FLAMNET-RÉTRO: Règlement du passif humanitaire : Les FLAM crachent dans la soupe
L’initiative du Haut Conseil d’Etat visant à régler définitivement ce qu’il été convenu d’appeler le passif humanitaire continue à faire couler beaucoup d’encre. Cette initiative qui a été bien accueillie dans beaucoup de milieux représentatifs des victimes a, par contre été rejetée par d’autres comme les FLAM.
Dans une interview parue récemment sur Horizons d’Abbere “, M. Kaaw Touré, Porte-parole de ce mouvement est longuement revenu sur les tenants et les aboutissants d’une telle initiative. Il a aussi parlé des FLAM en général et de leur position sur les questions de l’unité nationale et de la cohabitation entre les communautés.
Concernant ce qui s’est passé tout dernièrement à Kaédi avec le discours du président du HCE, M.Kaw Touré a souligné : ” Il n’y a rien de radical dans cette prise de position, ni dans aucune autre de nos positions en général. Cette position se trouve exprimée dans le Mémorandum que nous avons publié en mars 2000 alors que Taya était encore au pouvoir. Rien de nouveau dans le discours du général sauf qu’en bon militaire il a voulu ” clore ” le contentieux sans les principaux concernés et surtout ceux qui ont été les principales victimes de cette répression qui a commencé en septembre 1986 après la publication du Manifeste des FLAM. Nous avons subi dans notre chair et dans notre âme ces moments de douleur et certains d’entre nous continuent de souffrir de cette répression, des familles se sont trouvées éclatées, des coeurs et corps meurtris, des blessures profondes et des handicaps que rien ne guérira, surtout pas quelques promesses de subsides dédaigneusement consentis par un putschiste en mal de r e c o n n a i s s a n c e ! Personne ne peut décréter la réconciliation sans que les protagonistes ne se soient parler, sans que la vérité ait été révélée. Où étaient ces fameux oulémas lorsqu’on nous tuait à petit feu et torturait dans les geôles de Taya ? Où étaient-ils lorsqu’on nous déportait à nu? Où étaient-ils lorsqu’on massacrait des musulmans en plein mois béni du ramadan ? Où étaientils quand on manifestait dans les colloques internationaux pour dénoncer cette barbarie ? Comment prier sur les morts sans leurs corps? Qui les a tués, pourquoi ils l’ont été ? pourquoi pardonner et qui pardonner ? Ce sont des questions qui méritent des réponses et non une fuite en avant. Pour nous, c’est une insulte parce que ce sont les mêmes nègres de service qui cherchaient à blanchir Taya à Banjul, Dakar, Durban, Alger, Bruxelles, Paris et Généve. Je trouve certains propos des soutiens de la junte cyniques et inacceptables. Quand certains nous accusent de faire du fond de commerce avec le dossier du passif humanitaire parce que refusons d’embarquer dans ce train militaire à destination inconnue. “
Au sujet du “Manifeste du négro- mauritanien opprimé” rédigé en 1986, le porte parole des FLAM a rappelé qu’il ” y avait un problème de coexistence entre les communautés Arabe et négro- mauritanienne. Ce problème, disions- nous, ne résultait pas d’un antagonisme naturel latent ou spontané, mais plutôt d’un système politique visant à diviser le peuple en exacerbant les préjugés inter- ethniques. Nous attirions l’attention du régime sur l’urgence qu’il y avait à reconnaître et à prendre en charge ce problème pour juguler tout risque de confrontation que pourrait entraîner sa persistance. Enfin, nous préconisions dans la 3ème partie du ” Manifeste ” un vaste débat national où tous les Mauritaniens s’asseyeraient autour d’une table afin de résoudre par euxmêmes, par le dialogue et la concertation, l’ensemble de ces problèmes. Ceci pour expliquer que le “Manifeste” stigmatisait , non pas les populations arabo-berbères, contrairement à l’amalgame créé et entretenu par le régime de O/ Taya mais plutôt des politiques d’un système exclusiviste. Il dénonçait donc le caractère nocif, et impropre à construire une nation unie dans sa diversité.”
Sur les rapports actuels entre communautés M.Touré note: “A cause de ces désastreuses politiques justement , on constate qu’aujourd’hui les rapports entre ces populations restent marqués par la méfiance, la suspicion et le ressentiment au lieu de la solidarité et de la fraternité qui auraient dû fondé notre coexistence. Je ne vous apprends rien en vous disant que ces apports ont été davantage altérés par les purges ethniques des années 86-91.”
Sur la réalité des FLAM et la perception qu’on en avait M.Touré note: “Le régime de Taya et ses affidés et alliés nous qualifiait de chauvins ou d’extrémistes. Par stratégie, pour éloigner les populations de notre Organisation. Les populations qui vivent la réalité de l’exclusion, de la déportation et de l’esclavage que nous dénonçons, elles, savent ce que nous sommes réellement. D’ailleurs, ceux qui nous accusaient, hier, d’extrémisme reprennent allègrement aujourd’hui notre discours et nos propositions de solutions sur la question nationale et sur le passif humanitaire. Des forces progressistes commencent à mieux nous comprendre, à mieux nous juger pour avoir compris le sens de notre discours et de notre combat qui est celui pour l’égalité et la justice, dans une autre Mauritanie multiculturelle, démocratique, reconstruite sur les valeurs de fraternité, de respect et de tolérance. “
Parlant de la dernière loi contre l’esclavage ratifiée sous la présidence de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, le porte parole des FLAM affirme que : ” Cette nouvelle loi qui criminalise l’esclavage en Mauritanie est une révolution qui a été saluée par tous les militants abolitionnistes mais il ne suffit pas de décréter une loi pour faire disparaître cette pratique et une certaine culture fondée sur le complexe de supériorité. Des mesures concrètes d’épanouissement et une campagne d’explication doivent accompagner cette nouvelle politique pour combattre à jamais l’esclavage et ses séquelles dans notre société et dans nos mentalités féodales. Cette loi, n’a pas encore supprimé l’esclavage, mais elle a eu le mérite de créer une sorte de déclic psychologique chez les principaux concernés euxmêmes, c’est à dire la frange haratine. “
Parlant du retour des réfugiés du Mali et du Sénégal, le dirigeant flamiste a dit que: “ce retour organisé des réfugiés a été entamé après le discours historique du 29 juin 2007 du Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi qui, pour la première fois, reconnaissait la responsabilité de l’Etat dans le passif humanitaire et s’engageait à résoudre cet épineux problème comme celui des déportés. Vous avez suivi avec nous cette mlevée de boucliers et la résistance de certains cercles politiques hostiles au retour des déportés et du règlement du passif humanitaire. C’est ce qui explique d’ailleurs les limites et les insuffisances des premiers retours organisés des déportés. Il y a eu certes des retours même après le putsch mais les rapatriés végètent toujours dans les mêmes problèmes d’insertion et de rétablissement dans leurs droits : terres de culture, indemnisations, écoles, santé, eau, pièces d’état civil…etc.. c’est cette situation précaire des rapatriés qui explique en grande partie la réticence actuelle des déportés restés dans les camps à reprendre le chemin du retour parce qu’un homme averti en vaut deux; ensuite les sanctions internationales qui se profilent à l’horizon n’incitent pas à l’aventure.”
En conclusion M.Touré a livré son opinion sur les grands problèmes qui à son sens minent l’unité nationale et proposé quelques pistes pour sortir de cette situation: “Aujourd’hui le passif humanitaire défraie la chronique. On parle du règlement de ce dossier comme étant ” la ” solution pour la réconciliation nationale. Mais en fait ce passif ne fut pas la source des problèmes; il ne fut pas la cause mais l’effet ! La vraie cause des problèmes, récurrents depuis 1960, réside dans l’accaparement de la réalité du pouvoir politique par une seule communauté , la communauté arabo – berbère, qui se traduit par le déni total de citoyenneté du Négro – mauritanien. Si donc on procédait à la redistribution ou au partage équitable de ce pouvoir politique il est certain que les tensions cycliques vécues par le pays disparaîtraient, définitivement. La réconciliation nationale tant souhaitée par tous ne peut être obtenue de manière durable et viable que par le partage équitable du pouvoir politique. Nous en sommes convaincus. La Mauritanie est un pays multiculturel et biracial et nous devons tenir compte de cette diversité dans l’exercice du pouvoir pour que chaque mauritanien puisse se reconnaître dans l’Etat mauritanien.”
SYNTHÈSE BAKARI GUÈYE , 04 April 2009
Les “FLAM” contre la démarche de la junte au sujet du passif
Nouakchott, Mauritanie (PANA) – Les Forces de libération africaine de Mauritanie (FLAM), une organisation de la diaspora opposée au coup d’Etat du 6 août 2008, dénoncent la promesse des réparations au profit des rescapés et familles des victimes du passif humanitaire faite récemment par la junte au pouvoir comme “une instrumentalisation du dossier à des fins électorales”, dans une déclaration transmise à la PANA dimanche.
La promesse de règlement par “de simples réparations” constitue “une insulte” à la mémoire des victimes, selon la déclaration des FLAM. Considérant que les faits à l’origine du passif humanitaire sous le régime de Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya (renversé en 2005) “relèvent d’un plan d’épuration ethnique”, la déclaration prône “un débat de fond sur l’avenir de la cohabitation entre les différentes communautés mauritaniennes”.
Pour le règlement définitif du passif humanitaire, le mouvement propose une solution tenant compte de plusieurs paramètres: “refus de l’impunité, exigence de vérité, de réparation et nécessité du pardon”.
Le chef de la junte au pouvoir en Mauritanie depuis le 6 août 2008, le général Mohamed Ould Abdel Aziz, a annoncé son intention de clore définitivement l’épineux dossier du passif humanitaire, dans une allocution prononcée mercredi dernier devant les populations de Kaédi (420 kilomètres au sud-est de Nouakchott).
Le passif humanitaire en Mauritanie est constitué par une série de graves violations des droits humains contre les populations noires du pays entre 1989 et 1991, selon les ONG de défense des droits humains. Mais du côté de l’Etat mauritanien, on semble restreindre ces événements à plusieurs centaines d’exécutions extra judiciaires et des tortures dont ont été victimes des militaires négro-mauritaniens entre septembre 1990 et février 1991.
PANA: 04 April 2009