Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Témoignages de leaders de la société civile à l’occasion du 20e ’anniversaire de l’AMDH

altDéputé Sid’Ahmed Ould Habott: Le prix des larmes….

« Mon témoignage je l’ai vécu, j’étais maire de F’dérick et quant les tortures ont commencé dans les casernes, j’ai commencé à réagir auprès des commandants des régions militaires. Je suis descendu à Nouadhibou pour m’informer des arrestations et des tortures. J’arrive à Nouakchott où il ya eu une série d’appel dont un appel répété de Maloum Ould Braham, secrétaire général de l’association des maires de Mauritanie. Au téléphone, il me dit monsieur le maire, le président du comité militaire veut rencontrer les membres du bureau de l’association des maires et nous attendions votre arrivée. Je lui réponds qu’il est urgent de rencontrer le président du comité militaire, parce que je viens de la 2e région et il se passe des choses très graves là-bas » dira-t-il Poursuivant son témoignage, il affirme « Dans notre réunion, à la salle des conférences du conseil municipal de Nouakchott, j’ai rendu compte de ce que j’ai vécu dans ma région. Je leur explique que cette audience est plus qu’opportune, car il est nécessaire de poser tout de suite ces problèmes des arrestations et des tortures qui sont entrain de prendre une ampleur catastrophique pour le pays. Parmi les intervenants membres du bureau, un seul s’est opposé à cette question, c’était le maire de Nouakchott à l‘époque. Il a dit non, nous n’allons pas voir le président du comité militaire, nous sommes une association de maires, nous n’avons pas le droit, nous ne sommes pas un parti politique pour parler de ces choses et si Mr Habott, le représentant d’Amnesty international, est ici où des ennemies de la Mauritanie sont ici, je vais tenir ce discours au président du comité militaire, il ne va pas prendre part à l’audience. »
Soutenant ces propos, il ajoute « Je l’ai dit monsieur le maire, nous savons dans quelles conditions tu as été élu. Vous étiez amené par une voiture 4/4 qui vous a cherché à Aouin pour vous parachuter à la tête de la mairie de Nouakchott et si vous avez un minimum de conscience, vous êtes le maire d’un tiers de mauritaniens. Des citoyens qui sont aujourd’hui torturés et qui meurent au moment où nous parlons. Il ya eu une dispute entre nous ; à la fin, nous sommes arrivés à un consensus. Le président Ould Sidi Baba propose à la fin pour que lui, le maire de Rosso à l’époque, Sow Deyna et moi, pour que nous puissions rencontrer le président du comité militaire en aparté et demander l’ouverture d’une enquête immédiate sur la question. C’était le consensus qui a été retenu. »
Il poursuit, « Dans cette audience élargie, il fallait aussi défendre les acquis démocratiques et encourager les militaires à avancer dans le processus de démocratisation. Quand nous avons rencontré le président du comité militaire, ce dernier a voulu faire venir son ministre de l’intérieur Cheikh Sidi Ahmed Ould Baba. J’ai rendu compte de ce que j’ai vécu dans la région du Tiris Zemmour et à Nouadhibou, mais aussi de l’ampleur des dégâts à Nouakchott et dans les autres régions, notamment dans le Brakna. Comme toute réponse, le président du comité militaire déclare que c’est de l’intoxication et que ce n’est pas possible. Je lui dis monsieur le président, je suis le maire d’une ville garnison de l’armée, j’’ai écouté les hommes de troupe. Les officiers et les sous officiers viennent dans mon bureau. Les interpellations des pères de famille que j’ai à eu confirmation à travers leurs femmes et leurs enfant, je ne peux pas retourner les voir, sans rien faire. »
Et le député d’ajouter « Je peux vous assurer que cette audience était extrêmement dure et je rends hommage à mes deux collègues (Sowa Deyna et Ould Sidi Baba) qui étaient d’un courage exceptionnel. Au finish, le président du comité militaire a dit que si c’était le cas, une commission d’enquête va être désignée pour rendre compte. Mais très sincèrement je suis sorti de la salle, les larmes aux yeux, sachant que ce président ne fera jamais l’enquête et convaincu qu’il est au courant de la situation actuelle du pays. Cet anniversaire nous ne pouvons pas lecélébrer, sans avoir une pensée pour eux. »
Il renchérit « Lorsque les événements se sont précipités par la mobilisation de l’intérieur et par la pression internationale en 1991, le projet de démocratisation que le Président Ould Taya a cédé aux peuples mauritaniens, est le prix de leurs larmes et de leur sang. C’est à cause de leurs sacrifices que nous devons ces acquis démocratiques. Ce n’est pas mon général d’aujourd’hui ni celui de demain, c’est le prix de leurs larmes et de leur sang qui ont fait cracher aux militaires le processus de démocratisation qui a été initié depuis 1991. Quand nous parlons de démocratie et droits de l’homme en Mauritanie, nous devons leur rendre un hommage historique et patriotique. »
Il revient sur la loi d’amnistie « S’agissant de la loi d’Amnistie que j’ai défendu bec et ongle contre la proposition de loi d’amnistie initiée par une dizaine de députés du PRDS, certains m’ont approché plu tard pour me demander pardon. Je leur ai dit que ce n’est pas à moi de pardonner, c’est au peuple mauritanien de vous pardonner, c’est à dire les veuves, les orphelins, les déportés et à l’unité de ce pays. Vous avez failli à votre devoir de parlementaires et de musulmans, demandez pardon à ceux qui ont été humiliés

Mamadou Sarr, SG du Fonadh : « Notre pays a connu de graves violations en droits humains »
alt« Il faut d’abord rendre hommage au premier président de l’AMDH, feu Diagana Mamadou. A cette époque, il était très difficile de se réunir. Les ordres des avocats ont eu le courage de former cette organisation qui a rencontré toutes les difficultés. Les organisations qui ont fondé le Fonadh ont été le fer de lance du combat pour la protection et la promotion des droits humains en Mauritanie. Le combat que l’AMDH a toujours mené a été un combat pour la promotion des droits de l’homme en Mauritanie.
Notre pays a connu de graves violations en droits humains et si c’état pas le combat de l’AMDH et des autres organisations de droits humains, certainement on ne serait pas là. A l’époque la seule organisation de droits de l’homme qui existait, était la ligue mauritanienne des droits de l’homme (LMDH), sinon toutes les associations avaient des difficultés à se faire reconnaître. l’AMDH, comme les autres associations qui forment le Fonadh, a une mission commune de combattre l’impunité, car malgré certaines avancées, nous constatons qu’il ya des dossiers pendants qui pour la paix civile et sociale du pays, méritent que les autorités mauritaniennes et la société civile coopèrent d’avantage pour trouver des solutions consensuelles à ces problèmes. »

Lalla aicha, président du CSSVDH: « Ceux qui disaient que notre combat était du faux, reconnaissent aujourd’hui notre lutte »
« En 1991 quand il fallait tenir une réunion, il fallait l’organiser en secret. Souvent c’était des militaires qui venaient nous surprendre pour nous amener en prison. Au commissariat on nous disait que les violations de droits de l’homme n’existent pas dans le pays. Ba Mariam Koita qui était à l’époque responsable des droits humains au niveau du pouvoir, connait les problèmes que nous avons rencontrés auparavant. Quand on devait aller à Vienne ou en Gambie parler de ces violations, il y’avait pleins de mauritaniens qui nous combattaient. Ils disaient que ce que nous disons est du faux. Je suis contente parce que le monde évolue, ceux qui disaient que notre combat était du faux, reconnaissent aujourd’hui notre lutte. Et ce sont ces mêmes personnes qui disent qu’il ya des avancées. Des avancées qu’on a eues avec beaucoup de chagrin et de sacrifice. Je suis émue quand je vois la fille de Ba Seydi , ici présente. Elle avait deux ans quand son père a été tué, aujourd’hui elle a 22 ans. Elle milite, car elle sait que son père a été tué de façon arbitraire.
Un jour où l’autre la vérité éclatera, car il ya des militants téméraires qui continuent le combat. »

Boubacar Messaoud, président SOS ESCLAVES: « Les 20 ans de l’AMDH, c’est l’âge des droits de l’homme en Mauritanie »


alt« Quand on a créé ces organisations, le problème qui était posé était le passif humanitaire, la déportation, les exécutions extrajudiciaires. Nous avons créé cette organisation (AMDH) comme tant d’autre sur la base des problèmes de dépassement des pouvoirs publics, sur les droits humains (déportation, impunité, crimes de sang). Il y’avait aussi l’esclavage qu’on refusait de reconnaitre et qu’on voulait nécessairement transformer en séquelle. Néanmoins, l’AMDH, dans sa composition comprenait les éléments de toute la communauté mauritanienne. Mais le pouvoir s’est évertué à mettre l’AMDH et les autres organisations dans un ghetto. Les 20 ans de l’AMDH, c’est l’âge des droits de l’homme en Mauritanie. Effectivement il ya une organisation qui a précédé l’AMDH, il s’agit de la ligue mauritanienne des droits de l’homme. Mais je dirais qu’à l’époque, elle était une organisation assujettie qui soutenait le pouvoir. Elle n’était plus en mesure de contrer le pouvoir, mais aujourd’hui elle s’est relevée et nous nous en félicitons. »

Maimouna Alpha Sy (veuve, secrétaire général du collectif des veuves): « Pourquoi ont-ils été tués ? »
alt« Je suis surprise quand on dit que le problème des veuves à été résolu. Je me demande comment, car il n’a même pas commencé. On lutte et on continuera à lutter tant que justice n’est pas faite. On veut la vérité totale. Pourquoi ont-ils été tués ? Parce qu’ils sont des noirs. Ce n’est pas de leur faute, c’est le bon Dieu qui leur a donné cette couleur. Cette épuration ethnique est une pure insulte. Nous réclamons le devoir de vérité, de justice, de mémoire.
On avait demandé un devoir de mémoire, on nous avait répondu que cela allait à l’encontre de l’islam, mais maintenant on en parle. Aujourd’hui, on parle d’indemnisation, alors que c’est le Président de la République lui-même, qui a dit qu’il va apporter une aide aux veuves et aux orphelins.
Et c’était à la demande de la présidente du collectif (Houlèye sall). Les gens l’ont transformé en indemnisation. Ils ont signé un protocole d’accord, avec je ne sais qui, en tout cas pas avec nous, pour dire que c’est fini. Ce n’est pas fini tant que la lumière n’est pas faite. Il faut savoir que le collectif des veuves luttera toujours tant que justice n’est pas faite. »

Témoignages recueillis par Dialtabé- QUOTIDIEN DE NOUAKCHOTT

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