DÉCÈS DE MBASSOU NIANG : Baba Maal perd un ami, un confident et un manager

En 1972, travaillant avec les moyens du bord, il exposa, à la mairie de Podor, ses premières œuvres. Cette exposition lui permit de décrocher une bourse d’entrée à l’Institut national des arts du Sénégal. A l’Institut des arts, il a pu se perfectionner en sculpture, peinture, illustration et théâtre, et se produire avec des troupes pulaar, en tant que chanteur et guitariste.
Son domaine de prédilection : retracer l’histoire du Fuuta, du Sénégal et de l’Afrique.Pendant ce temps, il commençait à guider les pas du musicien Baaba Maal, encore élève, qui démarrait sa carrière d’artiste. Employé à la Direction de l’Alphabétisation, cet artiste polyvalent a occupé les fonctions de peintre-illustrateur, animateur et promoteur, jusqu’en 1985, année de naissance du Daande Leñol de Baaba Maal, dont il a été le manager jusqu’à sa disparition.
Membre fondateur de l’Association des managers professionnels du Sénégal (Art-Manage) jusqu’à son décès, il s’est aussi distingué dans le domaine de la lutte, en tant que promoteur et président de l’Ecurie Pulaar dans laquelle a évolué, un moment, Balla Bèye II alias Baboye. Il s’est également fait un nom dans le monde spirituel, en organisant, annuellement, depuis une décennie, une nuit de chants religieux.
Demba Silèye DIA Conseiller en communication de Baaba Maal – Daande Leñol.
Décès de Mbassou Niang: Baaba Maal perd un ami, un confident et un manager
La morgue de l’hôpital Général de Grand Yoff (Hoggy) a refusé du monde hier, à la levée du corps de Mbassou Niang, manager et proche de Baba Maal. Soutenus par Ismaïla Lô, Oumar Pène, Manel, Demba Dia, Amadou Bâ, Moussa Sy, Amadou Kane Diallo, avec les prières de Serigne Pape Malick Sy, le lead vocal du Dandé Lenol et son groupe ont fait des témoignages pathétiques sur le défunt. Les femmes n’ont pu retenir leurs larmes à la vue du cortège funèbre qui le conduisait vers sa dernière demeure, à Podor.
Seule la grande faucheuse pouvait aussi brusquement mettre fin à 39 ans de compagnonnage. Le lead vocal du Dandé Lenol, Baba Maal qui a perdu son manager et ami Mbassou Niang, décédé des suites d’une courte maladie (il n’a fait que deux jours à l’Hôpital Général de Grand Yoff (Hoggy) n’était pas le seul à le pleurer hier. Lors de la levée du corps à la morgue de l’Hoggy, il y avait un monde fou. Des dizaines de véhicules et de motocyclistes étaient garés le long de la rue.
Tristesse et désolation se lisaient sur tous les visages. Encadré par Ismaïla Lô, assis à sa droite et Mme Fatoumata Sall, gérante d’un restaurant à l’embarcadère, à sa gauche, Baba Maal, en grand boubou Bazin bleu de nuit, s’excuse de ne pouvoir parler à la presse. L’émotion lui serre les cordes vocales. Le silence est pesant. Les regards évasifs. « Il aimait bien Baba », murmure une femme, tête baissée. Mansour Seck, chanteur, est lui aussi trop submergé par la peine pour pouvoir dire quelques mots. Pourtant, il a accepté de se mettre dans un coin, a écouté tranquillement une journaliste d’une télé de la place qui lui posait une question en Poular, mais… les mots ne sortaient pas. Il fait non de la tête, essuie ses larmes qui continuent de couler et finit par se retirer.
39 ans de compagnonnage avec Serigne Talla Faye
Serigne Talla Faye, chef du protocole de Baba Maal, a du mal à s’exprimer sur un compagnonnage vieux de 39 ans. Par où commencer ? Il y a tant à dire. Quelques mots sortent : « je suis Sérère et lui était Hal Pular. Donc, nous étions cousins à plaisanterie. Il me taquinait souvent et était fidèle en amitié. Depuis Lasli, Yellitaare, Wandama, Dandé Lénol, nous avons cheminé avec Baba pas à pas. C’est Baba, Mbassou et Mansour et moi qui avons créé le Dandé Lénol », témoigne-t-il, les larmes aux yeux. Le chanteur Manel Diop place quelques mots pour dire que Mbassou était quelqu’un de bien. Il s’entendait avec tout le monde et avait assez d’humilité pour se mettre au même pied que tous.
Arborant fièrement le maillot bleu de l’équipe de l’Unité 16 des Parcelles Assainies, Demba Sall, le Président de la commission organisation de l’Asc Jappo, approuve les propos de Manel. Il ajoute que le défunt, qui était Président de l’Asc, partageait tout ce qu’il avait. « Chaque fois qu’il rentrait de tournée, l’Asc le ressentait financièrement. Il nous éduquait et nous soutenait. Qu’il soit présent ou non, nous restions chez lui jusqu’à 2 heures du matin. C’est nous qui avons perdu », dit-il, en passant sa main droite sur le cœur.
Mbassou les rappelait souvent à l’ordre, témoigne Hilaire Chaby, arrangeur pianiste du groupe. Les poussant à persévérer, il leur répétait souvent que Dandé Lénol est leur famille. Exigeant et pédagogue quand il le fallait, Mbassou était un vrai meneur d’hommes. « Il comprenait chacun dans sa façon de faire et avait les mots et les gestes pour fédérer tout le monde autour de lui ».
Serigne Pape Malick Sy : « Mbassou était toujours au service des autres »
On se fraie difficilement un chemin pour arriver à Oumar Wade, adjoint de Mbassou. Il ne sait pas quoi dire pour traduire ce qu’il a dans le cœur. Tout ce dont il est certain, c’est que la mort de Mbassou est une perte énorme pour tout le groupe. « C’était un membre fondateur du Dandé Lénol, qu’il a hissé au sommet de l’échiquier, sur toutes les scènes internationales. Il s’est battu pour que le groupe soit l’une des entreprises culturelles les plus performantes. Il travaillait comme s’il savait qu’il devait partir tôt.
Mbassou a initié un certain nombre de personnes pour prendre sa relève, il… ». A ce moment précis, le corps enveloppé de deux pagnes tissés, sort des toilettes de la morgue. Les femmes se jettent les unes sur les autres et fondent en larmes, en criant « lahi laha Ilallah ». Les hommes pleurent en silence en répétant « Ina Lilahi wa ina ileyhi Rajihoun » (c’est à Dieu que nous appartenons, c’est à Lui que nous retournerons). On forme un cercle autour de Mbassou Niang pour les discours d’usage. Il faut jouer des coudes pour arriver aux officiels. Le maire de Niandane, Mamadou Gaye prend la parole le premier. Sa voix se brise, il se racle la gorge et commence. « Nous étions frères dans le sang, dans l’Islam, dans la confrérie Tijane.
Niandane a perdu un homme de valeur. Il a baptisé sa maison Pecc Mi. Il est le premier talibé à Niandane à y avoir organisé un Gamou. Je salue toutes les autorités qui sont là, à commencer par notre guide spirituel Serigne Pape Malick Sy. Le ministre du Commerce Amadou Niang est là, je vois Aziz Sow, l’adjoint du directeur des Impôts et Domaines. Au député Maire des Parcelles Assainies, Moussa Sy et à Kane Diallo, c’est à nous de leur présenter nos condoléances. Tété Diédhiou est présent, Mamadou Bâ Pcr, Amadou Tall, délégué de quartier, le ministre Alioune Diop et Salif Sarr, le directeur des Arts viennent d’arriver. »
Quelqu’un dit quelques mots au nom de l’épouse du manager qui a laissé 5 enfants.
Dieu est le Seul qui peut décider de Tout, sans avoir à rendre compte à qui que ce soit, débute Serigne Pape Malick Sy en citant Serigne Babacar Sy. Sa relation avec le défunt ne date pas d’hier. La première fois qu’ils se sont vus, ils étaient à la fleur de l’âge. C’était à l’occasion d’un Gamou à Saint-Louis, célébrant la naissance du Prophète Mouhamed (Psl). Mbassou l’a approché pour lui avouer son admiration quand il l’a vu sur une photo, en béret. « Ce qui m’a le plus frappé chez lui, c’est que Mbassou était toujours au service des autres ». Comme si elle n’attendait que ces mots pour se délivrer d’un lien, l’assistance acquiesce en faisant « hum, hum ». Mbassou avait promis à ses enfants de leur amener Baba Maal. Le guide religieux demande au chanteur d’évacuer ce vœu.
A 16 heures 20 minutes, on annonce l’arrivée du ministre de l’Education, Kalidou Diallo. Baba Maal est invité à dire quelques mots. Encore sous le choc, il abrège, remercie tout le monde et déclare que quand un représentant de la famille de Cheikh El Hadji Malick a parlé, il n’a plus rien à dire. « C’est Mbassou qui nous a amenés à Dakar, Mansour et moi… ».
Hadja Diaw GAYE Lasquotidien
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