Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

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FLAMNET-RETRO: La Mauritanie ‘’ immobile à grands pas’’…Par SAMBA THIAM

altLes rideaux viennent de tomber sur le ‘’ Dialogue de l’Entente Nationale’’   à  Bamako.

Après le Maroc  et l’Algérie,  le Mali vient, à travers ses assises  ,  d’emprunter le chemin de la réconciliation ; en choisissant de reconnaitre  les problèmes , de les  discuter,  pour leur  trouver une juste solution, autant que faire se peut ; sur la base d’une triptyque : Unité , Réconciliation , Paix

Maliens , Marocains  et  Algériens ont pris conscience de l’ identité plurielle de leurs pays respectifs, reconnu la réalité du ‘’mal  vivre-ensemble ’’ , compris donc enfin la nécessité de faire  place à leur composante nationale  berbère… La Mauritanie, seule , poursuit sa fuite en avant face au problème d’unité nationale, de cohabitation  …

Et l’élite, lucide, pour l’essentiel, observe et ne dit  rien

Une Mauritanie immobile , à la stabilité  menacée , face aux grands défis nationaux ; immobile à grands pas dans du Faux . Faux diplômes , faux titres fonciers, faux permis  de construire, faux permis de conduire, fausses étiquettes , faux en écritures, fantaisistes et abusives  interprétations de la loi …Bref, rien que du faux , du  semblant , une histoire falsifiée ,  la loi tournée en dérision et le désordre partout !

Et l’élite consciente observe, toujours  sans rien dire, si elle  n’y pousse…

Nous nous comportons comme si nous ne  désirons  pas que ce  pays change  positivement ; comme si nous ne voulions pas  qu’il évolue et se modernise , à l’image du Maroc , de l’Algérie ou de la Tunisie . Chacun laisse faire , s’il ne contribue, par lui-même, à le maintenir dans l’arriération …Un Pays figé sur un passé ressassé et encensé mais hélas  archaïque…! ‘’ Ne remuez pas trop autour du tronc illustre , vous risquez de trouver un monceau de détritus’’, disait H de Balzac ! On pourrait en dire  autant de nos passés…

Les Pays précités, peut-être, nous montreront-ils un jour le chemin, dans la prise à bras le corps des problèmes , sans déni ; en nous indiquant ce que signifie l’Ordre , le sens de l’Etat , en nous inspirant le style et la classe de la place-Carthage et la Corniche d’Alger…  si nous toutefois désirons changer r …     

                

Samba Thiam, président des Forces Progressistes du Changement –FPC

Le 05 avril 2017

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FLAMNET-RETRO : Interpellation des intellectuels arabo-berbères : par SAMBA THIAM

alt‘’ Un pays est d’abord fondé sur une volonté des diverses parties de coexister , de vivre ensemble dans la paix. Sans ce choix et cette volonté c’est une partie perdue ‘’.

‘’… Si l’on ne peut vivre ensemble qu’au prix de l’oppression à l’égard d’une composante, c’est une position pas raisonnable qui , surtout , n’est pas tenable ‘’.

On croirait lire le cas mauritanien … Et pourtant il n’en ait rien !
Il s’agit en fait du cas malien , traité par un mauritanien bien particulier : l’éminence grise du Président ould Abdel Aziz , selon certaines sources , en l’occurrence Yehdih ould Bredeleil qui , à travers un article intitulé ‘’ l’Azawad’’, prend nettement, résolument et légitiment position pour les Touaregs opprimés du Mali …en abstraction totale cependant de sa Mauritanie !

Le plus curieux c’est qu’il ne vient , à aucun instant , à l’esprit de Yehdih que sa description de principe s’appliquait aussi et rigoureusement au cas mauritanien , à travers la difficile coexistence actuelle ! Manifestement il n’a pu se déprendre de ces solidarités grégaires qui souvent nous retiennent ; prisonnier d’une vision partisane et du prisme déformant de la solidarité mécanique, il ne fait ni retour sur soi , ni flexion sur sa propre réalité…Surprenant de la part du grand cerveau !

Cette attitude est assez courante hélas chez un bon nombre d’intellectuels et d’hommes politiques arabo-berbères qui tombent , généralement , dans le déni dès que nos problèmes sont évoqués ! Le mal existe ailleurs et pas en Mauritanie… 
Cette attitude qui interpelle ne serait –elle pas fondée par hasard sur une tentation de vouloir copier le maghreb ? Le Maghreb ( Egypte incluse ) compte , aux dires de Cheikh T Ndiaye, quatre vingt millions de Noirs . 8o millions absents de la superstructure ; des ombres portées … Noirs pourtant assimilés , pourtant musulmans … Vouloir copier ce maghreb -là, pour ceux tentés de le faire, serait , sans aucun doute , une cruelle méprise au regard de la géographie physique et humaine de la Mauritanie …
Cette attitude ou position singulière m’amène de plus en plus à penser qu’un débat interne s’impose au sein de la communauté arabo-berbère, qui devra se déterminer sur le‘’ vivre ensemble’’, préliminaire à tout dialogue inter-communautaire sur la question.

Le nœud du problème , me semble-t-il , réside davantage chez elle que chez les Négro-africains . Les Arabo-berbères veulent –ils vivre avec les Négro-africains ? si oui , sous quelle forme et à quelles conditions ? Dans l’assimilation ou dans le respect des identités respectives ? Dans l’accaparement de tous les secteurs de la vie publique par les uns ou le partage équilibré du pouvoir entre tous ? Au travers de l’unité ou de l’unitarisme ? Une clarification à ces niveaux s’impose à l’élite qui devra se parler , la minorité courageuse des Justes débattre avec la majorité silencieuse qui assiste, sans rien dire, au mensonge triomphant , au péril montant … Ils devront se parler afin de nous éviter de continuer de tourner en rond , de vivre sans cesse des crises sans fin, de nourrir un pessimisme chaque jour plus accusé sur notre commun devenir .

Initier et parrainer un tel débat interne au sein de la communauté arabo-berbère voilà, pour les segments actifs de la Société civile , un chantier urgent, porteur et autrement plus important que tous ces ateliers autour de questions, parfois sans diagnostique et sans débat de fond .

Enfin les amis et partenaires internationaux de la Mauritanie devront comprendre que ‘’la Mauritanie sans cohésion interne,’’ est porteuse de tous les dangers que leur ‘’tout- sécuritaire ‘’ ne pourrait juguler…La Mauritanie d’abord !
 “Si l’on ne peut vivre ensemble qu’au prix de l’oppression à l’égard d’une composante , c’est une position pas raisonnable qui , surtout , n’est pas tenable ‘’.

 

La lutte continue!

Samba Thiam président des FPC

 

 

 

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FLAMNET-RETRO : Pour une coopération plus éclairée : par SAMBA THIAM président des FPC.

altMaintenant que le sommet arabe est fini, bien fini, l’auto congratulation passée, redevenons nous –mêmes  et  revenons à nos moutons …)  

 Pour une coopération plus clairvoyante

       Unité nationale-radioscopie…  

” Notre lutte n’était pas dirigée contre les Blancs eux- mêmes, mais contre la domination des Blancs, contre une politique hégémonique qui se reflète dans la composition raciale des principales structures du Gouvernement, à tous les échelonsN. Mandela.

L’auteur de ces lignes, pour lever tout amalgame et toute ambiguïté, clarifie le sens et la direction de la lutte de l’ANC.

Lignes fortes, à résonnance particulière pour les militants des FPC–d’inspiration ANC- qui luttent aussi contre un Etat, contre un Système et non contre une communauté raciale quelconque; “un Système fondé sur des préjugés, des présupposés qui aboutissent à une hiérarchie’’ que définissait si bien A Césaire .

Résonnance particulière de ces lignes également chez les Négro-africains en général pour refléter ce qu’ils vivent au quotidien, à travers leur descente aux enfers qui se manifeste par leur élimination, graduelle et sans fin, de la superstructure et des principaux secteurs de la vie publique, amorcée dès l’indépendance.

 Dès 1960, un Système est mis en place par Moctar  ould Daddah, à travers le contrôle de quatre verrous essentiels -leviers du pouvoir:– le contrôle du pouvoir politique, du pouvoir culturel (la langue), du pouvoir militaire, du pouvoir économique et financier, que viendra couronner le monopole des médias. Un Système pernicieux, bien construit, à l’origine de l’Inégalité ethnique consacrée et institutionnalisée ’’actuelle, qui fera dire à un visiteur étranger de passage ‘’qu’en Mauritanie être Noir est un délit  sans que cela ne soit inscrit nulle part’’ !

Le Gouvernement du Président Abdel Aziz, sur les traces de prédécesseurs imbus de la même idéologie, consolide et perpétue ce Système, en exécutant cette  ‘’ politique hégémonique qui se reflète dans la composition raciale des principales structures du Gouvernement, à tous les échelons ‘’ dont parle Mandela. Ce gouvernement dans son empressement à asseoir définitivement et clôturer le Système, l’a profondément  exacerbé, accentuant davantage la fracture communautaire …

 Il suffit, pour s’en convaincre, d’observer autour de nous pour constater la composition raciale du secteur de la justice, celui des (9) Ecoles spéciales, ou des commissions chargées de l’enrôlement biométrique, du corps de commandement des forces  armées et de sécurité, des médias enfin. Des faits, rien que des faits que le Président, campant dans sa posture de déni habituel, s’efforçait de faire porter aux autres  ( message à la nation en début et fin du ramadan, entre autres ).Au regard de ces faits, têtus, qui est-ce qui, en réalité, œuvrait  dans le sens  du “sectarisme’’ , du “racisme’’ ou de la ‘’ségrégation’’ ? Qui ‘’ divisait le  peuple’’, à entendre nos “alter égo de Vichy’’, déclamer des slogans éculés, complètement  déconnectés  du réel?

A ce tableau d’iniquités décrit, vient s’ajouter ce découpage administratif et territorial des plus arbitraires et des plus injustes, depuis toujours. Citons en quelques cas significatifs à titre d’exemple :

L’Adrar : 62 658 habitants, 4 préfectures, 5 députés, 4 sénateurs (9 parlementaires)

Le Guidimakha : 267 029 habitants, 2 préfectures, 6 députés, 2 sénateurs  (8 parlementaires)

Le Tiris Zemmour : 53.261 habitants ,3 préfectures, 4 députés, 3 sénateurs (7 parlementaires)

Le Gorgol :   335.917 habitants, 4 préfectures, 10 députés  4 sénateurs (14 parlementaires);

Le Tagant : 80.962habitants ; 3 préfectures, 5 députés, 4 sénateurs (9 parlementaires) .

Le Hodh Gharbi 294 109 habitants, 4 départements, 9 députés, 4 sénateurs

Au total, toutes régions comprises, on dénombre 203 parlementaires dont 150 Arabo-berbères (73 %), 20 haratines  et 33 Negro africains .Le pays compte 55 préfectures  au total, et seulement 7 pour la vallée du fleuve malgré sa forte densité !

De quelle ‘’Unité nationale’’ nous parle-t-on lorsqu’il n’existe d’équité nulle part, au regard de ces faits ?

‘’ Annihiler la force numérique et la force de travail que représentent les Noirs pour les transformer en simples instruments, sans qu’aucune possibilité ne  leur soit laissée  de sortir de cette situation ’’. N  Mandela  

Rien ne distingue ce but ultime de l’idéologie afrikaner, ici décrit, des objectifs politiques de la plupart des  régimes  mauritaniens,  en particulier celui du Président Ould Abdel Aziz ! 

Voilà qu’après la main mise sur tous les leviers essentiels, le Système va boucler la boucle, à travers l’action du Président ould Abdel Aziz qui se tourne maintenant vers le dernier carré, jusque là préservé : les terres de la vallée du fleuve. Cela semble se dessiner à  travers un comité interministériel, à pied d’œuvre depuis juin 2016, ouvert aux bailleurs de fonds,  naturellement, mais qui restera sourd aux complaintes  légitimes des populations concernées, comme toujours!   

             Pour une coopération plus éclairée…  

Ce qu’il faut déplorer dans cette situation c’est qu’il se trouve, hélas, des partenaires internationaux qui, consciemment ou inconsciemment , accompagnent cette politique ; en effet, certaines institutions internationales, certains partenaires étrangers participent de cette dangereuse entreprise de spoliation, par leur apport multiforme dans ce secteur ; a travers  leurs  programmes d’appui, leurs financements …Or sans crever l’abcès, c’est-à-dire sans œuvrer au rétablissement  préalable de la vérité  sur l’occupation des terres-qui possède quoi-, sans affirmation claire du caractère intangible du droit de propriété, sans apaisement des rancœurs  et des frustrations accumulées toutes ces années à cause des injustices nombreuses , il ne serait ni judicieux, ni raisonnable de s’engager dans ce secteur . Il serait illusoire de vouloir exploiter de manière efficiente et productive ce secteur agricole durablement ; illusoire d’espérer en tirer des bénéfices probants ; plutôt, on risquerait de créer ou précipiter les conditions d’instabilité explosive, sans plus. A titre d’illustration, peut–on légitimement envisager un projet d’exploitation ou d’extension des manguiers des femmes de Thiembene  sans risques ? Serait-il moralement juste de s’approprier le fruit de leur labeur pendant des années, de transformer de facto un cas de flagrante injustice en fait accompli, définitivement accompli ? 

Enfin il ne faut pas que la raison de sécurité l’emporte sur celle (des risques) du chaos social éminemment plus dangereux 

Attention toutefois, que l’on nous entende bien : la vallée du fleuve doit voir son potentiel agricole mis en valeur, exploité au bénéfice de tout le peuple mauritanien. Seulement, ce développement devra tenir compte de certains principes, reposer sur la concertation avec les populations concernées  à  associer, respecter l’espace vital des villages et certains droits séculiers (accès à la terre pour les paysans, accès au fleuve pour les pécheurs, couloirs de parcours et d’accès à l’eau pour les éleveurs). Ainsi et ainsi seulement, on s’acheminerait vers un développement réfléchi, apaisé,  qui profiterait à tous. Voilà pourquoi nous pensons que tout plan d’exploitation de cet espace devrait se décliner en paliers, ci-après : 

La Zone du ‘’ Waalo’’- ou partie inondable- sera affectée aux populations locales que l’Etat accompagnera 

– Les investisseurs nationaux et sous–régionaux se verront attribuer le moyen Dierri -12km du fleuve, 

-Les Investisseurs internationaux (le grand capital ) occuperont le haut Dierri -20km du fleuve et au de-là-.  

Enfin s’il y a réforme foncière, elle devra être une, la plus équitable possible, applicable du Nord au Sud, d’Est en Ouest avec la même impartialité. 

D’ores et déjà nous ne pouvons que déconseiller fortement tout financement de projets agricoles de partenaires  dans la vallée du fleuve, avec le statu-quo  actuel ; tout comme nous décourageons les appuis au secteur de la justice dans  laquelle  Negro-africains et haratines ne se reconnaissent pas ; Ils n’y sont pas représentés, ne peuvent  s’y exprimer (N-africains), ni en attendre des verdicts impartiaux. Une justice enfin, où on ne donnait pas aux  juges honnêtes  de  dire le droit. A nos yeux l’appui visant à  ‘’ rendre cette justice plus forte,’’ comme  se le proposent certains partenaires au développement, mérite d’être questionné, car il ne serait pas de nature à favoriser la cohésion nationale, pour  accentuer et consacrer la marginalisation des Négro-mauritaniens.   

Pendant l’occupation algérienne Albert Camus eut à tenir ces propos sur la Justice française qui lui valurent bien des quolibets:‘’ entre votre Justice et ma mère je choisis ma mère’’, dit-il. C’était sa manière de dénoncer la justice française appliquée pendant la guerre d’Algérie, exigeant  une autre justice plus conforme  à  celle incarnée  par la rigueur et la droiture de sa vertueuse mère ! 

Citation qui ne saurait mieux traduire le ressenti actuel des Négro-africains à l’égard de la justice mauritanienne perçue comme une justice partisane au service d’une entité, une justice des riches et des puissants pourvoyeuses de cellules  …Nous sommes des assiégés ! 

Nous sommes des assiégés, en survie !   

Dans le livre titré ‘’ la vallée du fleuve Sénégal ’’ de B Grousse et Sidy M Seck, Ed karthalla 1991, le mauritanien Ba Boubacar Moussa révèle -page 265- : ‘’ dans un rapport confidentiel, le ministre de l’intérieur écrit’’ « Les halpulareen tentent de déstabiliser la Mauritanie en remettant en cause son arabité. La base sociale sur laquelle se développe ce particularisme tributaire de l’hégémonisme sénégalais, c’est la composition ethnique du peuplement local actuel, majoritairement halpulareen. En modifiant radicalement la composition de ce peuplement, on prive ce particularisme de toute possibilité de développement à moyen terme ». 

C’est on ne peut plus clair ! 

 La majorité des mauritaniens victimes des évènements Sénégalo-mauritaniens de 1989, expulsés du Sénégal se sont vus bloqués sur la ligne du fleuve, contraints et forcés de s’y installer  alors qu’ils avaient, pour la plupart, émis le désir de regagner leurs régions d’origine…Ils furent autorisés à occuper villages et champs de Négro-africains déportés, non encore restitués à ce jour, comme pour le carré de manguiers des braves dames de Thiembene … 

L’esprit du rapport confidentiel était en marche …  

La déportation des populations négro-africaines au Sénégal et au Mali s’inscrit dans le même sillage ; comme le refus obstiné de ramener les (12000) déportés mauritaniens au Mali, qui participe de la même logique … 

On le voit, le rapport était en applicationLa descente vers le Sud n’a donc pas été que ‘’spontanée’’ ou sous la poussée de la sécheresse, contrairement à certaines affirmations ; elle fut inspirée, suscitée et même encouragée… pour des motifs obscurs. 

L’esprit de ce rapport-circulaire était en marche. IL est en marche, non plus localement, mais à l’échelle nationale  avec le Président Abdel Aziz ; au niveau des forces armées et de sécurité, de la Police,  de l’Administration, de la Justice, des Ecoles spéciales, des médias , à travers cet ’enrôlement biométrique aux commissions techniques mono ethniques  et ces conseils de ministres ; l’esprit de cette circulaire se poursuit encore et se reflète jusque dans l’organisation du sommet arabe récemment à Nouakchott où nous avons été tenus absents ; Arabité oblige, toutes les émissions en langues nationales pulaar , soninke , wolof ont été suspendues , le temps d’un sommet… Or l’Unité ne peut se fonder sur l’assentiment des peuples en présence, dans l’acceptance  et le respect réciproques. Dès lors qu’une des parties est perçue comme une gène, voire un boulet au pied  l’Unité n’est plus viable ! 

Le Président, son compère de l’état major et la dame de la CUN, par leur action conjuguée, tentent  de parachever au pas de course l’infâme  projet, amorcé en 1960,  considérablement  aggravé  par Ould Taya dans les années 1980. Le Président veut développer ce pays, ce qui, en soi, n’est pas une mauvaise chose; ce qui est mauvais par contre est qu’il veuille le développer sans Nous,- nous Négro-africains et Haratines- chose inacceptable, encore une fois ! 

 Un pays, une Nation, un Etat viable ne sauraient se construire de cette façon là…En conséquence toute coopération dans ces conditions devient donc questionnable. 

Dans son allocution du 12 juillet 2016, l’ambassadeur des Etats-unis à Nouakchott, évoquant la question de l’esclavage, disait, je cite : «les histoires de nos deux pays ont de tristes similitudes. Comme la Mauritanie, nous luttons pour surmonter les séquelles de notre passé, et pour construire un meilleur pays pour tous les citoyens ». A cette différence qui échappait peut-être à son Excellence : si aux Usa l’esclavage a été vaincu c’est  parce qu’il y eut des consciences torturées, des intellectuels et des hommes de foi qui n’en pouvaient plus de transiger avec  leurs consciences, torturées ; ce  n’était pas le cas en Mauritanie où l’on fait  surtout semblant … En Mauritanie l’hypocrisie  et  le  ‘’faire semblant’’ sont entrés dans les mœurs … 

 

Isselmou O Abdel kader  disait  au cours  d’une rencontre publique récente que 90% de l’économie de Kaédi était aux mains des familles maures ; Dire 90% de l’économie de toute la vallée du fleuve aurait été plus proche de la réalité ! « Si l’on ne peut vivre ensemble qu’au prix de l’oppression à l’égard d’une composante, c’est une position pas raisonnable et qui, surtout, n’est pas tenable » soutenait  Yehdih.

 

                    Il faut reprendre Aleg  

S’il s’était agi de corriger le déséquilibre issu du legs colonial on aurait compris ! C’eût été légitime, parce que c’eût été faire justice; mais l’on s’attela, plutôt, à éliminer la composante négro-africaine des sphères de la vie publique, totalement! Evidence, hélas, que le Pouvoir en place et une bonne partie de l’élite arabo-berbère s’obstinaient à nier! Or il ne pouvait y avoir d’unité ou simplement de rencontre avec l’autre sans la reconnaissance de l’autre dans son altérité …     

Au vu de toutes ces données, appuyer ou financer donc le secteur agricole ou celui de la justice ou encore des forces armées et de sécurité  mono ethniques actuelles, sans créer au préalable  les conditions d’égalité, d’équité et de justice entre les composantes nationales dans ces secteurs, ne serait ni plus ni moins  qu’aggraver cet état de siège. Ce serait  apporter une caution à notre exclusion, soutenir et légitimer la domination d’une composante nationale sur les autres. Nous sommes des assiégés en état de survie ! Voilà pourquoi l’appui à ces secteurs doit être questionné, encore une fois… 

 Il faut reprendre Aleg qui fut un raté ! Il faut rediscuter des conditions de coexistence, du vivre ensemble. Les partenaires et amis de la Mauritanie se doivent donc de faire preuve de claire voyance et davantage de vigilance et de prudence dans leur coopération avec l’Etat ou le régime mauritanien, buté, de nature éthniciste, aux tendances autocratiques, répressives et prédatrices …. 

Samba Thiam 

Président des Forces Progressistes du Changement FPC

Nouakchott, le 31 juillet 2016

 

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FLAMNET-RETRO : Regard critique post- dialogue: les vraies conclusions : par SAMBA THIAM président des FPC

altDans le document final de l’accord politique on a, de nouveau, parlé comme dans toutes les réformes administratives, politiques et  scolaires  précédentes  ‘’ du renforcement de la langue arabe ‘’. Il faut soutenir ce renforcement de la langue arabe , mais le soutenir  pour  la nationalité arabo-berbère …Il n’est plus  question de  l’appliquer  aux Négro-africains car , pour ces derniers , ce ‘’renforcement’’, dans  le passé et le présent récent, s’est toujours traduit  par davantage d’exclusion . Avec  ce ‘’renforcement de la langue arabe’’ on a cherché à faire de l’unitarisme  plutôt que  l’unité ; Obstinément, on s’évertue  à vouloir gommer l’autre identité  du pays . Oui donc  au  renforcement  de la langue arabe, mais  pour les Arabo-berbères ;au titre du respect de l’ identité négro-africaine qui  s’impose et exige, enfin, l’enseignement et l’officialisation immédiate  des langues nationales wolof , pulaar , soninke et bambara  au même titre que l’arabe ; identité pour identité…

Il n’y a pas de majorité en matière d’identité, tout comme il n’y a pas de majorité en matière de vérité. Rappelons  au passage que le stade de promotion ou du choix des caractères pour la transcription de ces langues est un stade dépassé.

L’élite arabo- berbère ne semble pas se résoudre à admettre  que l’Unité nationale suppose la reconnaissance de l’autre et dans son identité et dans son altérité! Qu’elle requiert l’égale dignité, l’acceptation et le respect réciproque, l’équité et l’égalité des chances devant les opportunités.

Voilà pourquoi nos langues pulaar , soninke , wolof et bambara doivent être érigées en langue de travail et d’alphabétisation des masses  pour en faire de bons citoyens et des acteurs de développement avertis.  L’indépendance culturelle, tant prônée , ne doit pas rester sélective . Elle doit  rimer avec l’indépendance culturelle de tous , sans esprit partisan …

IL ressort par ailleurs du même accord politique que l’on s’acheminerait vers une consultation  référendaire  autour de certains points , dont les emblèmes nationaux , à modifier .  Il nous semble plutôt que le contenu central de ce référendum, s’il avait lieu , doit d’abord porter sur  la question fondamentale, première, du‘’ vivre ensemble’’ à trancher .Voulons-nous , oui ou non, vivre ensemble ‘’? Sur quelles bases, si la réponse devait être affirmative ? A quel prix ? Car comme le soulignait Yehdih : << Un pays est d’abord fondé sur une volonté des diverses parties de coexister , de vivre ensemble , dans la paix . Sans ce choix et cette volonté c’est une partie perdue >>.

Tout le reste constitue des points  corollaires  à cette  question . S’il advenait que la réponse du peuple  fût oui, alors forcément la constitution devra être ouverte afin d’y  insérer  les principes régulateurs du vivre –ensemble  qui touchent à la redéfinition du pays  ( la Mauritanie est un pays islamique , arabe et négro-africain ), à sa re-caractérisation ( la Mauritanie est bi-raciale , multi ethnique et pluriculturelle ) et aux principes , affirmés, d’équité et d’égalité en droits et devoirs  des communautés et des groupes nationaux  en présence .

Au sortir du dialogue national inclusif  il y a lieu nous semble-t-il,  pour rassurer sur la volonté réelle de changement de politique, de poser un certain nombre d’actes concrets qui répondent  à des  attentes pressantes. Il s’agit , entre autres , de déclarer  l’officialisation de toutes les langues nationales , d’acter  la représentativité  des  langues et cultures dans les médias nationaux  , de  rectifier le processus d’enrôlement à travers une recomposition plus équilibrée et des commissions techniques régionales et de la commission centrale de supervision; de ramener les  refugiés du Mali enfin, de geler  provisoirement  toute occupation ou cession de terres, en attendant la mise en place d’une réforme globale plus juste  . Ces points ne requièrent pas de débat particulier  pour relever plutôt de l’initiative du Président de la république. 

Si la Mauritanie connait depuis les années 60  des problèmes récurrents, c’est en raison du projet,   inavoué, tenace, d’assimilation  du groupe négro-africain… impossible à réaliser. On a cherché- on cherche toujours- à copier la réalité du Maghreb, où les populations noires sont reléguées au bas de l’échelle sociale, assujetties aux basses besognes, totalement effacées de la superstructure…C’est une voie sans issue  parce que notre histoire et nos trajectoires  respectives sont totalement différentes …

L’histoire des populations noires du Maghreb ( 80 millions d’âmes si on inclut l’Egypte ) est complètement différente de celles des populations noires du Waalo , du Tekrour, du Guidimakha . Les premières sont le produit de la traite négrière , surajoutées au substrat négroïde – groupe des vaincus assimilé- ;  les secondes( les négro-africains )- autochtones sur la terre de Mauritanie -, ont, quant à elles ,  vécu libres, avec leur organisation sociale et politique propres ; celles -là  ont gardé intactes leur culture, celles-ci  ont été assimilées,  acculturées et déracinées au double sens du terme .

Telle est la première raison qui justifie pourquoi il faut renoncer à  copier le Maghreb… 

La seconde raison tient à la proximité du Sénégal et du Mali voisins qui, par l’osmose permanente entre populations, rend tout projet d’assimilation voué à l’échec ; à moins d’un rideau de fer à nos frontières…

Et puis il y a la condition des haratines appelée à évoluer, en raison du vaste mouvement des peuples et des idées  induit par la mondialisation…

L’intelligence de la situation , la bonne compréhension, lucide, de ces faits doit nous amener à modifier notre vision et sur les choses et sur  notre devenir en commun qui ne peut plus se fonder sur des rapports de domination  au travers de projet assimilationniste … Les tenants d’une telle entreprise doivent y renoncer, encore une fois … en dépit de ce que postule la loi de ‘’proximité’’ entre groupes humains . Ces gens doivent enfin intégrer cette vieille donne  que ‘’ les hommes naissent libres et égaux en droits ’’, et qu’ils restent fiers de leurs cultures respectives.

Cette reconversion des mentalités devra également s’accompagner d’un changement de perspective…

Efforçons-nous de changer de perspective , ce serait tout bénéfice…
Au lieu de nous entre-déchirer sur un gâteau minuscule, que les uns veulent accaparer pour eux seuls ,à tout prix, travaillons plutôt à en augmenter la dimension… Autrement dit, mettons- nous, ensemble, au travail pour créer plus de richesses , assez de richesses… suffisantes pour le  plus  grand nombre …

Comment y parvenir ?

En ouvrant les opportunités, en octroyant plus de liberté, en libérant davantage les énergies … Si l’on  donnait  les mêmes possibilités au lumpen prolétariat du groupe arabo- berbère- laissé  pour compte- que l’on accordait aux éléments négro-africains  et   haratines  les plus dynamiques et les plus  talentueux   les mêmes possibilités et  les mêmes  opportunités , immanquablement nous accroitrions notre richesse en densifiant notre classe moyenne  …En nous  départissant  de toutes considérations subjectives , pour ne retenir , dans le choix des  hommes, que le profil .  Des hommes dynamiques , des hommes d’éthique , des hommes talentueux , trempés dans la transparence…

Cette richesse, ainsi créée, détendra nos rapports sociaux assez tendus  du moment, et réduirait,  ipso-facto , la dépendance  actuelle du plus grand nombre et,  en dernière conséquence , la quantité de frustrations et de rancœurs accumulées toutes ces années  qui, inévitablement, conduisent au conflit, à la violence… Alors que nous devrions nous atteler à panser la plaie des tragiques évènements du passé , à construire la paix ;  et la paix ne peut se bâtir durablement sans l’éradication de ces innombrables inégalités et injustices, flagrantes . Aujourd’hui nous vivons tous, nantis comme démunis tous confondus,  un stress permanent  né de  l’inquiétude et de l’angoisse grandissantes d’un lendemain incertain .Changeons donc de perspective …

Changeons de perspective en choisissant de vivre dans la gaieté , la fraternité , le partage …Partager les richesses, partage la joie et les peines ,partager les plaisirs et les douleurs , la souffrance et l’aisance …La vie est si courte !

Une problématique dernière qui aurait dû figurer en bonne place dans le document final : comment venir à bout du désordre généralisé si nous devions conserver le modèle d’Etat centralisé actuel ? On ne peut rien construire dans le désordre …

Au cours de ce dialogue national , deux ateliers ont essentiellement polarisé l’attention générale (où j’ai consacré les ¾ de mon temps ); l’un portait sur les réformes constitutionnelles et l’autre sur  l’Unité nationale ( question négro-africaine et question haratine ) ; la question de l’Unité fut débattue longuement , avec passion, tout le long des assises . Dans le premier atelier, les points ayant fait objet de consensus , à tout le moins de  majorité, forte , étaient le  sénat  ( dissolution ), le  3e mandat (rejet , même dans les rangs de l’Upr , à l’exception des caciques et griots de l’Udp), le refus d’ouvrir  la limite d’âge (75 ans ) pour les candidats à la présidentielle . D’autres points sont restés clivants ,  tels le changement de drapeau et de l’hymne national  -points  de details – auquel j’avais  souscrit,  mais pour des raisons totalement différentes  de celles de l’Upr, telle, enfin, la création du  poste de vice-président  …Pour ce poste , la conclusion fut  tirée de manière originale par un compatriote arabo-berbère qui, avec humour et ironie, la résuma ainsi : ‘’Je constate que tous les Arabes qui se sont exprimés sur la question sont contre l’institution de la vice -présidence , et que la quasi-totalité  des  Négro-africains sont , au contraire, pour . Les premiers sont contre , pensant que si le poste était crée,  il le serait pour les  Négro-africains , et  ces derniers  étaient  pour , pensant que si la  vice-présidence  était retenue , elle leur reviendrait, tout naturellement  …’’.  La  salle rit , mais  d’une rire jaune , car  cet  ‘’état d’esprit’’ , subtilement  ressorti par ce compatriote , traduisait  le  malaise réel qui  relançait , avec  amertume,  l’acuité de  la question du ‘’ vivre-ensemble’’. (Notons au passage que  les haratines furent divisés sur la question… )

Dans le second atelier ‘’ l’Unité nationale’’ retint l’attention ; elle fut débattue , longuement , avec passion , pour aboutir à la conclusion –  toutes opinions transversales confondues – sur  la nécessité d’enseigner  et d’officialiser les langues nationales d’une part et , d’autre part, résoudre la question haratine .

Voilà , en résumé , les points essentiels, focaux, qui furent les véritables conclusions du dialogue national . D’autres  points ont été  portés récemment à la connaissance du public ,  mentionnés  dans le projet de révision constitutionnelle en perspective du référendum , entre autres, la redistribution des membres du conseil constitutionnel – qui constitue une illusion, un leurre pour mieux ferrer l’opposition ; en effet la neutralité du conseil constitutionnel pendant les compétitions électorales ne peut découler, véritablement, que de l’indépendance totale de la justice et non de ce type  d’artifice…les cas du Burundi , de la Côte  d’Ivoire et récemment  du Gabon sont là pour le prouver .  On note dans ce projet  d’autres points  comme  la fusion d’institutions islamiques – point  superficiel –  qui  fut  sans intérêt pour la majorité des participants .

A l’exception du point relatif à la dissolution du Senat , tous les autres points présentés dans ce projet  de révision constitutionnelle sont de pure invention ,  et résultent  de négociation menée en catimini et dans l’opacité totale ; ils ne reflétaient donc ni les conclusions véritables des assises , ni  l’avis de la commission générale de suivi du dialogue national . Il  ne  s’agit donc là ,  ni plus ni moins,  que d’une  supercherie… L’esprit et la lettre des assises nationales ont été trahis…

Au vu de ces manœuvres du régime, iL appartiendra donc , à partir de maintenant, aux uns et autres de juger et décider de l’attitude à adopter  face  au  référendum, en perspective, au contenu  falsifié , très éloigné des conclusions réelles du dialogue national …

Pour notre part c’est tout décidé .

 

 Samba Thiam 

 Inspecteur de l’Enseignement Fondamental  

Président des Forces Progressistes du Changement (FPC)  

Nouakchott, le 24 Novembre 2016

 

 

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FLAMNET-RETRO : Problématique du Système Educatif National: contribution de SAMB THIAM

altVoilà bien des années que l’Ecole mauritanienne est malade, secouée par des crises récurrentes.

Au lieu de procéder à un diagnostique approfondi , sans complaisance du corps malade , l’on s’est contenté , à chaque fois , d’une auscultation superficielle  pour lui  administrer  un  traitement symptomatique .

Six réformes successives qui ont toutes  échoué ! Notre Ecole est malade , notre système éducatif en crise depuis 56 ans , tout le monde en convient !

Plus que sur des raisons de surface ( effectif pléthorique , manuels scolaires insuffisants ou désuets , mobilier brinquebalant, locaux vétustes et inéquipés ) nous nous attarderons plutôt sur les raisons de fond .

*Quel est le mal ?

 Des  élèves, des étudiants , des Enseignants sans niveau  aucun , des élites francisantes ou arabisantes en extinction progressive, un produit inadapté…Un observateur, averti, ramassait la situation par cette formule : ’’En voulant rendre notre Enseignement authentique  nous avons sacrifié l’essentiel: aucune considération pour la qualité, aucune pour la perspective  d’emploi, aucune pour le développement’’.

* Quelle est la cause du mal ou quelles en sont les raisons ?

– Raison d’ordre psychologique, affectant le corps enseignant :

L’Enseignant a perdu son statut d’antan , par contagion du milieu social dans lequel il baigne , où les valeurs universelles de référence habituelle, telle l’honnêteté, le respect du travail –du travail bien fait-, la moralité, l’admiration pour le détenteur du Savoir , ont cédé la place à la course effrénée pour l’argent ; l’enrichissement à tout prix , tout de suite, a pris le pas sur la conscience professionnelle , d’où cette flopée d’Enseignants-boutiquiers ! Le terme ‘’ garraaye’’, devenu fortement connoté, négativement, suscite  un demi-sourire pincé chez l’autre , au point qu’il devient gênant de se présenter comme tel…On est désormais Instituteur ou professeur à défaut de mieux, mais certainement pas par vocation .On est là, pour un temps provisoire , transitoire , en attendant de trouver mieux , de ‘’monter’’ sa boutique , ou de partir pour des cieux plus cléments.

Cette dévalorisation du métier d’enseignant s’explique (ou s’accompagne) aussi par la dépréciation du Savoir et/ou de la Culture, censé être un des attributs  majeurs de l’Enseignant. Aller à l’école, accumuler des diplômes , lire, simplement , est perçu aujourd’hui dans la société mauritanienne au mieux , comme une perte de temps , au pire comme une absurdité ; avoir de l’argent c’est mieux !

Pour corriger cet état des choses il faudra rendre à l’Enseignant sa dignité et son auréole d’antan  par la revalorisation du métier , et restituer au Savoir l’admiration qui lui était attachée .

*Notre Ecole souffre , par ailleurs, d’une crise d’orientation . Au lieu d’une orientation technique et pragmatique on a opté pour l’élitisme . A la place d’une Ecole qui produit des plombiers , des électriciens , des frigoristes , des maçons , des mécaniciens, des menuisiers , des agriculteurs modernes ,on a préféré celle qui fabrique des littéraires , des philosophes , c’est –à-dire des fonctionnaires aux mains propres, des ‘’cols blancs’’…

Il faut changer cet état de chose, en orientant les 60 % des cohortes vers la formation professionnelle  et technique  des  cols bleus , et les  40%  vers  la formation de l’élite …

*Autre cause non moins importante, l’administration et la gestion chaotique du corps Enseignant , où l’on constate l’absence de rigueur dans la sélection et le recrutement des maîtres d’école, l’absence de contrôle sérieux et de suivi qui fait le lit du laxisme et de l’affairisme , l’absence d’émulation , de sanction et de récompense systématiques , l’absence d’ordre en un mot , qui ne se trouve  pas,  hélas, que dans l’Enseignement ! 

*Mais de toutes les causes à l’origine des crises de notre système éducatif, la plus fondamentale – entre toutes – d’ordre idéologique – demeure l’Arabisation à outrance, genèse véritable des problèmes ! 

Dès les années 50 les réformes débutèrent , en série , toutes à caractère linguistique ! Toutes les réformes opérées des années 50 aux années 80 portèrent sur la langue …l’objectif déclaré, hier et aujourd’hui , était et demeure  de rendre notre enseignement ‘’national’’ , ‘’authentique’’…l’élite arabo-berbère ne pouvait accepter, disait-on , que son identité culturelle –dont la langue est un élément essentiel- fusse occultée au profit d’une langue et culture étrangère , de surcroît héritée du colonisateur…C’était l’argument de surface, classique… Si, en soi , cette aspiration semble juste et légitime,  elle cesse cependant de l’être dès lors que cette même élite imposa, paradoxalement , sa langue et sa culture à des non arabes .  N’était-ce pas  reproduire  à l’identique le comportement du  colon ?

En réalité cette revendication, nationaliste en apparence, était un écran de fumée, une supercherie visant d’abord et surtout à renverser le rapport de force, hérité du legs colonial, entre arabo-berbères et Négro-africains. Sous le couvert de ‘’l’indépendance culturelle ’’on cherchait, en réalité, à créer un autre  ‘’équilibre ‘’ …

 L’argument ‘’authenticité ou repersonnalisation ‘’ ayant  servi -pour masquer les choses- est fallacieux . Nous avions tous résisté au colon , nous nous sommes tous opposés à sa langue, à l’entrée . Elle nous a été imposée à tous …  Dès lors qu’il s’est agi de  réhabiliter  langues et cultures pourquoi le fit-on de manière sélective ? Pourquoi n’avoir pas réhabilité  et promu également les langues et culture négro-africaines ?

Repersonnalisation contre repersonnalisation , Identité contre Identité , pourquoi une réhabilitation pour les uns et pas pour les autres , étant entendu que chacun reste fier de ses racines et de sa culture ,et si  tant est , comme le soutient Mohamed M Abdalhaye , ‘’ chaque individu est porteur d’une dignité inaliénable ’’ ?

Non, la motivation n’était pas que toute  culturelle…

Je me permets ici une petite digression ; La thèse selon laquelle les Négro-africains seraient plus attachés à la langue française est spécieuse et de mauvaise foi . Ils ne sont, ni plus ni moins, attachés à cette langue que l’élite arabo-berbère francisante, qui joue et gagne sur les deux tableaux ! En effet, n’est-ce pas cette même élite qui envoyait en cachette ses enfants dans la filière bilingue des années 80 , et continue de le faire à  l’Ecole Française, à nos jours  ?

 Non , encore une fois , la motivation n’était pas  que toute  culturelle…l’Arabe ne devait servir ,hier comme aujourd’hui ,de moyen de promotion et d’épanouissement pour tous , comme proclamé, mais de gangue protectrice, de garantie pour la préservation et la perpétuation du Système, dicté par des peurs enfouies et des complexes Aryens… Dans ‘’ crise mauritano-sénégalaise : la rupture d’une alliance  inter- ethnique ‘’  de Marion Fresia, M Ould Bédredine  confessait ceci :<< les Negro- africains représentaient  80% des cadres de l’Etat mauritanien naissant . Alors les maures ont voulu rétablir les rapports de force en leur faveur en utilisant deux instruments : la langue et l’Ecole >>.

C’est on ne peut plus clair !

 La langue arabe a été, bel et bien , instrumentalisée à cette fin, et uniquement à cette fin. Un rééquilibrage des rapports de force, normal et légitime certes , mais qui versa hélas , dans l’excès, aboutissant, aujourd’hui  à la liquidation totale de la communauté  non arabe…

 

Notre système éducatif est donc à genoux. Des générations d’écoliers issus des milieux défavorisés ont été sacrifiées sous l’autel du slogan de la “repersonnalisation” factice et démagogique.

Pour changer les choses il nous faut, si nous sommes sincères, procéder à une véritable réforme structurelle qui conduise à une Ecole moderne, efficiente, avec comme préalable le renoncement à toute idée, à tout projet assimilationniste et hégémonique, sous-jacent.

 

*Il nous faudra , après cela, articuler certains facteurs :

 

-Adaptation de l’output aux besoins nationaux et du marché en général ( adéquation formation /emploi )

 

-Association des communautés villageoises à la prise en charge partagée de l’Ecole,

 

-Instauration d’une continuité entre formation initiale et formation continue, en paliers

 

-Adoption de certaines mesures d’accompagnement : (régulation du mouvement des Enseignants du public vers le privé à réorganiser et responsabiliser ; lutte ferme contre le désordre général qui prévaut – à supposer qu’on puisse le faire dans une Administration générale où le désordre et l’absence quasi systématique de suivi sont érigés en norme – , respect de la hiérarchie, de l’ancienneté, restauration de la promotion et du contrôle rigoureux des Enseignants, régulation des détachements abusifs et anarchiques, sanction sévère des absences fantaisistes, rationalisation des moyens etc ).

 

-Vigilance sur le corps de contrôle ( contrôle, fiche de suivi , formation du personnel , identification des Enseignants fictifs … )

 

-Mais surtout, procéder au rétablissement des bases de justice à l’école en supprimant l’iniquité actuellement en cours entre enfants dans l’acquisition du Savoir ; les Psycho-pédagogues s’accordent unanimement pour dire qu’un enfant qui commence par une langue étrangère accuse six (6) années de retard de scolarité. Les Ecoliers négro-africains faisant face à deux langues étrangères, au sens pédagogique terme, subissent donc un double handicap qui équivaut, logiquement, à 12 années de retard.

 

Il faut corriger ça !

 

*-Il nous faut, par ailleurs, clarifier le statut et le rôle attendu de chaque langue dans notre Ecole, à court, moyen et long terme. Pour ma part, je suis pour une Ecole qui parle plusieurs langues, comme la nation mauritanienne – pour un Etat multi-nations fédérateur des langues et cultures- . Les langues maternelles, toutes les langues maternelles, comme facteur d’apaisement des frustrations et tensions, et aussi comme facteur de développement ; le Français ou/et l’Anglais – comme porteur de pensée scientifique –( à un certain niveau), le chinois… Mohamed ould Abdalhaye disait que “la langue maternelle constitue pour tout un chacun l’outil irremplaçable de toute production scientifique effective et le socle de tout esprit créatif”.

-Je suis de ceux qui proposent que chaque enfant commence sa scolarité dans sa langue maternelle, pour aborder dans un 2eme temps une langue nationale seconde, qui serait enseignée comme langue de communication tout court ; L’arabe pour les Ecoliers Negro-africains, le wolof ou le pulaar, ou le soninke, le bambara pour l’arabo- berbère. Cette seconde langue serait affectée d’un coefficient faible de manière à ne pas gêner ou compromettre la progression de l’enfant.

 

L’instruction civique, morale ou religieuse, l’histoire, seraient enseignées en langues nationales. La philosophie, apte à former la pensée critique, serait enseignée en Français ; Il ne serait pas sain, ni judicieux au regard de l’évolution actuelle des choses, de faire porter l’enseignement de cette discipline par la langue Arabe –tant que celle -ci “n’est pas réformée”, et parce qu’elle est en ce moment “récupérée par le courant dogmatique et conservateur en Islam qui rejette la pensée critique et privilégie la répétition à l’identique”, selon le linguiste Algérien A Dourari. En effet, ce qui se passe autour de nous et dans le monde actuellement, n’est pas pour rassurer et n’incline pas à la pensée libre, telle que nous la connaissons chez Al Kindi, Averroes, Mohamed Abdou, Mohamed Iqbal…

Il y aurait lieu de procéder également à des réaménagements pratiques, en supprimant certaines anomalies aberrantes qui ne répondent à aucune logique objective : qu’est-ce que, par exemple, l’instruction civique, morale et religieuse en arabe (coeff 4 ) vient chercher, objectivement, en classe terminale série D ou C, si ce n’est pour pénaliser les uns et constituer un bonus pour les autres ?

 

Si la baisse de niveau est un phénomène général, elle est davantage plus accusée chez nous, à cause de nos pesanteurs propres ; ce phénomène est davantage accentué, ces dernières années, à cause en particulier, de la dernière réforme porteuse de tous les maux et de toutes les anomalies, sur laquelle il nous faut revenir …

 

Sous le couvert d’uniformisation de l’Ecole mauritanienne “qui divise” disait-on ( système à filière -Arabe/bilingue -) , cette réforme fut conçue et mise en œuvre en 2000. Son objectif déclaré était “d’unir” les Ecoliers en leur faisant suivre une seule et même filière ; plus de filière arabe où se retrouvaient quasiment tous les écoliers arabo- berbères, plus de filière bilingue, fréquentée exclusivement par les enfants négro-africains …

 

Autre attente exprimée à travers cette réforme, la nouvelle Ecole favoriserait la rencontre d’enfants issus de milieu social ou ethnique différent, qui déboucherait sur l’esprit de solidarité, de camaraderie retrouvée, de gestation de la citoyenneté ou du sentiment d’appartenance commune à un même pays, comme par le passé …

 

Derrière ces ambitions nobles, mais combien trompeuses, se cachaient, en réalité, des considérations et préoccupations bassement partisanes et claniques. Le souci n’était pas de s’attaquer aux dysfonctionnements du Système en général, mais essentiellement, de trouver une solution, à l’impasse de la filière arabe : Il fallait sauver les Ecoliers, naufragés, de la filière arabe, sans issue ! Filière qui consacrait un échec massif des enfants, sans réels débouchés ni perspectives de réinsertion dans le tissu économique.

 

En effet, chez nous la langue française – à la vie dure- était loin d’être morte et ailleurs l’anglais et le Français étaient de rigueur. Pour un étudiant formé donc uniquement en arabe, l’horizon interne et externe était assez rétréci, le champ des possibilités fortement restreint…

 

Cet échec de la filière arabe – le seul à l’origine de la réforme scolaire actuelle-, s’est illustré, on s’en souvient, par le renvoi dans les années 2000 d’un bon nombre de Professeurs de Sciences et de Mathématique, arabophones, reversés dans la diplomatie, ou affectés à d’autres tâches et fonctions administratives. Soit donc le corps arabophone, soit le médium était mis en cause dans l’enseignement des sciences, soit dit en passant …

 

La solution choisie fut donc de revenir à l’enseignement de certaines matières de base en Français (sciences et Mathématique ), qui était, jusque- là, réservé à la filière bilingue où se retrouvaient les écoliers négro- africains. D’un coté on levait un écueil – retour du français -, de l’autre on en créait, délibérément, par l’imposition de la langue arabe aux écoliers non arabes, avec de surcroît une langue éclatée en matières multiples affectées de coefficients accrus, accentuant ainsi leur handicap et leur échec massif, à travers une série littéraire totalement arabisée ! L’histoire, la géographie, la philosophie, la langue, l’instruction civique, l’instruction morale religieuse sont dispensées en arabe ! Appliquée brutalement, cette réforme allait pousser des milliers d’enfants négro-africains, pris de court et désorientés, à abandonner massivement l’Ecole.

 

On a donc réformé, mais en veillant à préserver soigneusement la nature discriminatoire du système qui opérait comme un filtre…Faisant déjà face à deux langues étrangères, -double handicap à surmonter- voilà qu’on multipliait de nouveau les obstacles sur leur chemin, ce qui, nécessairement, affecte négativement, fortement et durablement leur réussite scolaire. Voilà pourquoi , à titre d’exemple, au baccalauréat 2016, niveau national, série C, sur 100 admis on compte deux (2) Négro –africains ! A Kaédi sur 1061 candidats au bac toutes séries confondues il y a 37 admis négro -africains …Djeol compte zéro admis ! Voilà pourquoi dans les examens et concours d’accès à l’emploi les enfants et jeunes négro-africains sont recalés. De 2000 à 2016 les résultats sont tous les ans plus catastrophiques que jamais. L’Equité a déserté notre Ecole dès notre accession à l’indépendance …

Enseigner nos langues négro- africaines -gage de l’équité et de l’égalité des chances à l’Ecole et en société – n’a jamais, réellement, effleuré l’esprit des réformateurs. Ce fut –et ça le demeure – le cadet des soucis de nos gouvernants ; Il ne le fallait surtout pas, car ce serait “ouvrir la boite de Pandore, affaiblir la suprématie consacrée de la langue arabe, remettre en cause l’arabité de la Mauritanie”, compromettre le “rééquilibrage” du rapport de force, en voie de parachèvement …

 

Tel est l’esprit qui nous gouverne toujours !

 

Cette actuelle réforme, sabordant au passage l’Institut –performant – des langues nationales, n’a pas moins divisé et l’Ecole et la société mauritanienne. Par ses conséquences directes, des Profs de fac francophones, négro- africains, sont entrain d’être poussés vers la sortie, en voie de chômage technique…Les Profs de Droit, et d’histoire sont actuellement touchés, demain ce sera au tour des Profs de lettres. On devine la suite logique du processus sur l’Université… (et lorsque je parle de l’autre Elite- qui a choisi , pour l’essentiel, de se coucher, je note des grincements de dents !!!

 

En conclusion, l’uniformisation du Système scolaire actuel, à travers cette réforme dernière, s’est faite au détriment des enfants négro africains, au détriment de l’Unité nationale. En lieu et place de la réconciliation, elle a reconduit et accentué la fracture entre Ecoliers et entre communautés, par ses inégalités. Peut –il, du reste, y avoir réconciliation, restauration de l’esprit de camaraderie sur le socle de l’injustice ?

 

La baisse de niveau est, il est vrai, à l’échelle régionale, africaine et mondiale, mais elle est particulièrement aiguë chez nous à cause de la série de réformes à caractère idéologique et partisan…

 

“Notre pays dont l’unité s’est forgée dans l’épreuve entend sauvegarder cette unité comme son patrimoine le plus précieux. La diversité est une source d’enrichissement, elle ne doit jamais devenir une source de division. Unité dans la diversité, sans doute, unité dans une stricte égalité, des droits de chacun, sans discrimination d’aucune sorte. C’est ce que nous commande une vision de la réalité, une analyse sans complaisance des faits”.

Ce sont là des propos que tenait M.
ould Daddah, mais quel usage en fit-il ? Nous pouvons réussir si nous abordons notre problématique dans un esprit exempt de tout calcul, de tout esprit partisan ou hégémoniste. Nous réussirons à condition d’être mus par le seul désir de construire, une fois pour toute, un système éducatif performant, fonctionnel, efficient , qui servirait l’égalité des chances , offrirait les mêmes opportunités et assurerait au peuple , dans toute sa diversité, développement, bien-être, et harmonie.



Samba Thiam

Inspecteur de L’Enseignement Fondamental

 

4 Septembre 2016 

 

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