Les Forces Progressistes du Changement (FPC) Mauritanie

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FLAMNET-ARCHIVES: DOSSIER SPÉCIAL: MAURITANIE : LES CHIFFRES DE LA DEPORTATION

altAprès les massacres d’avril dernier, la Mauritanie déporte maintenant en secret ses agriculteurs noirs et s’empare de leurs terres . Une razzia moderne «justifiée» a priori par les expertises des économistes de la Banque mondiale…
Le vent de sable n’était autrefois ici que l’exception. Il souffle maintenant presque en continuité. isolant parfois Nouakchott dans un brouillard doré de particules de silices qui obligent même en plein jour à rouler phares allumés. C’est le vent de la désertification, conséquence des années de sécheresse que vient de connaître, avec l’Afrique du Sahel, la Mauritanie.
Mais, si les silhouettes des Négro-africains se courbent, rasant les murs de ce Nouakchott – champignon. passé de quinze mille à Plus de cinq cent mille habitants en vingt-cinq ans, c’est moins pour éviter les poignards des particules de désert cinglant les visages que par crainte de nouvelles vengeances…

Le vent de folie des chasses au Noirs d’origine sénégalaise, qu’a connu la capitale de la Mauritanie en avril dernier, ne s’est pas apaisé. Il y a quelques jours encore des policiers casqués et armés pourchassaient des écoliers de dix à quatorze ans dans les rues de Nouakchott.
« Mini-événement » qui, même s’il n’y a eu ni blessés ni morts, en dit long sur la crise traversée par la société mauritanienne et les stigmates laissés par les scènes du printemps.
Comment, en dépit des bonnes intentions de conciliation que semblent afficher les représentants de la Mauritanie et du Sénégal,  réunis à Bamako, pourrait-il d’ailleurs en être autrement?
Comment infléchir un état d’esprit quand sont encore présents dans les mémoires les centaines de morts qui ont endeuillé les deux pays, quand, sur chaque rive du fleuve Sénégal, cent mille personnes au minimum vivent maintenant dans l’exil des camps de réfugiés ?
Si les pogroms ont cessé, l’expulsion des Toucouleurs, des Soninkés, des Peuls – toutes ethnies d’origine négro-africaine n’en continue pas moins sur la rive mauritanienne du fleuve. Et, au vent de folie a succédé une planification froide : celle de l’expulsion organisée, systématisée des cultivateurs noirs qui vivaient depuis des siècles le long du fleuve. Une véritable déportation de masse. Silence à Nouakchott sur ce qui se passe là-bas, au sud du pays. Désintérêt ? Plutôt peur, y compris chez les Beydanes, les Maures blancs. Racistes, ils sont loin de l’être d’emblée. Certains se sont même opposés aux Haratines, les Maures noirs, exécuteurs des basses besognes pendant les événements. On en a vu sauver des amis Sénégalais, et ils ont failli y laisser leur peau. Alors maintenant, ils se taisent.« Vous êtes au courant de ce qui se passe sur le fleuve ? » Pas de réponse du correspondant. Juste quelques syllabes :« Excusez-moi, je dois couper la communication. » II raccroche.

Troupeaux volés. Pourtant à Nouakchott, où l’on attend sous peu une commission d’enquête diligentée par la fédération internationale de la Ligue des droits de l’homme, on commence à parler. Des documents circulent, des  témoignages se recoupent prouvant qu’au sud, rien n’est terminé.

«D’abord, ils ont expulsé les deux imams noirs de la mosquée de Rosso. Quand il n ‘y a plus eu d’autorités religieuses ou morales pour protéger les populations. la police est alors entrée en jeu ; la police, et aussi les douaniers, les gendarmes, dirigés par le directeur de la sûreté du Trarza, et le commandant des douanes en personne. » Silence,  puis : » »Surtout, tu ne dis pas mon nom ! Tu ne me cites pas ‘.Tu me le jures ! »
Je promets. Il reprend : « Les chefs de famille de tous les villages ont été convoqués dans la région de Rosso. celle de Tekane, de Leqceiba et aussi de Koundi. A Rosso, ils se sont retrouvés dans le bâtiment de la Sécurité pour attendre des heures. »
Injures, humiliations. Parfois, on les menace avec des armes, pour leur faire peur et les inciter à partir, à quitter cette rive de la vallée. Le lendemain, s’ils sont toujours là. réconvocation. Ceux qui n’ont pas craqué se retrouvent de plus en plus seuls. Il n’y a plus alors qu’à les cueillir, eux et
leur famille, la nuit.

Embarqués dans des camions, ils sont acheminés vers le fleuve.. Fin du voyage sur l’autre rive. sans rien, démunis de tout. Le lendemain matin, les camions retournent dans leurs fermes. Meubles, biens divers : les militaires mettent la main sur tout ce qui reste.
Les meubles, à Rosso par exemple, sont entassés dans l’entrepôt des Travaux publics, tout à côté du camp de réfugiés mauritaniens sénégalais où entre parenthèses sont passées quelque cinquante-deux délégations depuis son ouverture… « Quant aux troupeaux, ils sont carrément volés. On retrouve le bétail parfaitement identifiable, grâce au marquage fait au fer, dans la région de M’Bout. avec des chameliers armés qui veillent sur eux. »

CENSURE. Il est bien évidemment impossible de faire la moindre photo dans ces zones. Les déplacements sont soumis à la seule autorisation du ministère mauritanien de l’intérieur. Quant à amener films ou vidéo, c’est tout simplement strictement interdit.
Il n’empêche que l’information, malgré ces contrôles ou ceux des policiers mauritaniens,  lisant
même le courrier personnel qu’ont sur eux les voyageurs, à l’aéroport de Nouakchott, passe quand même. La mise à jour du tableau (lire page suivante) date du 2 juin. Les chiffres présentés ont certainement évolué depuis. dans le sens que l’on devine. Aux organisations humanitaires de les compléter. Ils montrent en attendant que sur 3420 familles recensées dans la partie sud du fleuve (voir la carte). 1 469 ont déjà été déportées soit. à raison d’une moyenne de cinq personnes par famille, un total avoisinant les 7 500 individus..

RAZZIAS. Exode forcé, immédiatement suivi par la venue de nouveaux arrivants. Chaque jour des camions les amènent de Nouakchott. Ce sont des Noirs Harratines, anciens esclaves des Beydanes, des Maures blancs, expédiés en masse pour prendre la relève des ethnies chassées de la rive droite du fleuve Sénégal.
Chassé-croisé qui  n’a  rien d’improvisé et qui. selon les observateurs. est certainement programmé de longue date.
Bien avant le vent de sable, le vent de folie, c’est d’abord le souffle de l’arabisation qui a parcouru la Mauritanie.

Dès 1966, l’imposition dans les écoles de la langue arabe va entraîner des grèves des élèves noirs de Nouakchott. La nouvelle politique linguistique écarte de fait Toucouleurs. Soninkés et Peuls ; ethnies noires qui outre leurs langues.

Embarqués la nuit
dans les camions
en direction du fleuve

maternelles comme le ouolof, parlent le français. Conséquence : une génération plus tard. l’administration” mauritanienne se retrouve à une majorité écrasante entre les mains des arabophones.
Influence accentuée dès 1977 par l’adoption de la Charia. la loi islamique Rejetée implicitement, une partie de la communauté noire d’origine entre dans la clandestinité, formant le mouvement des Forces de libération africaines de Mauritanie ( les FLAM ).

Le conflit Africains/Mauritano-Arabes n’est pas pour autant strictement racial ou religieux. Les Toucouleurs sont entrés dans l’orbe islamique dès le XI eme siècle. Quant aux Maures, s’ils constituent 60% de la population, la moitié d’entre eux sont des Harratines, tout à fait noirs de peau.
Le conflit semble dépendre d’abord des racines culturelles propres à chaque groupe et des conceptions économiques qu’elles sous-tendent; de l’opposition entre gens du désert – Maures – et cultivateurs du fleuve – Noirs-
La tradition des razzias a contribué à établir chez les premiers le goût des profits immédiats, des rentabilités  record. Il se perpétue encore dans les fortunes que continuent à faire les Maures liés au commerce des diamants au Zaïre ou en Sierra Leone, et qu’ils investissent dans les casinos de Las Palmas aux Canaries et de Dakar.
Ils ignoraient jusqu’ici la terre, ses gestes, la patience du cultivateur des deux rives du fleuve Sénégal. Mepris de l’homme du desert, de l’etendue, pour le Noir dont l’attention se borne à la culture de parcelles de terre.
L’interet nouveau porté par les Maures aux terres agricoles du fleuve repose sur les perspectives ouvertes par l’achevement des deux barrages de Manantalli, au Mali et de Diama qui sept cents kilometres en aval va empecher la montée des eaux salées, le premier assurant la régularité de l’irrigation de la « vallée du fleuve ».

Grâce à ces ouvrages, ce sont, pour la seule Mauritanie, cent mille hectares nouveaux qui s’ouvrent à l’agriculture avec l’hypothèse, selon les experts de la Banque mondiale qui soutiennent ces projets, de voir le pays assurer son autoalimentation, alors qu’il doit pour l’instant se fournir en riz, entre autres denrées, en Thaïlande.

COMMERCE. Seulement voilà, ces terres nouvelles reviennent cher : « il faut compter deux millions d’ouguiyas – environ quinze mille francs – par hectare pour l’achat des pompes, les travaux de terrassement des canaux d’irrigation, préalables à la mise en culture », selon un homme d’affaires mauritanien rencontré à Paris. A dix-huit kilomètres à l’est de Rosso, il vient d’acquérir trois cents hectares. Nombre de Maures sont ainsi en train de s’installer sur la rive du fleuve, à la place des Noirs. Explication très simple : la loi foncière de 1981 a substitué le droit écrit au droit coutumier et n’a pas permis aux populations de faire reconnaître leurs droits sur les terres. Quant aux avis administratifs invitant les propriétaires à
le faire, ils s’adressaient à une population analphabète à 80%.
Et pour « financer les nouvelles terres », les agriculteurs noirs de la rive mauritanienne «n’avaient pas l’argent » !Tout simplement.

Par quel miracle la société maure de Mauritanie dispose-t-elle des fonds considérables que va nécessiter l’exploitation de ces terres ? La question se pose quand, avec deux millions d’habitants, un PIB de 600 000 millions de dollars, la Mauritanie figure, avec un endettement de trois milliards et demi de dollars en tête des pays proportionnellement les plus endettés du monde.

Etude de la relance des mines de fer de Zoueratt, aménagement du fleuve Sénégal, création du « port de l’amitié » par les Chinois à Nouakchott, plans de restructuration des Postes et Télécommunications, de la Société nationale d’électricité, du développement rural, de l’Education… pour tous ces projets, la Mauritanie aura reçu quelque neuf cent cinquante millions de dollars en trois ans, bénéficiant en même temps d’un rééchelonnement de sa dette sur quinze ans. Principaux donateurs et prêteurs : l’Agence de coopération internationale du Canada,
son homologue allemand le KFW, l’Arabie Saoudite, le Koweit et surtout la Banque mondiale.

La restructuration de l’administration mauritanienne de son économie, de son agriculture est le fait des experts de cette succursale du FMI.

RENTABILISATION. Selon ceux-ci. « la seule façon pour la Mauritanie de redresser son économie est d’exploiter “industriellement ” (c’est-à-dire une agriculture sur le modèle européen) les bords du fleuve qui offrent maintenant avec les barrages, toutes garanties ». Exploitation « contradictoire », est-il bien précisé, « avec l’existence de petits périmètres d’agriculture   communautaire traditionnelle».Une « industrialisation » exemplaire de la désinvolture manifestée. une fois de plus, par les experts internationaux à l’égard des tissus sociaux ou des modes de production existants.

Le parachutage de cette nouvelle politique économique trouve évidemment  l’assentiment  des Maures de Nouakchott. Economie de la razzia et du parachutage technocratique s’entendent comme larrons en foire. Rien d’étonnant dans ces conditions à ce que les Maures se prêtent au jeu de la démocratie qu’exigent d’eux leurs interlocuteurs de la Banque mondiale. Organiser des élections municipales – une première en Mauritanie -. ça ne mange pas beaucoup de… pouvoir. et ça paye quand, en retour, rentrées de devises et de subventions suivent. Sous couvert de rentabilisation de l’espace, de modernisation de l’agriculture, la mise à l’écart des ethnies noires du sud du pays est ainsi justifiée.

CONVOIS HUMAIMS. La réalité même d’un point de vue chiffré est tout autre. Quand les exploitations traditionnelles réalisaient six tonnes à l’hectare, il s’avère que les techniques modernes ne dépassent pas les deux tonnes et demie. De plus, la terre argileuse nécessite le repiquage du riz à la main. D’où la nécessité de faire venir massivement de nouveaux arrivants, les Harratines qui deviennent les ouvriers agricoles des nouveaux propriétaires Beydanes. Une façon de réactualiser les relations de maître à esclave qu’entretenaient autrefois les deux communautés.
L’explosion de violence d’avril dernier prend ainsi un tout autre sens qu’un affrontement racial.
Dès octobre 1988, l’hebdomadaire Sud-Hebdo jugeant déjà ainsi que d’autres titres de la presse sénégalaise. « la situation alarmante », incriminait” le problème foncier, les disparités entre moyens d’aménagement » et reprochait à la Banque mondiale d’avoir proposé ici « des projets pour des Etats d’une tout autre dimension ».

Pierre d’achoppement des intérêts les plus divers, la Mauritanie a officiellement retrouvé le calme. Officieusement, les témoignages concordants n’en affluent pas moins, racontant comment la nuit, des  convois humains sont acheminés vers le fleuve. Depuis des siècles, ils avaient pris l’habitude  de le franchir dans un sens; dans l’autre, sans interruptions. Justifiées par les stratèges la Banque mondiale, les autorités de Nouakchott ont décidé que ce dernier voyage serait sans retour.

Pierre-Bernard Soulier.

Mai 1989.

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FLAMNET: Spécial déportations, 23 ans après: MAURITANIE: radioscopie d´un Apartheïd méconnu

altAu mois d’avril 1989, des centaines de Noirs (700 au moins) étaient massacrés à Nouakchott, Nouadhibou et dans plusieurs autres localités mauritaniennes, avec la complicité des plus hautes autorités de l’état. Dans la foulée de ces pogroms anti-noirs, le pouvoir beydane procédait á l’épuration de l’administration et des entreprises publiques de leur éléments noirs, á l’arrestation et á l’exécution de dizaines de Nègro-Africains et de la déportation dans le but évident de “dénégrifier” le pays de plus de 120.000 Nègro-Mauritaniens.

L’ opinion internationale, effarée, découvrait ainsi que quelque part dans le Sahel sévissait un système de discrimination raciale assimilable a bien des égards à l’apartheid.

Les événements d’avril étaient parfaitement prévisibles: ils sont la suite logique de la politique raciste appliquée en Mauritanie depuis l’indépendance et fondée sur l’accaparement, par la communauté beydane, de tous les leviers du pouvoir. en dépit de multiples contestations (Manifeste des 19, Manifeste du Négro-Mauritanien opprimé…) et affrontements violents (guerre civile de 1966…) suscités par cette situation, les régimes beydanes successifs se sont toujours refusés, avec une remarquable constance, à envisager une autre alternative: celle de une société non raciale et démocratique, reposant sur l’égalité entre toutes ses composantes.

Il ne pouvait du reste en être autrement, puis-qu’officiellement il n’existe pas de problème racial en Mauritanie. C’est ainsi qu’en 1966, Moktar Ould Daddah déclarait contre toute évidence: “Non, en Mauritanie, il n’y a des Noirs et des Blancs que pour les sociologues. Il ne saurait être question de bâtir une nation sur des pourcentages aussi fluctuants qu’absurdes.” Vingt années plus tard, Ould Taya lui emboîtera le pas: “Je refuse de diviser mon peuple en Blanc et Noirs. Il n’y a pas de problème racial en Mauritanie. Le peuple est indivisible et ne sera jamais divisé. Depuis près de 2000 ans, les communautés de ce pays ont vécu ensemble sans qu’il y ait eu la moindre relation d’appartenance à telle ou telle ethnie. Nous tous, sans exception, sommes unis par l’Islam, et la couleur de notre peau n’a aucune espèce d’importance.” (Jeune Afrique no 1350, 19/11/1986, p. 37). Hélas, tout ceci n’est que profession de foi. La réalité, elle, est bien différente.

Fidèle à sa politique de fuite en avant et de provocation, le pouvoir mauritanien réédite aujourd’hui encore le même procède: il cherche, en montant en épingle le conflit avec le Sénégal, à en occulter la dimension essentiellement interne.

Mais combien de morts, de déportés et de mutilés faudrait-t-il pour que les médiateurs saisissent enfin cette évidence et arrêtent de se polariser sur les aspects inter-étatiques et secondaires du climat de tension actuel? Faudrait-il qu’une guerre civile éclate en Mauritanie pour que les Etats africains s’attaquent au noeud du problème: la discrimination raciale dont sont victimes les Nègro-Mauritaniens? Faudrait-il attendre que le pouvoir beydane mène à terme son odieuse politique de “dénégrification” du pays pour que l’O.U.A. fasse preuve vis-a-vis de la Mauritanie de la même intransigeance que celle qui caractérise ses résolutions sur l’Afrique du Sud?

C’est pour lutter contre l’oppression raciale subie par les Nègro-Mauritaniens qu’ont été créées en mars 1983 les Forces de libération africaines de Mauritanie (F.L.A.M). Dès sa naissance, notre mouvement s’est fixé pour but l’avènement d’une société non raciale et démocratique, fondée sur le respect de l’identité de chacune de ses composantes. A cette fin, nous proposions que fut organisé un large débat national ou toutes les composantes de notre peuple se prononceraient sur la solution à apporter á la Question Nationale. Pour toute réponse, le pouvoir s’engagea dans une répression féroce (arrestations, tortures, assassinats), si bien que la plupart de nos militants sont condamnés soit à la clandestinité soit à l’exil.

Les Forces de Libération Africaines de Mauritanie (F.L.A.M.).

EXTRAIT DU LIVRE-BLANC:RADIOSCOPIE D´UN APARTHEID MÉCONNU- OCTOBRE 1989

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Calvaire des rapatriés : De l’exigence d’exorciser tous les maux !

altLes douloureux événements de 1989 ont exactement commencé le 9 avril.Et 23 ans après jour pour jour, les rapatriés mauritaniens, revenus au pays natal, parlent ouvertement du chemin parcouru de la déportation au Sénégal au rapatriement en Mauritanie en passant des camps des refugiés au pays de la Teranga à ceux des rapatriés au pays natal.
A chacun son récit: Le vendredi 5 mai 1989, Mamadou Thiam, agent de l’OPT (Office des postes et télécommunications) était en train d’écouter la RFI à 6h30, quand la police frappa à la porte de sa maison à El Mina. « Ils m’ont demandé de monter dans la voiture pour aller au commissariat de Sebkha avec eux. Dans la voiture se trouvaient Fall et Dieng, deux collègues de l’OPT. Dans les locaux du commissariat de Sebkha, le commissaire m’a retiré mes papiers d’identification et a ordonné de me m’enfermer derrière les grilles. J’ai trouvé de nombreux agents de l’OPT et même un proche parent d’un Colonel, de l’armée». Mamadou Thiam a ainsi compris que les agents de la police n’arrêtaient pas que les ressortissants sénégalais, mais aussi des noirs mauritaniens travaillant dans l’administration. Ce qui n’était alors à ses yeux qu’un «nettoyage» ethnique de l’OPT. C’est ainsi qu’il a été conduit à l’aéroport pour être déporté au Sénégal à bord d’un avion algérien. Mamadou Thiam, se souvient qu’il il y avait deux avions militaires algériens et français qui transportaient les personnes arrêtées au Sénégal. Mais d’autres gens ont été acheminés par voie routière.
Pour sa part Souleymane LO, un ancien douanier, a fait une traversée forcée le 24 mai 1989 à Rosso Sénégal. Deux dispositifs ont été mis en place. De ce fait, les militaires et les paramilitaires rapatriés ont été séparés des civils. Et les Sénégalais avaient ainsi du mal à comprendre que les autorités mauritaniennes puissent déporter des hommes de tenue. Pour eux, les militaires et les paramilitaires mauritaniens n’étaient que des espions envoyés par leurs autorités en terre sénégalaise. Ils prouveront qu’ils étaient bel et bien des Mauritaniens déportés au Sénégal par leur pays contre leur gré. Ils sont alors acheminés au camp de Samba Djeri Diallo de Dakar via le camp militaire Richard Toll et celui de Saint-Louis. Pendant trois mois, ils y sont restés. Ensuite, avant d’être transférés à Thiès après avoir passé des jours à l’école de police de la capitale sénégalaise. La destination finale sera le camp de réfugiés de Dagana, où ils s’organisent pour donner dispenser à leurs enfants le programme mauritanien par des enseignants déportés. Les rapatriés n’ont pas changé leur façon de vivre à la mauritanienne a confié Souleymane Lô qui a indiqué également que matériellement qu’ils ont été assistés par le Gouvernement du pays hôte, le Haut Commissariat des Refugiés (HCR) et la communauté internationale.

 Le rénovateur.

 

 

 

 

 

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Déclaration du regroupement des victimes des évènements89/91

Bientôt vingt trois années après les déportations de 1989/91, des milliers de mauritaniens continuent de vivre les misères de la déportation.

 

 Aujourd’hui le “REVE 89/91” conscient de ses objectifs, s’adresse au peuple mauritanien, à ses instances dirigeantes pour leur rappeler que des mauritaniens, dont le seul tort en 1989, a été d’être « noirs» continuent de vivre dans l’indifférence, le mépris, l’arbitraire, l’injustice et la misère chez eux.Le REVE 89/91 attire encore une fois l’attention du pouvoir sur le sort de ces milliers de mauritaniens constitués de :

–          des auto-rapatriés de 1996-2005 : plus de 35.000,

–          des rapatriés sous l’égide du H.C.R. et l’Etat : près de 25 000

–          des révoqués et licenciés : plus d’un millier, issus de tous les secteurs.

 Et qui vivent la même situation douloureuse et continuent d’être des déportés, réfugiés chez eux; aucune action respectant le droit n’a été entreprise à leur égard, à savoir :

 

–          La restitution de l’ensemble des terres confisquées,

–          La restitution du bétail spolié ou indemnisation,

–          La réintégration dans leurs droits de tous les travailleurs victimes,

–          La réhabilitation des villages détruits,

–          L’insertion des jeunes

–          Le retour des 15000 réfugiés au Mali

Ces victimes, dans leur ensemble, ont montré à l’opinion nationale et internationale, par leur comportement pacifique, leur degré de maturité, de patience, de nationalisme. Ils ont entrepris de multiples démarches auprès des différents pouvoirs qui se sont succédés pour trouver des solutions consensuelles dans le droit et la justice afin d’épargner un climat d’insécurité au peuple.

 Face à cette situation, le REVE s’engage à poursuivre son plan d’action pour que Justice soit rétablie par:

–          La libération de toutes les terres confisquées,

–          L’intégration de tous les travailleurs du Public et Para public, avec la reconstitution de leur carrière

–          L’instauration d’un programme d’insertion rapide pour le secteur Privé et le secteur informel victimes,

–          L’insertion des diplômés, étudiants et élèves victimes,

–          L’établissement des pièces d’Etat – Civil pour l’ensemble des victimes,

–          Un programme d’insertion pour les agriculteurs et éleveurs,

–          Le rapatriement des réfugiés restés encore au Sénégal et au Mali.

 En ces moments de turbulences sous- régionales et pour éviter le pire, nous aurions souhaité que l’Etat revoit dans la plus grande lucidité avec l’ensemble des concernés  le règlement raisonnable et définitif du passif au lieu de clôturer prématurément, donc activement ce lancinant dossier.

 La Mauritanie mérite que ses fils, dans leurs diversités, se retrouvent et se réconcilient.

 

                                                                                                                       Fait à Nouakchott, le 24 Mars 2012

 

                                                                                                                                                                                                                   Le Président

                                                                                                                                                                                                              Lô Souleymane

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Quand Ould Dogui rendait hommage aux FLAM

altIls ont, pour la plupart, échappé de justesse à la mort,

Ils ont presque tous vu leurs frères mourir, ou subir l’humiliation d’être chassés de leur pays,

Ils ont vu les souffrances des veuves, des orphelins, des vieillards…

Et ils ont réagi contre l’injustice, la discrimination raciale, l’exclusion et la marginalisation.

Les FLAM UN COMBAT

Publié par des intellectuels négro-africains le manifeste du négro-mauritanien opprimé , demandait rencontre et négociation entre les différentes composantes du pays, pour l’égalité et l’entente, nous vous proposons certains extraits :

Les problèmes mauritaniens doivent être posés par des Mauritaniens, discutés entre Mauritaniens et solutionnés par les Mauritaniens eux-mêmes. Notre amour pour ce pays nous commande à inviter toutes nos nationalités à un dialogue des races et des cultures, dans lequel nous nous dirons la Vérité pour guérir nos maux.
Il faut que nous traduisons dans la réalité nos appels au Salut National et au Redressement de notre pays, au lieu de dépenser toutes nos ressources et toutes nos potentialités humaines dans des querelles raciales et culturelles dont les principaux bénéficiaires ne seraient certainement pas les Mauritaniens”

” … Il faudrait que tous les véritables nationalistes mauritaniens (Noirs et Arabo-berbères), épris de paix, de justice et soucieux de voir instaurer une Unité Nationale véritable, acceptent de s’unir afin que tous ensembles combattent pour la suppression de ce système raciste, chauvin, aussi pernicieux que l’Apartheid. Car cela est possible. Il faudrait que le Négro-mauritanien comprenne qu’il ne doit pas s’insurger contre le Beydane en soi, mais contre l’appareil d’Etat arabo-berbère raciste et oppresseur, afin que Blancs et Noirs puissent enfin dialoguer à égalité, se battre ensemble pour des lendemains plus certains. (avril 1986).


La réponse du régime raciste fut :

– la déportation des négro-africains du pays en 1989,

– l´extermination massive des cadres civils et militaires noirs ,

– l´Etat d´urgence permanent dans les régions du Sud qui continue d’exister à ce jour,

– les obstructions dans l´octroi des pièces d´état-civils ou des bourses d´études à des négro-africains,

– Sélectivité dans le recrutement ou la nomination dans les postes de responsabilité.

Le tout doublé d’une propagande mensongère sur les FLAM, propagande que le gouvernement s’appliquait par tous les moyens à inculquer aux populations. Une fausse traduction du manifeste du négro-mauritanien opprimé, fut éditée et diffusée, suivie d’une campagne de diabolisation de ce mouvement et le tour était joué.

C’était sans compter que cette supercherie et ces mensonges ne pouvaient faire long feu, car la vérité finit par triompher à tous les coups.

Acculés à la violence, bien qu’ils ne la désiraient pas les FLAM ont pris les armes, puis ils ont réalisé qu’il fallait lutter contre l’injustice par des moyens justes donc non-violents. Ils ont changé de stratégie de lutte sans changer de camp ni d’âme.

Ce faisant ils ont pris à contre-pied le régime et ses valets, mais surtout ils ont réussi à faire connaître leur combat juste et noble pour la dignité, à leurs autres compatriotes de différentes communautés.

Ils ont agréablement surpris et séduit plus d’un, en publiant leur mémorandum qui appelle au débat et propose des solutions : ” Je voudrais, d’abord faire une observation sur un segment de votre dernière question, qui infère que l’unité du pays et l’Autonomie sont antithétiques. Il n’en est rien ; simplement vous faites une mauvaise lecture de l’Autonomie qui est un des principes cardinaux du Fédéralisme. Et le Fédéralisme n’est pas la sécession ni l’indépendance. Dés lors, on peut comprendre que l’Autonomie ne s’oppose en rien à l’unité du pays, encore moins à la réconciliation nationale. Cela étant, je reconnais avec vous que nous avons, quelque peu, anticipé sur les solutions ; mais comme vous avez dû le remarquer, dans ce mémorandum nous ne nous sommes pas seulement contentés de soulever les questions. Nous avons aussi apporté à chaque fois, non pas la réponse, mais une réponse, à chaque question posée.Cette démarche, à mon sens, semble plus opératoire, pour permettre une économie de temps ; on va directement aux propositions qui pourraient être améliorées, si toutefois elles sont retenues. Mais naturellement, comme toute démarche, elle ne peut-être exempte d’inconvénients. “

” … Notre objectif, à travers ce mémorandum est d’abord de tenter de secouer la classe politique de sa torpeur, d’amener l’opposition à s’interroger sur l’absurdité du statut quo actuel, qui ne profite qu’au régime. Nous croyons, après cela, que l’opposition prendra naturellement des initiatives de nature à prouver sa capacité à s’organiser, ou plutôt à se réorganiser. Aux dernières nouvelles, je crois que c’est en voie. Pour ce qui concerne les réactions, nous les souhaitons nombreuses et variées. J’en profite au passage, pour saluer la réaction de M.CHBIH Président du FRONT POPULAIRE, éminemment positive. Il serait illusoire, toutefois, de s’attendre à une unanimité ; car l’unanimité n’est plus de ce monde”.

(M. SAMBA THIAM Président des FLAM- Extrait d’une interview accordée à la revue le Refus.)

Les réactions à ce mémorandum ne se firent pas attendre, Le FPM et son courageux Président M.CHBIH OULD CHEIKH MELAININE, puis LE PLEJ, le FAAS, le MRC (AFR) réagirent positivement à cette heureuse initiative, le débat sur la question nationale a bien pris forme en dépit des nombreuses réticences, il fera son chemin envers et contre tous les anathèmes.

 

Mohamed ould Dogui- LE REFUS- 27 DECEMBRE 2002

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