Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

Hommage au camarade feu Mohamed Dogui, un homme du refus, premier invité du site Flamnet

altNous venons d´apprendre avec une grande tristesse le décès de notre compatriote, ami et camarade Mohamed Ould DOGUI, membre-fondateur du FAAS (Front arabo-africain du salut), un des pionniers de la lutte électronique en Mauritanie pendant les années de braise sous Ould Taya, un opposant acharné au Système, un homme du refus et militant infatigable des droits humains.Le BEN des FLAM et à travers lui tous nos militants et sympathisants envoie ses condoléances les plus attristées à sa famille, à ses amis de l´Avomm et à toute la Mauritanie.
Qu´Allah l´accueille en son Saint paradis et que la terre lui soit légère. Amine.
A Dieu nous appartenons et à lui nous retournons.

Pour rendre hommage à l´ami qui fut pour la petite histoire le premier invité de la rubrique de Flamnet: “Invité du site”, nous reproduisons l´entretien enregistré le 08 novembre 2000 à l´occasion du premier anniversaire du site Flamnet.

Adieu le combattant! Et la lutte continue!

Mohamed Dogui du FAAS A COEUR OUVERT AVEC FLAMNET

“Nous refusons d’insulter l’histoire et nous demandons aux autres de ne pas insulter le présent et l’avenir. Pour nous la ligne de démarcation était et sera toujours entre le camp du progrès, de la liberté et de la justice, et le camp de la réaction, de l’opportunisme et de l’injustice.”
Mohamed DOGUI

Qui est Mohamed Dogui, pouvez vous, camarade, vous présenter à nos lecteurs?

DOGUI: Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier de l’opportunité que vous m’offrez en me permettant de répondre à des questions sur la situation que traverse notre pays, je salue au passage tous les démocrates, les membres de la société civile et les journalistes qui se battent pour l’avènement d’un Etat de Droit dans notre pays.

Militant du FAAS, je suis chargé des relations extérieures de ce mouvement. Né à Nouakchott, j’ai poursuivi mes études au Maroc (Gestion d’entreprises, Marketing, Informatique : Programmation et réseaux).

Qu’est ce que le FAAS, quelle est votre particularité  en tant que mouvement sur la scène politique mauritanienne?

DOGUI: Le FAAS est un mouvement d’opposition non-violent dont l’objectif est d’apporter une modeste mais réelle contribution à la lutte contre l’injustice et l’exclusion sous toutes leurs formes dans notre pays. Le FAAS c’est aussi des militants et militantes ouverts aux autres, tolérants, solidaires, libres, différents, remuants, indépendants et unis par les liens sacrés de l’engagement désintéressé.

Notre aspiration sincère à la modernité et au progrès de notre pays et notre adhésion convaincue aux grandes valeurs de l’humanisme constituent les fondements de notre engagement.

Quelle est votre appréciation de la situation politique nationale?

 DOGUI: La situation dans notre pays est catastrophique : Une accumulation de toutes les horreurs, les meurtres, les déportations, l’esclavage, les humiliations en tous genres, les exclusions, les mépris, les détournements, le népotisme éhonté, la censure, la répression, la misère et la famine qui tue aujourd’hui dans plusieurs régions du pays.

La situation chez nous, c’est aussi des silences, des lâchetés, des compromissions qui ne laissent aucun doute sur la terrible solitude de l’idéal et des valeurs démocratiques.

Nos partis sont à l’image de la société, ils sont handicapés par les archaïsmes qui ont vieilli leur mode de fonctionnement. Ils doivent évoluer pour continuer. Et c’est à cela que les démocrates et tous les citoyens doivent les aider. Car ce sont ces partis qui feront vivre la démocratie et ses institutions.

Quels sont vos rapports avec les autres composantes de l’opposition dite radicale?

 DOGUI: Ils sont bons et nous travaillons à les renforcer, nous ferons des propositions dans ce sens à nos partenaires dans un avenir proche.

Que pensez vous des FLAM, de leur discours et de leur combat, pensez vous comme certains que les FLAM “exagèrent un peu” pour ne pas dire que c´est « un mouvement extrémiste »?

DOGUI: Nous avons beaucoup de sympathie et de respect pour les FLAM, et pour leur noble combat contre l’injustice et le racisme. Nous l’avons toujours dit sans détours. Pour nous les FLAM sont un mouvement mauritanien authentique qui incarne l’aspiration d’une communauté à la justice, à un traitement égale, à la dignité et au respect, une communauté qui fut longtemps exclue humiliée et marginalisée, C’est pourquoi nous pensons qu’ils ont un rôle important à jouer aux côtés des autres partis politiques mauritaniens, pour ramener la paix, la réconciliation et le progrès pour notre pays, notre Mauritanie digne de tous. Ensemble et différents. Il y a quelques années lorsque nous avons crée notre site internet, nous avons dédié une page web à ce mouvement, comme nous l’avons fait pour d’autres.

Enfin, nous nous battons pour la même cause et nous appartenons au même camp.

Quant aux clichés réducteurs du genre “extrémistes” et autres qui ont servi à la propagande mensongère du régime et de certains milieux, ils avaient déjà commencé à s’effriter pour disparaître définitivement chez beaucoup, après la publication du mémorandum des FLAM. Les efforts consentis en matière de communication ont permis de démystifier la réalité.

Quel jugement portez-vous sur les tentations de « collaboration » d’une certaine opposition mauritanienne  avec le pouvoir de Taya?

DOGUI: Nous avons pour principe de respecter le choix des autres, même si nous le partageons pas. Nous refusons d’insulter l’histoire et nous demandons aux autres de ne pas insulter le présent et l’avenir. Pour nous la ligne de démarcation était et sera toujours entre le camp du progrès de la liberté et de la justice, et le camp de la réaction de l’opportunisme et de l’injustice.

Dialoguer avec le régime de Ould Taya est une aventure porteuse de tous les périls. A-t-on oublié que ce même régime est responsable de tueries de ses propres citoyens, de déportations honteuses, de la persistance de l’esclavage et de pillage des richesses de ce pays?

Négocier avec ce régime c’est bafouer la mémoire des victimes et légitimer la barbarie. Plus grave, c’est donner à ce régime une légitimité qu’il n’a jamais eu et qu’il n’aura jamais.

Quand on a comme interlocuteur une véritable machine à produire du vent, de l’absurde et du faux on ne peut récolter que la désillusion et les mirages.

Quelle devrait-être la stratégie de l’opposition radicale compte tenu du contexte évoqué plus haut?

DOGUI: L’opposition radicale doit se préparer à l’affrontement et à la confrontation ouverte avec ce régime. Pour cela elle doit travailler à mobiliser les populations à la désobéissance civile non-violente, celle qui a eu raison des dictateurs de la trempe de Ould Taya ( Misolevic et le Général Guei). Parallèlement elle doit continuer le travail de dénonciation à l’extérieur en vue de couper les derniers soutiens dont bénéficie ce dictateur.

En agissant ainsi l’opposition pourra isoler ce criminel et créer les conditions nécessaires pour précipiter sa chute.

L’unité d’action des composantes de l’opposition radicale devrait-elle à votre avis déboucher sur une alliance structurelle?

DOGUI: Nous pensons que la création d’une structure sous forme d’alliance ou de pôle des forces progressistes est nécessaire pour, d’une part rendre plus efficace tous les actions et d’autre part faire échec à toutes les manœuvres du pouvoir. Le but recherché est de se retrouver ensemble pour faire triompher l’idéal collectif, tout en gardant chacun son identité et ses convictions politiques pour le grand bien du pluralisme.

 Depuis quelques temps nous assistons à un discours “réformiste” sur la question nationale et qui tente à minimiser le caractère ethno-raciste du système et le problème de l´esclavage dans notre pays que pensez vous de ces deux problèmes ? sont-ils des réalités aujourd´hui en Mauritanie ou des “simples fond de commerce d´une certaine opposition en perte de thèmes de campagne ” comme disent les partisans du Système ?

 DOGUI: Tout changement qui n’apporte pas des solutions radicales aux problèmes majeurs qui minent notre pays, à savoir le racisme et l’esclavage n’est pas un changement !

En Mauritanie, le vrai débat sur le changement est là. Maintenant que l’on soit d’accord ou pas c’est une toute autre affaire. Chacun juge selon ses affinités, ses convictions quand il en a ou selon ses intérêts. Seulement voilà la politique politicienne, elle, se poursuit sous nos yeux, indifférente aux appels, sourde au débat, fixée uniquement sur ses ridicules réflexes et ses petits calculs.

Ceci dit et afin de donner un sens et une véritable chance de réussite à l’idée de changement, des démocrates sincères ont déjà engagé ce débat, il s’agit maintenant de lui assurer la mobilisation dont il a besoin : la participation de tous.

Que vous inspire aujourd´hui la situation des déportés mauritaniens au Sénégal et au Mali.

 DOGUI: Une profonde indignation devant cette conspiration du silence qui tente de banaliser l’intolérable, de cacher l’immonde et d’installer l’oubli et l’indifférence. Un régime qui dépossède, humilie et déporte ses propres citoyens commet la plus haute abomination contre l’Homme, la pire et la plus irréversible des atteintes aux Droits de l’Homme. Nous continuerons à lutter pour leur retour dans la dignité. Tout comme nous continuerons à lutter pour traduire le sinistre criminel Ould Taya devant la justice afin qu’il serve de leçon aux apprentis barbares. Une lutte pour les droits de la vie, le droit à la vie digne de tous. Ensembles et différents.

Avez-vous un dernier mot à dire à nos compatriotes et à nos militants?

 DOGUI: j’aimerais exprimer ici toute ma solidarité, ainsi que celle de mes compagnons de lutte, avec nos soeurs et nos frères des FLAM, ainsi que tous les démocrates sincères, les militants des Droits de l’Homme en Mauritanie (AMDH, SOS-ESCLAVES…), les journalistes, les syndicalistes qui mènent, chacun à sa manière, la lutte pour l’intérêt suprême de ce pays que nous aimons tant.
Je vous remercie.
La lutte continue.

Propos recueillis par K. Touré et A. Thiongane

www.flamnet.info

Archives FLAMNET : 08 novembre 2000.

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