Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Quelle portée donner aux manifestations actuelles en Mauritanie ?

altEn Tunisie s’est déclenché un mouvement qui a eu des retentissements en Afrique, au Moyen Orient et dans le monde entier.Ce soulèvement est surtout l’œuvre d’une jeunesse dépitée.Il marque une rupture, celle entre une génération vieillissante engourdie dans une pensée et des pratiques passéistes et une autre qui, grâce à de petites fenêtres, Internet, télévision, Ipad, Iphone, Black Berry, etc., s’ouvre à la planète entière.Les nouvelles technologies ont bouleversé les rapports sociaux à travers le monde.
De nombreux pouvoirs ne l’ont pas encore intégré. Aujourd’hui, grâce aux nouveaux moyens de communication, les citoyens sont en train de récupérer une part de leur pouvoir qui leur avait été arrachée. Ils ne sont plus dépendants des informations officielles. Ils peuvent se renseigner, communiquer, s’instruire, sans trop de contraintes et ceci indépendamment des Etats, des médias officiels, et s’organiser. De nombreux libyens ont appris l’anglais hors de l’école publique, grâce aux nouvelles technologies. Ce qui leur permet d’accéder à des informations critiques à travers la BBC, CNN, etc. etc. A partir du moment où des populations peuvent s’informer de manière indépendante, entrer en contact entre elles, échanger, elles peuvent développer des contrepouvoirs. Ainsi quelque soit la férocité des moyens utilisés pour contrôler les populations, le pouvoir se trouve fragilisé. Le cas de la Tunisie en est un parfait exemple. Les manifestions qui s’ouvrent en Mauritanie s’inscrivent dans le cadre d’une contagion protestataire qui frappe le Maghreb et le monde arabe. Selon L’Humanité.fr du 19 Février 2011, « des manifestations contre le manque d’eau et la hausse des prix dans la ville mauritanienne de Vassala (sud-est), frontalière avec le Mali, ont été sévèrement réprimées par les forces de l’ordre, a affirmé aujourd’hui un parti d’opposition. » Des manifestations se sont déroulées à Nouakchott, capitale de la Mauritanie, vendredi 25/02/2011, à l’appel (en ligne) de jeunes, pour demander des réformes sociales, politiques et économiques, et la fin du régime militaire en Mauritanie. D’après France actu.net du 27 février 2011, « environ 2000 manifestants ont défilé vers la Place Blockat, où certains avaient l’intention de camper “jusqu’à ce que leurs revendications aboutissent”. Parmi ces revendications, un blocage de l’augmentation des prix et des solutions au problème du chômage. D’autres protestaient contre la discrimination ou demandaient la fin du régime militaire. » A la différence de la Tunisie et de l’Egypte, on peut remarquer que les manifestants, en Mauritanie, ont des objectifs diversifiés. En Egypte et en Tunisie, l’objectif essentiel des contestataires était de se débarrasser de leur Président et de leur vielle classe politique dirigeante. Ainsi, c’est la clarté de l’objectif et sa portée unificatrice qui ont donné aux mouvements tunisien et égyptien leur puissance. L’autre point concerne l’enracinement de la fronde en Mauritanie. Existe-il une volonté réelle de changement dans ce pays ou s’agit-il simplement de protestations qui s’inscrivent dans une mouvance et sans réel ancrage ? A partir de ces remarques, nous pouvons dire que pour que les manifestants, en Mauritanie, aient une force et une efficacité, il faudrait que des objectifs clairs, unificateurs des masses, se dégagent. Il serait aussi utile que des valeurs communes de justice auxquelles seraient sensibles la majorité des populations, au-delà des appartenances particulières, sous-tendent les soulèvements. Il est aussi nécessaire, qu’à travers les revendications, se dégage un projet d’une société réellement démocratique et égalitaire. Les exigences doivent se structurer autour d’idéaux qui permettent à chacun de s’y reconnaître. Le départ du chef de l’Etat, le Président Mohamed Ould Adel Aziz ne peut être une fin en soi. Enfin, il faudrait de la persévérance et du courage pour changer le destin de la Mauritanie. Nous craignons que les manifestations actuelles ne se résument à une imitation sans devenir. Les acteurs de la fronde doivent absolument veiller à leur autonomie par rapport aux partis et mouvement politiques. En Tunisie et en Egypte, aucun parti ou mouvement n’a pu récupérer les séditieux. C’est ce qui leur permit d’être forts et de chasser leurs dirigeants véreux. Le chemin sera peut-être long, car en Mauritanie, les ingrédients nécessaires à l’édification d’une société démocratique ne sont pas encore réunis. Les mentalités sont encore majoritairement inégalitaires. On peut espérer que la nouvelle génération va accélérer le processus de mutation de la société….(«Et surtout mon corps aussi…bien que mon âme, gardez-vous de vous croiser les bras en l’attitude stérile du spectateur, car la vie….n’est pas un spectacle, car une mer de douleurs n’est pas un proscenium, car un homme qui crie n’est pas un ours qui danse… »
Aimé Césaire. ).


Oumar Diagne- Ecrivain

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