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Journée de réjouissance ou de deuil ? Par le colonel (E/R) Oumar Ould Beibecar
Le mois de novembre, qui symbolisait pour nous, pendant trente ans les moments de joie et d’allégresse, les moments d’euphorie pour l’unité nationale et cette communauté de destin fondée sur l’islam, des moments de souvenir des pères fondateurs et bâtisseurs, des moments d’espoir d’une vie meilleure, a perdu tout son charme et toute sa fierté depuis ce fameux 28 novembre 1990 où la tristesse a remplacé la joie et le désespoir. A la joie de l’indépendance et de la liberté se sont désormais mêlées la souffrance morale et la détresse de la cruauté, pendant ce jour mémorable.
En ce mois de novembre 1990, des centaines de nos frères négro-mauritaniens, civils et militaires ont été froidement exécutés. Plusieurs centaines d’âmes croyantes exécutées sans aucune raison valable, ou morts sous la torture. Certains ont été abattus de sang froid en public, leurs corps exposés pendant très longtemps devant leurs proches, empêchés de leur donner une sépulture, d’autres ont été enterrés vivants comme à Azlatt et à Jreida. Certains ont été pendus comme à Inal et à Rach Tachedbit dans le département de Rosso au 1er BCP, d’autres morts sous la torture à Nouadhibou et ailleurs.
Les viols ne se comptaient pas, certains viols avaient été effectués devant les parents des intéressées, d’autres devant les enfants des intéressées. Les pillages, les humiliations et les bastonnades étaient monnaie courante.
Les victimes dans les unités de l’armée nationale, un peu moins de trois cents hommes, dont plus de la moitié (154) dans la seule fosse commune d’Inal. Inal qui est tout un symbole car c’est ici où sont tombés nos premiers martyrs, sur le champ de bataille le 9 décembre 1975, dont l’adjudant-chef Abdallahi Sy dit lehrour de la gendarmerie, un foutanké du gorgol, le premier martyr des forces armées nationales et le brigadier Mohamed Ould Mahmoudi Ould Moussa MLE 2147 un guerrier du Tagant, premier martyr de la Garde nationale. Ils sont morts pendant la lâche attaque surprise de l’armée algérienne et quelques mercenaires du Polisario, qui a déclenché la guerre du Sahara où nous avons perdu plus de 2000 martyrs oubliés par la République.
Auteurs bien connus
Les tueries au niveau de l’armée nationale ont fait l’objet d’un rapport incriminant une poignée d’officiers. Etabli dans les règles de l’art en mai / juin 1991, par une commission plurielle composée de cinq officiers, dirigée par le chef d’état-major national adjoint, ce rapport avait fait toute la lumière sur ce massacre. Le chef de l’Etat, après lecture de ce rapport, avait été d’une grande naïveté, en demandant à son ministre de la Défense de voir avec la cour suprême la possibilité d’une solution interne, à l’amiable, impliquant des sanctions disciplinaires accompagnées de réparations matérielles.
Le ministre de la Défense a, par lettre N° 0056 du 17 juin 1991, posé deux questions, on ne peut plus absurdes, au président de la cour suprême, dont voici la teneur : « Les chefs d’états-majors détiennent-ils des prérogatives en matière de poursuites des militaires ayant commis des crimes et des délits? La sanction disciplinaire peut-elle se substituer à la sanction pénale ? » La cour suprême toutes chambres réunies, à son audience du lundi 15 juillet 1991, a par délibération N° 95/91 donné l’avis suivant : « Incompétence des chefs d’états-majors en matière de poursuites des militaires ayant commis des crimes ou des délits et impossibilité quant à la substitution de la sanction disciplinaire par la sanction pénale. »
En novembre 1990, à la Garde nationale, sur les seize victimes de ce massacre, plusieurs sont morts sous la torture. Pendant l’occupation de la vallée, dans le département de Boghé, des gardes avaient exécuté froidement un gendarme et plusieurs soldats de l’Armée nationale en tenue et en position régulière, et au lieu d’être sanctionnés, ils ont été récompensés. Ils avaient aussi massacré dans la forêt de BAKAW, plusieurs personnes dont des femmes et un bébé.
Dans le département de Maghama, dans la zone de Sangué Lobali, pendant ces années de braise, les unités de la Garde ont semé la terreur en coupant les têtes de certaines victimes avec lesquelles ils s’amusaient à terroriser les populations des villages riverains. Au niveau de la Garde nationale, il n’y avait jamais eu d’enquête concernant ces massacres, mais les auteurs présumés sont très bien identifiés. Malheureusement, les statistiques des massacres et viols chez les civils, pendant l’occupation de la vallée, ne sont pas répertoriés avec précision. Les ONG qui s’intéressent à ce dossier sont divisées, démunies et diabolisées et les ayant droits sont toujours terrorisés.
Le seul crime des victimes de ces massacres était d’être nées toucouleurs ou soninkés du Gorgol. Car les soninké du Gorgol, contrairement à ceux du Guidimagha plus conservateurs, étaient assimilés par le pouvoir à des toucouleurs, à cause des métissages et de la symbiose qui existaient entre ces deux composantes. Il parait que le but de ce génocide, car on ne peut l’appeler autrement, était de terroriser les ‘’kwars’’ (terme générique désignant le snégros-mauritaniens), afin de les amener à traverser volontairement le fleuve pour s’installer définitivement au Sénégal, considéré par les stratèges nationalistes du pouvoir, comme étant leur vraie patrie.
Certes, les kwars ont été complètement terrorisés au point où ils ne savent plus à quel drapeau se vouer, et où ils n’ont plus que des mains pour applaudir et des voix pour soutenir sans réserve, les gouvernements d’hier et d’aujourd’hui, qui protègent les bourreaux en légalisant l’impunité. Mais, heureusement pour la Mauritanie, les kwars n’ont pas encore traversé le fleuve « Sanhaja ».
Epuration ethnique
Les proches des victimes de cette épuration ethnique, sont depuis plus de 25 ans dans l’expectative. L’avenir de la Mauritanie vaut plus que la vie de tous les officiers, sans exception aucune, en activité ou à la retraite, à plus forte raison d’une poignée d’officiers génocidaires, qui prennent en otage depuis un quart de siècle la justice de tout un peuple, mettant en péril toute la République, et à l’ égard desquels la moindre sympathie ou le moindre sentiment de pitié constitue à lui seul un très grand péché.
Depuis 25 ans, les poursuites contre les auteurs de ces massacres sont suspendues, la justice mise en veilleuse, avec la bénédiction de beaucoup des oulémas et des notables de la République Islamique de Mauritanie. Depuis un quart de siècle, les ayant droits sont privés de justice par ces dictatures militaires qui se succèdent et se ressemblent, soutenues par les baathistes et les nasséristes à tour de rôle.
Depuis 25 ans, les parents des victimes n’ont même pas le droit de pleurer leurs morts, ni de chuchoter les noms de leurs centaines de martyrs, ni de murmurer leurs profonde douleur, ni de prier publiquement pour le repos de leurs âmes. Pourtant tous les auteurs présumés de ces crimes sont connus et beaucoup de témoins sont encore en vie et prêts à témoigner pour Allah devant les juridictions compétentes.
Toute la procédure judiciaire a été bloquée par le premier parlement issu de la démocratie militaire, composé majoritairement de tribalistes arabo-berbères et négro-mauritaniens dont des oulémas, qui avait voté presque à l’unanimité, sous l’impulsion du président du CMSN ère nouvelle, déçu par la réponse de la cour suprême en juillet 1991, et soutenu par des nationalistes arabes, le 14 juin 1993 la loi 93-23 portant amnistie et qui légalise l’impunité et l’arbitraire, dont voici la teneur :
Article premier : Amnistie pleine et entière est accordée :
-1/ Aux membres des forces armées et de sécurité auteurs des infractions commises entre le 1er janvier 1989 et le 18 avril 1992 et relatives aux événements qui se sont déroulés au sein de ces forces et ayant engendré des actions armées et des actes de violence.
-2/ Aux citoyens mauritaniens auteurs des infractions suites aux actions armées et actes de violence et d’intimidation entrepris durant la même période.
Article 2 : Toute plainte, tout procès- verbal et tout document d’enquête relatif à cette période et concernant une personne ayant bénéficié de cette amnistie sera classé sans suite.
Cette loi d’amnistie votée par cette assemblée monolithique, élue dans les conditions que l’on sait, qui n’a d’ailleurs pas plus de légitimité que le CMSN, composée de « députés » béni-oui-oui, dont certains sont plus militaristes que les militaires, et dirigée par un officier, ancien membre du CMSN, ancien ministre de l’intérieur, sans doute pour donner la cadence, est nulle et non avenue. Particulièrement en ce qui concerne les auteurs de crimes de sang, puisque contraire à la charia qui est constitutionnellement, le fondement du droit mauritanien. Seuls les ayant droits peuvent pardonner et seulement dans les cas du ghissas (loi du talion). Les cas de houdoud (châtiment pour un péché) ne peuvent faire l’objet ni de pardon ni de grâce et doivent être exécutés immédiatement.
Des officiers génocidaires ont été décorés les 28 novembre. Décorer les bourreaux, c’est encourager l’impunité, travestir l’histoire, maudire un peu plus cette journée mémorable, insulter davantage la mémoire de nos martyrs, humilier et frustrer les ayant droits, et renvoyer aux calendes grecques les mots comme réconciliation nationale et comme justice tout court.
Le 28 novembre 2015, les festivités pour la commémoration du 55ème anniversaire s’étant délocalisées à Nouadhibou, la cérémonie nationale va s’approcher de la principale nappe de sang de nos martyrs, du point culminant de la barbarie. Elle va se dérouler à 255 km d’Inal, le symbole de l’atrocité, l’adresse de la boucherie, le souvenir du cérémonial solennel de la pendaison de nos 28 valeureux soldats, l’incarnation du génocide.
Elle va se dérouler au commandement de la première région militaire, responsable de ce massacre. Elle va se dérouler à Nouadhibou, notre capitale économique, elle aussi entachée par le sang des dizaines de nos martyrs de novembre 1990. Cette année, notre drapeau national sera hissé publiquement et solennellement, en présence du chef de l’Etat, des membres du gouvernement et des hautes personnalités, dans une mare du sang de nos frères martyrs.
Journée souillée
Le 28 novembre ne peut plus constituer une fête nationale pour notre peuple. On ne peut pas fêter le sacrifice de nos 28 martyrs pendus, pendant ce jour mémorable. Leur sang avait entaché à vie l’anniversaire de notre indépendance, et souillé notre drapeau national. On ne peut pas fêter la pendaison de toute une communauté, de toute une culture. On ne peut pas fêter la pendaison de l’humanité tout entière.
Le sang de ces 28 âmes croyantes sacrifiées comme des moutons ce 28 novembre 1990, par leurs frères d’armes dans une ambiance incroyable, interpelle notre conscience religieuse, notre conscience nationale, notre conscience citoyenne, notre conscience patriotique. La réponse au génocide et surtout au sacrifice d’INAL doit être responsable et contribuer à apaiser les esprits, à consolider la cohésion nationale, le patriotisme, et surtout à renforcer la foi en Allah, après que justice soit rendue. Le fait d’ignorer le génocide est pire que le génocide. Le fait de nier la pendaison est pire que la pendaison. De grâce pleurons le 28 novembre. Exigeons la vérité. Exigeons la justice. Pleurons. Pleurons.
Aussi le 28 novembre 2001, la Mauritanie avait livré le citoyen Mohamedou Ould Sellahi, brillant informaticien, aux USA en violation flagrante de notre constitution. Cet innocent moisit depuis une quinzaine d’années dans les geôles de la plus grande puissance du monde, qui le maintient en prison, hors de son territoire pour tricher, par excès de zèle, malgré son acquittement par la justice américaine. Cette honteuse livraison a souillé un peu plus cette journée mémorable.
On peut consacrer la journée du 25 novembre, encore intacte, à la fête. Date de la création de nos forces armées, premier acte de souveraineté nationale de notre pays. On peut réserver ce jour à la joie de l’indépendance et de la liberté, avec ses discours, ses musiques, ses chants, ses cérémonies officielles, ses défilés, ses levées des couleurs. Et instituer la journée du 28 novembre comme journée des martyrs ou journée de la cohésion nationale, pour partager la souffrance morale et la détresse de tous ceux qui ont souffert, ou qui souffrent de la cruauté de leurs propres concitoyens.
Avec une pensée particulière pour les victimes du génocide, et nos 2000 martyrs oubliés, morts les armes à la main pour défendre notre intégrité territoriale entre le 9 décembre 1975 et le 12 juillet 1979, et surtout les 28 pendus de l’anniversaire. Cette journée du 28 novembre sera une journée de prière, de recueillement et de pardon pour une meilleure harmonie, une meilleure concorde nationale. Pour que cette folie ne recommence jamais.
Les plaies provoquées par le génocide sont très profondes et ne peuvent se cicatriser que suite à un procès juste et transparent, et qui doit réparer administrativement les calvaires vécus par les ayant droits pendant ces 25 ans d’expectative. Le peuple doit connaître toute la vérité, rien que la vérité au sujet de ce massacre. Tenter de dissimuler cette tuerie, c’est comme essayer de cacher le soleil.
L’approche timide choisie pour régler le problème de ces tueries, par le pouvoir en place, en distribuant des miettes aux ayant droits, est contre-productive. Les amalgames créés par l’ajout sur la liste des victimes du génocide, des noms des auteurs des putschs sanglants du 16 mars 1981 et du 8 juin 2003 sont inacceptables et ridicules. La prière à Kaédi ressemble plus à une provocation qu’à un acte d’apaisement. On ne peut réaliser notre unité nationale tant que la justice n’est pas rendue aux ayant droits. Pourtant les parents des victimes sont prêts à pardonner. Mais pardonner quoi ? Pardonner à qui ? Pardonner comment ? Il est indécent de demander pardon avant de rendre justice.
Il ressort de ce qui précède que nous sommes majoritairement des musulmans non pratiquants, citoyens d’une république semi-laïque en voie de disparition, dirigés depuis le 10 juillet 1978 par des gouvernements irresponsables et hors-la-loi. Qu’Allah protège notre chère Mauritanie. Allah donnez-nous des yeux qui voient le meilleur, un cœur qui pardonne le pire, un esprit qui oublie le mal, et une âme qui ne perd jamais la foi.
LE CALAME
La tentative de coup d’Etat du 22 octobre 1987 : L’intention vaut-elle l’acte ? / Par le colonle (E/R) Oumar Ould Beibacar
Le noyau concepteur du coup d’Etat est né fin 1986-début 1987. Il était composé de six lieutenants : Sarr Amadou, Diacko Abdoul Kérim, Boye Alassane Harouna, Bâ Abdoul Khoudouss, Bâ Seydi et Sy Saïdou. Le lieutenant Sarr Amadou en était le chef, l’animateur et le coordinateur. De multiples erreurs, fautes et dérives avaient fait que beaucoup de personnes s’étaient retrouvées embarquées dans cette affaire sans y être conviées.
Au départ, il s’agit donc d’un groupe restreint de six officiers, contaminés par le syndrome putschiste local, déjà endémique. Leur première option était de construire patiemment et progressivement une solide organisation militaire clandestine au niveau national, puis, le moment venu, envisager un coup d’État. La deuxième option, plus classique, celle d’agir en déclenchant immédiatement le putsch, l’emporta et aboutit aux résultats, que l’on sait.
Leur objectif était de prendre le pouvoir, en contrôler la réalité, jouer à fonds la carte de l’apaisement, rassurer le pays et les Mauritaniens, tout en préservant le pouvoir conquis. C’est dans ce sens que le colonel Mohamed ould Lekhal était pressenti pour occuper la fonction de chef d’État-major de l’armée nationale. Il avait été jugé que cet officier était intègre, qu’il avait de l’aura et qu’il pourrait, sous contrôle, incarner l’autorité nécessaire à la consolidation du nouveau pouvoir. Le principe du partage du pouvoir avec les arabo-berbères était retenu. Mais son contenu et ses modalités restaient à définir. Changer le nom du pays, le nom de la monnaie nationale, tout cela n’est que de l’affabulation. Des mensonges diffusés par les renseignements généraux pour diaboliser les conspirateurs, largement repris par Jeune Afrique à l’époque.
Victimes d’injustice
Au bout du compte c’est un commissaire de police, treize officiers dont deux capitaines et 11 lieutenants parmi lesquels deux de la gendarmerie, 21 sous-officiers comprenant cinq de la gendarmerie et deux de la Garde nationale, les brigadiers Djibril Ali Malik Sy dit Samuel Do et Kane Ibrahima qui seront reconnus coupables et condamnés par la cour spéciale de justice le 3 décembre 1987. Tous négro-mauritaniens, recrutés pour la plupart en pleine guerre du Sahara, issus, en majorité, de la féodalité toucouleur, victimes de beaucoup d’injustice et de discrimination dans leurs promotions, dans leurs avancements, dans leurs mutations, dans leur vie sociale et professionnelle de tous les jours. Ils avaient agi par orgueil, plus pour défendre leur dignité que pour autre chose.
L’histoire démontrera un jour que ces officiers étaient de braves guerriers, honnêtes, bons croyants, bons citoyens, fiers d’appartenir à cette Mauritanie et dépourvus de sentiments racistes ou ségrégationnistes quelconques. Ils ont été victimes malheureusement de cette redoutable et impitoyable justice d’exception, expéditive et aux ordres, qui a condamné puis exécuté à la hâte ce dimanche 6 décembre 1987, soixante-douze heures seulement après la lecture du verdict, trois officiers considérés comme les chefs de ce groupe, avec pour motif principal d’être les premiers à se réunir pour décider du projet du coup d’Etat.
En dehors du redoutable et téméraire lieutenant de la Marine, aucun des deux autres n’avait un commandement au moment de cette « tentative », le lieutenant Sarr Amadou était en mission d’inspection à Nouadhibou pour le compte de la direction du matériel et le lieutenant Sy Saidou, qui revenait d’Espagne où il effectuait un stage d’application, était encore à l’état-major de la Gendarmerie, en instance de mutation. Le reste du groupe a été condamné à des peines allant de la perpétuité à 5 ans de prison ferme. Seuls sept parmi eux dont le colonel ANNE Amadou Babaly, le taciturne, ont été reconnus non coupables. « Il suffit d’ajouter ‘’militaire’’ à un mot pour lui faire perdre sa signification. Ainsi, la justice militaire n’est pas la justice, la musique militaire n’est pas la musique, …», disait Clemenceau.
Certains putschistes accusent un officier de la gendarmerie servant hors de la garnison de Nouakchott, d’autres accusent un officier de la marine de les avoir dénoncés par le biais du BED ou du ministère de l’Intérieur. Mais l’hypothèse la plus vraisemblable accuse un sous-officier de la gendarmerie, de l’escadron de la sécurité présidentielle, qui aurait vendu la mèche par l’intermédiaire du commandant, directeur du cabinet militaire, qui aurait présenté l’intéressé directement devant le président du CMSN afin de déjouer la conspiration en procédant immédiatement à l’arrestation des meneurs.
Enorme bavure
Il semble que c’est cette vigilance exceptionnelle, qui a fait défaut aux différents services des renseignements des forces armées et de sécurité, Police, Armée, Gendarmerie et Garde qui n’ont rien vu venir malgré les moyens mis à leur disposition, qui est à l’origine de la propulsion de cet officier supérieur au poste de ministre des affaires étrangères, puis au poste de ministre de l’intérieur avant d’être chargé de conduire la démocratisation militaire, pour ne pas dire la tribalisation de la Mauritanie, qui aboutira au CMSN ère nouvelle, période qui va durer jusqu’au 3 aout 2005.
Si le projet de ces putschistes d’octobre 1987 avait été dénoncé, en dehors de la période d’exception, ils auraient été tout simplement traduits devant un conseil de discipline et rayés des contrôles des forces armées nationales. L’exécution de ces trois officiers constitue incontestablement, la plus grande bavure du régime d’exception. Il n’est pas évident que ce groupe d’officiers ait commis une quelconque infraction au code pénal car l’infraction se compose de trois éléments : un élément légal, un élément moral et un élément matériel.
Or dans leur cas, l’élément matériel et l’élément légal qui sont déterminants, sont absents. Il n’y avait pas eu d’élément matériel, dans la mesure où il n’y avait pas eu début d’exécution,car l’article 88 stipule : « Lorsque l’une des infractions prévues aux articles 83, 85, 86 et 87 aura été exécutée ou simplement tentée avec usage d’armes, la peine sera la mort. » ; tenter c’est commencer en vue de réussir. Il n’y avait pas eu de tentative puisqu’il n’y avait pas eu de commencement. Le 8 juin 2003, il y avait eu une tentative avec usage des armes, puisqu’il y avait eu début d’exécution.
Il n’y avait pas non plus d’élément légal, puisque les attentats ou complots objets des articles 83 à 87 du code pénal, ne sont considérés comme infractions contre l’autorité de l’Etat, que « quand ils sont dirigés contre des régimes constitutionnels ». Or le 22 octobre 1987, la Mauritanie était dirigée par un régime d’exception, usurpateur, qui avait dissout la constitution et qui gouvernait en maître absolu, comme dans un territoire conquis. Certes il y avait bien une intention de prendre le pouvoir par la force qui constitue l’élément moral mais il n’est pas suffisant pour constituer l’infraction.
L’exécution de ces trois officiers constitue donc un assassinat extrajudiciaire, assimilable à un accident de travail comme pour le cas, de deux de leurs compagnons, morts de mauvais traitements et de malnutrition dans le mouroir d’Oualata. Dans ce cas l’Etat mauritanien doit payer la diya aux ayant-droits, et les intéressés doivent tous figurer en bonne place sur la liste de nos martyrs. Les martyrs de la nation. Les autres victimes rescapées doivent aussi obtenir une juste réparation pour tous les malheurs qu’ils ont subis, y compris pour l’exil.
Les véritables acteurs, qui pouvaient agir efficacement ce 22 octobre et qui avaient échappé miraculeusement à la peine capitale, étaient le capitaine Sy Bocar, directeur adjoint du cabinet militaire et les lieutenants Ngaidé Aliou Moktar, commandant de l’escadron de sécurité présidentielle qui aurait eu pour mission de neutraliser le président du CMSN et ses proches collaborateurs, Dia Abdarrahmane, officier de permanence à l’état-major national, Kane Mamadou de la 6ème région militaire, et Diacko Abdoul Kerim du 1er BCP.
Le cas du colonel ANNE Amadou Babaly
Le colonel ANNE est un brillant intendant, l’un des pères fondateurs de l’armée nationale, réputé pour son intelligence, sa modestie, sa courtoisie et surtout pour son honnêteté intellectuelle. C’est lui qui, deux années auparavant presque jour pour jour, le 29 octobre 1985, avait décliné poliment l’offre du chef de l’Etat le nommant chef d’état-major national, en remplacement de son frère, feu le colonel Yall Abdoulaye, au prétexte qu’en sa qualité d’intendant il n’était pas le mieux indiqué pour commander l’armée nationale. Il avait proposé au président de nommer à sa place, le colonel Jibril Ould Abdallahi qui avait, selon lui, de meilleures prédispositions pour cet emploi. C’est ainsi que ce dernier avait été nommé le même jour, chef d’état-major national.
Cette réaction digne et spontanée, on ne peut plus correcte, faite dans le bureau du chef de l’Etat et en présence du colonel Jibril, démontre à elle seule que cet excellent officier n’avait aucune ambition pour prendre le pouvoir par la force, et qu’il n’était animé d’aucun sentiment sectaire ou ségrégationniste quelconque. Au contraire, ce comportement montre toute la noblesse de l’homme, sa très grande vertu, son sens élevé de l’honneur, du devoir, de la fraternité, de l’amitié, et son respect absolu de la déontologie de l’officier.
Aveuglé par le pouvoir, le président du CMSN avait oublié ce noble geste du 29 octobre 1985, et avait cherché en vain, à compromettre inutilement, son compagnon d’armes, dans cette désagréable aventure.
Ainsi, ce grand officier s’était trouvé en très mauvaise posture, devant une confrontation surréaliste, qu’on lui imposait avec de jeunes officiers dont la plupart pouvaient être ses enfants, et qui n’étaient liés à lui que par le respect dû à son rang, à son âge et à la considération réciproque, sentiments très appréciés en milieu poular. A l’issue de cette épreuve difficile, le colonel Anne était sorti grandi.
Le héros
Le lieutenant Bâ Seydi de la Marine Nationale condamné à mort, s’était particulièrement distingué par son orgueil, son courage et sa témérité depuis l’enquête préliminaire jusqu’au poteau d’exécution. Pendant la phase instruction, lorsqu’il avait été confronté avec certains de ses subordonnés, il avait dit au juge d’instruction : « Monsieur le juge, mon honneur d’officier m’empêche d’accepter d’être contredit par mes subordonnés, c’est pourquoi je vous demande de considérer comme vrai tout ce qu’ils vous disent me concernant ». Après le verdict, il avait dit à ses avocats : « On avait aucune intention de massacrer qui que ce soit, mais on avait bien l’intention de prendre le pouvoir par la force. Et si c’était à refaire, je suis prêt à recommencer. »
A quelques minutes de son exécution, on lui avait demandé, comme en pareille circonstance, s’il avait quelque chose à dire ou des souhaits à formuler. L’audacieux lieutenant a répondu sereinement à son avocat maître Mohamed Cheine Ould Mouhamadou, avant de regagner le poteau d’exécution: “Oui maître, j’ai deux commissions et un témoignage. La première commission concerne mes parents, ma mère et mon père. Ils sont venus de Boghé et ont beaucoup souffert en apprenant mon arrestation. Ils souffriront encore plus en apprenant mon exécution, je te demande d’aller les voir pour leur demander de me pardonner. La deuxième commission concerne mon frère qui travaille dans une banque de la place, il faut le voir pour qu’il paye une dette de 7000 ouguiya à mon créancier, un boutiquier aux environs de l’hôpital national. Quant au témoignage je voudrais vous prendre à témoins.” Puis il prononça la chahada en arabe: «J’atteste qu’il n’y a qu’un seul Dieu et que Mohamed est son prophète.”
L’avocat lui avait promis de payer lui-même cette dette et qu’il ferait sa commission pour ses parents immédiatement.
Attachés tous les trois sur les poteaux d’exécution, tenus en joue par trois tireurs à une distance de six mètres, les trois officiers attendaient dignement la fin de leur vie qui ne tenait plus qu’à un ordre du chef du peloton d’exécution. Puis vint le moment fatidique: ” Feu.” Les trois premiers coups partirent, le tireur chargé de tuer le lieutenant BA Seidi le blessa à la hanche, l’officier aurait dit, selon plusieurs témoins, à son bourreau : « Tu m’as blessé, lève le tir, vise très bien ». Seidi BAH. Seidi BAH. Seidi BAH.
Par ce comportement exceptionnellement courageux, ce martyr originaire du Fouta, avait démontré qu’il existait en Mauritanie le 6 décembre 1987 à Nouakchott, des hommes qui avaient, devant l’épreuve de la mort, autant de témérité que le martyr Saddam Hussein exécuté par pendaison le 30 décembre 2006 à Baghdad. Enfin, les trois officiers rendirent leur dernier souffle en implorant Allah au cri d’Allah Akbar, Allah Akbar, Allah Akbar. LA ILAHA ILLA ALLAH MOHAMEDOUNE RASSOULOU ALLAH.
Puisse ALLAH le tout puissant, accueillir nos martyrs dans son paradis. Puisse-t-il faire que la Mauritanie se réconcilie un jour avec ses enfants du Fouta, du Walo et du Guidimagha.
le calame
Le noyau concepteur du coup d’Etat est né fin 1986-début 1987. Il était composé de six lieutenants : Sarr Amadou, Diacko Abdoul Kérim, Boye Alassane Harouna, Bâ Abdoul Khoudouss, Bâ Seydi et Sy Saïdou. Le lieutenant Sarr Amadou en était le chef, l’animateur et le coordinateur. De multiples erreurs, fautes et dérives avaient fait que beaucoup de personnes s’étaient retrouvées embarquées dans cette affaire sans y être conviées.
Au départ, il s’agit donc d’un groupe restreint de six officiers, contaminés par le syndrome putschiste local, déjà endémique. Leur première option était de construire patiemment et progressivement une solide organisation militaire clandestine au niveau national, puis, le moment venu, envisager un coup d’État. La deuxième option, plus classique, celle d’agir en déclenchant immédiatement le putsch, l’emporta et aboutit aux résultats, que l’on sait.
Leur objectif était de prendre le pouvoir, en contrôler la réalité, jouer à fonds la carte de l’apaisement, rassurer le pays et les Mauritaniens, tout en préservant le pouvoir conquis. C’est dans ce sens que le colonel Mohamed ould Lekhal était pressenti pour occuper la fonction de chef d’État-major de l’armée nationale. Il avait été jugé que cet officier était intègre, qu’il avait de l’aura et qu’il pourrait, sous contrôle, incarner l’autorité nécessaire à la consolidation du nouveau pouvoir. Le principe du partage du pouvoir avec les arabo-berbères était retenu. Mais son contenu et ses modalités restaient à définir. Changer le nom du pays, le nom de la monnaie nationale, tout cela n’est que de l’affabulation. Des mensonges diffusés par les renseignements généraux pour diaboliser les conspirateurs, largement repris par Jeune Afrique à l’époque.
Victimes d’injustice
Au bout du compte c’est un commissaire de police, treize officiers dont deux capitaines et 11 lieutenants parmi lesquels deux de la gendarmerie, 21 sous-officiers comprenant cinq de la gendarmerie et deux de la Garde nationale, les brigadiers Djibril Ali Malik Sy dit Samuel Do et Kane Ibrahima qui seront reconnus coupables et condamnés par la cour spéciale de justice le 3 décembre 1987. Tous négro-mauritaniens, recrutés pour la plupart en pleine guerre du Sahara, issus, en majorité, de la féodalité toucouleur, victimes de beaucoup d’injustice et de discrimination dans leurs promotions, dans leurs avancements, dans leurs mutations, dans leur vie sociale et professionnelle de tous les jours. Ils avaient agi par orgueil, plus pour défendre leur dignité que pour autre chose.
L’histoire démontrera un jour que ces officiers étaient de braves guerriers, honnêtes, bons croyants, bons citoyens, fiers d’appartenir à cette Mauritanie et dépourvus de sentiments racistes ou ségrégationnistes quelconques. Ils ont été victimes malheureusement de cette redoutable et impitoyable justice d’exception, expéditive et aux ordres, qui a condamné puis exécuté à la hâte ce dimanche 6 décembre 1987, soixante-douze heures seulement après la lecture du verdict, trois officiers considérés comme les chefs de ce groupe, avec pour motif principal d’être les premiers à se réunir pour décider du projet du coup d’Etat.
En dehors du redoutable et téméraire lieutenant de la Marine, aucun des deux autres n’avait un commandement au moment de cette « tentative », le lieutenant Sarr Amadou était en mission d’inspection à Nouadhibou pour le compte de la direction du matériel et le lieutenant Sy Saidou, qui revenait d’Espagne où il effectuait un stage d’application, était encore à l’état-major de la Gendarmerie, en instance de mutation. Le reste du groupe a été condamné à des peines allant de la perpétuité à 5 ans de prison ferme. Seuls sept parmi eux dont le colonel ANNE Amadou Babaly, le taciturne, ont été reconnus non coupables. « Il suffit d’ajouter ‘’militaire’’ à un mot pour lui faire perdre sa signification. Ainsi, la justice militaire n’est pas la justice, la musique militaire n’est pas la musique, …», disait Clemenceau.
Certains putschistes accusent un officier de la gendarmerie servant hors de la garnison de Nouakchott, d’autres accusent un officier de la marine de les avoir dénoncés par le biais du BED ou du ministère de l’Intérieur. Mais l’hypothèse la plus vraisemblable accuse un sous-officier de la gendarmerie, de l’escadron de la sécurité présidentielle, qui aurait vendu la mèche par l’intermédiaire du commandant, directeur du cabinet militaire, qui aurait présenté l’intéressé directement devant le président du CMSN afin de déjouer la conspiration en procédant immédiatement à l’arrestation des meneurs.
Enorme bavure
Il semble que c’est cette vigilance exceptionnelle, qui a fait défaut aux différents services des renseignements des forces armées et de sécurité, Police, Armée, Gendarmerie et Garde qui n’ont rien vu venir malgré les moyens mis à leur disposition, qui est à l’origine de la propulsion de cet officier supérieur au poste de ministre des affaires étrangères, puis au poste de ministre de l’intérieur avant d’être chargé de conduire la démocratisation militaire, pour ne pas dire la tribalisation de la Mauritanie, qui aboutira au CMSN ère nouvelle, période qui va durer jusqu’au 3 aout 2005.
Si le projet de ces putschistes d’octobre 1987 avait été dénoncé, en dehors de la période d’exception, ils auraient été tout simplement traduits devant un conseil de discipline et rayés des contrôles des forces armées nationales. L’exécution de ces trois officiers constitue incontestablement, la plus grande bavure du régime d’exception. Il n’est pas évident que ce groupe d’officiers ait commis une quelconque infraction au code pénal car l’infraction se compose de trois éléments : un élément légal, un élément moral et un élément matériel.
Or dans leur cas, l’élément matériel et l’élément légal qui sont déterminants, sont absents. Il n’y avait pas eu d’élément matériel, dans la mesure où il n’y avait pas eu début d’exécution,car l’article 88 stipule : « Lorsque l’une des infractions prévues aux articles 83, 85, 86 et 87 aura été exécutée ou simplement tentée avec usage d’armes, la peine sera la mort. » ; tenter c’est commencer en vue de réussir. Il n’y avait pas eu de tentative puisqu’il n’y avait pas eu de commencement. Le 8 juin 2003, il y avait eu une tentative avec usage des armes, puisqu’il y avait eu début d’exécution.
Il n’y avait pas non plus d’élément légal, puisque les attentats ou complots objets des articles 83 à 87 du code pénal, ne sont considérés comme infractions contre l’autorité de l’Etat, que « quand ils sont dirigés contre des régimes constitutionnels ». Or le 22 octobre 1987, la Mauritanie était dirigée par un régime d’exception, usurpateur, qui avait dissout la constitution et qui gouvernait en maître absolu, comme dans un territoire conquis. Certes il y avait bien une intention de prendre le pouvoir par la force qui constitue l’élément moral mais il n’est pas suffisant pour constituer l’infraction.
L’exécution de ces trois officiers constitue donc un assassinat extrajudiciaire, assimilable à un accident de travail comme pour le cas, de deux de leurs compagnons, morts de mauvais traitements et de malnutrition dans le mouroir d’Oualata. Dans ce cas l’Etat mauritanien doit payer la diya aux ayant-droits, et les intéressés doivent tous figurer en bonne place sur la liste de nos martyrs. Les martyrs de la nation. Les autres victimes rescapées doivent aussi obtenir une juste réparation pour tous les malheurs qu’ils ont subis, y compris pour l’exil.
Les véritables acteurs, qui pouvaient agir efficacement ce 22 octobre et qui avaient échappé miraculeusement à la peine capitale, étaient le capitaine Sy Bocar, directeur adjoint du cabinet militaire et les lieutenants Ngaidé Aliou Moktar, commandant de l’escadron de sécurité présidentielle qui aurait eu pour mission de neutraliser le président du CMSN et ses proches collaborateurs, Dia Abdarrahmane, officier de permanence à l’état-major national, Kane Mamadou de la 6ème région militaire, et Diacko Abdoul Kerim du 1er BCP.
Le cas du colonel ANNE Amadou Babaly
Le colonel ANNE est un brillant intendant, l’un des pères fondateurs de l’armée nationale, réputé pour son intelligence, sa modestie, sa courtoisie et surtout pour son honnêteté intellectuelle. C’est lui qui, deux années auparavant presque jour pour jour, le 29 octobre 1985, avait décliné poliment l’offre du chef de l’Etat le nommant chef d’état-major national, en remplacement de son frère, feu le colonel Yall Abdoulaye, au prétexte qu’en sa qualité d’intendant il n’était pas le mieux indiqué pour commander l’armée nationale. Il avait proposé au président de nommer à sa place, le colonel Jibril Ould Abdallahi qui avait, selon lui, de meilleures prédispositions pour cet emploi. C’est ainsi que ce dernier avait été nommé le même jour, chef d’état-major national.
Cette réaction digne et spontanée, on ne peut plus correcte, faite dans le bureau du chef de l’Etat et en présence du colonel Jibril, démontre à elle seule que cet excellent officier n’avait aucune ambition pour prendre le pouvoir par la force, et qu’il n’était animé d’aucun sentiment sectaire ou ségrégationniste quelconque. Au contraire, ce comportement montre toute la noblesse de l’homme, sa très grande vertu, son sens élevé de l’honneur, du devoir, de la fraternité, de l’amitié, et son respect absolu de la déontologie de l’officier.
Aveuglé par le pouvoir, le président du CMSN avait oublié ce noble geste du 29 octobre 1985, et avait cherché en vain, à compromettre inutilement, son compagnon d’armes, dans cette désagréable aventure.
Ainsi, ce grand officier s’était trouvé en très mauvaise posture, devant une confrontation surréaliste, qu’on lui imposait avec de jeunes officiers dont la plupart pouvaient être ses enfants, et qui n’étaient liés à lui que par le respect dû à son rang, à son âge et à la considération réciproque, sentiments très appréciés en milieu poular. A l’issue de cette épreuve difficile, le colonel Anne était sorti grandi.
Le héros
Le lieutenant Bâ Seydi de la Marine Nationale condamné à mort, s’était particulièrement distingué par son orgueil, son courage et sa témérité depuis l’enquête préliminaire jusqu’au poteau d’exécution. Pendant la phase instruction, lorsqu’il avait été confronté avec certains de ses subordonnés, il avait dit au juge d’instruction : « Monsieur le juge, mon honneur d’officier m’empêche d’accepter d’être contredit par mes subordonnés, c’est pourquoi je vous demande de considérer comme vrai tout ce qu’ils vous disent me concernant ». Après le verdict, il avait dit à ses avocats : « On avait aucune intention de massacrer qui que ce soit, mais on avait bien l’intention de prendre le pouvoir par la force. Et si c’était à refaire, je suis prêt à recommencer. »
A quelques minutes de son exécution, on lui avait demandé, comme en pareille circonstance, s’il avait quelque chose à dire ou des souhaits à formuler. L’audacieux lieutenant a répondu sereinement à son avocat maître Mohamed Cheine Ould Mouhamadou, avant de regagner le poteau d’exécution: “Oui maître, j’ai deux commissions et un témoignage. La première commission concerne mes parents, ma mère et mon père. Ils sont venus de Boghé et ont beaucoup souffert en apprenant mon arrestation. Ils souffriront encore plus en apprenant mon exécution, je te demande d’aller les voir pour leur demander de me pardonner. La deuxième commission concerne mon frère qui travaille dans une banque de la place, il faut le voir pour qu’il paye une dette de 7000 ouguiya à mon créancier, un boutiquier aux environs de l’hôpital national. Quant au témoignage je voudrais vous prendre à témoins.” Puis il prononça la chahada en arabe: «J’atteste qu’il n’y a qu’un seul Dieu et que Mohamed est son prophète.”
L’avocat lui avait promis de payer lui-même cette dette et qu’il ferait sa commission pour ses parents immédiatement.
Attachés tous les trois sur les poteaux d’exécution, tenus en joue par trois tireurs à une distance de six mètres, les trois officiers attendaient dignement la fin de leur vie qui ne tenait plus qu’à un ordre du chef du peloton d’exécution. Puis vint le moment fatidique: ” Feu.” Les trois premiers coups partirent, le tireur chargé de tuer le lieutenant BA Seidi le blessa à la hanche, l’officier aurait dit, selon plusieurs témoins, à son bourreau : « Tu m’as blessé, lève le tir, vise très bien ». Seidi BAH. Seidi BAH. Seidi BAH.
Par ce comportement exceptionnellement courageux, ce martyr originaire du Fouta, avait démontré qu’il existait en Mauritanie le 6 décembre 1987 à Nouakchott, des hommes qui avaient, devant l’épreuve de la mort, autant de témérité que le martyr Saddam Hussein exécuté par pendaison le 30 décembre 2006 à Baghdad. Enfin, les trois officiers rendirent leur dernier souffle en implorant Allah au cri d’Allah Akbar, Allah Akbar, Allah Akbar. LA ILAHA ILLA ALLAH MOHAMEDOUNE RASSOULOU ALLAH.
Puisse ALLAH le tout puissant, accueillir nos martyrs dans son paradis. Puisse-t-il faire que la Mauritanie se réconcilie un jour avec ses enfants du Fouta, du Walo et du Guidimagha.
Découverte : L’histoire jamais racontée de “Diallo Pithie”
Un marchand d’oiseaux, devenu un marchand de rêves. Derrière l’histoire de Diallo Pithie, un homme qui a fait fortune dans la vente des oiseaux en cage dans les rues de Dakar, se cache celle de Amadou Diallo, un opérateur économique hors pair, qui a été le précurseur dans beaucoup de chantiers qui étaient, à l’époque, la chasse gardée des Européens. Grâce aux témoignages de ses enfants, Seneweb retrace la fabuleuse histoire de cet homme, qui a su construire son « senegalese dream » dans le Dakar des années 30. Découverte?!
Vous avez au moins une fois entendu parler de lui. À défaut, peut-être vous êtes passés, se serait-ce qu’une fois, sur la ruelle qui porte son nom : Tally Diallo. Cette route qui quitte Thiaroye et qui mène à Yeumbeul.
Si vous habitez Dakar, vous ne pouvez pas passer à côté de Diallo Pithie. Un jeune venu du Fouta qui a fait fortune dans la vente d’oiseaux. Un commerce lucratif qui lui a permis d’asseoir une renommée internationale. De Dakar à Marseille en passant par New York, Amadou Diallo a fait le tour du monde avec ses oiseaux.
Ses enfants, Alassane (69 ans) et Mamadou, retracent son odyssée. C’est à l’adolescence (16 ans) que « Diallo Pithie » débarque à Dakar. À l’époque, il est accueilli par la famille léboue de Amadou Alassane Ndoye. Il s’essaie à la natation et au cyclisme et travaille parallèlement chez un Français comme travailleur de maison. Il y apprend à parler français et y connut ses premières amours avec les oiseaux.
« En voyant les toubabs s’émerveiller à la vue des oiseaux, cela a créé un déclic chez lui. Et c’est là qu’il s’est demandé pourquoi ne pas essayer de ramener d’autres espèces en dehors de celles qui sont dans la maison », raconte Amadou, un de ses fils.
Sur les quais du vieux port…
Diallo Pithie, sans le savoir, se lançait ainsi sur un chantier qui allait le rendre riche. Il parcourt les régions du Sénégal à la recherche d’espèces rares. De retour à Dakar, il se rendait au marché Kermel pour vendre ses oiseaux aux Européens, qui se les arrachaient. Le commerce commençait petit à petit à porter ses fruits. Et il commençait à asseoir une petite renommée à Dakar. Les rêves plein la tête, l’argent commençant à couler à flots, il décide de conquérir le marché international. Diallo Pithie décide de se rendre en Europe. « C’était dans les années 30, c’est-à-dire entre les deux guerres mondiales. Il s’est confectionné une grande cage. Il y a mis les oiseaux et a embarqué dans la cale du paquebot qui faisait la navette Dakar-Marseille-Dakar, avec de la provision en mil. Arrivé à Marseille, il a sorti sa cage d’oiseaux et s’est installé sur le quai », explique son fils. Les oiseaux se vendent comme du petit pain.
L’Africain qui venait avec les oiseaux
Après cette première expérience, il retourne à Dakar et décide de faire la navette Dakar-Marseille. Sur le vieux port, il se fait connaitre comme « l’Africain qui venait avec les oiseaux ». « Il s’est dit si ça a marché à Marseille, pourquoi ne pas essayer de chercher plus loin. Il a alors décidé d’aller à Paris. Le voyage suivant, il a pris ses oiseaux et y est allé ». Pour faire une économie de temps, il décide de faire le trajet par avion. « Il est alors allé voir, à l’époque, le chef d’agence de la compagnie Air France et lui a manifesté son désir de faire voyager ses oiseaux par avion, raconte son fils Alassane. Le monsieur a bondi de sa chaise et lui a demandé s’il allait bien. Il ne pouvait imaginer des oiseaux dans un avion. Mon papa lui a manifesté sa disponibilité à accompagner les oiseaux dans la soute de l’avion. Son interlocuteur lui a répondu que cela n’était pas possible d’autant plus que dans les soutes, il faisait un froid extrême. Et que la température était insupportable pour les oiseaux. Mais, cela ne l’a pas dissuadé. Il a alors répondu qu’il est prêt à tenter le coup, quel qu’en soit le risque. Pas trop convaincu, Air France l’envoie balader, avant de lui manifester plus tard, son intérêt ».
Birds in the air
« Les oiseaux ont été mis dans une cage. Il s’est payé un billet d’avion et il est parti », relate Alassane. En dépit de quelques mortalités, Diallo Pithie et ses oiseaux arrivent à bon port. « Il s’est dit avec aussi peu de mortalité, mon problème est donc réglé ». Par la suite, il prend contact avec d’autres commerçants et d’autres compagnies aériennes. Après la France, il investit l’Italie. Et de bouche à oreille, les gens ont commencé à parler des oiseaux du Sénégal. Son succès devient réel. Et dépasse outre-Manche. Il traverse l’Europe, les États-Unis, le Japon, etc. Bref, Diallo Pithie fait le tour du monde.
Pour l’aider dans ses comptes, le vieux Amadou, illettré, voyage avec son fils Alassane. « Le vieux passait récupérer son argent à Paris, à Marseille, à Stockholm, en Italie. Moi, j’ai fait le tour du monde avec lui. Même aux usa, j’ai été avec lui pour rencontrer les clients, prendre des contacts, de nouvelles commandes. Ce commerce s’est, par la suite, tellement développé que toutes les compagnies aériennes voulaient collaborer avec lui, sachant que les oiseaux payaient tellement cher. Il était finalement choyé comme un roi de sorte que quand il voyageait, on lui offrait même le billet gratuitement du fait du chiffre d’affaires qu’il réalisait à travers le monde », raconte-t-il un brin nostalgique.
Appelez-le désormais, Capitaine Diallo?!
Ainsi, le vieil Amadou Diallo finit par bâtir un empire grâce au commerce de ses oiseaux. Mais, au détour d’un de ses voyages, le destin le mit sur une autre piste. « Pendant un de nos voyages, je crois qu’on était en Suède, on était rentré tard, il m’a amené au restaurant. Et là, il a commandé du poisson. Quand on a fini de manger, le serveur lui a présenté l’addition. Il a bondi de sa chaise. Il a demandé s’il n’y avait pas d’erreur. Il ne pouvait pas comprendre que le poisson coûte aussi cher en Europe ». À son retour au Sénégal, il décide de se lancer dans le commerce. Et s’engage dans la pêche. « À l’époque, les toubabs avaient le monopole de ce secteur et avaient organisé une mafia pour barrer la route aux Sénégalais », se souvient Mamadou. Celui-ci, de souligner que son père a dû batailler avec les toubabs pour changer la donne.
Mais, le commerce du poisson à l’époque pour un Africain était un véritable parcours du combattant. « Comme pour vendre le stock en Europe, il fallait utiliser les bateaux, les compagnies maritimes à l’image de Delmas et autres l’ont boycotté. Elles s’étaient liguées contre mon père et lui refusaient le transport de son stock de poissons. Il s’est ainsi retrouvé avec le produit sur les bras. À partir de là, il s’est dit qu’il n’arriverait à rien tant que toute la chaine n’était pas en place. La congélation, le transport, les bateaux de pêche, toute cette chaine étaient entre les mains des toubabs », explique le fils.
Ainsi, il se paie un bateau de pêche. Parce que les variétés qui marchaient en Europe telles que les soles. La pêche artisanale ne pouvait pas nous l’offrir. Ce qui l’a poussé à se payer un navire de pêche. Un jour, il a voulu se payer un stock de poissons que des Français venaient de débarquer, mais ces derniers avaient refusé de le lui vendre. Il s’est dit que cela confirme l’appréhension qu’il avait. Et c’est comme ça qu’il a acheté son premier navire de pêche dans un port français ».
Mais, un autre problème se dressait devant lui : où trouver un commandant pour piloter son navire. À cette époque, seuls les commandants français savaient piloter les bateaux de pêche. Il n’y avait encore aucun Sénégalais capable de le faire. Cela ne le freinait pas pour autant. Il disait qu’il était même prêt à casquer le prix fort pour recruter un commandant de navire européen. À l’époque, il était prêt à payer 100 millions à l’Européen qui accepterait de piloter son bateau de pêche. Il se convainc finalement que la solution était de faire naviguer des Sénégalais comme lui. Malheureusement, aucun Sénégalais ne remplissait les conditions requises pour piloter un navire de pêche. Il est alors allé voir le ministre de la Pêche de l’époque, en l’occurrence Mady Cissokho. Il lui a présenté la situation. Mais, le ministre lui a dit que ce n’était pas possible de trouver un commandant sénégalais, car il n’y en avait pas encore.
Il est allé voir le vieux Seydou Nourou Tall qui était son ami et son marabout. Ensemble, ils sont allés voir le président de la République, Léopold Sédar Senghor. Celui-ci leur a octroyé une dérogation. Il a alors pris un marin sénégalais expérimenté et lui a confié le bateau. Quand on lui disait que c’était risqué, il s’en foutait. Il disait que l’appétit venait en mangeant et répondait à qui voulait l’entendre qu’il arriverait à bout, quel qu’en soit le prix. Et cela même si ça devait lui coûtait des bateaux.
Un premier cargo baptisé « Mame Abdou Aziz Sy »
« C’est mon bateau. Tant pis, je cours le risque?! C’est en forgeant qu’on devient forgeron. J’arriverai à avoir ce que je veux », disait-il, à l’époque. Et parallèlement, il a dit au ministre : « Je veux, maintenant, qu’on forme des Sénégalais pour qu’ils puissent avoir leurs diplômes, parce que moi, je ne compte pas m’arrêter en un seul bateau. Je veux, à l’avenir, que tous mes bateaux soient pilotés par des Sénégalais. Je veux que les Sénégalais soient formés. Je suis prêt à mettre les moyens qu’il faut. Mais, il faut des marins sénégalais bien formés et capables de piloter des bateaux de pêche. C’est comme cela qu’il a réussi à avoir un premier Commandant sénégalais aux commandes de son bateau. Avec celui-ci, il a fait de bonnes choses », a indiqué Mamadou, le fils ainé de Diallo Pithie. Ce dernier d’indiquer que son papa « a fini par se payer 12 bateaux, tous pilotés par des Sénégalais ».
Alassane, d’ajouter : « Il a eu ses bateaux, il a construit, entre temps, une usine de congélation au Port de pêche, il a créé aussi un atelier pour l’entretien et la réparation des bateaux, il s’est dit qu’il lui restait d’exporter les produits de la pêche en Europe et ailleurs. Et quand il voulait faire une réservation pour envoyer son stock en France, ses interlocuteurs lui répondaient qu’ils étaient pleins. Tout cela découlait de la solidarité des toubabs qui avaient ourdi un complot, à l’époque, pour ne pas ouvrir une brèche à des Sénégalais. Il y avait une mafia. Il s’est dit, qu’à cela ne tienne?! Je vais acheter un cargo pour faire le transport maritime » ». Il a acheté son premier cargo vers 1975 à 600 millions de nos Francs et l’a appelé « ’Mame Abdou Aziz Sy » ». Ensuite, il s’est payé un deuxième cargo à 800 millions qu’il a baptisé « Malick Sy ». Les cargos faisaient toute la Méditerranée, l’Europe et l’Afrique et couvraient, entre autres, Abidjan, Lomé, Ghana, etc.
À ce propos, faute de Sénégalais capables de piloter, il a engagé, au début, des Européens à qui il a confié ses deux cargos, tout en ayant le même esprit. Il a alors financé des Sénégalais pour qu’ils puissent avoir les diplômes de pilote international. C’est ainsi qu’il a eu le premier sénégalais à avoir piloté un cargo. Il s’agit d’un certain Mbodj. Finalement, les deux cargos étaient pilotés par des « » commandants sénégalais » ». Il venait ainsi de boucler la chaine et d’être indépendant parce qu’il disait ne plus vouloir dépendre de personne. « » Mon propre poisson, je le pêche moi-même, je le congèle moi-même, je le stocke moi-même et c’est moi qui le transporte?! », aimait-il à dire. C’est vous dire qu’à chaque fois qu’il y a un obstacle, il estimait que ce n’est pas insurmontable. D’autant que Dieu lui a donné les moyens de les surmonter ».
« L’argent qu’il tirait de la vente d’oiseaux était très important. Il a investi dans l’achat de maisons, mais qu’il a ensuite fini par abandonner. Au début de ses activités, dans le commerce d’oiseaux, il s’était fait construire des baraques dans l’enceinte de notre maison familiale à Thiaroye. Comme les choses prospéraient, il les a aménagés et a construit de grandes voilières dans le site et y a stocké 100 000 paires d’oiseaux, c’est-à-dire 200 000 oiseaux. Et puis chaque jour, on avait des expéditions sur le Japon, sur l’Europe, etc. Et tous les jours, les avions partaient avec nos oiseaux, dans leurs soutes. Il en avait donc gardé un stock important. Lorsque, vers les années 50, il a construit des bâtiments pour les oiseaux, les gens se moquaient de lui. Certains passants disaient que le vieux était devenu fou, lui qui construisait des bâtiments pour les oiseaux, alors que les plus lucides, eux, le faisaient pour les humains.
Un visiteur nommé Senghor
Par la suite, Amadou Diallo avait acheté, à Thiaroye-Sur-Mer pour les besoins de l’extension de ses activités, des bâtiments pour les perroquets, d’autres pour des pigeons. Et tant d’autres pour les différentes espèces d’oiseaux. “Mon père avait construit des volières bien aménagées, bien aérées, mais aussi avec le confort nécessaire pour les oiseaux. Cela suscitait d’ailleurs la curiosité du président Senghor. Il avait tendance à venir voir les oiseaux, à chaque fois avant d’aller à Popenguine. À la maison, Senghor amenait, chaque semaine, sa famille, mais aussi des invités de temps en temps. Et comme les issues qui menaient vers chez nous, étaient sablonneuses, le président, Senghor y a fait construire une route qui s’arrêtait devant notre demeure. Il venait avec sa famille, voire le vieux, discuter avec lui avant d’aller à Popenguine. Il gérait parallèlement le commerce d’oiseaux qui était son domaine fétiche. Pour lui, il était hors de question, de l’abandonner. Ce sont avec les revenus tirés des oiseaux qu’il finançait la pêche”.
Après le poisson, Amadou Diallo se lance dans la vente de produits horticoles. L’idée lui est venue de la France. C’était en 1974. Un jour, séjournant dans ce pays, il a assisté au débarquement, à l’aéroport, d’une cargaison de haricots. Quand il s’est renseigné, on lui a dit que c’était une denrée très prisée et très chère. Il s’est dit : “» alors, pourquoi ne pas se lancer dans cette filière?? Pourquoi ne pas cultiver le haricot et le vendre à prix d’or. C’est à son retour au Sénégal qu’il a créé, avec un Européen, une société d’exploitation horticole. Il s’est mis ensuite, à faire de la culture maraichère pour l’exportation. C’est comme cela qu’il avait ses trois activités qu’il menait parallèlement », raconte son fils.
Inhumé dans une mosquée dont il a financé la construction ‘Rien qu’au niveau de la pêche, on avait 800 employés qui y travaillaient. Pour les oiseaux, il y avait même plus, parce que dans toutes les régions, il avait créé des voilières. Au moins, il avait 700 oiseliers attitrés qui travaillaient pour lui. Mais, c’est la gestion de sa flotte de bateau qui avait commencé à le ruiner. Mais, cela ne l’a pas obligé à abandonner la pêche. Il pensait que c’était un problème cyclique. Mais, le problème était réel. Le produit s’est raréfié, beaucoup de licences ont été données. Ce n’était donc, plus comme avant. Les bateaux devenaient vieux, l’entretien devenait de plus en plus cher. C’est comme cela qu’on a finalement arrêté la pêche pour continuer avec le commerce des oiseaux et l’horticulture’.
Après une vie bien remplie, des défis relevés, le vieux Diallo Pithie a quitté ce monde, le 5 mai 1998 à Dakar. Il a été inhumé à Thiaroye Gare, plus exactement à Tally Diallo, dans l’enceinte d’une mosquée dont il a lui-même financé la construction. Il avait 80 ans (1918-1998). Sa famille, elle, garde de lui le souvenir d’un homme de défis, humble, simple et modeste.
C’est après sa disparition que la famille et les proches ont vu sa dimension. Quand, il rentrait de ses activités, vers 22 heures et parfois plus, il trouvait beaucoup de personnes qui l’attendaient devant la maison. Les gens comptaient énormément sur lui. ‘Quelle que soit l’heure, on l’attendait. Il réglait des problèmes d’argent, conjugaux et des charges sociales. Pour lui, rendre service était aussi important que son travail. C’était un sacerdoce pour lui. Il avait horreur du ‘’m’as-tu-vu’’. Il disait : ‘’jamais la politique’’. Pour preuve, confie son fils ‘le président Abdou Diouf avait fait appel à lui pour l’élever au grade de l’Ordre national du Lion, mais il a refusé. Il recommandait à son entourage de ne jamais dormir sur ses lauriers. À ses enfants, il disait toujours ‘’naagû baxuul’’’ (il ne faut jamais dormir sur ses lauriers). Aujourd’hui, deux de ses fils pérennisent son héritage. Et font de la vente des oiseaux, leur gagne-pain.
Auteur: Youssoupha MINE – Seneweb.com
Les Harratines, ces oubliés de la République (Suite et fin) Par le colonel (E/R) Oumar Ould Beibecar
Le manifeste des harratines proclamé en grande pompe à Nouakchott le 29 avril 2013, solennellement avec la présence remarquée des leaders harratines opportunistes et de leurs soutiens, contrairement au manifeste diabolisé du négro-mauritanien opprimé, élaboré lui dans la clandestinité en avril 1986, donne l’impression qu’il a été conçu avec la bénédiction du pouvoir féodal, pour amuser la galerie et gagner ainsi du temps, ce qui n’augure pas de lendemains meilleurs. L’absence à ce forum des chefs des adwabas et des notables harratines de l’intérieur, grands électeurs, qui subissent au quotidien les injustices, les mépris et les frustrations de toutes sortes, démontre si besoin est que le pouvoir féodal continue de jouer sa mauvaise comédie, qui ne s’intéresse qu’à l’élite harratine dont la majorité est manipulable à volonté.
Ce tintamarre aboutira sans doute, avant d’être oublié, à la nomination de quelques opportunistes harratines et leurs proches à des postes importants et à la distribution bien ciblée de quelques charités sur la base du leitmotiv chanté par ces abolitionnistes : la discrimination positive.
Action visant à favoriser les groupes sous-représentés afin de corriger autant que faire se peut les inégalités. Alors que cette discrimination positive bien contrôlée par le pouvoir féodal est contreproductive.
Les centaines de femmes recrutées à la fonction publique sur la base de ce fameux principe sont majoritairement triées parmi les proches du pouvoir tribal et des partis de la majorité. Les cinquante imams harratines n’échappent pas à la règle et sont recrutés majoritairement parmi les anciens esclaves fiers d’être soumis au pouvoir féodal.
Cadres opportunistes
Toutes mesures de discrimination positive susceptibles de réduire les inégalités de chances, les inégalités sociales, les inégalités de promotion dont souffrent encore et toujours les anciens esclaves, doivent commencer par la base.
C’est-à-dire dans les adwabas et dans les banlieues des grandes villes où vivent ces populations discriminées. En donnant la priorité aux infrastructures scolaires, médicales et routières et non pas se contenter de donner des promotions à certains cadres opportunistes qui tirent profit de ce fléau social.
L’accès à la fonction publique doit se faire sur concours conformément à la loi, une commission consensuelle assermentée doit être choisie parmi les meilleurs cadres pour veiller à la transparence et à la bonne exécution des examens et concours.
Aujourd’hui les opportunistes du mouvement Elhor anciens ministres, anciens ambassadeurs ou hauts fonctionnaires et leurs soutiens sont majoritairement devenus au fil du temps, partie intégrante du système féodal, certains apparaissent même plus royalistes que le roi, et doivent être combattus.
Quant aux idéalistes les plus actifs notamment ceux de l’IRA, ils ont été infiltrés et manipulés ouvertement par les services de renseignement du pouvoir féodal, leur prodiguant un discours extrémiste belliqueux au besoin, qui a abouti à leur emprisonnement suite à la profanation des livres du Fikh malékite, action qui ressemble à une véritable mise en scène orchestrée par le pouvoir pour les diaboliser.
Cependant, IRA est discréditée par son caractère violent, insolent et provocateur ainsi que par son comportement fanatique et sectaire qui prend parfois des allures racistes incompatibles avec sa mission.
En effet, ils ont dénoncé avec arrogance, à plusieurs reprises, le travail des domestiques mineurs harratines rémunérés chez des familles beidanes modestes, comme formes d’esclavage modernes, alors qu’ils n’ont jamais dénoncé la même catégorie de domestiques qui travaillent dans les mêmes conditions chez certains cadres et notables harratines, ainsi que les mathoudos et les comés travaillant dans les mêmes conditions chez les toucouleurs et les soninkés camouflés tous par la couleur de leur peau.
Quand le pouvoir tribaliste a voulu utiliser IRA pour les besoins de la mascarade électorale dont les résultats sont connus à l’avance, il a mis leur chef en liberté provisoire, lui a fourni un casier judiciaire vierge en violation de la loi, et fait entériner sa candidature à la présidence de la république par le conseil constitutionnel tribal, présidé pour la circonstance par un hartani du pouvoir féodal. En légitimant cette imposture IRA a renforcé le pouvoir qu’elle était censée combattre.
Plus tard quand le chef de l’IRA, revigoré par son prix et par son score aux élections de juillet 2014 a voulu apaiser son discours pour être fréquentable, il a été mis en prison parce que le pouvoir ne peut accepter cette organisation qu’avec son discours violent et méchant destiné à terroriser la communauté Beidane afin de l’obliger à rester solidaire du système féodal.
On ne peut oublier le rôle combien positif des nombreuses associations abolitionnistes de la société civile et particulièrement de SOS ESCLAVES qui lutte inlassablement depuis plusieurs années avec élégance et pédagogie, en toute indépendance et avec des moyens modestes, dans le respect des règles du droit et de la Charia pour la liberté et le bien être des anciens esclaves.
Les harratines sont une chance pour la Mauritanie. Les tribus arabo- berbères et négro- mauritaniennes doivent nécessairement les adopter. Il est grand temps que nos communautés acceptent le principe fondateur de la République : L’égalité citoyenne.
Enjeu vital
Pour renforcer cette égalité, l’un des principes fondateurs de notre sainte religion, on doit nécessairement encourager le métissage entre nos communautés et nos castes. On ne doit pas être plus royaliste que le roi.
Le prophète Mohamed PSL avait donné en mariage sa cousine Zaïnab bint Jahch à son ancien esclave Zayd Ibn Haritha. Il lui avait donné le commandement de l’Armée musulmane lors de la bataille de Mu’tah où il avait sous son commandement beaucoup de compagnons du Prophète.
Plus tard le Prophète désigna Oussama le fils de Zayd et de Zaïnab pour diriger une autre armée qui comprenait Omar Ibn Elkhattab, le futur Calife. Ce dernier, sur son lit de mort, avait dit devant d’illustres compagnons du Prophète dont notamment Othmane, Ali, Saad, Zoubeir, Talha et Abderrahmane ibn Awf : « Si Salim l’affranchi de Abou Houdheyfa était encore parmi nous, je l’aurai nommé pour me succéder ».
Tout cela prouve, si besoin est, que dans l’Islam seuls les critères objectifs de piété, de probité morale, de compétence et d’aptitude sont à prendre en considération. L’épanouissement des harratines en harmonie avec les autres composantes, aura un effet salutaire pour notre peuple et augure des lendemains meilleurs. Le pouvoir et la classe politique doivent tenir compte de cet enjeu vital pour la concorde nationale.
La population mauritanienne estimée à 3 500 000 habitants est approximativement répartie ainsi qu’il suit : 35 à 40 % de Beidanes, 35 à 40 % de Harratines et entre 25 à 30% de Négro-mauritaniens.
Selon certaines estimations, l’élément harratine est majoritaire au sein de la communauté arabo-berbère, d’autres estiment le contraire. En l’absence de statistiques fiables et consensuelles, il est quasiment impossible de trouver des estimations qui ne soient pas contestées par l’une ou l’autre des composantes.
Incontestablement, certains facteurs démographiques réels privilégient la majorité de la composante noire, notamment un taux de fécondité beaucoup plus élevé chez les Négro-mauritaniens (Haratine, Soninké, Haalpulaar, Wolof) doublé du mariage précoce, la polygamie pratiquée presque exclusivement en milieu noir et l’instabilité des foyers arabo-berbères caractérisée par un taux très important de divorces doublée d’un taux très élevé de mariages tardifs et de célibat.
Sur le plan démographique, le rapport de force dans un proche avenir sera très favorable aux harratines. Ceux-ci doivent nécessairement protéger leur pays contre les appétits du pouvoir féodal destructeur, responsable de l’esclavage et du racisme en adoptant une attitude pacifique et en évitant coûte que coûte toute confrontation avec ce pouvoir tribaliste, sans foi ni loi, qui n’a pas respecté le caractère sacré du Ramadan de 1989 et qui met en péril l’existence même de la Mauritanie.
L’avenir de la Mauritanie sera donc ce qu’en feront les harratines. Ils pourront même changer le nom du pays en le nommant par exemple la République Islamique HARTANIA. Ainsi tous les féodaux, descendants du Prophète, fils d’Emirs et de chefs de tribus ou de cantons , nobles arabo-berbères et négro-mauritaniens, irréductibles féodaux, seront obligés chacun en ce qui le concerne de décliner sa nationalité en disant : « Je suis hartani » « Je suis hartania ». Ce jour-là tous les complexes disparaîtront.
Source : Le Calame
Les Harratines, ces oubliés de la République (deuxième partie) Par le colonel (E/R) Oumar Old Beibecar
De la responsabilité de l’esclavage
La France a une très grande part de responsabilité dans la consolidation de l’esclavage en Mauritanie, à cause de sa grande tolérance, de son indulgence et de sa bienveillance à l’égard du lobby féodal mauritanien, son partenaire, son complice, qu’elle n’a pas soumis au décret du 12-12-1905 dont la colonie de Mauritanie fut la seule exemptée tacitement.
Les colons adeptes de l’école de l’islamisant Coppolani, qui consiste à respecter scrupuleusement l’Islam sunnite, ont été encouragés par les oulémas des émirs, obligés d’interpréter le coran et la sunna suivant le rite malékite, dans le sens de la légitimation de l’esclavage.
A ce propos, le commandant François BESLAY chef d’état major de l’Armée Mauritanienne en 1961, écrivait : « En ce qui concerne les « serviteurs », je pense qu’il faut, sans vouloir jouer sur les mots, faire ici la distinction entre la condition des serviteurs non libres donc « captif » et celle d’ « esclave ».
Officiellement il n’y avait en effet pas d’ « esclaves » en Mauritanie dans la mesure où ce terme rappelle fâcheusement la traite des Noirs et les esclaves enchaînés, achetés puis revendus aux Antilles ou en Amérique du nord. Il n’y avait, il n’y a encore que des serviteurs et des servantes appartenant, il est vrai à un maître et, de ce fait, intégrés à sa famille pour le meilleur et pour le pire. Sans doute étaient-ils au bas de l’échelle sociale, chargés de toutes les besognes serviles mais, nombre d’entre eux s’y trouvaient à leur place, acceptant volontiers une situation leur assurant sécurité et affection, et se dévouaient à leur maître comme le faisaient sans doute chez nous naguère les vieux serviteurs de la Noblesse attachés à vie à certaines familles.
Dans la société moyenâgeuse qu’était celle de la Mauritanie à l’époque, il n’y avait là rien de bien choquant. Mais la barrière sociale n’existe plus hors la vue des témoins et « un guerrier seul en route avec son serviteur partagera avec lui sa nourriture avec une simplicité amicale qui serait une leçon pour bien des démocrates. ». Certes des excès étaient commis et des serviteurs maltraités par leurs maitres. Mais leur « libération » n’aurait alors la plupart du temps, rien résolu du tout, les jetant seulement en pleine insécurité, sans patron donc sans travail : qui eut alors osé utiliser le serviteur d’un autre sans son consentement.
On convoquait donc le mauvais maître et, en présence du serviteur, on exigeait qu’il s’engage à traiter ce dernier humainement, faute de quoi il lui serait enlevé pour être libéré. Moyennant quoi généralement tout s’arrangeait. Par contre l’administration française s’opposait efficacement à toute vente de serviteur, c’est-à-dire, en fait, à tout changement de patron sans l’accord de l’intéressé et notamment à toute séparation de la mère et de ses jeunes enfants ou même de la servante et de son mari. Une tentative de « libération » massive fut faite en 1944 par les autorités françaises au profit des serviteurs des Réguibats Legwacem.
On dut vite faire machine arrière. Le Peloton méhariste de la Saoura qui nomadisait entre Bir Mogrein et Tindouf étant alors envahi de Noirs évadés, qu’il fallait nourrir, et les Legwacem prêts à repartir en dissidence si on ne leur rendait pas ceux dont l’absence privait le troupeau de ses bergers.
Pratiquement, au fil des années et sous la pression constante des autorités françaises qui refusaient de reconnaitre un droit de propriété quelconque en la matière, nombre de serviteurs passèrent insensiblement du statut de serviteur à celui d’affranchi ; c’est-à-dire que certains reçurent un salaire et, libres de prendre leurs distances avec leurs anciens maîtres, ils se mirent souvent à travailler pour leur propre compte. A tel point qu’en 1958, peu après la mise en place de l’autonomie interne, le vice-président du conseil de gouvernement, Mokhtar Ould Daddah, se fit à plusieurs reprises au cours de ses visites chez les nomades, interpeller par de vieux chefs qui réclamaient : « Rends-nous, maintenant que nous sommes une République Islamique, ceux dont le coran nous reconnaît la propriété !
Néanmoins dans les années 1965, un responsable de la Miferma à Zouerate me rapportait qu’il recevait parfois la visite de Beidhanes venant réclamer que leur soit versé le salaire de « leurs » serviteurs qui travaillaient à la mine !
Pour en revenir aux années 40-50, il existait malheureusement un trafic, clandestin bien sûr, d’ « esclaves », et je reprends le terme car il s’agissait bien de Noirs volés, vendus ou revendus contre leur gré. Un esclave se vendait alors dans le sud marocain pour plus de 20 chameaux ! J’eus personnellement deux fois l’occasion d’arrêter de tels trafiquants.»
Autorités françaises tolérantes
Il ressort de ce qui précède que les autorités françaises pendant la pacification étaient très tolérantes et avaient contribué à transformer l’esclavage en servage, et les esclaves en serviteurs ou en serfs. Ces mêmes autorités avaient renforcé le pouvoir des maîtres ou des seigneurs en leur attribuant toutes les terres arables, pour perpétuer leur domination sur la majorité de ces serviteurs dont le seul moyen de survie était de labourer la terre.
Aucun serviteur n’avait droit de propriété sur ces terres mises en valeur grâce à son labeur et à celui de ses ascendants. La réforme foncière de 1983 n’a pas modifié la situation. Les anciens maîtres sont toujours les propriétaires des terres et les anciens esclaves sont toujours les cultivateurs de ces terres. Profitant de la période de pacification de 1900 au 28 novembre 1960, les français avaient très bien préparé la période de néo- colonisation qui a commencé depuis l’indépendance et qui continue jusqu’à présent.
Avec deux périodes distinctes, celle des bâtisseurs qui se situe entre le 28 novembre 1960 et le 10 juillet 1978 beaucoup plus marquée par une vraie volonté de réduire les inégalités et de promouvoir une véritable égalité citoyenne. A ce sujet le père de la nation déclarait en janvier 1999 dans une interview à Jeune Afrique économie : «C’est une réalité sociologique de la Mauritanie. Malheureusement un héritage très ancré dans les mœurs du pays. Nous n’avions pu l’attaquer de front parce que nous avions un pays à créer d’urgence, et à partir de rien. Il fallait résoudre le problème au fur et à mesure que des solutions étaient envisageables. Notre constitution de 1961 supprimait l’esclavage. Dans la pratique administrative et judiciaire, il fut donné instruction aux forces de sécurité et aux agents de la justice de ne plus considérer l’esclavage comme une institution et de le combattre. »
La seconde période, celle des régimes d’exception destructeurs, qui a commencé ce 10 juillet 1978 et qui continue jusqu’à présent, est marquée par un recul des libertés et des valeurs morales ainsi que par la montée en puissance des inégalités intercommunautaires, interrégionales et intertribales avec pour summum la déportation et le génocide.
Les écoles de la discrimination
En effet, les Français avant de partir avaient bien préparé leur succession au profit de leurs héritiers et complices les chefs de tribus ou fils de grandes tentes arabo- berbères et négro-mauritaniens. C’est ainsi qu’ils ont institué dans les quatre coins du pays les écoles des fils de chefs, dont les premières avaient été construites à Boutilimit (1914), à Atar (1936) et à Kiffa (1939) pour reproduire la société coloniale en vue de préserver les intérêts de la métropole et perpétuer la colonisation sous une autre forme plus civilisée et acceptable par les populations autochtones. Comme leurs noms l’indiquent ces écoles privilégiaient clairement la noblesse et étaient interdites aux serviteurs et aux autres castes auxquels les colons ne faisaient pas confiance et ne leur accordaient aucune importance.
Pour cette raison la France doit être sollicitée aujourd’hui, pour participer avec le gouvernement mauritanien à l’alimentation d’un Fonds de Solidarité pour la Dignité, au profit des victimes de l’esclavage ou personnes assimilées, pour réparer autant que faire se peut les préjudices subis par les descendants de ces esclaves. Pour la France, sa responsabilité se situe entre le 12 décembre 1905, date du début de la répression de la traite des esclaves dans les colonies et le 28 novembre 1960. Elle doit participer avec une indemnisation considérable.
La responsabilité du gouvernement mauritanien commence du premier jour de l’indépendance jusqu’à la fin de ce fléau. L’Etat mauritanien, quant à lui, doit donc mettre en place un fonds de Solidarité qu’il alimentera, à hauteur de 3% de son budget annuel, à compter de 1961. Ce fonds permettra une meilleure insertion de la communauté des anciens esclaves ou personnes assimilées en leur offrant une véritable éducation citoyenne, des écoles, des centres de formation, des capitaux assurant leur autonomie ainsi qu’une entière prise en charge de leur sécurité sociale.
Le pouvoir d’exception a incontestablement renforcé le système féodal – fondé sur les inégalités sociales et l’arbitraire,sources d’instabilité – légué par les pacificateurs, en essayant de lui donner un visage moderne et libéral, si bien décrit par Géneviève Désiré-vuillemin dans son livre “histoire de la Mauritanie” : « Le discours officiel pourrait faire croire que l’ancienne société, avec sa hiérarchie pesante, a été balayée avec les mots d’indépendance, de démocratie, de partis, de rassemblement, de liberté …
Mais ces vocables à consonance moderne ne sont guère que les déguisements, des anciennes formes de pouvoir et de contre pouvoir qui soutenaient auparavant, les compétitions et les affrontements entre fractions ou tribus. Aujourd’hui, qu’un individu se présente vêtu d’une derrah ou d’un costume-cravate, il est parfaitement identifié par ses compatriotes comme le descendant d’une lignée prestigieuse de marabouts ou de guerriers de grande tente, ou le fils exceptionnellement doué et chanceux d’un obscur hartani.»
A suivre.
le calame