sortir des solutions consensuelles autour des questions nationales ?

Je pense que s’il y a un regain d’intérêt pour la question de l’unité nationale ces derniers temps, c’est sûrement qu’elle est devenue d’une certaine acuité, problématique et source de tensions plus vives . Pour le reste je crois y avoir déjà répondu , en ajoutant encore ceci , que même s’il sortait de ces assises des solutions consensuelles, je doute qu’elles soient appliquées , pour les raisons soulignées plus haut .

-Avec quel sentiment avez–vous décidé d’aller à ces concertations ? Avez-vous décelé chez les autres acteurs, la détermination de trouver des solutions définitives aux problèmes du pays ?

-J’ai expliqué mes réserves, dès le début, sur la façon dont ce ‘’dialogue’’ a été négocié, et amorcé… Dès le départ, j’étais donc sceptique quant à l’issue ,puisque le bon sens me dit que tant que le chef suprême n’a pas pris conscience de l’existence et de l’acuité des problèmes , de leur danger, tant qu’il n’a pas perçu l’intérêt ou la nécessité d’un dialogue autour , il serait utopique de penser qu’il se serait encombré de solutions, pensées ailleurs, et pour des questions qui n’existaient pas à ses yeux ! Il n’y a pas de crise disait-il, souvenons-nous en ! Il ne servait donc à rien de s’engager sur ce chemin, sauf que chaque parti politique a ses réalités …Si nous y sommes allés , c’était pour nous en servir comme d’une tribune , mais nous étions sans illusions.

Au cours d’une récente conférence de presse, le président de IRA, Biram Dah Abeid a comparé les prochaines concertations au Congrès d’Aleg de 1958. Que vous inspire cette comparaison ?

-Je crois que chacun a la liberté de se livrer à des comparaisons qu’il veut et comme il veut… Avec des arguments choisis et sous l’angle désiré. On peut donc concéder , que sous certains angles , cette ‘’ comparaison soit raison’’, entre ce dialogue et le Congrès d’Aleg … A cette différence, toutefois , qu’à l’époque certaines franges n’étaient pas dans l’équation dont elles sont ,aujourd’hui , un paramètre essentiel …

Pour ma part, je me serais plutôt saisi de ces assises pour rattraper l’erreur d’Aleg : fonder un pays sur la base d’un vivre ensemble, volontairement choisi entre des entités différentes , mais sans en définir, clairement, les bases et les contours . ..

Pendant que les acteurs politiques s’activent autour de la tenue du dialogue, le gouvernement s’attèle quant à lui à éponger le passif humanitaire avec certaines organisations des veuves, des orphelins, des rescapés et des rapatriés, comme il prépare une loi d’orientation pour la réforme du système éducatif, ceci après la tenue des assises sur l’école. Ces deux questions avaient été retenues parmi les thématiques des concertations désormais suspendues. Qu’en pensez-vous ?

– Il n’y a pas que le dossier de l’éducation ou du ‘’passif’’. Et c’est bien pourquoi on ne pouvait attendre grand-chose d’un projet de dialogue, complètement désossé, au départ …

-Que vous inspire la gestion du dossier de la décennie dont on enregistre une avancée dans la mesure où les personnes présumées viennent d’être déférés devant un tribunal pour être jugé? Pensez-vous que le travail de la CEP de l’Assemblée nationale a permis de prévenir la gabegie ?

– N’allons pas trop vite en besogne, au vu des hésitations, des demi-mesures, des atermoiements auxquels on nous a habitués .Il ne faut croire que ce que l’on tient en main…

Prévention de la gabegie dites-vous ? Avec des choses , toujours faites à moitié ou de travers et tous ces atermoiements , vous y croyez vous ?

– Quelle évaluation vous faites de la gouvernance du président Ghazwani ?

– Si j’entends bilan, je dirais décevant ,au regard des attentes et de l’immense espoir suscité auprès , tant des populations que des politiques, au départ du mandat. Inégalités, injustices, discriminations perdurent, ne le perdons pas de vue .

Dans l’une de ses déclarations, le président de IRA Biram Dah Abeid a affirmé que la candidature de feu Kane Hamidou Baba soutenu par la Coalition Vivre Ensemble (CVE) dont le FPC, votre parti, était membre avait pour objectif d’affaiblir sa candidature à la présidentielle. Un commentaire?

Je trouve cette question anachronique et la remarque quelque peu déplacée … Celui qui aurait été le mieux à même d’y répondre c’est certainement feu Kane H Baba lui-même , aujourd’hui disparu ! Paix à son âme. Il s’y ajoute que je n’aime pas revenir sur des questions qui renvoient au passé et de surcroît polémiques ; ce n’est pas productif … Cela dit, il faut quand même rappeler que feu KHB s’est toujours présenté aux élections présidentielles, pour son propre compte , avec d’autres concurrents . Pourquoi en serait -il autrement pour cette élection dernière? Pourquoi, même s’il le fit à travers une coalition, cela devrait-il être dirigé contre quelqu’un ?

L’humilité, disait Mani – personnage de A Maalouf-‘’ c’est ‘’de savoir parfois rire de soi’’!

-Au fait, où en est votre dossier administratif ? Pourquoi ne prenez –vous pas contact avec la CNDH ?

-Toujours au point mort … Je n’ai pas un dossier mais deux, politique et administratif …

Le dossier politique – contentieux avec l’Etat- depuis 2015 autour du récépissé des FPC , est toujours en souffrance à la Cour suprême qui, pourtant, dénoue régulièrement des contentieux du même genre .Puis le dossier administratif relatif à mes droits à pension , que l’on continue de me refuser …Dossier qui avait été engagé par le ministre de la Fonction publique sortant , l’ arrêté devant me régulariser ,lancé dans le circuit , mais reste bloqué au niveau de la législation ,depuis plusieurs mois . Il y a comme un retour de l’ère de Abdel Aziz qui avait limogé un Directeur général de la fonction publique pour avoir tenté de me remettre dans mes droits, légitimes…De tous les prisonniers politiques de Walata de 1986 , il faut le rappeler, je reste le seul à qui on refuse ce droit…En raison de ma posture politique de penseur libre et d’honnête opposant.

Oh, c’est fait pour la CNDH ! J’avais saisi son Président, voilà plus de deux ans, mais rien… J’avais toujours pensé, honnêtement, que ce président était à équidistance, vraiment indépendant. Eh bien ! Je découvre, au vu de cette expérience et bien d’autres, qu’il choisit ses dossiers, manifestement…

Propos recueillis par Dalay Lam

le calame

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