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FLAMNET-RETRO : Problématique du Système Educatif National : Contribution | Par Samba Thiam
Voilà bien des années que l’Ecole mauritanienne est malade, secouée par des crises récurrentes.
Au lieu de procéder à un diagnostique approfondi, sans complaisance du corps malade, l’on s’est contenté, à chaque fois, d’une auscultation superficielle pour lui administrer un traitement symptomatique. Six réformes successives qui ont toutes échoué ! Notre Ecole est malade, notre système éducatif en crise depuis 56 ans, tout le monde en convient !
Plus que des raisons de surface ( effectif pléthorique, manuels scolaires insuffisants ou désuets, mobilier brinquebalant, locaux vétustes et inéquipés ) nous nous attarderons plutôt sur les raisons de fond.
*Quel est le mal ?
Des élèves, des étudiants, des Enseignants sans niveau aucun, des élites francisantes ou arabisantes en extinction progressive, un produit inadapté…Un observateur, averti, ramassait la situation par cette formule : “En voulant rendre notre Enseignement authentique nous avons sacrifié l’essentiel: aucune considération pour la qualité, aucune pour la perspective d’emploi, aucune pour le développement”.
* Quelle est la cause du mal ou quelles en sont les raisons ?
– Raison d’ordre psychologique, affectant le corps enseignant :
L’Enseignant a perdu son statut d’antan, par contagion du milieu social dans lequel il baigne, où les valeurs universelles de référence habituelle, telle l’honnêteté, le respect du travail –du travail bien fait-, la moralité, l’admiration pour le détenteur du Savoir, ont cédé la place à la course effrénée pour l’argent ; l’enrichissement à tout prix, tout de suite, a pris le pas sur la conscience professionnelle, d’où cette flopée d’Enseignants-boutiquiers !
Le terme “garraaye”, devenu fortement connoté, négativement, suscite un demi-sourire pincé chez l’autre, au point qu’il devient gênant de se présenter comme tel…On est désormais Instituteur ou professeur à défaut de mieux, mais certainement pas par vocation .On est là, pour un temps provisoire, transitoire, en attendant de trouver mieux , de “monter” sa boutique, ou de partir pour des cieux plus cléments.
Cette dévalorisation du métier d’enseignant s’explique (ou s’accompagne) aussi par la dépréciation du Savoir et/ou de la Culture, censé être un des attributs majeurs de l’Enseignant. Aller à l’école, accumuler des diplômes, lire, simplement, est perçu aujourd’hui dans la société mauritanienne au mieux, comme une perte de temps, au pire comme une absurdité ; avoir de l’argent c’est mieux !
Pour corriger cet état des choses il faudra rendre à l’Enseignant sa dignité et son auréole d’antan par la revalorisation du métier, et restituer au Savoir l’admiration qui lui était attachée.
*Notre Ecole souffre, par ailleurs, d’une crise d’orientation. Au lieu d’une orientation technique et pragmatique on a opté pour l’élitisme. A la place d’une Ecole qui produit des plombiers, des électriciens, des frigoristes, des maçons, des mécaniciens, des menuisiers, des agriculteurs modernes, on a préféré celle qui fabrique des littéraires, des philosophes, c’est –à-dire des fonctionnaires aux mains propres, des “cols blancs”…
Il faut changer cet état de chose, en orientant les 60 % des cohortes vers la formation professionnelle et technique des cols bleus, et les 40% vers la formation de l’élite…
*Autre cause non moins importante, l’administration et la gestion chaotique du corps Enseignant, où l’on constate l’absence de rigueur dans la sélection et le recrutement des maîtres d’école, l’absence de contrôle sérieux et de suivi qui fait le lit du laxisme et de l’affairisme, l’absence d’émulation, de sanction et de récompense systématiques, l’absence d’ordre en un mot, qui ne se trouve pas, hélas, que dans l’Enseignement !
*Mais de toutes les causes à l’origine des crises de notre système éducatif, la plus fondamentale – entre toutes – d’ordre idéologique – demeure l’Arabisation à outrance, genèse véritable des problèmes !
Dès les années 50 les réformes débutèrent, en série, toutes à caractère linguistique ! Toutes les réformes opérées des années 50 aux années 80 portèrent sur la langue …l’objectif déclaré, hier et aujourd’hui, était et demeure de rendre notre enseignement “national” , “authentique”…l’élite arabo-berbère ne pouvait accepter, disait-on, que son identité culturelle –dont la langue est un élément essentiel- fusse occultée au profit d’une langue et culture étrangère, de surcroît héritée du colonisateur…C’était l’argument de surface, classique… Si, en soi , cette aspiration semble juste et légitime, elle cesse cependant de l’être dès lors que cette même élite imposa, paradoxalement, sa langue et sa culture à des non arabes. N’était-ce pas reproduire à l’identique le comportement du colon ?
En réalité cette revendication, nationaliste en apparence, était un écran de fumée, une supercherie visant d’abord et surtout à renverser le rapport de force, hérité du legs colonial, entre arabo-berbères et Négro-africains. Sous le couvert de “l’indépendance culturelle”, on cherchait, en réalité, à créer un autre “équilibre” …
L’argument “authenticité ou repersonnalisation” ayant servi -pour masquer les choses- est fallacieux. Nous avions tous résisté au colon, nous nous sommes tous opposés à sa langue, à l’entrée. Elle nous a été imposée à tous … Dès lors qu’il s’est agi de réhabiliter langues et cultures pourquoi le fit-on de manière sélective ? Pourquoi n’avoir pas réhabilité et promu également les langues et culture négro-africaines ?
Repersonnalisation contre repersonnalisation, Identité contre Identité, pourquoi une réhabilitation pour les uns et pas pour les autres, étant entendu que chacun reste fier de ses racines et de sa culture, et si tant est, comme le soutient Mohamed M. Abdalhaye, “chaque individu est porteur d’une dignité inaliénable” ?
Non, la motivation n’était pas que toute culturelle…
Je me permets ici une petite digression ; La thèse selon laquelle les Négro-africains seraient plus attachés à la langue française est spécieuse et de mauvaise foi. Ils ne sont, ni plus ni moins, attachés à cette langue que l’élite arabo-berbère francisante, qui joue et gagne sur les deux tableaux ! En effet, n’est-ce pas cette même élite qui envoyait en cachette ses enfants dans la filière bilingue des années 80, et continue de le faire à l’Ecole Française, à nos jours ?
Non, encore une fois, la motivation n’était pas que toute culturelle…l’Arabe ne devait servir, hier comme aujourd’hui, de moyen de promotion et d’épanouissement pour tous, comme proclamé, mais de gangue protectrice, de garantie pour la préservation et la perpétuation du Système, dicté par des peurs enfouies et des complexes Aryens… Dans “crise mauritano-sénégalaise : la rupture d’une alliance inter- ethnique” de Marion Fresia, M. Ould Bédredine confessait ceci : “les Negro- africains représentaient 80% des cadres de l’Etat mauritanien naissant. Alors les maures ont voulu rétablir les rapports de force en leur faveur en utilisant deux instruments : la langue et l’Ecole”.
C’est on ne peut plus clair !
La langue arabe a été, bel et bien, instrumentalisée à cette fin, et uniquement à cette fin. Un rééquilibrage des rapports de force, normal et légitime certes, mais qui versa hélas, dans l’excès, aboutissant, aujourd’hui à la liquidation totale de la communauté non arabe…
Notre système éducatif est donc à genoux. Des générations d’écoliers issus des milieux défavorisés ont été sacrifiées sous l’autel du slogan de la “repersonnalisation” factice et démagogique.
Pour changer les choses il nous faut, si nous sommes sincères, procéder à une véritable réforme structurelle qui conduise à une Ecole moderne, efficiente, avec comme préalable le renoncement à toute idée, à tout projet assimilationniste et hégémonique, sous-jacent.
*Il nous faudra , après cela, articuler certains facteurs :
-Adaptation de l’output aux besoins nationaux et du marché en général ( adéquation formation /emploi )
-Association des communautés villageoises à la prise en charge partagée de l’Ecole,
-Instauration d’une continuité entre formation initiale et formation continue, en paliers
-Adoption de certaines mesures d’accompagnement : (régulation du mouvement des Enseignants du public vers le privé à réorganiser et responsabiliser ; lutte ferme contre le désordre général qui prévaut – à supposer qu’on puisse le faire dans une Administration générale où le désordre et l’absence quasi systématique de suivi sont érigés en norme – , respect de la hiérarchie, de l’ancienneté, restauration de la promotion et du contrôle rigoureux des Enseignants, régulation des détachements abusifs et anarchiques, sanction sévère des absences fantaisistes, rationalisation des moyens etc ).
-Vigilance sur le corps de contrôle ( contrôle, fiche de suivi , formation du personnel , identification des Enseignants fictifs … )
-Mais surtout, procéder au rétablissement des bases de justice à l’école en supprimant l’iniquité actuellement en cours entre enfants dans l’acquisition du Savoir ; les Psycho-pédagogues s’accordent unanimement pour dire qu’un enfant qui commence par une langue étrangère accuse six (6) années de retard de scolarité. Les Ecoliers négro-africains faisant face à deux langues étrangères, au sens pédagogique terme, subissent donc un double handicap qui équivaut, logiquement, à 12 années de retard.
Il faut corriger ça !
*-Il nous faut, par ailleurs, clarifier le statut et le rôle attendu de chaque langue dans notre Ecole, à court, moyen et long terme. Pour ma part, je suis pour une Ecole qui parle plusieurs langues, comme la nation mauritanienne – pour un Etat multi-nations fédérateur des langues et cultures- . Les langues maternelles, toutes les langues maternelles, comme facteur d’apaisement des frustrations et tensions, et aussi comme facteur de développement ; le Français ou/et l’Anglais – comme porteur de pensée scientifique –( à un certain niveau), le chinois… Mohamed ould Abdalhaye disait que “la langue maternelle constitue pour tout un chacun l’outil irremplaçable de toute production scientifique effective et le socle de tout esprit créatif”.
-Je suis de ceux qui proposent que chaque enfant commence sa scolarité dans sa langue maternelle, pour aborder dans un 2eme temps une langue nationale seconde, qui serait enseignée comme langue de communication tout court ; L’arabe pour les Ecoliers Negro-africains, le wolof ou le pulaar, ou le soninke, le bambara pour l’arabo- berbère. Cette seconde langue serait affectée d’un coefficient faible de manière à ne pas gêner ou compromettre la progression de l’enfant.
L’instruction civique, morale ou religieuse, l’histoire, seraient enseignées en langues nationales. La philosophie, apte à former la pensée critique, serait enseignée en Français ; Il ne serait pas sain, ni judicieux au regard de l’évolution actuelle des choses, de faire porter l’enseignement de cette discipline par la langue Arabe –tant que celle -ci “n’est pas réformée”, et parce qu’elle est en ce moment “récupérée par le courant dogmatique et conservateur en Islam qui rejette la pensée critique et privilégie la répétition à l’identique”, selon le linguiste Algérien A Dourari. En effet, ce qui se passe autour de nous et dans le monde actuellement, n’est pas pour rassurer et n’incline pas à la pensée libre, telle que nous la connaissons chez Al Kindi, Averroes, Mohamed Abdou, Mohamed Iqbal…
Il y aurait lieu de procéder également à des réaménagements pratiques, en supprimant certaines anomalies aberrantes qui ne répondent à aucune logique objective : qu’est-ce que, par exemple, l’instruction civique, morale et religieuse en arabe (coeff 4 ) vient chercher, objectivement, en classe terminale série D ou C, si ce n’est pour pénaliser les uns et constituer un bonus pour les autres ?
Si la baisse de niveau est un phénomène général, elle est davantage plus accusée chez nous, à cause de nos pesanteurs propres ; ce phénomène est davantage accentué, ces dernières années, à cause en particulier, de la dernière réforme porteuse de tous les maux et de toutes les anomalies, sur laquelle il nous faut revenir …
Sous le couvert d’uniformisation de l’Ecole mauritanienne “qui divise” disait-on ( système à filière -Arabe/bilingue -) , cette réforme fut conçue et mise en œuvre en 2000. Son objectif déclaré était “d’unir” les Ecoliers en leur faisant suivre une seule et même filière ; plus de filière arabe où se retrouvaient quasiment tous les écoliers arabo- berbères, plus de filière bilingue, fréquentée exclusivement par les enfants négro-africains …
Autre attente exprimée à travers cette réforme, la nouvelle Ecole favoriserait la rencontre d’enfants issus de milieu social ou ethnique différent, qui déboucherait sur l’esprit de solidarité, de camaraderie retrouvée, de gestation de la citoyenneté ou du sentiment d’appartenance commune à un même pays, comme par le passé …
Derrière ces ambitions nobles, mais combien trompeuses, se cachaient, en réalité, des considérations et préoccupations bassement partisanes et claniques. Le souci n’était pas de s’attaquer aux dysfonctionnements du Système en général, mais essentiellement, de trouver une solution, à l’impasse de la filière arabe : Il fallait sauver les Ecoliers, naufragés, de la filière arabe, sans issue ! Filière qui consacrait un échec massif des enfants, sans réels débouchés ni perspectives de réinsertion dans le tissu économique.
En effet, chez nous la langue française – à la vie dure- était loin d’être morte et ailleurs l’anglais et le Français étaient de rigueur. Pour un étudiant formé donc uniquement en arabe, l’horizon interne et externe était assez rétréci, le champ des possibilités fortement restreint…
Cet échec de la filière arabe – le seul à l’origine de la réforme scolaire actuelle-, s’est illustré, on s’en souvient, par le renvoi dans les années 2000 d’un bon nombre de Professeurs de Sciences et de Mathématique, arabophones, reversés dans la diplomatie, ou affectés à d’autres tâches et fonctions administratives. Soit donc le corps arabophone, soit le médium était mis en cause dans l’enseignement des sciences, soit dit en passant …
La solution choisie fut donc de revenir à l’enseignement de certaines matières de base en Français (sciences et Mathématique ), qui était, jusque- là, réservé à la filière bilingue où se retrouvaient les écoliers négro- africains. D’un coté on levait un écueil – retour du français -, de l’autre on en créait, délibérément, par l’imposition de la langue arabe aux écoliers non arabes, avec de surcroît une langue éclatée en matières multiples affectées de coefficients accrus, accentuant ainsi leur handicap et leur échec massif, à travers une série littéraire totalement arabisée ! L’histoire, la géographie, la philosophie, la langue, l’instruction civique, l’instruction morale religieuse sont dispensées en arabe ! Appliquée brutalement, cette réforme allait pousser des milliers d’enfants négro-africains, pris de court et désorientés, à abandonner massivement l’Ecole.
On a donc réformé, mais en veillant à préserver soigneusement la nature discriminatoire du système qui opérait comme un filtre…Faisant déjà face à deux langues étrangères, -double handicap à surmonter- voilà qu’on multipliait de nouveau les obstacles sur leur chemin, ce qui, nécessairement, affecte négativement, fortement et durablement leur réussite scolaire. Voilà pourquoi , à titre d’exemple, au baccalauréat 2016, niveau national, série C, sur 100 admis on compte deux (2) Négro –africains ! A Kaédi sur 1061 candidats au bac toutes séries confondues il y a 37 admis négro -africains …Djeol compte zéro admis ! Voilà pourquoi dans les examens et concours d’accès à l’emploi les enfants et jeunes négro-africains sont recalés. De 2000 à 2016 les résultats sont tous les ans plus catastrophiques que jamais. L’Equité a déserté notre Ecole dès notre accession à l’indépendance …
Enseigner nos langues négro- africaines -gage de l’équité et de l’égalité des chances à l’Ecole et en société – n’a jamais, réellement, effleuré l’esprit des réformateurs. Ce fut –et ça le demeure – le cadet des soucis de nos gouvernants ; Il ne le fallait surtout pas, car ce serait “ouvrir la boite à Pandore, affaiblir la suprématie consacrée de la langue arabe, remettre en cause l’arabité de la Mauritanie”, compromettre le “rééquilibrage” du rapport de force, en voie de parachèvement …
Tel est l’esprit qui nous gouverne toujours !
Cette actuelle réforme, sabordant au passage l’Institut –performant – des langues nationales, n’a pas moins divisé et l’Ecole et la société mauritanienne. Par ses conséquences directes, des Profs de fac francophones, négro- africains, sont entrain d’être poussés vers la sortie, en voie de chômage technique…Les Profs de Droit, et d’histoire sont actuellement touchés, demain ce sera au tour des Profs de lettres. On devine la suite logique du processus sur l’Université… (et lorsque je parle de l’autre Elite- qui a choisi , pour l’essentiel, de se coucher, je note des grincements de dents !!!
En conclusion, l’uniformisation du Système scolaire actuel, à travers cette réforme dernière, s’est faite au détriment des enfants négro africains, au détriment de l’Unité nationale. En lieu et place de la réconciliation, elle a reconduit et accentué la fracture entre Ecoliers et entre communautés, par ses inégalités. Peut –il, du reste, y avoir réconciliation, restauration de l’esprit de camaraderie sur le socle de l’injustice ?
La baisse de niveau est, il est vrai, à l’échelle régionale, africaine et mondiale, mais elle est particulièrement aiguë chez nous à cause de la série de réformes à caractère idéologique et partisan…
“Notre pays dont l’unité s’est forgée dans l’épreuve entend sauvegarder cette unité comme son patrimoine le plus précieux. La diversité est une source d’enrichissement, elle ne doit jamais devenir une source de division. Unité dans la diversité, sans doute, unité dans une stricte égalité, des droits de chacun, sans discrimination d’aucune sorte. C’est ce que nous commande une vision de la réalité, une analyse sans complaisance des faits”.
Ce sont là des propos que tenait M. ould Daddah, mais quel usage en fit-il ? Nous pouvons réussir si nous abordons notre problématique dans un esprit exempt de tout calcul, de tout esprit partisan ou hégémoniste. Nous réussirons à condition d’être mus par le seul désir de construire, une fois pour toute, un système éducatif performant, fonctionnel, efficient , qui servirait l’égalité des chances , offrirait les mêmes opportunités et assurerait au peuple , dans toute sa diversité, développement, bien-être, et harmonie.
Samba Thiam
Inspecteur de L’Enseignement Fondamental
4 septembre 2014
Pacte républicain : le poison d’un pacte. Par Pr ELY Mustapha
Appelez-là ce qu’il vous conviendra de l’appeler : juxtaposition, transposition, permutation, interversion, inversion…mais ne l’appelez pas opposition. Cette opposition qui pactise avec le pouvoir est le pire des maux que la Mauritanie puisse subir. S’opposer à cette opposition-là est le premier devoir de tout citoyen concerné par l’avenir politique de son pays.
Une opposition s’organise, collecte ses moyens matériels et financiers prépare son programme politique, le vulgarise, rencontre ses militants, génère des alliances, déploie son énergie à rassembler une opinion qui lui soit favorable, en d’autres termes prépare avec militantisme sa participation aux prochaines élections.
Mais une opposition toute tournée vers la contemplation du pouvoir et attendant de son détenteur qu’il l’apostrophe, est un réceptacle d’une misère partisane tendant sa gamelle pour y recueillir les postillons d’un pacte qui est devenu tout son programme.
Le devoir de tout Mauritanien, est de ne pas intégrer cette opposition-là mais plutôt de la fuir comme une peste institutionnelle. Si aujourd’hui, une nomenklatura partisane (dite par « euphémisme « majorité »), piétine tout un peuple et accapare le pouvoir ce fut et c’est toujours à cause de cette opposition-là.
Toute une frange de l’opposition mauritanienne est devenue une composition. Une composition d’individus qui ont instrumentalisé leurs partis pour des intérêts individuels. Des individus qui monnaient désormais leurs rencontres avec le président de la République, qui monnaient des postes publics pour leur progéniture, qui monnaient leur silence, qui monnaient des petits privilèges au détriment du pays.
L’opposition mauritanienne est devenue un poison pour la démocratie en Mauritanie. Une ciguë que l’Etat, fait boire au peuple, en lui faisant croire qu’il y a une opposition pour l’assagir alors qu’elle hante depuis longtemps l’antichambre du pouvoir.
Depuis que l’actuel président est au pouvoir toute l’opposition a fait la queue leu leu dans son salon, pour lui prêter allégeance, et depuis ses leaders se sont tus, repus de promesses et de privilèges attendus.
Un suppositoire institutionnel
L’opposition mauritanienne, est devenue dangereuse pour le pays, en ce que non seulement, elle est devenue alliée silencieuse du pouvoir, mais elle justifie aussi, par sa présence fantomatique, un semblant de démocratie faisant croire à son existence institutionnelle, alors qu’elle n’est plus qu’une collection d’individus qui, tous, lorgnent sur les prébendes du pouvoir.
La preuve que l’opposition n’existe plus, c’est d’abord son silence qui justifie son inaction. « Le silence face à l’injustice est une complicité avec l’oppresseur. » (G.Sagan) ” Son silence vis-à-vis de tout ce que le pays vit de misère, de criminalité, d’injustice, d’incompétence des gouvernants, de leurs concussions, de leurs malversations, de leurs détournements, de leur corruption et de leur impunité.
Comment une opposition peut-elle se taire lorsque des corrompus notoires et des criminels financiers sont nommés aux postes publics, lorsque des incompétents sont parachutés à des postes-clefs de l’administration publique, la réduisant à une boite de pandore budgétaire incapable de monter le moindre projet public viable ou de réaliser la moindre valeur ajoutée, fut-elle non marchande ?
Comment une opposition peut-elle se taire, lorsque le fonds COVID-19 consignant des millions de dollars depuis 2019 s’évapore, sans qu’aucune justification n’en soit donnée ?
Comment une opposition peut-elle être si muette lorsque l’Etat continue à augmenter les droits sur les produits de consommations courantes, mettant à genoux les populations miséreuses et paupérisation ce qui reste de classes moyennes, alors qu’il bénéficie chaque année de millions de dollars, en dons et prêts concessionnels ?
Comment une opposition peut-elle se taire lorsqu’après 60 ans d’indépendance notre pays manque de fruits et légumes alors qu’il dispose d’une superficie arable, cultivable, supérieure à la superficie de certains pays africains et arabes ?
Comment une opposition peut-elle se taire, lorsqu’un citoyen parmi ceux d’une population de 4 millions d’habitants à peine, n’arrive pas à se procurer le moindre poisson alors qu’il vit dans le pays aux côtes les plus poissonneuses du monde ?
Une opposition qui ne commande, ni ne recommande le bien et qui n’interdit pas le mal, comme cela est dit dans les saintes écritures, est pire qu’une opposition, c’est un leurre institutionnel qui bien plus que le pouvoir, qui agit à visage découvert, est sournoise et mortelle pour la démocratie.
Et voilà qu’elle pactise pour ne pas sortir de son silence mais servir ceux qui justement l’ont réduite au silence. Une forme politiquement évoluée du syndrome de Stockholm.
Cette opposition mauritanienne, est devenue un poison. Un poison pour l’avenir de la démocratie, un poison pour le peuple et un suppôt du pouvoir.
Opposition vieillissante, transigeante, avec ses règlements de comptes internes, toute tendue vers le soutien du pouvoir et qui le caresse dans le sens du poil et qui n’a même pas le mérite de se comporter en opposition digne ce nom.
Une opposition, supposée, qui ne s’oppose pas, n’est donc plus qu’une supposition, un suppositoire institutionnel, un sédatif sournois, pour mettre le peuple en léthargie.
L’excipient d’une forme galénique d’un poison régalien.
Et ses effets sont négatifs à deux niveaux :
– Au niveau du peuple lui-même et de son opinion
– Au niveau du champ partisan de l’opposition
Relativement au premier point, le soutien qu’apporte un parti de l’opposition à une majorité à laquelle il n’appartient pas et qu’il est sensé combattre légalement, enracine une image éminemment négative dans la constance de son combat et de son attachement à ses principes.
Car une opposition n’est pas seulement une opposition à des idées c’est aussi une opposition à leur mode de réalisation, à leur degré de réalisation et aux convictions de ceux qui les réalisent. Relativement au second point, notamment le champ partisan de l’opposition, il est clair qu’une telle attitude entrainera un rétrécissement important dans la base de l’opposition et réduira ses forces. Elle ouvre une brèche dans les convictions des uns et des autres, semant l’inconstance dans l’esprit et l’attitude des militants. « Qui croire ? », « Y’a-t-il une conviction réelle dans ce que nos partis font ? » etc.
Autant de questionnements qui éparpillent la base militante et effritent les convictions. Et ceux qui en profiteront seront ceux justement que le parti aurait dû combattre au nom de son idéal et de ses valeurs. Et il ne faut pas, à moins de disparaître, se tromper de combat.
On ne défend pas la République en adoptant les idées et les valeurs des autres, on défend le République en se battant pour ses idées et ses valeurs ! Et avec constance !
A moins que l’on soit convaincu que les idées et les valeurs des autres sont meilleures que les siennes pour l’objectif “idéel” que l’on recherche. Et dans ce cas on le fait en son âme et conscience en commençant au préalable par dissoudre son parti pour rejoindre l’autre.
C’est ce que dicte la déontologie partisane et c’est ce que le devoir à l’égard du peuple exige.
Hélas, tout cela est ignoré, et confinée dans l’antichambre des dialogues stériles que le pouvoir lui miroite « l’opposition » continue à saliver, comme un cabot attendant un os. Le dialogue, fut un instrument machiavélique par lequel le Pouvoir a usé ce qui restait d’une opposition depuis sa forfaiture à l’Accord de Dakar. Dans sa mauvaise foi le régime pousse au Dialogue et il le retire chaque fois que l’opposition y croit. La tenant en haleine, en laisse.
Cette opposition-là, fait le jeu du pouvoir. Et c’est en cela qu’elle est dangereuse. Elle comprend un grand nombre d’individus, groupes usés par la compromission vénale, n’ayant rien à perdre, qui constituent une sorte de courroie de transmission avec le pouvoir.
Ce sont ces groupes-là qui constituent les « poignées », une culotte de cheval, dont se saisit le Pouvoir pour appâter l’opposition. Ces « poignées » sont composées de dirigeants aigris par le pouvoir et qui ne savent plus comment y accéder, mais aussi d’individus membres qui « monnayent » leur participation au pouvoir et qui émulent au sein de l’opposition une espèce de « psychose » du dialogue où le délire de l’intéressement matériel n’est pas absent.
Toujours est-il que cette opposition qui fut intéressée au dialogue, et qui signe un « pacte républicain » est le dindon d’une farce qui dans sa fièvre du pouvoir n’en a pas saisi les conséquences pour le peuple mauritanien.
Oui en effet. Que représente cette opposition « pactisante » pour le peuple mauritanien pour pactiser en son nom ?
Quelle est sa valeur institutionnelle ? Quelle est sa base partisane ? Quel est son poids électoral ?
Qui sait ce que ces partis représentent aujourd’hui électoralement ? Quel est le nombre de leurs membres effectifs ou tout simplement leurs sympathisants ?
Que représentent aujourd’hui ces partis pour que, à travers un pacte engager une parole de citoyens d’électeurs, d’un peuple qui leur aurait été donnée ?
La défaite cuisante de ces partis-pactisant aux dernières élections n’est-elle pas un indice pertinent de leur non viabilité politique et de leur insignifiance aux yeux d’un électorat mauritanien pris en otage par un système tribalo-militaro-mercantile que cette opposition n’a jamais su, ni pu, contrer par un militantisme permanent et convaincant, par une force de la rue contraignant le pouvoir à se « soumettre ou à se démettre ». ?
Plongée dans le dialogue cherchant la compromission attendue, elle a vendu son âme ?
Un électorat de circonstance
Certaines bonnes volontés justifient un pacte républicain en Mauritanie, en donnant l’exemple de partis d’opposition dans certains pays qui ont passé des pactes « démocratiques » avec le pouvoir en place (et sa majorité).
Hélas la comparaison n’est pas de mise. Dans ces pays (notamment au plus proche d’entre-eux le Maroc), les pactes sont bâtis sur des consensus au sein de l’opposition elle-même et pas de comportements unilatéraux à tire larigot.
Ce sont ensuite des partes à forte coalition électorale et bénéficient d’une assise électorale quantifiable, à l’échelle nationale et locale, ils sont par leurs coalitions des forces de discussion et d’imposition de programmes politiques partagés avec les autorités au pouvoir.
Et cela depuis les années 90, avec la polarisation des partis sous les appellations de “bloc démocratique” (El Koutlah al democratiya) et de “l’Entente” (El Wifak). Cette terminologie a participé au façonnement du système partisan marocain ; ainsi la gauche a évolué face à une droite proche du pouvoir monarchique.
Avec les changements survenus à la fin du règne de Hassan Il, et notamment l’acceptation de l’alternance comme mode de gouvernance cette polarisation a été nuancée, suite à l’entrée de nouveaux partis et la montée de la mouvance islamiste. Cette évolution n’a pas fait disparaître la dualité Gauche /Droite comme repères pour l’électorat.
En Mauritanie, tout aussi bien le parti, dit de la « majorité » (assis sur une baïonnette) que les partis d’opposition dits « pactisants » (assis sur une disette), n’ont de réalité électorale que circonstancielle. Leur base électorale est de circonstance, elle se fait et se défait au gré des influences claniques, tribales, mercantiles et les prébendes que le pouvoir en place distribue pour accaparer les voies (pièces d’identité) des pauvres gens…
Les partis en Mauritanie ne sont pas agrégés autour d’idéologies ou de programmes populaires, qui définissent leurs électeurs ou leur attachement à ces partis. L’effet migratoire de l’électorat en est l’expression la plus élémentaire dans le jeu politique mauritanien.
Cavaliers seuls sous tutelle
Aurions-nous pu croire, en un pacte républicain, si toutes les parties prenantes partisanes y avaient été associées qu’elles que soient leur faiblesse ou leurs dissensions, qu’elles s’y soient allées en rang solidaire, uni, et avec des exigences pré-réfléchies et adoptées dans un cycle de concertation qui aurait crédibilisé le contenu de tout acte et de tout pacte.
Ce ne fut pas le cas, deux partis, faisant cavalier seul ont signé sous la supervision du pouvoir en place et encadrés par ses cadres, un « pacte républicain » comportant 18 points au sujet desquels les signataires s’engagent à nouer le dialogue et la concertation pour affronter les défis auxquels est confronté le pays : unité nationale, passif humanitaire, processus électoral, gouvernance, lutte contre la corruption, esclavage…
En somme, un pacte qui n’apporte rien qui ne soit déjà connu.
Un pacte qui, s’il a une signification, c’est de bien trahir la non viabilité de cette opposition à pouvoir lutter pour ces défis et qui préfère se mettre sous la tutelle du parti de la majorité pour… les concrétiser. Le ridicule ne tuant plus depuis longtemps dans ce pays…
Et même le simple d’esprit se poserait la question : Que veut bien faire un parti majoritaire, fort, de deux partis faibles ? La manipulation encore et toujours…en face d’échéances électorales, puis ils tomberont dans l’oubli et la désuétude.
L’avenir du pays n’en sera jamais changé et ce sera un marché de dupes qui se terminera en queue de poisson (d’ailleurs introuvable pour le pauvre diable de citoyen) ?
S’il est certain qu’il ne faut pas faire confiance au parti au pouvoir, il est encore plus urgent de ne pas faire confiance à cette opposition-là. Si le premier ne cache pas son jeu, la dernière a depuis longtemps mis à mal le pays. Et ce pacte n’est qu’un jalon d’un infantilisme politique, par lequel les régimes politiques, on toujours traité l’opposition.
Les leçons de l’histoire sont là pour le prouver.
Qu’est-ce que l’opposition « pactisante » en Mauritanie ? Rien. Que veut-elle devenir ? quelque chose. Comment s’y prend-t-elle ? Très mal.
En tout cas ce n’est pas une opposition au sens de force de frappe et de dissuasion politique dans un Etat de droit.
Que s’est-il passé pour que l’opposition devienne ce qu’elle est aujourd’hui ? Simplement qu’elle n’a pas tiré les leçons du passé politique récent du pays.
L’opposition ou la sape psychologique : les leçons du passé.
Jamais une stratégie n’a été aussi brillante et aussi sournoise que celle qui réduisit durant ces dernières année l’opposition et lui enleva se velléités aux présidentielles et aux législatives. Ceux qui dirigèrent les différentes transitions, avaient décidé de miner l’opposition et de la réduire autant que possible à travers une stratégie de « concertation » qui a permis de « piéger » ceux qui justement pouvaient tout faire basculer.
Les « renards » de la transitions aguerris aux faux compromis et aux jeux de la souricière avaient décidé de neutraliser une opposition qui a la veille du 3 Août 2005 avait une force et une légitimité qu’ils craignaient par-dessus tout. Cette opposition qui sortait d’une haute lutte contre l’ancien régime et dont certaines composantes avaient même pris les armes contre lui risquait de remettre en cause le coup d’Etat lui-même et la transition elle-même.
Il aurait suffi que l’opposition ne reconnaisse pas le coup d’Etat, qu’elle s’agrippe à ses acquis historiques qu’elle « tape sur la table » pour que ceux qui ont élaboré la transition dans des buts inavoués reculent et cèdent devant ses doléances. Cela ne fut pas fait parce que les renards de la transition avaient très vite identifié le talon d’Achille de l’opposition en la personne de ses leaders et notamment Ahmed Ould Daddah.
Cette identification se confirma pour eux très vite lorsque Ahmed Ould Daddah fut le premier reconnaître le coup d’Etat et son apport pour la démocratie. Il devenait alors un « interlocuteur » qui allait servir de porte d’entrée, un cheval de Troie pour déstabiliser l’opposition.
La bonne foi d’Ahmed Daddah n’avait d’équivalent que la mauvaise foi de ceux qui allaient « l’utiliser » malgré lui. Et c’est là où l’œuvre de sape psychologique commença à la manière d’une forteresse assiégée.
Durant les premiers mois on le consultait on le travaillait dans le sens du poil et le travail psychologique finit par prendre : la conviction du leader du RFD en la volonté des militaires de céder le pouvoir à l’opposition et de façon démocratique. Par cette politique d’amadouement ils ont obtenu deux choses :
– L’immunisation : Faire passer calmement la transition jusqu’à son terme et appliquer leur plan stratégique.
– La neutralisation : Assagir l’opposition à travers l’un de ses principaux leaders jusqu’à la mettre à genou.
Des sorcières …à la rectification de la Démocratie
Cette situation se manifesta à travers les idées lancées par Ahmed Ould Daddah dans sa fameuse déclaration sur « l’absence de chasse aux sorcières » qui reprenait l’argumentaire du CMJD et ses déclarations dans l’interview à Jeune Afrique. Feu, ELY Ould Mohamed Vall déclarait en effet en Septembre 2005 : « Il n’y aura ni règlement de comptes, ni chasse aux sorcières, ni esprit de revanche. « (J.A L’Intelligent » Septembre 2005)
Le 07 septembre 2005 Ahmed Daddah déclarait à l’AMI : « ‘j’ai confiance, en toute objectivité, dans le projet du CMJD”.
Il était devenu ce que le CMJD voulait qu’il devienne « la courroie de transmission » avec l’opposition en la « piégeant » dans le processus d’un dialogue et d’une concertation qui allait être fatal pour toute l’opposition.
« le RFD, déclarait Ahmed Daddah, en tant que parti, est favorable au principe du dialogue sur les questions nationales qui nous concernent tous. Nous nous réjouissons donc de cette initiative et pensons qu’elle marque le début d’une concertation que nous espérons approfondie, franche et exhaustive.
Concernant le comité chargé du processus de transition, je tiens à préciser que cette période transitoire est essentielle parce qu’elle déterminera tout ce qui la suivra. C’est pourquoi nous estimons que tous les acteurs doivent y participer, y compris les partis politiques, la société civile, les leaders d’opinion, avec tout le sérieux et toute la franchise requise…»
Et la boucle est bouclée. Ahmed Daddah était devenu l’appât auquel on miroitait mille et une bonnes intentions dont il nourrissait ses espoirs de changement.
Mais la leçon du CMJD n’ayant pas suffi, voilà que le leader du RFD, qui un auparavant félicitait Sidioca pour sa présidence, soutenait le putsch de Ould Abdelaziz en le qualifiant de « rectification de la Démocratie ».
Et ce fut l’accord de Dakar et ce fut l’humiliation de l’opposition et la justification d’un putsch …qui allait encore miroiter un dialogue…à l’infini.
Rappelons-nous la phraséologie indécente du Président putschiste, qui ayant mis les pieds dans le plat, piétinait ce qui restait à l’opposition de dignité.
A propos de Sidioca (alors détenu au Palais des Congrès) : « Si ce qui vous intéresse c’est seulement la personne de Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, nous sommes capables de vous exposer sa dépouille dans les rues de Nouakchott »
A propos de Ould Waghef (alors détenu pour l’affaire du « riz avarié ») : “Si Ould Waghef mange le riz avarié, je le libère. »
Et à propos de Daddah (venant d’inventer le concept de « rectification de la Démocratie ») : « Daddah, ne sera jamais président même si les chinois votaient pour lui. »
Une opposition qui a la mémoire courte, ne peut que servir de courte échelle pour le pouvoir.
Comme au Chiapas mexicain.
Les militaires, en s’appuyant sur une structure gouvernementale triée dans le tas des anciens du régime précédent, avec lesquels ils partageaient les mêmes préoccupations de défense de ses intérêts et de ses basses-œuvres avaient mis en place une stratégie psychologique militaire qui, comme on le sait, utilise de multiples techniques de déstabilisation de l’adversaire utilisant la psychologie préventivement, ou simultanément, à l’usage de la force.
Une stratégie qui ressemble étrangement à celle utilisée par les experts militaires dans le Chiapas mexicain : diviser et semer la confusion dans les esprits pour atteindre des buts de déstabilisation des structures villageoises.
A travers une pseudo- politique d’ouverture au dialogue, le gouvernement opposait les chefs de village en accordant plus d’importance officielle à l’un deux et en le favorisant financièrement et matériellement par rapport aux autres. Ce qui, à moyen terme, entrainait la division et les blocages dans les rapports villageois. De la division et des rancunes naissaient alors les dénonciations.
Lorsque Ahmed Daddah a compris qu’il n’était pas l’interlocuteur unique du CMJD, que celui-ci jouait son propre jeu, il fît machine arrière à travers les dénonciations que l’on sait sur la « dérive » du CMJD notamment après que Sidioca fut pressenti au mois de juillet 2006 comme candidat « favori » du CMJD. Mais déjà en décembre 2006 le vent avait tourné et la stratégie du CMJD était à son apogée.
La dissidence de Messaoud Ould Boulkheir qui permit à Sidioca de remporter la victoire, tient de cette stratégie car on se rappelle très bien que pour justifier son ralliement à Sidioca, le dirigeant de l’APP avait reproché à Ahmed Daddah d’avoir eu un plan secret avec le CMJD de constitution d’un gouvernement. La stratégie de déstabilisation avait joué.
Concertation et dialogue furent les deux armes absolues de la stratégie des autorités de transition pour « endormir » l’opposition et gagner du temps pour échafauder ses plans et les mettre à exécution. Ce qui rappelle étrangement l’objectif du pseudo « pacte républicain » d’aujourd’hui à la veille d’élections présidentielles. Le pacte stérilisant, un ersatz d’un dialogue anesthésiant
Cette stratégie de « la concertation anesthésiante » est encore aujourd’hui mise en œuvre par l’actuel régime politique car, par certains de ses aspects, il est une continuité de la transition.
Une opposition à palabre.
Mieux encore, la transition avait pensé à un mécanisme pour pérenniser cette « concertation » et neutraliser l’opposition : : le statut de leader de l’opposition. Un leader de l’opposition qui s’est trouvé enfermé dans une fonction aux devoirs et aux rôles législativement bien définis, le transformant en une institution statique qui se meut avec le pouvoir, qui l’accompagne, qui se concerte mais… ne s’oppose pas.
Une forme de « ministère de l’opposition » qui a institutionnalisé une neutralité de fait basé sur une gestion « concertée » de l’opposition. On ne s’oppose plus : on discute. Une opposition à palabre.
Le piège institutionnel se referma alors et l’opposition fut toute réduite à cette fonction de « concertation » qui lui enlève tout rôle et toute volonté sinon ceux d’entériner ce que le « leader » glane comme assurances et expressions de bonnes intentions sur tout et sur rien. la bonne foi du leader fut mise à contribution à travers une concertation dont on sait ce qu’elle a donné par le passé…et qui se continue aujourd’hui.
Une stratégie militaire érigée en politique : la terre brulée
Elle fut appliquée par tous les régimes militaires depuis 1978 mais Ould Abdelaziz y excelle. Elle consiste à saper, devant tout mouvement qui se crée, la possibilité de progresser et de se développer. Et cela en lui enlevant ses moyens, en les corrompant ou en les attirant à lui.
« La politique de la terre brûlée est une tactique consistant à pratiquer les destructions les plus importantes possibles, impliquant, en cas de conflit militaire, de détruire ou d’endommager gravement ressources, moyens de production, infrastructures, bâtiments ou nature environnante, de manière à les rendre inutilisables par l’adversaire.
Cela peut concerner une tactique offensive, consistant à ravager les territoires de l’adversaire afin de l’empêcher de reconstituer ses forces ou de trouver un refuge, ou bien une tactique défensive consistant, face à une armée d’invasion, à se déplacer ou à se retirer (retraite) en détruisant ou en brulant tout derrière soi (habitations, récoltes, bétail, routes, ponts, moyens de communications et de production), afin d’ôter à l’ennemi toute possibilité de ravitaillement.
Au sens figuré, cette expression désigne aussi l’attitude d’une personne qui, risquant de perdre face à un adversaire, saccage la place que celui-ci s’apprête à prendre afin de minimiser ses gains et de gêner toute progression ultérieure. » L’histoire récente, Et toujours une même et unique stratégie.
L’assagissement des intégristes : La raison sans raison
L’on se rappelle la volonté du pouvoir de ramener à la « raison » les intégristes emprisonnés en leur envoyant les oulémas en prison et en leur dispensant des montants financiers en contrepartie de leur renoncement à leurs activités. Aziz pensant ainsi récupérer le mouvement intégriste en amadouant certains de ses membres virulents. Sur ce plan, l’échec a été cuisant. Refusant sa « raison » ils ont été expédiés dans un coin du désert au mépris de tous les principes des droits de l’homme. N’ayant pu les « phagocyter », il s’en est débarrassé.
Le mouvement du 25 février : manipuler pour diviser
Lorsque les jeunes mauritaniens, à l’instar de ceux de la sous-région se révoltèrent, Aziz trouva le moyen de les diviser à travers des jeunes recrutés à cet effet et qui se constituèrent en « partis » soutenant Aziz et dénigrant le mouvement, allant même jusqu’à s’identifier faussement à d’anciens membres de ce mouvement pour entrainer son éclatement.
La politique de la terre brûlée, a consisté à mobiliser une partie de la jeunesse désœuvrée et intéressée pour contrer une autre qui menace son régime. La première a été présentée comme le véritable moteur du mouvement du 25 février entrainant ainsi des difficultés de déploiement pour ce dernier.
Le mouvement estudiantin : nommer pour neutraliser
Lorsque le mouvement revendicatif s’est amplifié à l’université, Aziz s’est aussitôt entouré d’un recteur et d’un étudiant dirigeant d’un des mouvements. Le premier fut nommé chef de cabinet, le second conseiller au cabinet. Ces deux “nommés” firent un travail de fond pour assagir le mouvement dont on n’entend plus guère parler aujourd’hui. Aziz a pris les devants en intéressant des acteurs du mouvement.
L’opposition : diviser pour régner.
Lorsque l’opposition face à l’Accord de Dakar se rendant compte, a postériori de sa duplicité avait crié au « scandale et à la trahison », Aziz a su phagocyter certains partis pour assoir ses desseins de pouvoir.
L’accord signé, avec Boidiel et autres compères (dont Ould Boulkheir) n’avait d’autres objectifs que de mettre en quarantaine le reste de l’opposition et fortifier le pouvoir du général.
C’est un accord qui n’est que l’expression de la politique de la terre brûlée : diviser l’opposition et la priver de ses moyens dont le premier est son unité face au pouvoir. Sans unité et divisée à propos d’un accord, l’opposition a sombré dans les chamailleries et les coups bas. Et cela arrangea le pouvoir. Il en profita à travers le temps qu’il gagna (continuant ainsi à « gérer » le pays) et à jouant « l’arbitre » d’un match qu’il a gagné d’avance.
Quel est l’instrument de cette stratégie de la « terre brûlée » ? Simplement la « phagocytose ». Connue dans le monde cellulaire, la « phagocytose » est une forme de capture d’éléments à détruire se trouvant dans le milieu ambiant. Soit que ces éléments menacent l’organisme soit qu’il s’en nourrit.
Aziz l’avait compris son régime ne fit que « phagocyter » les mouvements, les biens et les personnes. Il happa tout mouvement partisan ou populaire qui le menaçait, et produisit immédiatement son contraire (partis et jeunesse manipulés) pour le neutraliser, il s’appropria les biens de l’Etat (à travers les privilèges qu’il octroie à ceux qu’il phagocyte) et immobilisa les personnes qui le contredisent (à travers son système judiciaire et pénitentiaire).
La « pacte républicain » n’est qu’une forme de phagocytose d’une opposition qui … est venue se ligoter elle-même.
Des conditions d’une opposition crédible
Ce n’est pas de cette opposition dont le pays a besoin, mais d’une qui n’est liée que par des principes qu’elle défend. Elle doit être présente dans le peuple et avec lui. Défendant pied-à-pied et au jour le jour ses intérêts. Haranguant les foules quand il le faut, appelant à la résistance quand c’est nécessaire. Bref une opposition qui s’oppose.
Or déjà en entrant dans le jeu de l’institutionnalisation et de la « fonctionnarisation du leadership » et de la « pactisation » de son action l’opposition a été prise au piège. Elle est devenue une partie du système auquel elle est sensée s’opposer. L’ultime phase serait de la stériliser dans un gouvernement d’union nationale, comme y avait durant des années appelé l’UFP.
Le pays a besoin d’une opposition qui se démarque de tout gouvernement et qui joue son rôle politique de régulation et de proposition sans lesquels le gouvernement peut aller à la dérive. En tout état de cause, la perception d’un parti d’opposition qui a milité en tant que tel et qui se met à défendre les programmes d’une majorité, quelle que soit la bonne foi de ses dirigeants, ne peut entrainer dans le public que suspicion.
Toute opposition qui voudrait trop se rapprocher du pouvoir finira, comme un papillon prenant une lampe incandescente pour la lumière du jour, par se brûler les ailes.
Et pactiser avec le pouvoir c’est déjà corrompre ses propres convictions pour un compromis imposé. Souvenons-nous : « Si le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument» (Lord Byron). Ceci n’est pas seulement valable pour ceux qui exercent le pouvoir mais aussi pour tous ceux qui le courtisent.
Que le Président préside
Que le gouvernement gouverne.
Que l’opposition s’oppose.
Que chacun remplisse son devoir.
Ainsi va la démocratie. Et va l’alternance.
Et, face à l’injustice, à la dérive des gouvernants, à la misère du peuple, une Opposition, digne de ce nom, ne se compromet pas …Elle se bat !
Pr ELY Mustapha
cridem
DÉCLARATION DE PRESSE DES FPC
Les militants et sympathisants de l’IRA ont organisé un sit-in pacifique, le 27 septembre 2023 devant le ministère de la justice, pour protester contre l’arrestation arbitraire du militant abolitionniste Youba Siby et, aussi pour exprimer leur soutien au député Mohamed Bouya. Ils ont été réprimés dans le sang par le pouvoir militariste et policier de Nouakchott.
Notre parti, les Forces Progressistes du Changement ( FPC), trouve cette répression sauvage inacceptable et inadmissible dans un État qui se veut” démocratique “,
– Les FPC condamnent avec la plus grande fermeté la violence injustifiée exercée contre les manifestants, comme à son habitude, par les forces répressives du système;
– S´insurgent contre cette violation manifeste des libertés d’expression;
– Dénoncent l’attitude provocatrice et irresponsable des autorités mauritaniennes dans la gestion des manifestations pacifiques.
– Réaffirment leur soutien militant et fraternel à l’IRA et ses militants;
Enfin, les FPC appellent les forces patriotiques et démocratiques du pays à plus
d´unité et de mobilisation pour résister à la tyrannie rampante.
Nouakchott le 3 octobre 2023.
Le département de la communication des FPC
La lutte continue!
Conférence de Presse conjointe
Cette conférence de presse s’inscrit dans le sillage de la précédente et s’articule autour de deux points :
_ L’exigence de la reconnaissance légale des FPC et du RAG, victimes d’injustice,
_les difficultés des populations à s’enrôler avec les nouvelles Commissions techniques .
Nous avons choisi de mettre l’accent sur ces deux points , sans toutefois méconnaître tous ces autres problèmes , non moins importants, qui existent .
Il s’agit
– de cette pauvreté qui frappe les populations et qui évolue vers la misère ,
– du désespoir de cette jeunesse , sans perspectives , qui se jette dans l’aventure , jusqu’aux nouvelles recrues et fonctionnaires de l’Etat, sans plus d’illusions sur l’avenir du pays .
-de la destruction de la cohésion nationale au travers du racisme d’Etat érigé en mode de gouvernance et de l’esclavage qui perdure,
-du sabotage de l’Enseignement , par chauvinisme et imposition du monolinguisme ,qui traduit un déni de la diversité du pays,
– du recul démocratique et de l’impunité qui s’installent,
– de tous ces déportés de retour, laissés en rade,
-de cette Administration complètement par terre , gangrenée par la corruption ,l’ethnicisme et le népotisme , dans l’improvisation et l’anarchie à tous les niveaux .
– de Nouakchott, -cette capitale sale et nauséabonde par endroits- où règne une insécurité permanente ,etc,etc,etc .
Les FPC et le RAG, tout en reconnaissant ces problèmes , ont choisi cependant de se focaliser et sur la nécéssité de leur reconnaissance légale qui participe du renforcement du jeu démocratique, et sur les difficultés actuelles à s’enrôler que rencontrent les populations des villages, des adwaba et des periphéries des villes .
Selon nos informations , dans certaines localités du Brakna ,du Gorgol ,du Guidimakha, du Trarza et à l’Est du pays, l’enrôlement se fait au rythme de trois personnes par jour, alors que les centres ne désemplissent pas . Partout des blocages , de l’obstruction, comme pour décourager et amener les populations à baisser les bras .
Le Président Ghazouani avait , lors de son discours d’investiture , promis de ‘’résoudre les déséquilbres et toutes les manifestations d’injustice, de consolider l’unité nationale, d’œuvrer au respect des droits de l’homme, de mettre fin au calvaire des populations dans leur enrôlement ’’ .
A propos de l’injustice, le cas des FPC et du RAG, victimes de l’arbitraire, en constitue l’illustration, concernant l’unité nationale, elle a été mise à mal pour ne pas dire démolie , quant au respect des droits de l’homme, il a dérapé en intimidation et menaces, en assassinats dans les commissariats de police ; enfin, pour l’enrôlement , les populations continuent de pâtir de blocages en tous genres . Pour la seconde fois , des commissions techniques ont été diligentées à cet effet par le Président, mais sans résultats , les blocages persistent. Dysfonctionnement manifeste dans l’application . Soit ces consignes avaient été données du bout des lèvres , sans volonté politique réelle, soit les agents de l’Etat civil ,à la base, se moquent des instructions du Président de la république .
En ce qui concerne la reconnaissance des partis politiques ,le RAG et les FPC souhaitent, afin d’éliminer des choix arbitraires et partisans , d’adopter le régime déclaratif qui permet ,le mieux, d’ouvrir le jeu démocratique, et partant l’expression de tous les projets . La démocratie véritable constitue une soupape de sécurité , un gage de l’apaisement social .
Il demeure, en conclusion, trop de problèmes irrésolus , trop de défis non relevés .
Tous ces défis , aggravés , tous ces nombreux échecs posent, naturellement, la question légitime de l’alternative pour 2024 .
Appel ,
LES FPC et le RAG
_Appellent à leur reconnaissance légale et à plus de compassion et de solidarité nationale ,
_ Souhaitent la simplification de l’enrôlement des populations et des sanctions pour les obstructions constatées ,
_ Estiment , nécéssaire et impérieuse au vu de la situation préocupante du moment , la mise en place d’une vaste Mouvance pour le changement (MPC) , en vue bâtir une Mauritanie reconciliée et refondée sur des bases justes , égalitaires et démocratiques . La ‘’nation’’ mauritanienne , le vivre-ensemble harmonieux ne saurait s’édifier sur l’hégémonie suprématiste des uns . Cette situation conduit à l’impasse et reste porteuse de danger .
Il nous faut nous ressaisir …
FPC –RAG
Nouakchott Août -20 -2023
https://www.facebook.com/federationnouakchott/videos/1532208597523363/?mibextid=JgRRn7n7jRVACbyL
Politique : Tous les partis ne se reconnaissent pas dans le pacte signé
La Dépêche – Est-ce à cause du déficit de représentativité de certains de ces signataires ? Est-ce du fait de l’exclusion d’une majorité de partis politiques de l’Opposition et de la Majorité ? Est-ce par contre le désaveu du contenu concocté par les « gauchisants » à l’accord ? Une seule chose est sûre, le Pacte n’apporte pas l’adhésion de toute la classe politique.
Va-t-on assister à une simple alliance politique avant l’élection présidentielle de 2024 entre le parti au pouvoir et deux partis de l’Opposition qui n’ont aucun élu à l’Assemblée nationale ? Ce n’est pas sans doute pas la première fois qu’un document de conciliation politique est signé dans le pays.
L’actuel régime est d’ailleurs à l’origine de la dernière tentative de recherche d’un consensus qui avait inauguré la veille des dernières élections de mai 2023. Cependant, l’événement, s’il faut ainsi le qualifier, ne manque pas de relents d’apaisement du champ politique national.
Le président Ghazouani s’y était engagé et continue, malgré les couacs de parcours, à le privilégier à une confrontation stérile. Un quatuor a signé ce document. Il s’agit des présidents des partis, Insaf, Mohamed Malainine Ould Eyih, du RFD, Ahmed Ould Dadah, de l’UFP, Mohamed Ould Maouloud, et du ministre de l’intérieur, Mohamed Ahmed ould Mohamed Lemine, représentant le Gouvernement.
Mais il faut bien se rendre à l’évidence que le véritable « cadeau » est donné aux partis politiques de l’Opposition présents à la signature du Pacte qui malgré leur déconfiture se voit «attribuer » la largeur de représenter une classe politique institutionnellement mieux assise.
Le président Ghazouani contribue ainsi à la mise en selle de partis politiques en déphasage avec l’électorat. Ils ne risquent pas demain de galvaniser et rassembler autour du président, probablement candidat à sa propre succession, les masses qu’ils prétendent représenter.
A voir les réactions des partis de l’Opposition et de la Majorité l’on comprend aisément que ces acteurs crient à l’usurpation de la représentativité réelle pour espérer que les réformes promises se fassent jour. En effet, il est difficile de croire à l’aboutissement d’un Pacte Républicain qui laisse en rade la majorité des acteurs politiques (majorité et opposition).
Les mêmes acteurs refusent –c’est bien plus adressé à l’UFP et au RFD qui s’octroient le bon sens par rapport aux autres- le rôle de locomotive des deux formations dans la matérialisation de la feuille de route annoncée par les signataires. Ils mettent en avant les écarts de réflexion en mettant « en garde contre le manque de lucidité et de clairvoyance des protagonistes politiques ». Comme si la clairvoyance avait un seul camp. Sans appel.
Selon nos amis de l’AMI, « une feuille de route constituée de huit points a été établie pour venir à bout, de nombreux maux qui touchent la société. Les parties prenantes notent que les réformes viseront à renforcer la cohésion sociale, la préservation de l’unité nationale, à travers le règlement de tous les dossiers liés aux droits de l’homme. Par la même occasion, ils entendent matérialiser leur volonté de consolider les valeurs et pratiques de la démocratie, en mettant en exergue la nécessité de réformer les institutions de l’État.
Feuille de route :
Déterminées à faire face à ces multiples défis et périls, nous, parties signataires :
1. Réitérons notre indéfectible attachement à la préservation de la stabilité et de la sécurité du pays par l’instauration d’un système fondé sur la justice sociale, l’État de droit et les valeurs démocratiques ;
2. Considérons que la Majorité et l’Opposition constituent les acteurs principaux dans toute démocratie et portent, chacun en ce qui le concerne, la responsabilité politique et morale de tout ce qui pourrait advenir au pays, en raison du manque de lucidité et de clairvoyance des protagonistes politiques ;
3. Décidons, dans ce contexte sensible, de surmonter nos divergences, en vue de servir les intérêts supérieurs du pays et lui éviter les périls auxquels peuvent le soumettre les divisions stériles et destructrices au sein de la classe politique ;
4. Comptons conduire, en urgence, une profonde réflexion sur notre système électoral et, le cas échéant, engager les réformes pertinentes visant à renforcer notre démocratie, afin de dépasser le contexte issu des dernières élections et prévenir tout désaccord électoral à l’avenir ;
5. Exprimons notre commune volonté de procéder aux réformes fondamentales indispensables à la préservation et au renforcement de l’unité nationale, et à l’ancrage des valeurs et pratiques de la démocratie et de l’État de droit. Ces réformes porteront, également, sur la concrétisation de la justice sociale et de la bonne gouvernance ainsi que sur l’amélioration des conditions de vie de nos populations, éprouvées par la crise et les répercussions des conditions résultant de la décennie du pouvoir précédent. Ces réformes seront menées dans un cadre national inclusif et participatif, sous forme d’ateliers, sur la base de la liste des thématiques en annexe au présent Accord, dont elle constitue une partie intégrante ;
6. Annonçons la conclusion du présent Accord pour la création d’une Entente politique, nationale, républicaine et démocratique, dénommée Pacte Républicain, ouverte à tous les partis politiques désireux de s’y joindre pour la réalisation des réformes énumérées ci-haut ;
7. Œuvrerons dans le cadre du Pacte Républicain, à tous les niveaux et par tous les moyens, en vue de conduire notre pays vers davantage d’unité, d’harmonie, de cohésion sociale et, partant, de démocratie, de développement et de prospérité ;
8. Convenons de la mise en place, à compter de la signature du présent Accord, d’un Comité d’Orientation et de Suivi où seront représentées les parties signataires, pour la mise en œuvre de l’Accord, dans un délai n’excédant pas deux mois à compter de sa date de signature.
Annexe au « Pacte Républicain »
Les réformes évoquées dans le Pacte Républicain s’articulent, notamment, autour des mesures suivantes :
1. Conduire, en urgence, une profonde réflexion sur notre système électoral et, le cas échéant, engager les réformes pertinentes, afin de dépasser le contexte issu des dernières élections, activer les dispositions légales en matière électorale et prévenir tout désaccord électoral à l’avenir ;
2. Mettre en place un mécanisme crédible pour le règlement définitif des dossiers des droits de l’homme et des injustices en suspens, en tenant compte des efforts déployés et des actions entreprises par le passé afin de résoudre ces questions ;
3. Adopter des mesures concrètes visant à traduire, dans les faits, la diversité culturelle du pays dans l’espace public, notamment au niveau des médias, des programmes éducatifs et des événements officiels, en activant le statut constitutionnel de la langue arabe et en reconnaissant la vocation des langues pulaar, soninke et wolof à accéder au statut de langues officielles ;
4. Appliquer de manière stricte le dispositif juridique pénalisant les pratiques esclavagistes et racistes, et les injustices à l’égard des couches marginalisées, ainsi que les discours incitant à la violence, au fanatisme, à l’extrémisme, au racisme et à la haine, et mettre en place un mécanisme national pour la prise en charge des victimes des pratiques sus-évoquées, y compris par l’adoption et la mise en œuvre de politiques nationales efficientes à même de réduire les inégalités sociales, conduisant ainsi à une discrimination positive en faveur de ces groupes ;
5. Appliquer de manière effective le principe de l’égalité des chances entre tous les citoyens du pays, dans tous les domaines et à tous les niveaux, et instaurer l’égalité entre les acteurs économiques devant les services administratifs ;
6. Combattre la hausse des prix par des mesures appropriées de nature à protéger, durablement, le pouvoir d’achat des populations ;
7. Mettre en place un mécanisme efficace de mobilisation nationale pour une réforme foncière visant à soutenir et promouvoir l’agriculture et à renforcer les politiques visant l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire qui constitue un des piliers de la souveraineté et de la sécurité nationales ;
8. Promouvoir la décentralisation et la bonne gouvernance dans les domaines de la gestion des affaires publiques, de l’administration et des finances de l’Etat, en renforçant et en mettant en œuvre, de manière effective, les dispositifs nationaux de lutte contre la corruption ;
9. Appliquer les conclusions des concertations nationales sur la réforme de l’éducation et promouvoir la contribution substantielle de toutes les forces vives de la nation pour assurer le succès de l’école républicaine ;
10. Appliquer les conclusions des concertations nationales sur la réforme de la justice ;
11. Appliquer la stricte séparation entre les emplois politiques et postes techniques et procéder à l’éloignement de l’administration publique du champ politique et des compétitions électorales ;
12. Assurer la promotion des partis politiques afin de leur permettre de s’acquitter de leurs missions constitutionnelles ; réviser et appliquer les textes juridiques et réglementaires qui les régissent ;
13. Assurer la promotion du secteur privé, des collectivités locales, de la société civile, de la presse, des syndicats et pour leur permettre de jouer leur rôle d’acteurs majeurs dans le développement du pays ;
14. Promouvoir l’instauration d’un dialogue durable entre les partenaires sociaux et assurer la protection des droits des travailleurs ;
15. Mettre en place une stratégie nationale intégrée visant à protéger les enfants et les jeunes contre la drogue, la délinquance et la violence, et assurer un traitement adéquat du chômage et du phénomène de la migration des jeunes ;
16. Promouvoir une autonomisation plus accrue des femmes, des jeunes et des personnes aux besoins spécifiques, et veiller à leur insertion dans la vie politique, économique, culturelle et sociale du pays à travers notamment l’adoption et la mise en œuvre de politiques efficientes en matière d’emplois professionnels qualifiants ;
17. Mettre en place un fonds souverain alimenté par les revenus des hydrocarbures pour la promotion du développement économique durable et équilibré du pays et qui préserve les intérêts des générations futures ;
18. Identifier et mobiliser les compétences, expertises et investissements de nos communautés à l’étranger au profit du pays ».
Fin de citation.
cridem