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M. Samba Thiam président des FPC et candidat à la députation de la coalition CVE-CVE/VR à Nouakchott ouest: ‘’Que peut-on espérer d’une opposition incapable de s’entendre sur le principe élémentaire d’une CENI indépendante ?’’

Le Calame : Commençons si vous le voulez bien par cette question d’actualité tragique : –Apres avoir été arrêté et conduit au commissariat de Sebkha Oumar H Diop y décède, dans la nuit du 29 mai, suite semble-t-il à des tortures. Ce meurtre intervient quatre mois après celui de SOUVI Cheibany .. Que vous inspirent ces meurtres ?
M. Samba Thiam: Je suis tout simplement sidéré. Comme si nous voulions copier la police des USA ! Deux meurtres déjà sous le Président Ghazouani, en quelques mois ! Quelle différence entre ce que nous vivons et ce qu’Israël fait subir aux Palestiniens ? Politique d’occupation, exécutions régulières, limitation dans les déplacements en zones Sud, exclusion …Et Lorsqu’on parle d’Apartheid, certains hommes politiques hypocrites s’offusquent ! Le développement séparé –sens de l’Apartheid -est encore mieux pour nous aujourd’hui , car lui au moins a l’avantage d’être institué ou déclaré ! Mais le plus écœurant
dans tout ça c’est l’indignité d’une partie de notre peuple. On tue vos enfants et vous votez INSAF …en majorité ! Un fils de M’bagne tombe mais M’bagne, vote quand même pour Insaf,.. Comme avec Abass !
Je termine en exprimant ma profonde compassion à la famille éplorée souhaite que la mort de jeune ne soit pas vaine. Il est mort, mais le combat continue.
-Les partis de l’opposition démocratique ont dénoncé, à travers un grand meeting, les résultats du 1er tour des élections locales du 13 mai dernier. Dans la foulée, ils réclament la reprise des élections. Pensez-vous que ce meeting a été un succès ?
–Je n’ai pas été à ce meeting pour n’y avoir pas été invité. Je ne puis donc en juger, pour vous dire s’il a été un succès ou un échec dans son organisation ou dans ses objectifs ; j’ai oui dire qu’une rencontre se tenait à la CENI de laquelle rien n’est encore sorti que je sache, du moins pour l’instant …Visiblement la CENI semble continuer son chemin … Quant au contenu des dénonciations rapportées du meeting, j’y souscris entièrement ; même si je remarque, curieusement, que cette Opposition passe sous silence, et toujours, le caractère mono-ethnique, frappant, de l’encadrement des bureaux de vote à Nouakchott, et peut-être ailleurs. Ce manquement est aussi grave, sinon plus grave que tous les autres manquements pour faire fi de notre diversité. Ould Maouloud souligne quantité d’insuffisances et de manquements liés à ces élections sauf celui-là ; et il n’est pas le seul ! Comme pour valider, implicitement, un ordre ou cette politique funeste de discrimination ethnique, disons de négation des uns, du président Ghazouani. Ces meetings et conférences de presse, tenus récemment, qui ne s’adressaient qu’aux hassanophones, au mépris de notre diversité culturelle et linguistique, ne font pas mieux…
–Face à ce que l’opposition considère comme le début d’une crise électorale, laquelle pourrait générer une crise politique, une rencontre a réuni les partis de l’opposition, la CENI et le ministère de l’intérieur. L’objectif est de trouver un compromis autour du différend électoral. Y croyez-vous ? La coalition CVE-CVE/VR dont vous êtes membre pense-t-elle que le pouvoir et la CENI accepteraient l’annulation des résultats, ne serait-ce qu’à Nouakchott et à Boutilimit, comme réclamé par l’opposition ? En cas de refus, que doit-elle faire ?
– Si je crois que cette rencontre aboutira à un compromis, me demandez –vous ? j’ose l’espérer sans trop y croire toutefois, au vu d’un constat amer qui est celui-là : le président Ghazouani, depuis son installation, comme par magie, tient doucement par la main un pan entier de l’opposition. Groupe qui se sent, semble- t-il, un peu trahi dans son allégeance, tacite, avec ces élections. Si ce groupe se reprenait et que l’opposition se ressaisisse et décide, résolument, de jouer pleinement son rôle, alors on pourrait y croire. Mais une Opposition qui n’a pas été capable de s’entendre sur le principe élémentaire d’une CENI indépendante, que peut-on en espérer ? Restons malgré tout optimiste et ne remuons pas trop le couteau dans la plaie. Si donc cette opposition revenait à la raison et faisait bloc tout devient possible. La difficulté de la chose – et cela le Pouvoir ne le comprend que très bien- réside, hélas, dans cette confiance, érodée, sans compter des intérêts qui divergent. Comment, sous la pression du temps et des humeurs, colmater tout ça en perspective de la présidentielle toute proche ? C’est toute la question !
-Quelques 48 heures avant la tenue du meeting de l’opposition, le député Biram Dah Abeid a été arrêté par la police puis libéré, le lendemain. On l’accuse d’avoir incité à la violence, au cours d’une conférence de presse. Qu’avez-vous pensé de cette arrestation ?
–Biram est un opposant politique que je respecte et pour lequel j’ai beaucoup de considération .Et il le sait. C’est une lapalissade que de dire que nous appartenons, tous deux, au camp des opprimés …Je ne puis donc, ne serait-ce qu’à ce titre, ne pas m’ériger contre son arrestation ; même si la forme du propos prêtait à réserve. La colère, disait un psychologue, est un moment de folie. En effet, on sentait sourdre dans sa sortie beaucoup de colère, légitime disons-le, de la révolte, engendrée, je crois, par des attentes déçues, de la frustration, signant la fin d’un amour de circonstance fabriqué et savamment calculé. Par ailleurs, vous le savez, je suis opposé à tout arbitraire, d’où qu’il vienne ; or cette arrestation relève de l’arbitraire. Tout comme celle de Mohamed Delhahi qui, pour l’heure, est injustement soumis au contrôle judiciaire.
-Vous n’avez donc pas été élu député, comme vous et vos soutiens espériez. Dans l’un des audios que vous avez fait circuler au lendemain du scrutin, vous avez déclaré que vous ne vous faisiez pas d’illusions. Pouvez-vous nous dire pourquoi ?
Je dois d’abord vous faire remarquer que je n’ai pu, à la fois, espérer et être sans illusions, comme vous semblez le poser .. Soit j’espérais être élu , soit je ne me faisais pas d’illusions. La vérité, comme je l’ai exprimé dans l’audio en question, est que je ne me faisais, effectivement, pas d’illusions sur l’issue du scrutin ; pour différentes raisons. Mais avant d’entrer dans leur énumération, j’aimerais redire que j’ai été candidat par la force des choses ; ça dit ce que ça dit ,décodez …
l’Ajd, que je remercie au passage, nous a donné l’opportunité de participer à ces élections. Il allait se saisir de cette opportunité, malgré toutes ses limites.
Le choix de la voie politique, à la différence de l’autre voie, implique, pour un parti politique, d’aller aux élections, de compétir pour la conquête du pouvoir ou d’une parcelle de pouvoir. Même si les conditions optimales ne sont pas réunies. Et elles le sont rarement en Afrique. Approche discutable, dira-t-on ; je le reconnais. Boycott ou participation, ce sont là des options sujettes à controverse, avec chacune des partisans, avec chacune sa vérité, insaisissable, à l’image des kérygmes.
Maintenant pour revenir aux raisons que je ramasserai, je nommerai en premier l’hostilité marquée du pouvoir à l’endroit des FPC et de leur Président, que traduit une peur bleue à nous offrir cette reconnaissance légale qui nous permettrait d’approcher librement des populations, intoxiquées par des années de campagne de diabolisation qui ne nous lâche pas. Le contentieux qui oppose les FPC au gouvernement, oublié par la cour Suprême voilà huit longues années, puis mon dossier administratif personnel, le seul à rester pendant pour les anciens prisonniers politiques de Walata -, sont là pour le prouver. S’y ajoute l’espace réduit de Nouakchott-Ouest, doublé d’un électorat ayant subi des ponctions pour les besoins de soutien à nos candidats de l’intérieur. Je crois, sans trop ‘’surfer’’ sur l’égo, que je pèse quand même un peu plus que le poids des chiffres que l’on m’octroie. Sans fausse modestie. Vous allez sûrement objecter que cette contrainte ou ces conditions frappaient aussi les autres candidats pour Nouakchott – Ouest ! J’en conviens. Autre raison – pour vous aider – qui s’imposa à tous, l’Administration qui mobilisa ses ressources humaines, matérielles et financières au profit du parti au pouvoir. Je n’ai pas cité les intimidations, le trafic d’influence, l’achat des consciences maintenant banalisé et le bourrage des urnes, bien entendu !
Enfin, – et c’est le plus important- ne perdez surtout pas de vue que la CENI – prolongement du ministère de l’intérieur – ayant emporté les procès verbaux refusés aux représentants des partis comme le prévoit la loi, avait procédé, toute seule, au dépouillement, comme bon lui semblait …L’on devine alors aisément sur qui se porterait son choix dans le lot des candidats en lice. Qui parmi nous à Nouakchott -Ouest, pensez-vous, constitue pour ces gens-là le mouton noir du groupe ? Il n’est pas besoin d’être devin pour le savoir. C’est donc tout cela qui m’amena à dire que je ne me faisais pas d’illusions. Mais demain il fera jour, inexorablement.
-Quels enseignements vous tirez de ces élections locales ? Partagez-vous le sentiment de ceux qui disent que les élections ne règlent pas les problèmes pour lesquels vous vous battez ?
–Ces élections enseignent que nous sommes toujours dans une république bananière. Aujourd’hui plus qu’avant. Que ces régimes militaires, masqués, ne nous feront jamais entrer dans l’ère démocratique, sans résistance, âpre, de notre part. Oui, je partage ce point de vue ; tant que ce sont des militaires, déguisés, qui sont au pouvoir le changement n’est pas pour demain. Telle est ma conviction intime. Dire donc, comme le prétendent certains, que des élections sous des régimes militaires n’apporteront pas le changement escompté n’est pas faux…
Au titre d’une évaluation globale, je puis dire, sans exagération aucune, que les candidats de l’opposition en général et des FPC en particulier n’ont pas démérité…Malgré la force d’une machine de guerre rôdée à la fraude, massive, qui nous était opposée. Nous avons tenu bon, à l’intérieur comme à l’extérieur, en dépit d’un rapport de force inégal. Nous avons été, ici ou là, toujours face au parti au pouvoir ou à son autre versant … Experts en duperie, les tenants du Système tentent, à nouveau, de mystifier, l’opinion nationale et internationale par l’organisation d’un second tour avec un semblant de transparence … De qui se moque-t-on ?
-Lors d’un point de presse que vous avez tenu au lendemain du scrutin du 13 mai, on a noté la présence du président de IRA, M. BiramDahAbeid. Comment avez-vous accueilli cette présence ? Les victimes du «système » pourraient-elles se retrouver sous peu ?
Mais toujours avec plaisir, naturellement. Il dit venir nous témoigner sa solidarité et sa compassion ; ça ne se refuse pas. Nous ne pouvions que nous en réjouir…Que les victimes du Système se retrouvent, dites-vous, c’est souhaitable et même urgent et vital pour ces victimes-là. Mais cette alliance, si elle devait renaître, devra éviter les embûches du passé, se bâtir sur la franchise, la confiance sincère entre partenaires, la constance dans la résistance aux chants des sirènes et aux appâts de toutes sortes. Elle devra, enfin, reposer sur une plateforme minimale, requise. Pour ma part, j’ai toujours milité et souscris à ce que disait cet homme politique : ‘’ la lutte en ordre dispersé n’a pas d’autre effet que la défaite pour tous ’’.
– Quelles sont les perspectives d’avenir de la coalition CVE-CVE/VR ? Pourrait-elle s’allier avec le reste de l’opposition démocratique pour une candidature unique à la prochaine présidentielle ?
– Il faut espérer que cette Coalition se poursuive, pour la raison (citation) que j’évoquais plus haut. Raison de bon sens. Concernant la question de candidature unique de l’opposition, elle n’a pas été encore discutée en notre sein …Mais, personnellement, je pense que les enjeux du moment le demandent, même si…
Je ne sais si, à travers vos colonnes, je puis exprimer toute ma reconnaissance à tous ceux-là qui se sont investis, à leur manière, dans cette campagne, en notre faveur .. A mes amis et parentèle, à tous ces sympathisants du parti, j’exprime toute ma gratitude. Aux militants des FPC, enfin, que je félicite vivement, je dis merci, au nom de tous nos candidats du parti qui n’ont pas démérité.
Demain il fera jour. Il faut y croire.
Propos recueillis par Dalay Lam
Coalition CVE/VR – CVE: Communiqué de presse

Comme tous les Mauritaniens, la Coalition CVE/VR – CVE a appris l’odieux assassinat de notre
compatriote Oumar Diop, tué dans les locaux du Commissariat de Sebkha 1 dans la nuit du
28 au 29 mai 2023. Cette énième forfaiture intervient à peine trois mois après l’exécution de
Souvi Ould Cheine dans les locaux d’un autre commissariat, celui de Dar Naïm. Non
contentes d’avoir ôté la vie à un citoyen qu’elles se devaient de protéger, les forces de
l’ordre s’empressent de publier un communiqué tendant à salir la mémoire de la victime
comme elles l’avaient fait lors de l’assassinat de Souvi. Ce communiqué, rédigé à la hâte et
truffé d’incohérences, sonne comme un aveu de culpabilité et traduit la volonté de couvrir
ce qui apparait comme le résultat tragique d’un excès de zèle de ceux-là mêmes censés
protéger les citoyens.
Comme si cela ne suffisait pas, le régime du Président Mohamed Cheikh Ould Ghazouani n’a
rien trouvé de mieux à opposer à la jeunesse du pays, sortie dans beaucoup de nos localités
pour manifester son indignation, que des tirs à balles réelles qui auraient fait une nouvelle
victime, du nom de Mohamed Lemine Ould Sambe, du côté de Boghé en cette matinée du
30 mai 2023.
Ces tragédies, tout comme celles qui avaient coûté la vie à Souvi, Abbas Diallo et Lamine
Mangane, sont en effet une suite logique du permis de tuer du noir délivré aux
représentants les plus zélés du système raciste et esclavagiste qui nous gouverne à travers la
promulgation de la loi d’amnistie protégeant les auteurs des crimes de génocide contre la
communauté noire pendant les années de braise. La Coalition, tout en présentant ses
condoléances les plus attristées aux familles des victimes, rappelle qu’on ne peut construire
l’unité nationale sur le déni de justice et exige :
– L’arrêt immédiat de la répression brutale contre les jeunes sur l’ensemble du
territoire national.
– La libération sans condition de tous ceux qui sont arrêtés suite aux présentes
manifestations et qui sont soumis à des tabassages et à des humiliations dans les
différents commissariats du pays.
– L’ouverture d’une enquête indépendante pour mettre la lumière sur les circonstances de ces
assassinats et la traduction des responsables devant la justice.
– L’abrogation de la loi d’amnistie de 1993, cadre légal de toutes les exactions à
l’endroit des Noirs de Mauritanie.
Nouakchott, le 30 mai 2023
La Cellule de Communication
Des élections et des surprises

Après le deuxième tour organisé le samedi 27 Mai, les rideaux sont enfin tombés sur les élections municipales, législatives et régionales. Plusieurs partis ont dénoncé la désorganisation qui a entaché le scrutin en certains endroits, la fraude à ciel ouvert et l’intervention des démembrements de l’État au profit du parti au pouvoir…Ces scrutins n’ont donc pas dérogé à la règle non écrite qui veut qu’aucune consultation électorale ne se déroule normalement. Autre tradition, chaque élection apporte son lot de surprises. L’une d’elles – et non la moindre, sans contestation aucune – est l’affaiblissement fatal des partis de l’opposition traditionnelle (RFD, UFP et APP) qui se retrouvent sans aucun député à l’Assemblée nationale. Un véritable coup de tonnerre dont on n’a pas encore saisi toute l’ampleur. La faute à quoi ? A l’érosion progressive de l’électorat observé depuis quelques années ? Au discours modéré face aux problèmes du citoyen? À la politique d’apaisement vis-à-vis du pouvoir depuis l’arrivée de Ghazwani? A l’émergence de nouveaux partis et sensibilités aux discours plus véhéments ? Au vote tribal et identitaire qui a marqué plus que jamais ces élections ? Il y a en tout cas comme un nivellement de l’électorat. L’opposition-ère nouvelle (Tawassoul, FRUD, SAWAB/RAG et AJD/MR) se retrouve avec une trentaine de députés. Comme à son habitude, le parti au pouvoir obtient une majorité confortable (107 députés) et n’a donc plus besoin de ces partis-cartables qui ont servi de refuge à tous ses mécontents et l’ont tout de même battu à plate couture dans certaines localités. Prendra-t-il sa revanche, comme il l’a promis ? Réponse dans quelques jours lorsque le nouveau gouvernement sera formé.
Ahmed ould Cheikh
le calame
Mauritanie : internet coupé après de violentes manifestations

Le360 Afrique – Le gouvernement mauritanien a coupé mercredi le réseau internet sur les téléphones portables au lendemain de manifestations liées au décès d’un jeune Mauritanien à la suite d’une brève garde-à-vue dans un commissariat de police.
Toutes les connexions internet sur les téléphones portables étaient coupées mercredi, mais les lignes fixes continuaient de fonctionner et l’activité économique suivait son cours, a constaté un journaliste de l’AFP.
Mardi, des manifestations spontanées se sont déroulées à Nouakchott et Boghé (Sud) pour réclamer «justice pour Omar Diop», un jeune homme arrêté lundi soir à Nouakchott après avoir participé à une bagarre, selon la police, et décédé quelques heures plus tard à l’hôpital à la suite de problèmes respiratoires.
Une autopsie et une enquête sont en cours pour déterminer les circonstances du décès, a déclaré le ministère de l’Intérieur dans un communiqué.
Les manifestants ont brûlé des pneus dans les rues de la capitale, «incendié et saccagé des biens publics et privés», a-t-il aussi indiqué.
A Boghé, à environ 300 km au sud-est de Nouakchott, un manifestant a été tué au cours de heurts entre petits groupes de jeunes et forces de l’ordre, lorsque les premiers ont tenté «d’investir le commissariat de police de la ville», a ajouté le ministère de l’Intérieur.
Les autorités ont décidé de couper internet pour «réduire les chances de liaisons entre les malfaiteurs» a affirmé à l’AFP un haut gradé de la police.
Mercredi, le calme était revenu dans les deux villes de ce pays qui a connu samedi et dimanche l’épilogue de ses élections législatives, le parti au pouvoir du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani raflant un an avant la présidentielle 107 sièges sur 176.
Source : Le360 Afrique (avec AFP)
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source www.kassataya.com
Mort de Oumar Diop, radioscopie d’une explosion de colère en Mauritanie
Thaqafa – La mort à Nouakchott de Oumar Diop, jeune père de famille de 38 ans originaire de MBagne, continue de susciter des remous dans plusieurs villes de Mauritanie. Conséquences, un jeune manifestant est tué par la police à Boghé, plusieurs blessés et des fourguées d’arrestations à Kaédi, Nouakchott, Nouadhibou et MBagne, sans compter plusieurs casses et troubles sociaux. A la version avancée par la famille du défunt, et reprise par l’opinion publique nationale, s’oppose celle des autorités.

Manifestation Kaédi
Les explosions de violence continuent de secouer la capitale mauritanienne et plusieurs villes de l’intérieur du pays. En effet, depuis l’annonce, la nuit du lundi 29 mai 2023, de la mort de Oumar Diop, jeune ressortissant de MBagne, la colère s’est emparée de la rue mauritanienne.
A partir de la version avancée par la famille du défunt, plusieurs leaders politiques et défenseurs des droits de l’homme ont condamné un « crime odieux commis dans un commissariat de police ». C’était lors d’un rassemblement monstre à l’hôpital national de Nouakchott où une foule immense et colérique s’est massée lundi 29 mai dans l’attente des résultats de l’autopsie. Là, des échauffourées ont éclaté avec les forces de l’ordre.

Une foule de jeune transportant le corps sans vie de Mohamed Lemine tué à Boghé par un policier
Mardi 30 mai, le procureur de la République et le ministre de l’Intérieur font des déclarations à la presse pour avancer leur propre version.
Mort sous la torture
Selon la version de la famille de Oumar Diop, jeune homme d’affaires, père de trois enfants avec une épouse en état de grossesse avancée, le défunt qui se préparait à migrer vers les Etats-Unis avait vendu deux voitures pour un montant de deux millions cinq cents mille anciennes (2.500.000) ouguiyas. Deux policiers en patrouille voulurent le délester de son argent, ce qu’il refusa. Il était accompagné par son frère, selon qui, le défunt aurait remis finalement vingt-cinq milles (25.000) anciennes ouguiyas aux deux policiers pour se débarrasser d’eux.

Oumar Diop

Le corps du défunt
Le lendemain, dimanche 28 mai 2023, alors qu’il est en crevaison près de l’hôpital psychiatrique dit « Hôpital Dia », aux environs de 22 heures, un ami qui est accompagné de son épouse vint lui donner un coup de main. Selon lui, deux policiers à bord d’une voiture de police demandent à Oumar Diop de les suivre au commissariat. « Le commissaire a besoin de vous » lui aurait-il dit, selon le témoignage de son ami. Face à son refus de les suivre sans motif, ils l’embarquent par la force après l’avoir roué de coups et menotté.
Vers 7 heures du matin du lundi 29 mai, sa famille reçoit un coup de fil. La police leur annonce la mort de Oumar Diop, précisant que son corps repose à la morgue de l’hôpital national.
Une foule monstre à l’hôpital
Lundi 29 mai 2023, la morgue de l’hôpital national de Nouakchott est prise d’assaut dès la première lueur de la journée, par des centaines de personnes en colère, au milieu d’une forte présence de leaders politiques, de journalistes et d’activistes de la société civile.

Famille et amis du défunt devant la chambre mortuaire de l’hôpital national
Une autopsie est en cours, sous la supervision de deux médecins légistes, un médecin désigné par la famille du défunt, dont l’un des membres est présent, en plus d’un avocat de l’organisation mauritanienne des droits de l’homme.

Foule en colère devant l’hôpital national
Des véhicules de la police anti-émeute se présentent en milieu de journée pour disperser la foule. S’en suivent des escarmouches entre policiers et manifestants. Pendant plusieurs heures, les deux camps s’échangent lancées de pierres et jets de lacrymogènes. La devanture de l’hôpital est transformée en un véritable champ de bataille, pendant que des volutes de fumées noirâtres s’élèvent en l’air, obscurcissant le ciel. Des tas de pneu finissent de se consumer au milieu de la chaussée.
Les leaders réclament justice
Dans la vaste cour de l’hôpital où se bouscule une foule immense, plusieurs hommes politiques et membres de la société civile livrent leur point de vue, au milieu d’une atmosphère électrique dominée par un brouhaha assourdissant.

Balla Touré
Des photos du corps de Oumar Diop, parsemé d’ecchymoses bleus, font le tour de la toile, alimentant une colère déjà nourrie par des réseaux sociaux en feu. La tension monte crescendo au fil des heures.
L’opposant Mohamed Ould Maouloud, président de l’Union des forces du progrès (UFP), déclare être venu s’informer sur le drame et apporter sa solidarité à la famille du défunt. Selon lui, cette situation ne fait que détériorer la confiance entre les populations et les autorités, regrettant qu’un tel scénario puisse se reproduire à chaque fois qu’un citoyen entre dans un commissariat de police.

Pour Balla Touré, député nouvellement élu, « Omar Diop est victime de la police mauritanienne », revenant sur les circonstances de sa mort. Selon lui, la police mauritanienne a une nouvelle fois récidivé après l’assassinat au commissariat de Dar Naïm 2 de l’activiste Souvi il y a quelques mois. Il a demandé à ce que justice soit rendue, soulignant que l’opinion n’acceptera pas un résultat biaisé de l’autopsie et la délivrance d’un certificat médical qui ne corresponde pas aux causes réelles du décès de la victime.

Birame Dah Abeid, député et président du mouvement antiesclavagiste IRA, dit condamner l’acte ayant conduit à la mort de Omar Diop au commissariat de Sebkha. Selon lui, les autorités doivent faire toute la lumière sur cette affaire et condamner fermement les auteurs du crime.
Aminetou Mint Mokhtar, présidente de l’association des femmes chefs de famille (AFCF) déclare à son tour que ces assassinats de citoyens dans les commissariats de police menacent la paix civile et ébranlent les fondements encore fragiles de l’unité nationale.

Pour sa part, l’avocat et député Me Id Ould Mbareck, qui vient d’assister à l’autopsie, affirme que Oumar Diop est mort sous la torture. Selon lui, une enquête sérieuse et diligente doit être menée pour déterminer les circonstances de sa mort et rendre justice à la victime et à sa famille.
Plusieurs autres personnes qui étaient avec la victime lors de ses altercations avec les policiers et sa conduite au commissariat ont livré leurs témoignages.
Sur la toile, une vidéo prise par des voisins, montre les ultimes moments de Omar Diop avec deux policiers à côté d’une Pickup de la police et une petite voiture garée.
Version des autorités

Quarante-huit heures après le drame, la Direction de la Sûreté Nationale sort un communiqué dans lequel elle déclare qu’une patrouille de police a arrêté Omar Diop après une bagarre avec un groupe de jeunes durant laquelle il aurait été blessé. Selon le communiqué, il « était dans un état presque totalement inconscient à cause de psychotropes. ». Amené au commissariat de Sebkha, « la victime s’est plaint de difficultés respiratoires et a été immédiatement transporté à l’hôpital national, où le médecin l’a examiné et lui a prescrit un traitement » selon le communiqué. Et de poursuivre, « malheureusement, malgré les efforts continus du personnel médical, sa santé a commencé à se détériorer et il est resté à l’hôpital. Malgré les tentatives des ambulanciers pour le sauver, il est décédé ».

Mardi 30 mai, le Procureur de la République de Nouakchott-Ouest déclare à son tour que « les policiers qui ont interpellé Oumar Diop ont été entendus », affirmant que « les personnes qui étaient sur place sont en train d’être interrogées ». Selon lui, les résultats définitifs seront publiés. « Le médecin-légiste a demandé un complément d’analyses de l’autopsie. Les éléments seront envoyés à l’étranger pour le besoin d’examens supplémentaires » a-t-il conclu.
L’après-midi, lors d’une conférence de presse, le ministre de l’Intérieur a évoqué la mort de Oumar Diop et celle du jeune Mohamed Lemine, tué à balle réelle à Boghé lors d’une manifestation réprimée par la police. Selon lui, des enquêtes ont été ouvertes dans ces deux disparitions, ajoutant que « certains prêcheurs en eaux troubles exploitent la situation actuelle pour créer l’instabilité et le désordre dans le pays ». Il a affirmé que la « situation est sous contrôle » tout en appelant les leaders d’opinion, les journalistes, les hommes politiques et les oulémas, à contribuer pour le retour à la paix et à la stabilité.
Il faut rappeler que ces troubles qui se poursuivent depuis deux jours sont attisés par ce que d’aucuns appellent « la propension des policiers à faire des commissariats des lieux de crimes et de rapines », non sans rappeler le crime odieux dont a été victime l’activiste Souvi Ould Cheine en février 2023. S’ajoute à cela, ce que l’avocat et opposant Me Lô Gourmo nomme, la frustration des jeunes des zones périphériques de Nouakchott, notamment à El Mina et à Sebkha, soumis depuis plusieurs années à un couvre-feu permanent.
Hier nuit, le service Internet a été coupé, comme ce fut le cas aux lendemains des scrutins controversés du 13 mai 2023. Une arme que les autorités semblent utiliser d’une manière récurrente chaque fois que la situation sociale et sécuritaire commence à dégénérer.
Cheikh Aïdara
Source : Thaqafa (Mauritanie)